Etablissement sportif/ Fermeture administrative/ Entraîneurs étrangers/ Contrôle des qualifications

CAA de LYON

N° 16LY04458
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. POMMIER, président
Mme Rozenn CARAËS, rapporteur
Mme VIGIER-CARRIERE, rapporteur public
PLANES, avocat

 

lecture du jeudi 18 octobre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’entreprise à but non lucratif de droit britannique British ski academy (BSA) a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la décision du 2 mars 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a suspendu ses activités d’encadrement, d’animation, d’enseignement et d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin.

Par un jugement n° 1601503 du 27 octobre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2016, l’entreprise à but non lucratif de droit britannique British ski academy, représentée par MeC…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du 27 octobre 2016 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d’annuler la décision du 2 mars 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie l’a suspendue de ses activités d’encadrement, d’animation, d’enseignement et d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin et de l’entraînement de ses pratiquants ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la décision du 2 mars 2016 méconnaît l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 dès lors que la mise en demeure n’avait pas pour objet d’engager une procédure contradictoire et qu’il n’est pas fait état de sa réponse dans l’arrêté critiqué ni d’une vérification auprès de la préfecture de l’Isère ;
– l’arrêté est entaché d’une erreur de droit dès lors qu’il est fondé sur l’article R. 212-88 du code du sport, issu de la transposition de la directive 2005/36/CE sur la reconnaissance des qualifications professionnelles au sein de l’Union européenne, mais ne prend pas en compte les modifications substantielles apportées par la directive 2013/55/UE ; depuis le 18 janvier 2016, date limite de transposition dans la législation des Etats membres, cette directive 2013/55/UE s’applique de plein droit dans la législation française et se substitue directement aux textes en vigueur dans le code du sport en l’absence de transposition dans les délais ; les articles R. 212-92 et suivants du code du sport n’étaient plus applicables à la date où l’arrêté a été pris ;
– l’article 5 de la directive interdit la restriction au niveau national et l’expérience professionnelle est reconnue comme une qualification ; si la formation est réglementée, il suffit de démontrer que l’entraîneur est légalement établi dans son pays ; la notion de sécurité ne peut plus être opposée ; Mme D…a produit à l’appui de sa déclaration les pièces visées dans la directive et notamment son immatriculation d’activité en Pologne, la copie de son diplôme de formation et la copie de son casier judiciaire et, par suite, il devait être fait application de l’article 5 de la directive et non des articles du code du sport devenus inapplicables depuis le 18 janvier 2016 ;
– en application de l’article 7 de la directive, l’exigence d’une déclaration par un Etat membre est possible lors de la première prestation et sans formalisme particulier et la déclaration autorise le prestataire à exercer son activité ; Mme D…et Mme E…étaient déclarées ; Mme D…bénéficiait d’une présomption de qualification qui l’autorisait à travailler en France, la demande de pièces complémentaires est irrégulière dès lors qu’elle ne respecte pas les dispositions de la directive 2013/55/UE ; la combinaison des articles 5 et 7 de la directive la dispense de produire tout justificatif personnel supplémentaire pour pouvoir exercer en France son activité professionnelle ;
– à titre subsidiaire, l’établissement était parfaitement en règle au regard des dispositions applicables antérieurement au 18 janvier 2016 dès lors qu’une réponse motivée a été adressée à la préfecture de l’Isère le 22 février et que l’arrêté critiqué ne fait pas état de cette réponse et est, par suite, entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ; l’arrêté ne fait pas état des deux déclarations de Mme E…et MmeD… ; la détention d’un récépissé, dont la preuve de l’absence d’une telle détention appartient au préfet, n’est qu’une formalité non substantielle dès lors que l’article R. 212-93 prévoit que l’absence de réponse de la préfecture vaut autorisation ; la motivation de l’arrêté ne constate pas un exercice irrégulier en France ; l’arrêté a été pris sur la base d’informations partielles, juridiquement et factuellement incomplètes ; les prétendues lettres du 22 décembre 2015 à l’appui desquelles il n’est produit qu’un accusé de réception postal unique ne peuvent produire aucun effet et ne sont pas opposables aux tiers et ne constituent pas une réponse régulière à la déclaration de libre prestation de services des personnes ; les entraîneurs de la BSA ayant régulièrement déclaré une activité de libre prestation de services en 2015 et aucune réponse ne leur étant parvenue dans le délai d’un mois, ils sont réputés exercer légalement leur activité en France, les services de l’Etat ne peuvent plus leur demander d’informations complémentaires et doivent leur délivrer un récépissé ;

