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SAE/ Accident/ Responsabilité de l’association gestionnaire

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 7 mars 2018
N° de pourvoi: 16-28310
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)

 

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Donne acte à l’association club La Cordée perrosienne (l’association) et la société Zurich Insurance Public Limited (la société Zurich) du désistement de leur pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) et contre la Mutuelle des étudiants de Bretagne Atlantique ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 6 octobre 2016), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 15 décembre 2011, pourvois n° 10-23.528, 10-24.545, Bull. 2011, I, n° 219), que M. X… est devenu paraplégique à la suite d’une chute dont il a été victime, le 15 octobre 2001, alors qu’il descendait une voie d’escalade sur un mur artificiel appartenant à l’association et qu’il était assuré au sol par M. Y… ; qu’il a assigné en réparation de son préjudice corporel l’association, la société Zurich et la société Generali assurances IARD (la société Generali), assureurs de cette dernière, ainsi que la MAIF, assureur de l’Association sportive universitaire de Lannion dont lui-même et M. Y… étaient adhérents, et la Mutuelle des étudiants de Bretagne Atlantique ; que la société Generali a assigné en garantie M. Y… et la Fédération française de sport universitaire ; que la caisse primaire d’assurance maladie des Côtes-d’Armor est intervenue volontairement à l’instance ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, pris en leurs première, deuxième, troisième et cinquième branches, rédigés en termes identiques et réunis :

Attendu que les sociétés Zurich et Generali font grief à l’arrêt de déclarer l’association entièrement responsable du dommage et, en conséquence, de condamner in solidum les deux assureurs de celle-ci à réparer l’intégralité du préjudice subi par M. X…, alors, selon le moyen :

1°/ que l’association sportive exploitante d’une salle d’escalade communale, qui met à la disposition des participants du matériel afin de leur permettre d’exercer librement cette activité en dehors de tout enseignement, n’est pas tenue de vérifier in situ leurs compétences et satisfait à son obligation de sécurité, de prudence et de diligence dès lors que les participants lui ont indiqué être compétents et qu’ils ont refusé la formation qui leur était proposée ; que, dès lors, en retenant, pour considérer que l’association avait engagé sa responsabilité à l’égard de M. X…, que ce dernier et son compagnon M. Y… avaient pu utiliser le mur d’escalade sans que leur aptitude à le faire en toute sécurité ait été vérifiée in situ par M. A…, le président du club, après avoir pourtant constaté que MM. X… et Y… s’étaient vu proposer une formation et l’avaient expressément refusée, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;

2°/ que la détermination de l’étendue de l’obligation de sécurité de moyen pesant sur l’association sportive mettant à la disposition du public des installations en libre accès doit dépendre du degré d’autonomie et de la liberté d’action laissée aux participants, de sorte que l’on ne saurait lui imposer de vérifier in situ l’aptitude de ces derniers à pratiquer l’activité lorsqu’en raison de la liberté d’action qu’ils conservent, cette mesure ne serait pas de nature à exclure une imprudence ou une négligence de leur part ; que, dès lors, en retenant, pour considérer que l’association était seule responsable de l’accident dont M. X… a été victime, que ce dernier et son camarade, M. Y…, avaient pu utiliser le mur d’escalade sans que leur aptitude à le faire en toute sécurité ait été vérifiée in situ par M. A…, le président du club, qui s’était satisfait de ce qu’ils n’avaient pas donné suite à sa proposition de formation, et qu’une telle vérification aurait permis de constater l’inexpérience de M. Y… et le défaut de coordination des deux hommes, après avoir constaté que l’accident était la conséquence de l’imprudence de M. X… et de l’inattention momentanée de M. Y…, circonstances à l’égard desquelles la vérification des compétences des deux hommes aurait été sans incidence, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;

3°/ que la pratique libre d’un sport, même surveillée, exclut tout encadrement, lequel excède la simple surveillance en ce qu’il suppose des interventions de l’encadrant afin de fournir des explications ou des conseils ; que, dès lors, en retenant, par motifs adoptés, pour considérer que l’association avait manqué à son obligation de sécurité, qu’elle aurait dû fournir un encadrement adapté puisque la convention avec l’ASUL précisait que la séance libre était surveillée, la cour d’appel, qui a imposé une obligation excédant celle contractée par l’association, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;

4°/ que la faute de la victime qui a contribué à la réalisation du dommage est de nature à exonérer le tiers dont la faute a contribué au dommage de tout ou partie de sa responsabilité ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la chute de M. X… résultait, d’une part, d’un défaut d’expérience de M. Y…, d’autre part, d’un manque total de coordination entre les deux jeunes gens et, de troisième part, de l’imprudence personnelle de M. X… ; qu’en retenant, néanmoins, pour considérer que l’association était seule responsable de l’accident dont M. X… avait été victime, qu’il était constant que le club n’avait pas vérifié l’aptitude des jeunes gens à utiliser le mur d’escalade en toute sécurité et que la chute de M. X… était imputable à ce manquement dès lors que l’examen de leurs connaissances réelles in situ aurait permis de constater l’inexpérience de M. Y… et le défaut de coordination des deux hommes, sans tenir compte du rôle causal de l’imprudence personnelle de M. X… qui était pourtant de nature à réduire la part de responsabilité de l’association, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant retenu que MM. X… et Y… avaient pu utiliser le mur d’escalade sans que leur aptitude à le faire en toute sécurité ait été vérifiée, le moniteur s’étant satisfait de ce qu’ils n’avaient pas donné suite à sa proposition de formation, et que la chute de M. X… était imputable à ce seul manquement, en ce que l’examen de leur connaissance réelle in situ par le moniteur lui aurait en effet incontestablement permis de constater l’inexpérience de M. Y… et le défaut de coordination des deux hommes, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que l’association était responsable de l’accident dont M. X… avait été victime ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait, partant, irrecevable en sa quatrième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;

Et sur la quatrième branche du moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne l’association club La Cordée perrosienne et la société Zurich Insurance Public Limited aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’association club La Cordée perrosienne et la société Zurich Insurance Public Limited à payer à M. X… la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Convention d’aménagement/ Résiliation/ Mesures d’exécution

Conseil d’État

N° 407865
ECLI:FR:CECHR:2018:407865.20180711
Publié au recueil Lebon
7ème – 2ème chambres réunies
M. François Lelièvre, rapporteur
M. Olivier Henrard, rapporteur public
SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS ; SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL, avocats

 

lecture du mercredi 11 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

La commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 ont demandé à la cour administrative d’appel de Marseille d’enjoindre à la société d’aménagement d’Isola (SAI) 2000 d’exécuter son arrêt n° 12MA01668 du 7 juillet 2014 et la décision n° 384280 du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat statuant au contentieux annulant partiellement cet arrêt, de porter le taux de l’astreinte à 10 000 euros par jour de retard et de procéder à la liquidation de l’astreinte provisoire.

Par un arrêt n° 16MA02502 du 12 décembre 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté cette requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 février, 15 mai 2017 et 25 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à leur requête ;

3°) de mettre à la charge de la SAI 2000 la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 ;
– la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la commune d’Isola et du syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de la société d’aménagement d’Isola 2000.

 

Sur le cadre juridique applicable :

1. Considérant que si, en principe, il n’appartient pas au juge administratif d’intervenir dans l’exécution d’un contrat administratif en adressant des injonctions à ceux qui ont contracté avec l’administration lorsque celle-ci dispose à l’égard de ces derniers des pouvoirs nécessaires pour assurer l’exécution du contrat, il en va autrement quand l’administration ne peut user de moyens de contrainte à l’encontre de son cocontractant qu’en vertu d’une décision juridictionnelle, notamment après l’expiration des relations contractuelles ; qu’en pareille hypothèse, le juge du contrat est en droit de prononcer, à l’encontre du cocontractant de l’administration, une condamnation, éventuellement sous astreinte à une obligation de faire ; que la demande adressée en 2007 par la commune d’Isola et par le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 au tribunal administratif de Nice tendait précisément à obtenir, à la suite de la résiliation pour un motif d’intérêt général, le 6 mars 2001, de la convention d’aménagement conclue en 1992 par le syndicat mixte avec la société d’aménagement et de promotion de la station d’Isola (SAPSI), aux droits de laquelle est venue la société d’aménagement d’Isola 2000 (SAI 2000), la restitution, en application de l’article 20 de cette convention, des parcelles qui lui avaient été cédées par la commune ;

2. Considérant que le tribunal administratif de Nice, par un jugement du 9 mars 2012, et la cour administrative d’appel de Marseille, par un arrêt du 7 juillet 2014, confirmé sur ce point par la décision du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat, statuant au contentieux, ont prononcé à l’encontre de la SAI 2000 une injonction de restituer lesdits terrains assortie d’une astreinte, en leur qualité de juge du contrat ; que la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 ont, par la suite, saisi la cour administrative d’appel de Marseille pour lui demander d’assurer l’exécution de ces décisions ; que leurs conclusions doivent être regardées comme tendant à ce que le juge de l’exécution assure l’exécution effective des obligations de faire assorties d’une astreinte que le juge du contrat avait prescrites ;

3. Considérant que les dispositions du livre IX du code de justice administrative ne s’appliquent qu’aux injonctions et astreintes que, depuis la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 et la loi n° 95-125 du 8 février 1995, les juridictions administratives peuvent prononcer à l’encontre d’une personne morale de droit public ou d’un organisme privé chargé de la gestion d’un service public ; qu’elles ne sont, en revanche, pas applicables lorsque le juge du contrat, saisi par l’administration en vue de prononcer une obligation de faire à l’encontre de l’ancien cocontractant de l’administration, fait application du principe général selon lequel les juges ont la faculté de prononcer une injonction assortie d’une astreinte en vue de l’exécution de leurs décisions ;

Sur la juridiction compétente pour prononcer des mesures d’exécution :

4. Considérant que la juridiction compétente pour connaître d’une demande d’exécution du jugement d’un tribunal administratif est le tribunal qui a rendu cette décision ou, en cas d’appel, la juridiction d’appel, alors même que cette dernière aurait rejeté l’appel formé devant elle ; que la seule circonstance qu’un jugement ou un arrêt ait fait l’objet d’un pourvoi en cassation est sans incidence sur la compétence du tribunal administratif ou de la cour administrative d’appel pour prononcer les mesures qu’implique l’exécution de ce jugement ou de cet arrêt ; que, toutefois, il en va différemment dans l’hypothèse où un jugement ou un arrêt a fait l’objet d’un pourvoi en cassation et où le Conseil d’Etat règle l’affaire au fond, y compris lorsque le jugement ou l’arrêt n’a fait l’objet que d’une annulation partielle ;

5. Considérant que l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille a été annulé partiellement par la décision du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat, statuant au contentieux ; que le Conseil d’Etat ayant, par cette même décision, réglé l’affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée, il est seul compétent pour prononcer les mesures qu’implique l’exécution de sa décision et de la partie du dispositif de l’arrêt de la cour qui est devenue définitive ; qu’il suit de là que la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 sont fondés, sans qu’il soit besoin d’examiner le moyen de leur pourvoi, à demander l’annulation de l’arrêt attaqué par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a statué sur leurs conclusions à fin d’exécution de son arrêt du 7 juillet 2014 ;

6. Considérant qu’il appartient au Conseil d’Etat de statuer, comme juge de l’exécution, sur les conclusions présentées par la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 devant la cour administrative d’appel de Marseille ;

 

 

Sur la portée de la chose jugée par le tribunal administratif de Nice, la cour administrative d’appel de Marseille et le Conseil d’Etat :

7. Considérant que la chose jugée résulte, en l’espèce, de la combinaison de l’article 1er du jugement du 9 mars 2012 du tribunal administratif de Nice, de la partie, devenue définitive, de l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille et de la décision du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat statuant au contentieux ; qu’il résulte des dispositifs de ces décisions successives, d’une part, qu’il est enjoint à la SAI 2000 de procéder à la restitution à la commune d’Isola des parcelles lui appartenant, sous réserve du paiement à cette dernière société d’une somme de 2 196 617 euros actualisée selon l’indice du coût de la construction de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) à la date du transfert de propriété ; que, d’autre part, cette injonction est assortie, à l’encontre de la SAI 2000, d’une astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter d’un délai de trois mois suivant la notification du jugement dans l’hypothèse où cette société s’opposerait à la restitution des parcelles ; que, par ailleurs, la SAI 2000 a droit, en exécution de l’arrêt de la cour, au versement de la plus-value apportée aux terrains sur lesquels un golf d’altitude de 18 trous et un circuit de glace ont été construits par l’aménageur, injonction étant faite au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 de saisir le service des Domaines pour qu’il évalue cette plus-value et, à défaut d’accord amiable sur cette base, à la partie la plus diligente de saisir le juge de l’expropriation ; qu’enfin, la SAI 2000 doit verser à la commune d’Isola et au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 la somme de 2 250 000 euros dont sera déduite une indemnité correspondant au prix de la cession de la parcelle AC n° 86 intervenue le 15 septembre 1970, augmenté pour tenir compte de l’évolution de l’indice du coût de la construction de l’INSEE entre cette date et le 28 novembre 2006 ;

8. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par la SAI 2000, la restitution à la commune des parcelles restant la propriété de l’aménageur, ordonnée par l’article 1er du jugement du 9 mars 2012 du tribunal administratif de Nice, est subordonnée uniquement au paiement simultané de la somme de 2 196 617 euros actualisée ; qu’il résulte, en effet, de l’article 2 de l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille, qui n’a pas affecté l’article 1er du jugement frappé d’appel, que la détermination du montant de la plus-value apportée à certains terrains par l’aménageur, qui n’est pas enserrée dans le délai de trois mois fixé pour les restitutions et est assortie de modalités qui ne pourront être effectives que dans un délai excédant cette durée de trois mois, n’est pas une condition préalable pour que cette restitution intervienne ; que la restitution ainsi visée concerne également les parcelles ayant fait l’objet de la plus-value ;

Sur les conclusions tendant à la liquidation de l’astreinte :

9. Considérant que, dans les circonstances particulières rappelées au point 5, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, est compétent pour statuer sur les conclusions tendant à la liquidation de l’astreinte prononcée par le jugement du 9 mars 2012 du tribunal administratif de Nice tel qu’il a été réformé par l’arrêt de la cour ;

10. Considérant qu’ainsi qu’il a été dit au point 7, une astreinte provisoire de 1 000 euros par jour de retard a été prononcée à l’encontre de la SAI 2000, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement du tribunal administratif, dans l’hypothèse où la restitution des parcelles ne serait pas intervenue du seul fait de cette société ; que le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et la commune d’Isola demandent la liquidation de l’astreinte sur la période comprise entre le 22 janvier 2015 et la date de la décision du Conseil d’Etat à intervenir ;

11. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le 22 janvier 2015, le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et la commune d’Isola ont demandé à la SAI 2000 de comparaître devant un notaire afin de procéder au transfert de propriété des parcelles litigieuses moyennant le paiement des sommes dues en application de l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille ; que la SAI 2000 a refusé d’accéder à cette demande tant que ne lui serait pas versé le montant de la plus-value apportée aux terrains sur lesquels le golf d’altitude de 18 trous et le circuit de glace ont été construits par l’aménageur ; que, par un mémoire enregistré le 4 septembre 2015, la SAI 2000 a, conformément à l’article 2 de l’arrêt de la cour administrative d’appel, saisi le juge de l’expropriation aux fins de fixer l’indemnité au titre de la plus-value apportée par les travaux qu’elle avait réalisés sur certaines parcelles ; que par un jugement du 22 juin 2017, le juge de l’expropriation du tribunal de grande instance de Nice s’est déclaré incompétent au motif du caractère d’ordre public des règles relatives à la compétence du juge de l’expropriation, auxquelles l’article 20 de la convention de 1992 n’a pu déroger ; que, par un arrêt avant-dire droit du 5 juillet 2018, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, saisie d’un appel contre ce jugement, a estimé que le litige ressortissait à la compétence des juridictions administratives et a renvoyé au tribunal des conflits le soin de décider de la question de compétence ainsi soulevée ;

12. Considérant qu’ainsi qu’il a été indiqué au point 8, la restitution des parcelles n’était pas subordonnée à la fixation et au versement du montant de la plus-value apportée à certains terrains par l’aménageur ; que, toutefois, eu égard à la difficulté de déterminer la portée exacte de la chose jugée sur ce point par les différentes décisions juridictionnelles, laquelle est précisée par les points 7 et 8 de la présente décision, l’inexécution de l’injonction ne peut être regardée, dans les circonstances particulière de l’espèce, comme intervenue du seul fait de la SAI 2000 ; que, dans ces conditions, il n’y a pas lieu de procéder à la liquidation de l’astreinte prononcée à l’encontre de la SAI 2000 par le tribunal administratif de Nice ;

Sur l’édiction de nouvelles mesures d’exécution :

13. Considérant que, pour assurer l’exécution des mesures prescrites par le juge du contrat, telles qu’explicitées au point 8, il y a lieu d’enjoindre à la SAI 2000 de signer l’acte procédant au transfert de propriété des parcelles lui appartenant au bénéfice de la commune d’Isola, sous réserve du paiement simultané à cette dernière société d’une somme de 2 196 617 euros actualisée selon l’indice du coût de la construction de l’INSEE à la date du transfert de propriété ; que la restitution devra intervenir dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ;

14. Considérant que la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 demandent que le taux de l’astreinte prononcée par le tribunal administratif dans son jugement du 9 mars 2012 soit, à l’avenir, porté à 10 000 euros par jour de retard ; que ces conclusions doivent être regardées comme tendant à ce que la mesure d’injonction édictée au point précédent soit assortie d’une astreinte d’un tel montant ; que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de prononcer contre la SAI 2000, à défaut pour elle de justifier de l’exécution de la présente décision dans le délai fixé au point précédent, une astreinte de 1 000 euros par jour de retard jusqu’à la date à laquelle cette décision aura reçu exécution ;

Sur les frais liés au litige :

15. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

 

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt du 12 décembre 2016 de la cour administrative d’appel de Marseille est annulé.
Article 2 : Il est enjoint à la SAI 2000 de signer l’acte procédant au transfert de propriété des parcelles lui appartenant au bénéfice de la commune d’Isola, sous réserve du paiement simultané à cette dernière société d’une somme de 2 196 617 euros actualisée selon l’indice du coût de la construction de l’INSEE à la date du transfert de propriété, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : Une astreinte de 1 000 euros par jour est prononcée à l’encontre de la SAI 2000 s’il n’est pas justifié de l’exécution de la présente décision dans le délai mentionné à l’article 2 ci-dessus. La SAI 2000 communiquera à la section du rapport et des études copies des actes justifiant des mesures prises pour exécuter la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par la SAI 2000 au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune d’Isola, au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et à la société d’aménagement d’Isola 2000.

RM/ Autorisation modificative

CAA de LYON

N° 16LY03856
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. BOUCHER, président
M. Antoine GILLE, rapporteur
Mme VACCARO-PLANCHET, rapporteur public
COGNAT, avocat

 

lecture du mardi 10 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

 

Procédure contentieuse antérieure

 

M. et Mme B… ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler l’arrêté du 17 décembre 2013 par lequel le maire de la commune de Lanslevillard a autorisé la société d’économie mixte du Mont-Cenis à exécuter des travaux modificatifs pour le téléski de Terre Grasse.

 

Par un jugement n° 1403508 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

 

Procédure devant la cour

 

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2016, M. et Mme B…, représentés par Me A…, demandent à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 20 septembre 2016 ;
2°) d’annuler pour excès de pouvoir l’autorisation du 17 décembre 2013 et la décision du 1er avril 2014 rejetant le recours gracieux formé à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Lanslevillard la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :
– l’implantation de l’ouvrage en face de leur résidence principale leur donne intérêt à agir à l’encontre de l’autorisation du 20 septembre 2016 ;
– contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, le projet devait faire l’objet d’un nouveau permis, et non d’une simple autorisation modificative, et le dossier de demande ne fait état d’aucun dispositif approprié pour permettre l’évacuation des eaux pluviales ;
– le projet méconnaît les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-21 du code de l’urbanisme, ainsi que celles des articles UL. 11 et UL. 4 du règlement du plan local d’urbanisme.

 

Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2017, la société d’économie mixte du Mont-Cenis, représentée par la société d’avocats Droit public consultants, conclut au rejet de la requête et demande qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la demande des requérants devant le tribunal administratif n’était pas recevable, faute de recours dans le délai de deux mois suivant l’affichage de l’autorisation en litige et faute de notification par les requérants de leur recours administratif au titre de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme ;
– les moyens de la requête ne sont pas fondés.

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;

 

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

 

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
– les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
– et les observations de Me C… pour la société d’économie mixte du Mont-Cenis ;

 

1. Considérant que, par un arrêté du 9 juillet 2013, le maire de la commune de Lanslevillard a délivré à la société d’économie mixte du Mont-Cenis (SEMMC) l’autorisation mentionnée à l’article L. 472-1 du code de l’urbanisme en vue de l’exécution de travaux portant sur la réalisation d’un téléski à enrouleurs au lieu-dit « Au Vas du Bas / Terre Grasse » ; que, par arrêté du 17 décembre 2013, le maire de Lanslevillard à délivré à la SEMMC une autorisation portant sur la modification de cet ouvrage ; que M. et Mme B… relèvent appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l’annulation de cette autorisation modificative ;

 

Sur la légalité de l’autorisation modificative du 17 décembre 2013 :

 

En ce qui concerne la nécessité d’une nouvelle autorisation :

 

2. Considérant que l’autorisation délivrée à la SEMMC le 17 décembre 2013 tend à modifier celle du 9 juillet 2013 lui permettant de construire la remontée mécanique dite de Terre Grasse ; que les modifications autorisées, qui se limitent au déplacement de quelques mètres vers l’amont des deux pylônes support de cet ouvrage et à l’élévation de 6 à 9 mètres de la hauteur de l’un de ces deux pylônes, sont sans incidence sur la conception générale du projet initial ; que ces travaux ne nécessitaient donc pas une autorisation distincte mais une simple modification de l’autorisation initiale ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu’une nouvelle autorisation aurait du être sollicitée doit être écarté ;

 

En ce qui concerne les risques liés à l’ouvrage :

3. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme :  » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations.  » ; que si les requérants font état du risque de chute d’un des pylônes support du téléski de Terre Grasse sur les propriétés voisines, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de la probabilité d’une telle chute ou de la gravité de ses conséquences, que le maire de Lanslevillard a, en autorisant la modification des caractéristiques de cette remontée mécanique, entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de ces dispositions ;

 

En ce qui concerne l’atteinte au caractère des lieux :