Par un mémoire enregistré le 28 juillet 2017, le ministre des sports conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
– en prononçant la fermeture de l’établissement en application de l’article L. 322-5 du code du sport, le préfet de la Haute-Savoie a pris une mesure de police qui a été motivée en application de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; la procédure contradictoire prévue par l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 a été respectée dès lors que par lettre du 27 janvier 2016 le préfet de la Haute-Savoie a mis en demeure BSA de fournir la liste des entraîneurs intervenant pour son compte, de régulariser dans un délai de 15 jours leur situation et de cesser immédiatement l’emploi des éducateurs non déclarés et qu’à défaut de respect de ces obligations, il envisageait de proposer la fermeture administrative de l’établissement ;
– Mme E…etD…, de nationalité polonaise, exerçaient les fonctions d’entraîneurs pour le compte de BSA sans posséder les qualifications requises ; BSA employait d’autres entraîneurs non titulaires d’un récépissé de déclaration de prestations de services ou d’une carte professionnelle d’éducateur sportif en violation des articles L. 212-1 et suivants du code du sport ;
– en ce qui concerne MmeD…, celle-ci n’a pas fourni au pôle national les justificatifs exigés par l’article A. 212-182-2 du code du sport ; les courriers adressés à Mme D… sont précis et personnalisés ; les circonstances que ces courriers ne mentionnent ni leur envoi sous forme de lettre recommandée avec avis de réception ni la date de réception des dossiers de déclaration sont sans incidence sur leur régularité dès lors que les pièces du dossier prouvent la date de réception par Mme D…et l’administration n’a pas opposé à l’intéressée un délai mais le caractère incomplet des dossiers de demande de déclaration ;
– le préfet n’avait pas l’obligation de mentionner dans son arrêté les demandes de déclaration préalable d’activités et il n’a commis aucune erreur fait ou d’appréciation en estimant que Mme D…exerçait son activité en France illégalement ;
– les modifications apportées par la directive 2013/55/UE ne permettent pas d’écarter l’obligation faite à BSA de régulariser la situation des entraîneurs ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 ;
– le code du sport ;
– le code des relations entre le public et l’administration ;
– le code de justice administrative.

 

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Caraës,
– et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,

 

1. Considérant que l’entreprise à but non lucratif de droit britannique, British ski academy (BSA), a pour objet d’entraîner et d’encadrer les jeunes skieurs anglais afin de les préparer à participer aux compétitions internationales de ski et de snowboard organisées par la fédération internationale de ski (FIS) ; qu’elle dispose depuis 1996 d’un établissement dans la commune des Houches qui dispense des entraînements pour les courses ; qu’après une mise en demeure, le préfet de la Haute-Savoie a, par arrêté du 2 mars 2016, décidé, sur le fondement du 2ème alinéa de l’article L. 322-5 du code du sport, de suspendre l’exercice par cet établissement des activités d’encadrement, d’animation, d’enseignement, d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin et de l’entrainement de ses pratiquants, au motif que la BSA a employé plusieurs entraineurs non titulaires d’un récépissé de déclaration de prestation de services ou d’une carte professionnelle d’éducateur sportif ; que la BSA relève appel du jugement du 27 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 2 mars 2016 ;

Sur la légalité de l’arrêté du préfet de la Haute-Savoie :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2016,  » Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d’une procédure contradictoire préalable.  » ; qu’aux termes de l’article L. 121-2 de ce code,  » Les dispositions de l’article L. 121-1 ne sont pas applicables : (…)3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (…)  » ; qu’aux termes de l’article L. 122-1 du même code,  » Les décisions mentionnées à l’article L. 211-2 n’interviennent qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. / L’administration n’est pas tenue de satisfaire les demandes d’audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique.  » ;