4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur :  » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales.  » ; qu’aux termes de l’article UL. 11 du règlement du plan local d’urbanisme (PLU) de Lanslevillard :  » Par le traitement de leur aspect extérieur, les constructions doivent s’intégrer au paysage environnant en prenant en compte : / – les caractéristiques du contexte bâti dans lequel elles s’insèrent, / – les spécificités architecturales des constructions avoisinantes, sans pour toutefois exclure la création architecturale, / – les contraintes fonctionnelles et techniques propres à l’équipement  » ;

5. Considérant que la décision en litige, ainsi qu’il a été dit, se borne à autoriser le déplacement de quelques mètres de deux pylônes supports du téléski autorisé le 9 juillet 2013 et le rehaussement de l’un d’eux ; que ces modifications ne sont pas en elles-mêmes de nature à affecter l’aspect général et l’intégration dans le paysage du téléski de Terre Grasse ; que, par suite, M. et Mme B… ne sont pas fondés à soutenir que le maire de Lanslevillard a, en délivrant cette autorisation modificative, fait une inexacte application des dispositions précitées de l’article UL. 11 du règlement du PLU de la commune, dont les exigences ne sont pas moindres que celles de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme dont la violation est également invoquée ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces articles UL. 11 et R. 111-21 doit dès lors être écarté ;

 

En ce qui concerne l’écoulement des eaux pluviales :

6. Considérant qu’aux termes du paragraphe 3 de l’article UL. 4 du règlement du PLU de Lanslevillard :  » Les aménagements réalisés sur tout terrain devront être tels qu’ils garantissent l’écoulement direct des eaux pluviales, sans aggraver la situation antérieure. Le constructeur réalisera les dispositifs appropriés pour une évacuation vers un exutoire. Ces aménagements sont à la charge exclusive du propriétaire qui doit réaliser les dispositifs adaptés à l’opération et au terrain  » ; que si les requérants font valoir que, contrairement aux exigences de ces dispositions, le dossier de demande de l’autorisation en litige ne fait pas apparaître de dispositif d’évacuation des eaux pluviales vers un exutoire, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas même allégué, que le déplacement des pylônes en cause et la modification de la hauteur de l’un d’eux soit, non plus d’ailleurs que la présence même de ces pylônes, de nature à affecter les conditions d’écoulement des eaux pluviales sur la piste de ski que longe cet équipement ; que le moyen doit être écarté ;

7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme B… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ;

 

Sur les frais liés au litige :

 

8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions des requérants formées au titre des frais exposés et dirigées contre la SEMMC, qui n’est pas partie perdante dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge des requérants le versement à la SEMMC de la somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés ;

 

 

DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B… est rejetée.

Quad Festival Randos du Cantal/ Interdiction/ Légalité

CAA de LYON

N° 15LY04123
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. POMMIER, président
Mme Emilie BEYTOUT, rapporteur
Mme VIGIER-CARRIERE, rapporteur public
SCP MARTIN -LAISNE, DETHOOR-MARTIN, PORTAL,GALAND, avocats

 

lecture du jeudi 5 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure

La société Macadam Holding et Globe Trotter a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d’annuler l’arrêté du 30 septembre 2014 par lequel le préfet du Cantal a interdit les randonnées dénommées  » Quad Festival Randos  » qu’elle souhaitait organiser du 3 au 5 octobre 2014.

Par un jugement n° 1402102 du 4 novembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

 

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 31 décembre 2015, la société Macadam Holding et Globe Trotter, représentée par MeA…, demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 novembre 2015 ;
2°) d’annuler l’arrêté du préfet du Cantal du 30 septembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la compétence de l’auteur de l’arrêté n’est pas rapportée ;
– le préfet du Cantal a commis une erreur de droit en soumettant sa demande au régime de l’autorisation alors qu’elle relevait du régime de la déclaration ;
– le préfet était tenu de lui délivrer un récépissé dès lors que son dossier de déclaration était complet ;
– l’interdiction litigieuse porte atteinte à la liberté d’aller et venir, à la liberté du commerce et de l’industrie et à l’égalité entre les différents usagers du domaine public, alors qu’aucune menace à l’ordre public ne justifiait une telle mesure.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2017, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code du sport ;
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Beytout, premier conseiller,
– et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

 

1. Considérant que, le 2 avril 2014, la société Macadam Holding et Globe Trotter a déposé une déclaration pour organiser du 3 au 5 octobre 2014 un événement dénommé  » Quad Festival Randos « , se composant, d’une part, d’un salon commercial consacré au quad et, d’autre part, de randonnées en quad au départ d’Entraygues-sur-Truyère, entre l’Aveyron et le Cantal ; que le préfet du Cantal a interdit cet événement par un arrêté du 30 septembre 2014 ; que la société Macadam Holding et Globe Trotter relève appel du jugement du 4 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de l’arrêté du 30 septembre 2014 :
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales :  » La police municipale est assurée par le maire, toutefois (…) : 3° Le représentant de l’Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d’application excède le territoire d’une commune (…)  » ; que l’arrêté d’interdiction en litige ne constitue ni un refus de délivrance d’un récépissé de déclaration ni un refus d’autorisation pris sur le fondement de l’article R. 331-18 du code du sport mais doit s’analyser comme une mesure de police prise sur le fondement de l’article L. 2215-1 précité du code général des collectivités territoriales, qu’il vise expressément ;
3. Considérant, en premier lieu, qu’en l’absence de situation de compétence liée, le moyen tiré de l’incompétence de son auteur est opérant ; que le signataire de la décision, M. B… D…, sous-préfet de Saint-Flour, disposait d’une délégation de signature en date du 19 août 2014 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs n° 22 d’août 2014 à l’effet notamment de se substituer au maire dans les cas prévus à l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’arrêté doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi qu’il a été indiqué au point 2, l’arrêté en litige constitue une interdiction prise par le représentant de l’Etat dans le cadre de ses pouvoirs de police générale, comme il pouvait le faire, alors même qu’il était par ailleurs saisi par la société Macadam Holding et Globe Trotter d’une déclaration sur le fondement de l’article R. 331-18 du code du sport ; que, par suite, le moyen tiré de l’erreur de droit à avoir appliqué le régime de l’autorisation alors qu’il s’agissait d’une concentration comportant moins de 400 véhicules et soumise à ce titre au régime de la déclaration en vertu de l’article R. 331-18 du code du sport ne peut qu’être écarté, de même que le moyen tiré de ce que le dossier étant complet, le préfet était en situation de compétence liée pour délivrer le récépissé ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date de l’arrêté en litige subsistait un doute sur le nombre de participants attendus, dès lors que si la société Macadam Holding et Globe Trotter avait indiqué dans sa déclaration la venue de 390 participants, elle n’avait mentionné qu’une centaine de participants dans son évaluation des incidences sur les zones Natura 2000 ; qu’en outre, les mesures prises pour assurer la sécurité des participants et des tiers, à savoir une organisation en groupe de 18 quads avec un ouvreur et un fermeur dotés d’une trousse de secours et de téléphones avec les numéros de secours, la traversée des zones habitées à allure modérée et la mise à disposition de deux secouristes par la fédération française de sauvetage et de secourisme ne disposant pas de véhicules d’intervention, apparaissaient insuffisantes au regard de l’étendue de la zone traversée ; que, de plus, la société Macadam Holding et Globe Trotter n’avait fourni aucune information sur le respect par les participants des règles relatives à la détention du permis de conduire pour les quads lourds, à l’homologation  » route  » des véhicules, à leur immatriculation ou encore au contrôle de leur niveau sonore ; qu’elle n’avait mentionné aucune mesure pour garantir la tranquillité, si ce n’est le passage à faible allure dans les zones habitées, sans garantie au demeurant sur les moyens mis en oeuvre pour assurer l’effectivité d’une telle mesure ; qu’enfin, le nombre annoncé de 390 véhicules participant à ces randonnées ne pouvait être sans conséquences sur la faune et la flore des zones concernées et sur celles des sites d’intérêts communautaires traversés, s’agissant en particulier du risque de détérioration du lit des rivières lors des passages à gué, ainsi que cela ressort de l’avis de la direction départementale des territoires du département du Cantal ; que, par suite, au vu de l’ensemble de ces éléments, le préfet du Cantal n’a pas, en interdisant dans le département les randonnées en quad dénommées  » quad festival randos  » du 3 au 5 octobre 2014, porté une atteinte excessive à la liberté du commerce et d’industrie dont bénéficie la société requérante ni à la liberté d’aller et venir des participants au regard des exigences de l’ordre public et de l’objectif de protection des espèces et des espaces naturels ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la société Macadam Holding et Globe Trotter ne peut utilement invoquer la méconnaissance du principe d’égalité, eu égard à la différence de situation existant entre la concentration envisagée et les randonnées en quad de particuliers ou d’associations locales ;
7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Macadam Holding et Globe Trotter n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur les frais liés au litige :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Macadam Holding et Globe Trotter au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Macadam Holding et Globe Trotter est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Macadam Holding et Globe Trotter et au ministre de l’intérieur.
Délibéré après l’audience du 7 juin 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
Mme C…et Mme Beytout, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2018.

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N° 15LY04123

Forêt ouverte au public/ Circuit VTT free-ride illégal/ Accident/ Responsabilité de l’ONF (non)

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 14 juin 2018
N° de pourvoi: 17-14781
Publié au bulletin Rejet

Mme Flise (président), président
SCP Alain Bénabent , SCP Delvolvé et Trichet, avocat(s)

 

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Donne acte à M. C… X…, devenu majeur en cours de procédure, de sa reprise d’instance en son nom personnel ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 2 février 2017) et les productions, que M. Florian X…, alors âgé de 17 ans, a été victime le 15 juin 2010, dans la forêt de […] , d’une grave chute de vélo à la suite de laquelle il est demeuré tétraplégique ; que la victime et ses parents, M. Hervé X… et Mme Isabelle X…, agissant tant en leur nom personnel qu’en leur qualité de représentants légaux de leurs enfants, alors mineurs, B… et C… X…, ont assigné l’Office national des forêts (l’ONF) afin de le voir déclaré responsable de cet accident ; que la RATP, la Caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP et la Mutuelle du personnel de la RATP ont été appelées en la cause ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Florian X…, M. Hervé X…, Mme Isabelle X…, M. C… X… et Mme B… X… (les consorts X…) font grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à voir dire l’ONF responsable de l’accident litigieux et ordonner une expertise, avant dire droit sur les préjudices, alors, selon le moyen :

1°/ qu’en vertu de l’article L. 380-1, devenu L. 122-10, du code forestier, dans les forêts gérées par l’ONF, l’ouverture des forêts au public implique la mise en oeuvre des mesures nécessaires à la sécurité de ce public ; que l’ouverture au public en l’absence des mesures de sécurité nécessaires constitue par conséquent un manquement générateur de responsabilité, et ce sans qu’il y ait lieu de distinguer selon que les espaces ouverts au public comportent, ou non, des équipements ou aménagements particuliers ; qu’en retenant pourtant que l’ONF, qui « aménage des sentiers, pistes cavalières, aires de jeux ou de pique-nique, etc. », ne serait « débiteur d’une obligation de sécurité [qu’]en ce qui concerne ces équipements » et «ne saurait répondre des éventuels dangers présents dans les espaces qui ne sont pas spécialement aménagés en vue de l’accueil du public », tâche ne correspondant pas « à sa mission », la cour d’appel, distinguant là où la loi ne distingue pas, a violé l’article L. 380-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009 applicable en la cause ;

2°/ qu’en retenant encore que l’ONF « ne saurait répondre des éventuels dangers présents dans les espaces qui ne sont pas spécialement aménagés en vue de l’accueil du public » eu égard « à ses moyens, puisqu’il n’est pas contesté qu’il ne dispose que d’une quinzaine d’agents de terrain », la cour d’appel a statué par un motif inopérant, en violation de l’article L. 380-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009 applicable en la cause ;

3°/ que constitue une faute génératrice de responsabilité le manquement à un devoir général de prudence et de diligence ; qu’un tel manquement est caractérisé lorsque l’établissement en charge de l’accueil du public en forêt, bien qu’informé de la pratique courante de sports dangereux au sein d’espaces qu’il laisse ouverts au public, ne met en oeuvre ni mesures de sécurité, ni mesures de prévention et de mise en garde du public qu’il accueille ; qu’en l’espèce, l’ONF reconnaissait lui-même avoir sciemment décidé de ne prendre aucune mesure de prévention des dangers encourus par les cyclistes venant s’adonner, dans des espaces forestiers laissés ouverts au public, à la pratique du ‘’free-ride » ; qu’il exposait ainsi notamment que «l’absence d’apposition de panneaux qui est reprochée à l’ONF par les demandeurs, loin de constituer une faute, s’explique aisément puisque (…) implanter des panneaux pour de tels circuits constituerait une forme d’officialisation d’un circuit non autorisé et d’une pratique sportive illégale » ; que pour écarter pourtant toute faute de l’ONF, la cour d’appel a retenu que sa connaissance du circuit ayant causé l’accident de M. Florian X… n’étant pas suffisamment établie, il ne pouvait « être retenu contre l’ONF une faute pour ne pas avoir détruit un tel aménagement » ; qu’en limitant ainsi les devoirs de l’ONF à la seule destruction des circuits connus de lui, la cour d’appel a violé les articles 1382, devenu 1240, et 1383, devenu 1241, du code civil ;

Mais attendu que les dispositions de l’article L. 380-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009, applicable en la cause, n’instituent pas une présomption de responsabilité pour faute de l’ONF pour les dommages survenus au public dans les forêts visées par ce texte ; qu’ayant relevé qu’il est constant que l’accident a eu lieu sur un circuit « sauvage », non signalisé, aménagé illégalement dans la forêt par des tiers pour leur activité dite de « free ride » consistant à franchir avec un VTT des bosses en effectuant des sauts, voire des figures sur un terrain préalablement modelé par leurs soins, et souverainement estimé qu’il n’est pas établi que l’ONF avait connaissance de l’existence de ce circuit qui était situé à l’écart de toute zone aménagée et n’était accessible qu’après plusieurs minutes de marche sur un chemin, la cour d’appel a pu retenir que l’ONF n’était pas responsable de l’accident litigieux sur le fondement de la responsabilité pour faute ;

D’où il suit que le moyen, inopérant en sa deuxième branche qui s’attaque à des motifs surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le second moyen, pris en ses quatre premières branches :

Attendu que les consorts X… font encore grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à voir dire l’ONF responsable de l’accident litigieux et ordonner une expertise, avant-dire droit sur les préjudices, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en l’espèce, pour débouter les consorts X… de leurs demandes au titre de la responsabilité de l’ONF fondée sur la garde du circuit, la cour d’appel a retenu que « le circuit, qui n’a ainsi joué qu’un rôle passif dans la survenance du dommage, ne peut donc être considéré comme en ayant été l’instrument » ; qu’en statuant ainsi, sans provoquer les observations des parties dont aucune ne prétendait que le circuit n’aurait pas été l’instrument du dommage, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que la responsabilité du gardien est subordonnée à la condition que la victime ait rapporté la preuve que la chose a été, en quelque manière et ne fût-ce que pour partie, l’instrument du dommage ; que tel est le cas lorsque la chose inerte intervenue dans la réalisation du dommage présente un caractère dangereux ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a elle-même constaté que M. Florian X… avait « chuté en franchissant une bosse dans un circuit, et est resté tétraplégique » et qu’ « il est incontestable que le circuit était en lui-même potentiellement dangereux, à raison de l’absence de sécurisation de ses abords et de l’importance des obstacles créés » ; qu’il en résultait que le circuit avait joué un rôle actif dans la survenance du dommage et en avait ainsi été l’instrument ; qu’en retenant pourtant que le circuit n’aurait « joué qu’un rôle passif dans la survenance du dommage » et « ne peut donc être considéré comme en ayant été l’instrument », la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l’article 1384, alinéa 1, devenu 1242, du code civil ;

3°/ qu’il suffit à la victime, pour engager la responsabilité du gardien, d’établir que la chose a été, en quelque manière et ne fût-ce que pour partie, l’instrument du dommage ; qu’en l’espèce, pour exclure que le circuit ait été l’instrument du dommage, la cour d’appel a retenu que M. Florian X… et son ami « s’apprêtaient à quitter le circuit, après y avoir évolué », outre « la démarche volontaire de la victime qui s’y est rendue et y a évolué, en parfaite connaissance de sa configuration », son « imprudence fautive », « l’allure inadaptée du cycliste, ou même sa fatigue à la fin de ses évolutions », et qu’« une chute aux conséquences aussi graves aurait parfaitement pu se produire en dehors d’un circuit » ; qu’en statuant par de tels motifs impropres à exclure que le circuit ait été, fût-ce au moins pour partie, l’instrument du dommage de la victime, la cour d’appel a violé l’article 1384, alinéa 1, devenu 1242, du code civil ;

4°/ que la victime d’un dommage peut invoquer la responsabilité du gardien de la chose sans que puisse lui être opposée son acceptation des risques ; qu’en retenant pourtant que « s’il est incontestable que le circuit était en lui-même potentiellement dangereux (…) c’est bien cette dernière caractéristique qui a été recherchée par la victime, qui s’y est rendue et y a évolué en toute connaissance de son caractère ‘’sauvage », et en y recherchant précisément des sensations liées à l’importance de son relief, et peut-être aussi à la totale liberté avec laquelle elle pouvait l’utiliser », cependant que, même à l’envisager, la victime ne pouvait se voir opposer son acceptation des risques, la cour d’appel a violé l’article 1384, alinéa 1, devenu 1242, du code civil ;

Mais attendu que, tout en considérant que le circuit était en lui-même potentiellement dangereux, la cour d’appel a relevé que l’accident était dû à un manque de vitesse du vélo lorsque la victime avait tenté de franchir l’ultime bosse du parcours et donc à une allure inadaptée du cycliste et non à l’obstacle lui-même ; que, tenue de vérifier les conditions d’application de l’article 1384, alinéa 1, devenu l’article 1242, alinéa 1, du code civil qui était invoqué, elle n’a pas violé le principe de la contradiction en retenant que le circuit n’avait joué qu’un rôle passif dans l’accident pour en déduire, à bon droit, que celui-ci ne pouvait être considéré comme ayant été l’instrument du dommage, l’accident étant exclusivement imputable à l’imprudence fautive de la victime, de sorte que la responsabilité de l’ONF n’était pas engagée ;

D’où il suit que le moyen, qui critique en sa quatrième branche des motifs surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, pris en ses trois dernières branches, annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Concessions de remontées mécaniques/ Biens apportés par l’exploitant/ Qualification de biens de retour

Conseil d’État

N° 402251
ECLI:FR:CESEC:2018:402251.20180629
Publié au recueil Lebon
Section
M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur
M. Olivier Henrard, rapporteur public
SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON, avocats

 

lecture du vendredi 29 juin 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler, d’une part, les délibérations des 30 octobre 2013 et 28 juillet 2014 par lesquelles la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye a approuvé le protocole d’accord portant sur la reprise de la station de ski  » Sauze – Super Sauze  » et, d’autre part, la délibération du 9 novembre 2013 par laquelle la commune d’Enchastrayes a approuvé la contribution financière qu’elle s’est engagée à verser dans le cadre du protocole relatif à la reprise de cette station de ski. Par deux jugements rendus respectivement sous les n°s 1403085, 1407888 et 1403073 le 18 août 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté chacune des demandes du préfet.

Par un arrêt n°s 15MA04083, 15MA04084 du 9 juin 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel du préfet, annulé l’article 2 du premier jugement ainsi que la délibération du conseil communautaire de la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye du 30 octobre 2013 puis a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un pourvoi, enregistré le 8 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’intérieur demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’article 3 de cet arrêt en tant qu’il rejette les conclusions du préfet des Alpes-de-Haute-Provence tendant à l’annulation des délibérations des 9 novembre 2013 et 28 juillet 2014 ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit aux conclusions d’appel du préfet des Alpes-de-Haute-Provence.

 

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code du tourisme ;
– la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 ;
– le code de justice administrative ;

 

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye et à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société C…Frères, de M. A…C…, de l’indivision B…C…et de la société d’exploitation des remontées mécaniques du Sauze ;

 

Sur le cadre du litige :

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la station de ski  » Sauze – Super Sauze « , située sur le territoire de la commune d’Enchastrayes, a été créée, aménagée puis exploitée, à partir des années 1930, par différentes personnes privées sur des terrains leur appartenant ou dont elles avaient la jouissance ; que postérieurement à l’intervention de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne désormais codifiée dans le code du tourisme, qui a qualifié de service public le service des remontées mécaniques et a confié aux communes ou à leurs groupements l’organisation et l’exécution de ce service, tout en laissant une période de quatorze ans pour mettre en conformité avec la loi les conventions antérieurement conclues ou les autorisations d’exploiter antérieurement accordées pour l’exécution du service des remontées, a été conclue le 28 décembre 1998, entre la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye (CCVU) et la SARL C…Frères, une convention de délégation de service public pour l’aménagement du domaine skiable et l’exploitation des remontées mécaniques du Sauze – Super Sauze – La Rente sur la commune d’Enchastrayes, d’une durée de quatorze ans ; qu’à l’expiration de cette convention, et après avoir déclaré infructueuse la procédure de mise en concurrence lancée en vue de la conclusion d’une nouvelle délégation de service public, la CCVU a, par une délibération du 13 juin 2013, décidé la reprise en régie de l’exploitation ; que s’agissant des biens affectés à l’exploitation du service public, leur remise à la CCVU a été ordonnée à la SARL C…Frères par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille en date du 29 juillet 2013 ; que les parties, ainsi que la commune d’Enchastrayes et des tiers ayant disposé de droits sur les biens en cause, ont recherché un accord amiable afin d’arrêter l’inventaire et l’évaluation de ces biens ; qu’un protocole a été approuvé par une délibération du conseil communautaire de la CCVU en date du 28 juillet 2014, prévoyant notamment le rachat des biens en cause par la CCVU pour un montant total de 3 700 000 euros hors taxes, dont 1 200 000 euros hors taxes à verser en une seule fois par la commune d’Enchastrayes dont le conseil municipal avait approuvé le principe d’une telle contribution financière par une délibération du 9 novembre 2013 ;

2. Considérant qu’estimant que ces délibérations étaient illégales, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence les a déférées devant le tribunal administratif de Marseille, qui a rejeté ses requêtes par deux jugements du 18 août 2015 ; que par un arrêt du 9 juin 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé une délibération du 30 octobre 2013 du conseil communautaire de la CCVU et rejeté le surplus des conclusions des parties ; que le ministre de l’intérieur se pourvoit contre cet arrêt en tant qu’il rejette les conclusions du préfet tendant à l’annulation des délibérations du conseil municipal d’Enchastrayes du 9 novembre 2013 et de la CCVU du 28 juillet 2014 ;