3. Considérant, ainsi que l’ont retenu à bon droit les premiers juges, que la suspension des activités, exercées par la BSA dans son établissement des Houches, d’encadrement, d’animation, d’enseignement, d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin et de l’entraînement de ses pratiquants, qui est fondée sur  » des éléments de constatations, d’audition et de vérification administrative « , constitue une mesure de police devant être motivée ; que, par suite, les dispositions du code du sport n’ayant pas organisé de procédure contradictoire particulière, le préfet de la Haute-Savoie était tenu, avant de prendre la décision critiquée, de permettre à l’établissement BSA de présenter ses observations ; qu’il ressort des pièces du dossier que, par lettre du 27 janvier 2016, le préfet de la Haute-Savoie a mis en demeure la BSA de se mettre en conformité avec la réglementation et lui a précisé qu’à défaut de cette mise en conformité, l’établissement pourrait faire l’objet d’une fermeture administrative ; que, par courrier du 22 février 2016, l’établissement a accusé réception de la mise en demeure du préfet de la Haute-Savoie et a fait part de ses observations quant à la régularité de la situation des entraîneurs ; que la circonstance que l’arrêté ne fait pas état précisément de sa réponse est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie alors, au surplus, que l’arrêté critiqué précise  » qu’il y a eu divers échanges de courriers depuis 2014  » ; que, par suite, l’arrêté du 2 mars 2016 ne méconnaît pas les dispositions précitées du code des relations entre le public et l’administration ;

4. Considérant que si l’arrêté attaqué ne fait pas état des deux déclarations de Mme E… et MmeD…, il indique qu’à la suite du contrôle exercé le 1er mars 2016 et ayant donné lieu à un procès-verbal de constatation, ces deux personnes n’ont pas été en mesure de présenter un récépissé de prestation de services ou une carte professionnelle d’éducateur sportif en méconnaissance des articles L. 212-1 et L. 212-11 du code du sport ; que l’arrêté précise encore, en se fondant sur les dispositions de l’article L. 322-5 du même code, que  » les prestations ainsi rendues ne garantissent pas, dans l’environnement spécifique enneigé où elles se déroulent la sécurité des usagers notamment en raison, d’une part, de qualification professionnelle reconnue et, d’autre part, de déclarations conformes aux règlements et procédures en vigueur à l’autorité administrative  » ; que, par suite, la décision du 2 mars 2016 satisfait aux exigences de motivation en fait et en droit ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 322-5 du code du sport,  » L’autorité administrative peut s’opposer à l’ouverture ou prononcer la fermeture temporaire ou définitive d’un établissement qui ne présenterait pas les garanties prévues aux articles L. 322-1 et L. 322-2 et ne remplirait pas les obligations d’assurance mentionnées à l’article L. 321-7./ L’autorité administrative peut également prononcer la fermeture temporaire ou définitive d’un établissement employant une personne qui enseigne, anime ou encadre une ou plusieurs activités physiques ou sportives mentionnées à l’article L. 212-1 sans posséder les qualifications requises.  » ;

6. Considérant que si la BSA soutient, en s’appuyant sur les courriers adressés à l’administration par MmeE…, M.B…, Mme D…et M.F…, directeur sportif, que les entraîneurs ont effectué des déclarations de libre prestation de services dans les conditions prévues par le code du sport, il ressort des mentions de l’arrêté litigieux que « d’autres entraîneurs exercent au cours de l’année 2016 pour le compte de British ski academy sans y être autorisées, à savoir Kip Carrington, RoryG…, Conrad Pridy , Jenny Stielow, Lynn Mill, Duane Baird » ; que si, dans son mémoire de première instance, le préfet indique que Mme E…était en situation régulière, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres entraîneurs mentionnés dans l’arrêté ont été régulièrement déclarés ; qu’à ce titre, le pôle national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme a informé Mme A…G…que sa déclaration du 2 mars 2016 était irrecevable dès lors que la procédure de libre établissement était réservée aux ressortissants des Etats membres de la communauté européenne ou des Etats partie à l’accord sur l’espace économique européen; que, par ailleurs, Mme D…a procédé à sa déclaration par courrier du 7 décembre 2015, réceptionné le 9 décembre 2015, sans répondre au courrier du pôle du 22 décembre 2015, reçu à l’adresse communiquée par le conseil des requérants le 24 décembre, demandant des pièces complémentaires ; qu’ainsi, si l’arrêté critiqué est entaché d’une erreur d’appréciation quant à la situation de MmeE…, la BSA n’établit pas que les autres entraîneurs cités dans l’arrêté litigieux étaient en situation régulière ; que, par suite, le préfet aurait pris en l’espèce la même décision s’il s’était uniquement fondé sur l’exercice irrégulier de l’activité d’entraîneur de Mme D…et M. G…ainsi que sur la situation des autres entraîneurs dont il n’est pas établi qu’elle serait régulière ;