Sur les règles applicables aux biens de la concession :

3. Considérant, en premier lieu, que, dans le cadre d’une concession de service public mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l’acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l’ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique ; que le contrat peut attribuer au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des ouvrages qui, bien que nécessaires au fonctionnement du service public, ne sont pas établis sur la propriété d’une personne publique, ou des droits réels sur ces biens, sous réserve de comporter les garanties propres à assurer la continuité du service public, notamment la faculté pour la personne publique de s’opposer à la cession, en cours de concession, de ces ouvrages ou des droits détenus par la personne privée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu’à l’expiration de la convention, les biens qui sont entrés, en application de ces principes, dans la propriété de la personne publique et ont été amortis au cours de l’exécution du contrat font nécessairement retour à celle-ci gratuitement, sous réserve des clauses contractuelles permettant à la personne publique, dans les conditions qu’elles déterminent, de faire reprendre par son cocontractant les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public ; que le contrat qui accorde au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des biens nécessaires au service public autres que les ouvrages établis sur la propriété d’une personne publique, ou certains droits réels sur ces biens, ne peut, sous les mêmes réserves, faire obstacle au retour gratuit de ces biens à la personne publique en fin de concession ;

5. Considérant, en troisième lieu, que lorsque la convention arrive à son terme normal ou que la personne publique la résilie avant ce terme, le concessionnaire est fondé à demander l’indemnisation du préjudice qu’il subit à raison du retour des biens à titre gratuit dans le patrimoine de la collectivité publique, en application des principes énoncés ci-dessus, lorsqu’ils n’ont pu être totalement amortis, soit en raison d’une durée du contrat inférieure à la durée de l’amortissement de ces biens, soit en raison d’une résiliation à une date antérieure à leur complet amortissement ; que lorsque l’amortissement de ces biens a été calculé sur la base d’une durée d’utilisation inférieure à la durée du contrat, cette indemnité est égale à leur valeur nette comptable inscrite au bilan ; que, dans le cas où leur durée d’utilisation était supérieure à la durée du contrat, l’indemnité est égale à la valeur nette comptable qui résulterait de l’amortissement de ces biens sur la durée du contrat ; que si, en présence d’une convention conclue entre une personne publique et une personne privée, il est loisible aux parties de déroger à ces principes, l’indemnité mise à la charge de la personne publique au titre de ces biens ne saurait en toute hypothèse excéder le montant calculé selon les modalités précisées ci-dessus ;

6. Considérant que les règles énoncées ci-dessus, auxquelles la loi du 9 janvier 1985 n’a pas entendu déroger, trouvent également à s’appliquer lorsque le cocontractant de l’administration était, antérieurement à la passation de la concession de service public, propriétaire de biens qu’il a, en acceptant de conclure la convention, affectés au fonctionnement du service public et qui sont nécessaires à celui-ci ; qu’une telle mise à disposition emporte le transfert des biens dans le patrimoine de la personne publique, dans les conditions énoncées au point 3 ; qu’elle a également pour effet, quels que soient les termes du contrat sur ce point, le retour gratuit de ces biens à la personne publique à l’expiration de la convention, dans les conditions énoncées au point 4 ; que les parties peuvent prendre en compte cet apport dans la définition de l’équilibre économique du contrat, à condition que, eu égard notamment au coût que représenterait l’acquisition ou la réalisation de biens de même nature, à la durée pendant laquelle les biens apportés peuvent être encore utilisés pour les besoins du service public et au montant des amortissements déjà réalisés, il n’en résulte aucune libéralité de la part de la personne publique ;

7. Considérant que, dans l’hypothèse où la commune intention des parties a été de prendre en compte l’apport à la concession des biens qui appartenaient au concessionnaire avant la signature du contrat par une indemnité, le versement d’une telle indemnité n’est possible que si l’équilibre économique du contrat ne peut être regardé comme permettant une telle prise en compte par les résultats de l’exploitation ; qu’en outre, le montant de l’indemnité doit, en tout état de cause, être fixé dans le respect des conditions énoncées ci-dessus afin qu’il n’en résulte aucune libéralité de la part de la personne publique ;

Sur l’arrêt en tant qu’il se prononce sur la qualification des biens en cause et sur les conséquences indemnitaires :

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que la propriété des biens en cause, alors même qu’ils étaient nécessaires au fonctionnement du service public concédé, n’avait pas été transférée à la communauté de communes dès la conclusion de la convention du seul fait de leur affectation à la concession de service public et que ces biens n’étaient pas régis par les règles applicables aux biens de retour, pour en déduire que le concessionnaire avait droit, du fait de leur retour dans le patrimoine de la CCVU, à une indemnité égale à leur valeur vénale ;

9. Considérant par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que l’arrêt attaqué doit être annulé en tant qu’il rejette les conclusions du préfet tendant à l’annulation des délibérations du 9 novembre 2003 de la commune d’Enchastrayes et du 28 juillet 2014 de la CCVU ;

10. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

 

D E C I D E :
————–

Article 1er : L’article 3 de l’arrêt du 9 juin 2016 de la cour administrative d’appel de Marseille est annulé en tant qu’il statue sur les conclusions tendant à l’annulation des délibérations du 9 novembre 2003 de la commune d’Enchastrayes et du 28 juillet 2014 de la CCVU.
Article 2 : L’affaire est renvoyée dans cette mesure à la cour administrative d’appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye, de la société C…Frères, de M. C…, de l’indivision B…C…et de la société d’exploitation des remontées mécaniques du Sauze, présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, à la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye et à la société C…Frères, première dénommée, pour tous ses cosignataires.
Copie en sera adressée à la commune d’Enchastrayes et au ministre de l’économie et des finances.

Compatibilité de la chasse avec la préservation de l’ours/ Contrôle juridictionnel entier

CAA Bordeaux, 5 juillet 2018

Arrêt 16BX01183 – 5ème chambre – Ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer c/ Association Ferus – Ours, loup, lynx conservation et association Le comité écologique ariégeois C+
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L’association Férus – ours, loup, lynx conservation, et l’association Le comité écologique ariégeois ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d’annuler l’arrêté du 7 juin 2012 du préfet de l’Ariège visant à assurer la compatibilité de l’activité cynégétique et la préservation de l’ours brun.
Par un jugement n° 1205255 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’article 2 de l’arrêté du préfet de l’Ariège du 7 juin 2012 en tant qu’il ne prévoit pas de mesures de protection suffisantes de l’ours brun dans des zones où sa présence répétée a été signalée au cours de l’année précédente.
Procédure devant la cour :
Par un recours, enregistré le 6 avril 2016 et un mémoire complémentaire, enregistré le 13 mai 2016, le ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer demande à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 février 2016 ;
2°) de rejeter la requête présentée par les associations Férus – ours, loup, lynx conservation, et Le comité écologique ariégeois.
…………………………………………………………………………………………….
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 7 juin 2012, le préfet de l’Ariège a fixé les dates d’ouverture et de clôture de la chasse pour la campagne 2012-2013 dans ce département. Par un arrêté distinct du même jour, il a édicté des mesures complémentaires en vue d’assurer la compatibilité de l’activité cynégétique avec la préservation de l’ours brun des Pyrénées. Les associations Férus – ours, loup, lynx conservation et Le comité écologique ariégeois ont demandé l’annulation de ce dernier arrêté. Le ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer relève appel du jugement du 3 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé l’article 2 de l’arrêté du préfet de l’Ariège du 7 juin 2012 visant à assurer la compatibilité de l’activité cynégétique et la préservation de l’ours brun en tant qu’il ne prévoit pas de mesures de protection suffisantes de l’ours brun dans des zones où sa présence répétée a été signalée au cours de l’année précédente.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l’article L. 5 du code de justice administrative : « L’instruction des affaires est contradictoire. / (…) ». Le principe du caractère contradictoire de la procédure contentieuse implique que le juge administratif ne puisse statuer qu’au vu des pièces qui ont été régulièrement versées au dossier de l’instance en cause et communiquées aux parties.

3. Il ressort des énonciations mêmes du jugement attaqué que, pour annuler l’arrêté du préfet de l’Ariège du 7 juin 2012, le tribunal administratif de Toulouse s’est fondé sur les données d’une cartographie des indices de présence de l’ours en période de chasse entre 1996 et 2008, réalisée en 2009 par les services de l’État. Il ressort cependant des pièces du dossier qui lui était soumis que ce document n’avait pas été versé dans la procédure ni, par conséquent, communiqué au préfet de l’Ariège dans le cadre de l’instruction contradictoire de l’affaire. Dans ces conditions, le tribunal administratif a méconnu le principe, rappelé ci dessus, selon lequel le juge administratif ne peut statuer qu’au vu des pièces qui ont été versées à son dossier et communiquées aux parties. Par suite, le préfet de l’Ariège est fondé à soutenir que le jugement qu’il attaque a été rendu sur une procédure irrégulière et à en demander l’annulation. Dès lors et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen d’irrégularité soulevé, le ministre de l’environnement est fondé, pour ce motif, à demander l’annulation de ce jugement.
4. Il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les associations Férus – ours, loup, lynx conservation et Le comité écologique ariégeois devant le tribunal administratif de Toulouse.
Sur l’intervention de la fédération départementale des chasseurs de l’Ariège :
5. La fédération départementale des chasseurs de l’Ariège a intérêt au maintien de la décision attaquée. Ainsi, son intervention est recevable.
Sur la légalité de l’arrêté attaqué :
6. Aux termes de l’article 1er de la directive du 21 mai 1992 : « Aux fins de la présente directive, on entend par : / (…) / i) état de conservation d’une espèce : l’effet de l’ensemble des influences qui, agissant sur l’espèce, peuvent affecter à long terme la répartition et l’importance de ses populations sur le territoire visé à l’article 2. / « L’état de conservation » sera considéré comme « favorable », lorsque : / – les données relatives à la dynamique de la population de l’espèce en question indiquent que cette espèce continue et est susceptible de continuer à long terme à constituer un élément viable des habitats naturels auxquels elle appartient et / – l’aire de répartition naturelle de l’espèce ne diminue ni ne risque de diminuer dans un avenir prévisible et / – il existe et il continuera probablement d’exister un habitat suffisamment étendu pour que ses populations se maintiennent à long terme ; / (…) ». Aux termes de l’article 2 de la même directive : « 1. La présente directive a pour objet de contribuer à assurer la biodiversité par la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages sur le territoire européen des États membres où le traité s’applique. / 2. Les mesures prises en vertu de la présente directive visent à assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des habitats naturels et des espèces de faune et de flore sauvages d’intérêt communautaire. / 3. Les mesures prises en vertu de la présente directive tiennent compte des exigences économiques, sociales et culturelles, ainsi que des particularités régionales et locales. ». Aux termes de l’article 12 de la directive du Conseil 92/43/CEE du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages, dite « habitats » : « 1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l’annexe IV point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant :/ (…) b) la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d’hibernation et de migration ; / (…) 4. Les États membres instaurent un système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces animales énumérées à l’annexe IV point a). Sur la base des informations recueillies, les États membres entreprennent les nouvelles recherches ou prennent les mesures de conservation nécessaires pour faire en sorte que les captures ou mises à mort involontaires n’aient pas une incidence négative importante sur les espèces en question. ». L’annexe IV de ladite directive classe notamment l’espèce « ursus arctos » parmi les espèces animales et végétales d’intérêt communautaire qui nécessitent une protection stricte au sens de l’article 12 paragraphe 1 de ladite directive. Toutefois, les mesures prises à cette fin ne doivent pas porter aux autres intérêts en présence, publics et privés, une atteinte disproportionnée.
7. Aux termes de l’article L. 411-1 du code de l’environnement résultant de la transposition des dispositions de l’article 12 précité de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 :  » I. Lorsqu’un intérêt scientifique particulier ou que les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient la conservation (…), d’espèces animales non domestiques (…) et de leurs habitats, sont interdits : / 1° (…) la mutilation, (…) la destruction, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle, la naturalisation d’animaux de ces espèces (…) ». Aux termes de l’arrêté interministériel du 23 avril 2007 qui a abrogé et remplacé l’arrêté du 17 avril 1981, fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire et les modalités de leur protection, l’ours brun fait partie des espèces de mammifères pour lesquels « I. – Sont interdits sur tout le territoire métropolitain et en tout temps la destruction, la mutilation, la capture ou l’enlèvement, la perturbation intentionnelle des animaux dans le milieu naturel. / II. – Sont interdites sur les parties du territoire métropolitain où l’espèce est présente, ainsi que dans l’aire de déplacement naturel des noyaux de populations existants, la destruction, l’altération ou la dégradation des sites de reproduction et des aires de repos des animaux. Ces interdictions s’appliquent aux éléments physiques ou biologiques réputés nécessaires à la reproduction ou au repos de l’espèce considérée, aussi longtemps qu’ils sont effectivement utilisés ou utilisables au cours des cycles successifs de reproduction ou de repos de cette espèce et pour autant que la destruction, l’altération ou la dégradation remette en cause le bon accomplissement de ces cycles biologiques. / (…) ».
8. L’article 1er de l’arrêté contesté du 7 juin 2012 prévoit, au titre des mesures d’information et de formation, que « la fédération départementale des chasseurs est chargée d’organiser des réunions spécifiques d’information avec le concours de l’ONCFS à l’intention des chasseurs pratiquant dans les zones de présence potentielle de l’ours. Ces réunions ouvertes publiques, cibleront tout particulièrement les détenteurs du droit de chasse, leur délégataire les responsables d’équipes de chasses en battue. /Elles viendront en complément de la formation initiale délivrée par la fédération départementale des chasseurs au candidat d’examen du permis de chasser en matière de gestion des espèces protégées et de l’ours en particulier. ( …) ».
9. L’article 2 de cet arrêté prévoit, au titre des mesures de prévention et de protection, que : « 1) L’ONCFS signale au détenteur du droit de chasse ou à son délégataire le cas échéant, toute présence ou indices de présence de moins de 24 heures portés à sa connaissance par les moyens habituels (…) et validés par elle. Par ailleurs, en cas de détection de la présence d’un ours par un chasseur (…) celle-ci devra être immédiatement signalée au détenteur du droit de chasse ou à son délégataire le cas échéant (…). Sur la base de ces informations, le détenteur du droit de chasse devra : – suspendre immédiatement toute action de chasse en battue éventuellement en cours, 1 prendre les mesures appropriées pour éviter tout accident vis-à-vis de l’ours, dont la suspension immédiate de la chasse en battue avec des chiens, dans un secteur arrêté par ses soins pour une durée de 48 heures à compter de la détection validée par l’ONCFS (…). Une attention particulière sera apportée aux cas des femelles accompagnées d’oursons. D’une façon générale, les équipes de 1’ONCFS pourront apporter aux détenteurs du droit de chasse ou à leurs délégataires en tant que de besoin, leur connaissance du terrain et leur appui technique (…). 2) En cas de détection d’un ours en tanière confirmée par l’ONCFS, une zone de sensibilité majeure sera définie par décision préfectorale en concertation avec l’ONCFS et les responsables cynégétiques (fédération départementale des chasseurs, détenteur et le cas échéant délégataire du droit de chasse). (…) Aucune action de chasse ne pourra être pratiquée dans cette zone jusqu’à la fermeture générale de la chasse. ».
10. L’article 3 de cet arrêté prévoit, au titre de l’évaluation du dispositif, qu’un bilan des actions de formation, de communication et des meures de protection mises en œuvre durant la campagne de chasse sera adressé au préfet et fera 1’objet d’une communication spécifique en commission départementale de la chasse et de la faune sauvage.
11. Il est constant, d’une part, qu’un faible nombre d’ours pyrénéens subsiste dans le département de l’Ariège où cette population se répartit en deux zones, l’une dans le Couserans où douze individus ont été détectés en 2010 et neuf en 2011, et l’autre dans le secteur de Vicdessos et de la Haute-Ariège comprenant des individus en nombre beaucoup plus réduit, d’autre part, que la battue collective est un mode de chasse très perturbant pour l’ours, dérangé dans sa période de pré-hibernation ou pendant son hibernation elle-même et exposé par ailleurs à cette occasion à une mort accidentelle.
12. Il résulte des points 8 et 9 que l’arrêté litigieux impose sur la base d’un signalement effectué par l’Office national de chasse et de la faune sauvage (ONCFS), établissement public administratif chargé de la connaissance de la faune sauvage et de ses habitats, de la police de chasse et de l’environnement, ou sur la base d’un signalement par le chasseur au détenteur de droit de chasse, de tout indice ou présence de l’animal de moins de 24 heures, la prise d’une mesure de suspension immédiate du droit de chasse en battue, éventuellement en cours, ainsi que l’obligation de prendre des mesures appropriées pour éviter les accidents pour une durée de 48 heures, mesures qui peuvent être le cas échéant complétées par arrêté préfectoral. Dans le cas de détection d’un ours en tanière hivernale, l’arrêté prévoit des zones de sensibilité définies par le préfet en concertation avec les acteurs concernés d’une superficie de 50 hectares, où aucune chasse ne pourra être pratiquée. Par ailleurs, le dispositif de protection mis en place confère un rôle important à l’ONCFS dans les mesures de préservation de l’ours brun dès lors que les signalements ne sont pas laissés à la seule initiative des chasseurs et des associations de chasse, l’ONCFS étant chargé de valider la présence ou les signes de présence de l’ours, de délimiter les zones de suspension du droit de chasse en battue et de participer à la délimitation des zones de sensibilité. Enfin, les mesures de formation et d’information des chasseurs sous la responsabilité de la Fédération départementale de chasseurs avec le concours de l’ONCFS qui sont également prévues, et en particulier les formations complémentaires aux candidats à l’examen du permis de chasser en matière de gestion des espèces protégées et de l’ours en particulier constitue un axe important de la protection de l’espèce, et si elles ne sont pas à elles seules des mesures suffisantes de protection, elles constituent des mesures d’accompagnement des mesures décrites à l’article 2 de l’arrêté litigieux qui en renforcent l’effectivité.
13. Il résulte de ce qui précède que contrairement à ce que soutiennent les associations requérantes, les mesures prévues ne reposent pas sur la seule responsabilité des chasseurs et ne leur délèguent pas l’application des mesures préventives. S’il est vrai que l’arrêté tend à responsabiliser les chasseurs, il repose aussi en grande partie sur la supervision et le contrôle de l’ONCFS. Par suite, les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que les mesures prévues par 1’arrêté seraient essentiellement initiées par les chasseurs et que la compétence du préfet serait déléguée au détenteur du droit de chasse.
14. Les associations requérantes soutiennent que l’arrêté attaqué serait inefficace au motif que la détection de la présence de l’animal ne serait presque jamais possible. Il ressort néanmoins des études de dénombrement et de suivi produites par le préfet en première instance que l’analyse des présences de l’ours repose sur une analyse génétique, des mesures d’empreintes, un dispositif de photographies automatiques, un maillage du territoire par 1’installation de stations de suivi, des opérations ponctuelles de recherche de présences, et un suivi (à partir des témoignages ou des dégâts). Il ne ressort pas du dossier que ces mesures de détection de l’ours seraient inefficaces.
15. Alors même que l’arrêté litigieux ne mentionne pas de sanction particulière, comme tout arrêté de police, le non-respect de ses dispositions est susceptible de sanction pénale par application de l’article R. 610-5 du code pénal et en l’espèce, l’article R. 415-1 du code de l’environnement punit de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe le fait de perturber de manière intentionnelle des espèces animales non domestiques protégées au titre de L. 411-l du code de l’environnement et, s’agissant de l’« endommagement » des « aires de vie », constitutif d’un délit, l’article L. 415-3 du code de l’environnement punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Par suite, le moyen tiré de l’absence d’aspect contraignant de l’arrêté doit être écarté.
16. Les associations requérantes soutiennent également que l’interdiction des battues serait la mesure la plus adaptée pour assurer la protection de l’ours brun. Il ressort toutefois du dossier que la chasse en battue permet de remédier à la prolifération des sangliers, lesquels provoquent des dégâts aux cultures et peuvent, en cas de sur-représentation, être à l’origine de problèmes sanitaires, tels que l’émergence de zoonoses alors que l’équivalence des autres modes de chasse n’est pas démontrée en particulier de la chasse à l’affût qui ne permet de viser que les mâles et les jeunes sangliers ce qui empêche une véritable régulation du gibier. Les battues constituent donc un mode de chasse important pour la régulation des sangliers sur le territoire fréquenté par l’ours en Ariège, qui s’étend sur quatre-vingt-sept communes et couvre une superficie 1 358 kilomètres carrés.
17. Les associations requérantes soutiennent que l’arrêté ne comporte pas suffisamment de mesures protectrices s’agissant des femelles suitées, qui sont moins mobiles que les ours solitaires et critiquent le délai de vingt-quatre heures prévu à l’article 2 de l’arrêté contesté, selon elles trop court, s’agissant des femelles avec oursons. En l’absence d’éléments permettant d’estimer que le délai général de vingt-quatre heures serait suffisamment protecteur dans le cas de signalement d’une femelle suitée eu égard à sa moindre mobilité, l’arrêté en litige, qui se borne à indiquer qu’ « une attention particulière sera accordée aux cas de femelles accompagnées d’oursons », doit être regardé comme comportant des mesures insuffisantes sur ce point.
18. Il résulte de tout ce qui précède que les associations requérantes sont seulement fondées à demander l’annulation de l’arrêté attaqué en tant qu’il ne prévoit pas de mesure particulière aux cas de présence avérée de femelles accompagnées d’oursons.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1205255 du 3 février 2016 du tribunal administratif de Toulouse est annulé.
Article 2 : L’arrêté du 7 juin 2012 du préfet de l’Ariège visant à assurer la compatibilité de l’activité cynégétique et la préservation de l’ours brun est annulé en tant qu’il ne prévoit pas de mesure particulière aux cas de présence avérée de femelles accompagnées d’oursons.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande des associations Férus – ours, loup, lynx conservation et Le comité écologique ariégeois ainsi que le surplus des conclusions du recours du ministre de l’environnement, de l’énergie et de la mer sont rejetés.