7. Considérant que la BSA soutient, à l’appui de sa requête, que le préfet de la Haute-Savoie aurait commis une erreur de droit en décidant la fermeture temporaire de son établissement situé aux Houches au motif qu’elle emploie plusieurs entraîneurs non titulaires d’un récépissé de déclaration de prestation de services ou d’une carte professionnelle d’éducateur sportif et ce alors que les entraîneurs qu’elle avait recrutés avaient régulièrement déclaré une activité de libre prestation de services en 2015 ; qu’elle invoque le bénéfice des articles 5 et 7 de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 dont le délai de transposition expirait le 18 janvier 2016, soit antérieurement à la date de la décision attaquée ; que ces dispositions n’ont été transposées en droit interne que par l’ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles de professions réglementées ;

8. Considérant que la transposition en droit interne des directives communautaires, qui est une obligation résultant du Traité instituant la Communauté européenne, revêt, en outre, en vertu de l’article 88-1 de la Constitution, le caractère d’une obligation constitutionnelle ; que, pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l’application du droit communautaire, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques ; que tout justiciable peut en conséquence demander l’annulation des dispositions règlementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision administrative, faire valoir, par voie d’action ou par voie d’exception, qu’après l’expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives ; qu’en outre, tout justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ;

9. Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la directive du 20 novembre 2013 :  » Sans préjudice de dispositions spécifiques du droit communautaire ni des articles 6 et 7 de la présente directive, les États membres ne peuvent restreindre, pour des raisons relatives aux qualifications professionnelles, la libre prestation de services dans un autre État membre: a) si le prestataire est légalement établi dans un État membre pour y exercer la même profession (ci-après dénommé « État membre d’établissement »), et b) en cas de déplacement du prestataire, s’il a exercé cette profession dans un ou plusieurs États membres pendant au moins une année au cours des dix années qui précèdent la prestation lorsque la profession n’est pas réglementée dans l’État membre d’établissement. La condition exigeant l’exercice de la profession pendant une année n’est pas d’application si la profession ou la formation conduisant à la profession est réglementée  » ; qu’aux termes de l’article 7 de cette même directive,  » 1. Les États membres peuvent exiger que, lorsque le prestataire se déplace d’un État membre à l’autre pour la première fois pour fournir des services, il en informe préalablement l’autorité compétente de l’État membre d’accueil par une déclaration écrite comprenant les informations relatives aux couvertures d’assurance ou autres moyens de protection personnelle ou collective concernant la responsabilité professionnelle. Une telle déclaration est renouvelée une fois par an si le prestataire compte fournir des services d’une manière temporaire ou occasionnelle dans cet État membre au cours de l’année concernée. Le prestataire peut fournir cette déclaration par tout moyen. 2. En outre, lors de la première prestation de service ou en cas de changement matériel relatif à la situation établie par les documents, les États membres peuvent exiger que la déclaration soit accompagnée des documents suivants: a) une preuve de la nationalité du prestataire; b) une attestation certifiant que le détenteur est légalement établi dans un État membre pour y exercer les activités en question, et qu’il n’encourt, lorsque l’attestation est délivrée, aucune interdiction même temporaire d’exercer; c) une preuve des qualifications professionnelles; d) pour les cas visés à l’article 5, paragraphe 1, point b), la preuve par tout moyen que le prestataire a exercé les activités en question pendant au moins une année au cours des dix années précédentes (…). / 2 bis. La présentation par le prestataire d’une déclaration requise conformément au paragraphe 1 autorise ce prestataire à accéder à l’activité de services ou à exercer cette activité sur l’ensemble du territoire de l’État membre concerné. Un État membre peut demander les informations supplémentaires énumérées au paragraphe 2, concernant les qualifications professionnelles du prestataire si: a) la profession est réglementée de manière différente sur certaines parties du territoire de cet État membre; b) une telle réglementation est également applicable à tous les ressortissants de cet État membre; c) les différences que présente cette réglementation se justifient par des raisons impérieuses d’intérêt général liées à la santé publique ou à la sécurité des bénéficiaires des services; et d) l’État membre n’a pas d’autre moyen d’obtenir ces informations. (…) / 4. Lors de la première prestation de services, dans le cas de professions réglementées qui ont des implications en matière de santé ou de sécurité publiques et qui ne bénéficient pas d’une reconnaissance automatique en vertu du titre III, chapitre II, III ou III bis, l’autorité compétente de l’État membre d’accueil peut procéder à une vérification des qualifications professionnelles du prestataire avant la première prestation de services. Une telle vérification préalable n’est possible que si son objectif est d’éviter des dommages graves pour la santé ou la sécurité du destinataire du service, du fait du manque de qualification professionnelle du prestataire, et dans la mesure où elle n’excède pas ce qui est nécessaire à cette fin. Au plus tard un mois à compter de la réception de la déclaration et des documents joints, visés aux paragraphes 1 et 2, l’autorité compétente informe le prestataire de sa décision :a) de permettre la prestation de services sans vérifier ses qualifications professionnelles ; b) ayant vérifié ses qualifications professionnelles :i) d’imposer au prestataire de services une épreuve d’aptitude; ou ii) de permettre la prestation des services.  » ;