IGP Tomme des Pyrénées – Cahier des charges – Contrôle normal

Conseil d’État

N° 411663
ECLI:FR:CECHR:2018:411663.20180613
Mentionné aux tables du recueil Lebon
3ème et 8ème chambres réunies
M. Laurent Cytermann, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public
SCP DIDIER, PINET, avocats

Lecture du mercredi 13 juin 2018

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 20 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, l’Association des éleveurs de brebis laitières demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’arrêté du 11 avril 2017 relatif à la modification du cahier des charges de l’indication géographique protégée « Tomme des Pyrénées » ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires ;
– le code rural et de la pêche maritime ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Laurent Cytermann, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de l’institut national de l’origine et de la qualité ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 26 mai 2018, présentée par l’Association des éleveurs de brebis laitières ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 11 avril 2017, les ministres chargés de l’économie et de l’agriculture ont homologué la modification du cahier des charges de l’indication géographique (IGP) protégée « Tomme des Pyrénées « . L’Association des éleveurs de brebis laitières demande au Conseil d’Etat l’annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, si l’association soutient qu’aucune proposition du comité national compétent de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) n’a été rendue publique, il ressort du résumé des décisions produit par l’INAO que, lors de sa séance des 1er et 2 février 2017, le Comité national des indications géographiques protégées, labels rouges et spécialités traditionnelles a adopté une proposition de cahier de charges de cette IGP. Aucune disposition n’impose la publication des propositions de l’INAO. Ce moyen doit, en conséquence, être écarté.

3. En second lieu, l’article 5.2 du règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires dispose :  » 2. Aux fins du présent règlement, on entend par « indication géographique » une dénomination qui identifie un produit : a) comme étant originaire d’un lieu déterminé, d’une région ou d’un pays ; b) dont une qualité déterminée, la réputation ou une autre propriété peut être attribuée essentiellement à son origine géographique ; et c) dont au moins une des étapes de production a lieu dans l’aire géographique délimitée « .

4. Le cahier des charges homologué par l’arrêté attaqué prévoit en son point 5.1 :  » Le lait de brebis provient des races basco-béarnaise, castillonnaise, manech tête noire ou manech tête rousse « . L’association requérante soutient que le cahier des charges aurait dû inclure également la race Lacaune. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la race Lacaune, à la différence des quatre races locales mentionnées ci-dessus, n’est pas adaptée à la transhumance en milieu pyrénéen, alors que l’utilisation de lait issu de races de brebis aptes à la transhumance dans ce milieu constitue un des éléments permettant d’établir le lien à l’origine géographique de la tomme des Pyrénées. De plus, l’INAO soutient sans être contredit que les quatre races retenues par le cahier des charges ont un rendement laitier inférieur à celui de la race Lacaune, ce qui permet de produire un lait plus gras nécessaire à la qualité d’un fromage à pâte semi-dure non cuite. Enfin, l’association requérante ne peut utilement soutenir que le cahier des charges ne comporte aucune restriction de race pour le lait de vache ou de chèvre et que le label rouge LA 11-08, qui est un label de viande d’agneau, n’autoriserait que la race Lacaune. Par suite, l’association n’est pas fondée à soutenir que les auteurs de l’arrêté auraient commis une erreur d’appréciation en n’autorisant pas le lait de brebis provenant de la race Lacaune pour la fabrication de la tomme des Pyrénées.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de l’association doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :
————–

Article 1er : La requête de l’Association des éleveurs de brebis laitières est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l’Association des éleveurs de brebis laitières, au
ministre de l’économie et des finances, au ministre de l’agriculture et de l’alimentation et à l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO).

Randonnée pédestre/ Obligations de l’autorité de police municipale/ Faute (absence de signalisation)

CAA de BORDEAUX

N° 16BX02289   
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. LARROUMEC, président
M. Gil CORNEVAUX, rapporteur
Mme MOLINA-ANDREO, rapporteur public
CABINET JEAN-JACQUES MOREL, avocat

lecture du lundi 28 mai 2018

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


 

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B… D…a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la commune de Cilaos à lui verser une somme totale de 110 000 euros assortie des intérêts légaux, ces intérêts étant eux-mêmes capitalisés, en réparation des préjudices moraux subis du fait de l’accident du 3 avril 2002 dans le canyon de Bras Rouge sur le territoire de la commune de Cilaos, au cours duquel son épouse a trouvé la mort et sa fille, a été grièvement blessée.

Par un jugement n° 1300223 du 12 mai 2016, le tribunal administratif de La Réunion a condamné la commune de Cilaos au versement, à M.D…, d’une somme de 22 500 euros portant intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2012, qui eux-mêmes porteront intérêts à chaque échéance annuelle à compter du 17 décembre 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juillet 2016, la commune de Cilaos, représentée par MeA…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de La Réunion du 12 mai 2016 ;

2°) de rejeter la demande indemnitaire présentée par M.D… ;

3°) de mettre à la charge de M. D…une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la demande préalable de M. D…présentée le 17 décembre 2012 est prescrite car l’accident, date de réalisation du dommage, qui est le fondement de sa demande est advenu le 3 avril 2002, la prescription étant acquise le 31 décembre 2006 ; la procédure pénale engagée en 2002 par M. D…n’a pas permis d’interrompre ce délai ;
– le sentier ne présentait aucun danger particulier et anormal qui aurait nécessité la mise en place d’une signalisation par la commune, alors que d’une part aucun accident ne s’était produit avant la date du 3 avril 2002 et que d’autre part le lieu de l’accident relève du domaine public fluvial relevant de la responsabilité de l’Etat, le maire ne possédant pas la compétence pour réglementer l’accès des sentiers en litiges ;
– les consortsD…, installés à La Réunion depuis l’année 2001 ne pouvait ignorer les risques afférents au passage d’un cyclone tropical quelques jours auparavant accompagnés de pluies très abondante de nature à déstabiliser les reliefs rocheux ;
– le dommage subit par les consorts D…trouve son origine par l’imprudence dont ils ont fait preuve en s’engageant sur ce sentier alors même que l’agent d’accueil du parc leur avait déconseillé d’y aller.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 juillet 2016, M. B…D…, représenté par MeF…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge de la commune de Cilaos une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– la loi n° 84-36 du 16 janvier 1984 ;
– loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
– le décret n° 86-473 du 14 mars 1986 ;
– le décret n° 2010-716 du 29 juin 2010 ;
– le décret n° 2011-444 du 21 avril 2011 ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Gil Cornevaux ;
– et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Les époux D…et leur fille ont emprunté, le 3 avril 2002, le sentier de grande randonnée GR.R2 menant à la cascade de Bras Rouge à Cilaos. Mme C…D…et Mme E…D…, en cours de randonnée, ont volontairement quitté, le parcours balisé pour rejoindre le site pittoresque des sources d’eau chaude, situé à l’écart du sentier et signalé par un fléchage au sol non officiel. Les randonneuses alors qu’elles empruntaient le lit de la rivière du  » Bras Rouge « , vers 13 heures 15, les rives abruptes de ce cours d’eau, fragilisées par le passage le 10 mars 2002 du cyclone tropical  » Harry « , se sont éboulées à deux reprises. Ces éboulements ont provoqué la mort de Mme D…et gravement blessé Mme E…D…à la jambe. M. B…D…après avoir adressé une demande préalable adressée au maire de la commune de Cilaos le 17 décembre 2012, demeurée sans réponse, a saisi le tribunal administratif de La Réunion pour solliciter la réparation du préjudice moral résultant du décès de son épouse et du traumatisme subi par sa fille. La commune de Cilaos fait appel du jugement du 12 mai 2016 par lequel le tribunal administratif de La Réunion l’a déclarée responsable des trois quarts des conséquences dommageables de l’accident et l’a condamné au versement d’une somme de 22 500 euros assortis des intérêts aux taux légal.

Sur l’exception de prescription quadriennale opposée par la commune de Cilaos :

2. Aux termes de l’article 2 de la même loi :  » La prescription est interrompue par (…) / Tout recours formé devant une juridiction relatif au fait générateur, à l’existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l’auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître et si l’administration qui aura finalement la charge du règlement n’est pas partie à l’instance./ Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l’interruption. Toutefois, si l’interruption résulte d’un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l’année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée « . En vertu de ces dispositions, une plainte contre X avec constitution de partie civile, de même qu’une constitution de partie civile tendant à l’obtention de dommages et intérêts effectuée dans le cadre d’une instruction pénale déjà ouverte, interrompt le cours de la prescription quadriennale dès lors qu’elle porte sur le fait générateur, l’existence, le montant ou le paiement d’une créance sur une collectivité publique.

3. Il résulte de l’instruction qu’à la suite du décès de Mme D… et des blessures de Mme E…D…, survenu le 3 avril 2002, M. D…a déposé, le 6 décembre 2002, une plainte contre X avec constitution de partie civile, qui tendait à la recherche de responsabilité du fait de cet accident survenu le 3 avril 2002, est relative à la créance de l’intéressé, susceptible d’être mise à la charge d’une collectivité. Cette action qui a été introduite avant l’expiration du délai de la prescription quadriennale qui courait à compter du 1er janvier 2003, a eu pour effet, en vertu des dispositions de l’article 2 de la loi du 31 décembre 1968, d’interrompre ce délai jusqu’à la date à laquelle l’arrêt du 31 octobre 2006 par lequel la chambre d’instruction de la cour d’appel de Saint Denis de La Réunion rejetant l’appel à l’encontre d’une ordonnance de non lieu, est devenu définitif faisant ainsi partir un nouveau délai de prescription quadriennale à compter du 1er janvier 2007. Ce dernier, interrompu à nouveau par le recours indemnitaire déposé par M. D… à l’encontre de l’Etat le 9 août 2007, a recommencé de courir à compter du premier jour de l’année suivant l’arrêt de la cour administrative d’appel de Bordeaux du 23 décembre 2010, le Conseil d’Etat ayant rejeté le 31 mai 2013, le pourvoi formé sur ce point précis de la responsabilité de l’Etat, soit à compter le 1er janvier 2014. Ainsi, le 17 décembre 2012 date à laquelle M. D…a présenté sa réclamation indemnitaire à la commune de Cilaos, ladite créance ne pouvait donc pas être regardée comme prescrite. Par suite, la commune de Cilaos n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont rejeté l’exception quadriennale de prescription de la créance de M. D…qu’elle opposait.

Sur la responsabilité de la commune :

En ce qui concerne la responsabilité pour faute de la commune de Cilaos :

4. Les dispositions du 5° de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, qui imposent au maire de prévenir, par des précautions convenables, les accidents et fléaux calamiteux tels que les éboulements de terre ou de rochers, ne s’appliquent que dans le cas où existe un danger excédant ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement, par leur prudence, se prémunir.

5. Il résulte de l’instruction que l’accident qui a provoqué le décès de Mme C…D…et grièvement blessé Mme E…D…s’est produit en un lieu, le site des vasques d’eau chaude de la rivière Bras-Rouge, dont le caractère dangereux était avéré, alors même qu’il était fréquenté par de nombreux randonneurs, qui au demeurant devaient quitter le GR R2 pour l’atteindre. Cet itinéraire, dont la dangerosité avait été accentuée par le passage du cyclone Harry quelque peu de temps auparavant, était indiqué par un balisage non officiel, dont la commune de Cilaos ne pouvait ignorer l’existence. Ainsi, il incombait au maire de Cilaos, alors qu’un arrêté préfectoral du 13 mars 2002, en vigueur à la date de l’accident, avait par mesure de précaution, à la suite du passage du cyclone Harry, ordonné la fermeture des sentiers de randonnée de l’île, nonobstant les obligations incombant à d’autres personnes morales participant à la gestion dudit site, de prendre les mesures adéquates pour informer les randonneurs de la dangerosité particulière de cet itinéraire et du site, où s’est déroulé l’accident, situé sur le territoire de la commune de Cilaos. Or le maire de la commune de Cilaos, s’est contenté d’afficher, en mairie, l’arrêté préfectoral du 13 mars 2013, qui préconisait l’interdiction d’emprunt du sentier GR R2 sur son territoire, sans pour autant procéder à un affichage ou à une information spécifiant le danger particulier de l’itinéraire menant au site  » les vasques d’eau chaudes « . Ainsi, le maire de la commune de Cilaos, en n’ayant pas respecté les obligations qui pesait sur lui au regard des exigences sus rappelées de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales, a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, sans que la circonstance qu’aucun accident n’ait été a déploré auparavant ne puisse l’exonérer de cette obligation.