10. Considérant qu’il résulte de ces dispositions de la directive du 20 novembre 2013 que l’autorité administrative est en droit de procéder à des investigations supplémentaires quant aux qualifications professionnelles du prestataire avant la première prestation de services en vue de s’assurer de la sécurité des clients de l’établissement ; que l’article R. 212-93 du code du sport, dans sa rédaction telle qu’issue du décret n° 2009-1116 du 15 septembre 2009 et antérieure à la transposition de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013, est conforme à cet objectif ; que, par suite, l’entreprise BSA ne peut soutenir qu’en procédant à un contrôle de la qualification professionnelle de Mme D…et en sollicitant des informations complémentaires à la suite du dépôt de sa déclaration de libre prestation de services sur le fondement des dispositions de l’article R. 212-93 du code du sport avant transposition de la directive 2013/55/UE du 20 septembre 2013, le préfet de la Haute-Savoie aurait commis une erreur de droit ;

11. Considérant que l’entreprise requérante soutient que si trois lettres datées du 22 décembre 2015 concernant M.F…, Mme E…et Mme D…auraient été adressées par l’administration, celle-ci n’a versé au débat qu’un accusé de réception postal unique, et par conséquent ces lettres et notamment celle concernant Mme D…ne peuvent produire aucun effet et ne sont pas opposables ; que, toutefois, les trois courriers datés du 22 décembre 2015 sont précis, personnalisés et font mention du nom de leur destinataire et de leur domiciliation chez leur conseil ; qu’il ressort ainsi suffisamment des pièces du dossier que ces lettres par laquelle le pôle national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme dépendant de la préfecture de l’Isère a demandé des pièces complémentaires pour instruire leur demande, notamment celle présentée par Mme D…le 7 décembre 2015, reçue le 9 décembre dans les services du pôle, ont été notifiées, de façon régulière, par lettre recommandée avec accusé de réception à l’adresse indiquée dans le courrier de demande ; que la circonstance que ce pli n’a pas été réclamé est sans incidence sur la régularité de cette notification ;

12. Considérant qu’aux termes de l’article R. 212-93 du code du sport, dont les dispositions sont compatibles avec la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013,  » Dans le mois qui suit la réception du dossier de déclaration, le préfet notifie au prestataire, selon le cas : 1° Le cas échéant, une demande motivée d’informations complémentaires ainsi que le délai supplémentaire rendu nécessaire avant l’expiration duquel il l’informera de sa décision, en tout état de cause avant la fin du deuxième mois qui suit la réception du complément d’informations ; / En l’absence de réponse dans les délais ci-dessus mentionnés, le prestataire est réputé exercer légalement son activité sur le territoire national.  » ;

13. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme D…n’a pas répondu à la demande de pièces complémentaires adressée par le pôle national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme le 22 décembre 2015 ; que si l’intéressée a déposé une nouvelle demande le 29 février 2016, cette demande ne contenait pas les pièces sollicitées par le pôle ; que, par suite, en l’absence de transmission des éléments d’information nécessaires à l’instruction de la demande, la BSA ne peut se prévaloir de ce que la préfecture aurait dû délivrer un récépissé en l’absence de respect du délai d’un mois suivant la réception du dossier de Mme D… prévu par les dispositions de l’article R. 212-93 du code du sport ;

14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’entreprise à but non lucratif BSA n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les frais liés au litige :

15. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la BSA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :

 

Article 1er : La requête de la British ski academy est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la British ski academy et au ministre des sports.

Délibéré après l’audience du 20 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller,

 

Lu en audience publique le 18 octobre 2018.