En ce qui concerne la faute des victimes :

6. Cependant, il résulte de l’instruction, que les victimes qui ne connaissait pas les lieux, se sont, avant l’excursion, renseignées auprès d’un agent d’accueil de la maison de la montagne qui leur a indiqué que les sentiers étaient rouverts. Ce même agent a précisé lors de la procédure pénale liée aux circonstances de l’accident qu’il déconseillait de façon générale cet itinéraire aux randonneurs. Néanmoins, MmesD…, en empruntant cet itinéraire menant aux vasques d’eau chaude, dont la dangerosité et l’absence de balisage officiel était indiqué dans le guide dont les victimes disposaient, au demeurant peu de temps après le passage du cyclone Harry, bien qu’aucun panneau n’interdisait l’accès des lieux ou n’en signalait le danger, savaient qu’elles allaient emprunter un cheminement dangereux, commettant ainsi une grave imprudence, de nature à atténuer la responsabilité de la commune. En laissant à la charge de la commune de Cilaos les trois quart des conséquences dommageables de l’accident litigieux, les premiers juges ont fait une juste appréciation de l’ensemble des circonstances de l’espèce.

7. Il résulte de ce qui précède que la commune de Cilaos n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement contesté du 12 mai 2016, le tribunal administratif de La Réunion a déclaré la commune de Cilaos responsable des conséquences dommageables de l’accident à hauteur des trois quarts et l’a condamné au versement, à M.D…, d’une somme de 22 500 euros portant intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2012.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. D…la somme que demande la commune de Cilaos au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu de faire droit aux conclusions de M. D…sur le même fondement et de condamner la commune de Cilaos à lui verser la somme de 1 500 euros.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Cilaos est rejetée.
Article 2 : La commune de Cilaos versera à M. D…une somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. B…D…et à la commune de Cilaos.
Délibéré après l’audience du 27 avril 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pierre Larroumec, président,
M. Gil Cornevaux, président-assesseur,
M. Axel Basset, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 28 mai 2018.

Le rapporteur,
Gil CornevauxLe président,
Pierre LarroumecLe greffier,
Cindy Virin
La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.
Pour expédition certifiée conforme.

Le greffier,
Cindy Virin

2
No16BX02289

Fiscalité des remontées mécaniques (CFE): « La base (imposable) et le socle (en béton) »…

CAA de BORDEAUX

N° 16BX00182, 16BX03976, 17BX00788   
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre – formation à 3
M. DE MALAFOSSE, président
M. Laurent POUGET L., rapporteur
M. de la TAILLE LOLAINVILLE, rapporteur public
CABINET NICOROSI, avocat

lecture du mardi 10 avril 2018

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 


 

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société d’économie mixte de Peyragudes (SEMAP) a demandé successivement au tribunal administratif de Pau de prononcer la décharge des cotisations foncières des entreprises qui lui ont été réclamées au titre des années 2012, puis 2013.

Par un premier jugement du 17 novembre 2015, n° 1401678, le tribunal administratif de Pau, s’agissant de l’année 2012, a constaté un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 38 760 euros et a rejeté le surplus de sa demande. Par un second jugement du 11 octobre 2016, n° 1501726, portant sur l’année 2013, le tribunal administratif de Pau a constaté un non-lieu à statuer à hauteur de la somme de 42 330 euros et a accordé à la société une réduction, à concurrence de 12 831 euros, de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2016 sous le n° 16BX00182, et des mémoires enregistrés les 28 juillet 2016, 29 novembre 2017 et 30 janvier 2018, la SEMAP demande à la cour :

1°) d’annuler les articles 1er et 3 du jugement n° 1401678 du 17 novembre 2015 du tribunal administratif de Pau ;

2°) de faire intégralement droit à sa demande de première instance ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– le tribunal n’a pas analysé son mémoire produit le 27 octobre 2015 et a omis de statuer sur le moyen qu’elle soulevait en demandant que seul le génie civil des gares amont et aval du télésiège  » Privilège « , ainsi que les études et plans y afférents, soient pris en compte pour le calcul de la taxe ;
– le dégrèvement obtenu au titre de la contribution économique territoriale (CET) ne peut s’analyser comme une réduction en droit de la cotisation foncière des entreprises (CFE), s’agissant de deux impositions distinctes ; c’est une modalité de paiement et non une compensation ; l’article L. 203 du livre des procédures fiscales ne trouve pas à s’appliquer, car cela reviendrait à méconnaître la procédure de reprise prévue à l’article 1647 B sexies V du code général des impôts ;
– aussi, la somme versée en excédent au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale à la suite de l’octroi d’un dégrèvement de cotisation foncière des entreprises doit être constatée par un avis de mise en recouvrement avant d’être éventuellement déduite du montant à verser au redevable au titre du dégrèvement ; au cas d’espèce, aucun avis de mise en recouvrement n’a été adressé aux fins de remettre en cause le dégrèvement ; aussi, c’est à tort que le tribunal a constaté un non-lieu à statuer partiel ;
– s’agissant du télésiège  » Sérias « , elle a démontré la faible dimension des dés de bétons sur lesquels sont fixés les pylônes et leur coût de réalisation limité, de sorte qu’il convient d’exclure leur coût du prix de revient à retenir pour la détermination de la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière ; le surcoût liés aux moyens mis en oeuvre pour la mise en place des socles ne saurait être pris en compte ;
– il en va de même s’agissant du télésiège  » Privilège  » ;
– seuls les ouvrages en maçonnerie des gares des deux télésièges présentent le caractère de véritables constructions passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties ; les frais d’études doivent être retenus pour leur seule part afférente au génie civil taxable ; les prix de revient taxables à prendre en compte s’élèvent donc à 167 112 euros pour le télésiège  » Sérias  » et à 86 381 euros pour le télésiège  » Privilège « .

Par des mémoires enregistrés les 11 juillet 2016, 28 septembre 2017, 3 janvier 2018 et 13 février 2018, le ministre des finances et des comptes publics (direction spécialisée de contrôle fiscal Sud-ouest) conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :
– l’application des articles 1447-0 et 1647 B sexies du code général des impôts conduit à une compensation entre le dégrèvement au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale et le montant de la cotisation foncière des entreprises ; les dispositions de l’article 1647 sexies B n’imposent pas l’émission d’un avis de mise en recouvrement ; le dégrèvement au titre du plafonnement de la CET en fonction de la valeur ajoutée s’impute directement sur le montant de la CFE, seule imposition émise ; il ne s’agit pas d’un reversement de sommes indûment restituées ; les dispositions des articles L. 203 et R. 203 du livre des procédures fiscales ne font pas obstacle à la compensation entre la CFE et un dégrèvement obtenu et restitué au titre du plafonnement de la CET, ces impositions n’étant pas de nature différente ; le mode opératoire suivi par l’administration n’a laissé subsister aucun excédent d’imposition à la charge de la requérante ;
– les socles en béton sur lesquels sont fixés les gares et les pylônes, de grande dimension et dont la réalisation a nécessité un enfouissement profond et la mise en oeuvre de moyens matériels et financiers importants, sont des constructions véritables ; la structure la plus complexe de ces éléments est enterrée et ils sont destinés à rester perpétuellement à demeure.

Par une ordonnance en date du 30 janvier 2018, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 15 février 2018 à 12 heures.

Par un courrier en date du 16 février 2018, les parties ont été informées, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la cour était susceptible de soulever d’office un moyen d’ordre public.

Le ministre de l’action et des comptes publics a répondu à ce moyen d’ordre public par un mémoire enregistré le 28 février 2018.

II) Par une requête, enregistrée le 12 décembre 2016 sous le n° 16BX03976, et des mémoires enregistrés les 21 août et 29 novembre 2017, la SEMAP demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 1501726 du 11 octobre 2016 du tribunal administratif de Pau en ce qu’il n’a pas fait intégralement droit à sa demande ;

2°) de réduire en conséquence de 51 252 euros le montant de la cotisation de contribution foncière des entreprises qui lui a été assignée au titre de l’année 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 5 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :
– le dégrèvement obtenu au titre de la contribution économique territoriale ne peut s’analyser comme une réduction en droit de la cotisation foncière des entreprises, s’agissant de deux impositions distinctes ; c’est une modalité de paiement et non une compensation ; l’administration fiscale a pratiqué une compensation implicite ; or, l’article L. 203 du livre des procédures fiscales ne trouve pas à s’appliquer, car cela reviendrait à méconnaître la procédure de reprise prévue à l’article 1647 B sexies V du code général des impôts ;
– aussi, la somme versée en excédent au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale à la suite de l’octroi d’un dégrèvement de cotisation foncière des entreprises doit être constatée par un avis de mise en recouvrement avant d’être éventuellement déduite du montant à verser au redevable au titre du dégrèvement ; au cas d’espèce, aucun avis de mise en recouvrement n’a été adressé aux fins de remettre en cause le dégrèvement ; aussi, c’est à tort que le tribunal a constaté un non-lieu à statuer partiel.

Par des mémoires enregistrés les 31 mai 2017, 28 septembre 2017 et 3 janvier 2018, le ministre de l’action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :
– l’application des articles 1447-0 et 1647 B sexies du code général des impôts conduit à une compensation entre le dégrèvement au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale et le montant de la cotisation foncière des entreprises ; les dispositions de l’article 1647 sexies B n’imposent pas l’émission d’un avis de mise en recouvrement ; le dégrèvement au titre du plafonnement de la CET en fonction de la valeur ajoutée s’impute directement sur le montant de la CFE, seule imposition émise ; il ne s’agit pas d’un reversement de sommes indûment restituées ; les dispositions des articles L. 203 et R. 203 du livre des procédures fiscales ne font pas obstacle à la compensation entre la CFE et un dégrèvement obtenu et restitué au titre du plafonnement de la CET, ces impositions n’étant pas de nature différente ; le mode opératoire suivi par l’administration n’a laissé subsister aucun excédent d’imposition à la charge de la requérante.

Par une ordonnance en date du 3 janvier 2018, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 31 janvier 2018 à 12 heures.

III) Par un recours enregistré le 15 mars 2017 sous le n° 17BX00788 et des mémoires complémentaires enregistrés les 28 septembre 2017 et 3 janvier 2018, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour d’annuler les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Pau n° 1501726 du 11 octobre 2016, et de remettre à la charge de la SEMAP la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de l’année 2013.

Il soutient que :
– conformément aux dispositions du décret n° 2016-1099 du 11 août 2016, le greffe du tribunal administratif de Pau aurait dû notifier le jugement au pôle fiscal juridictionnel départemental ; dès lors, la notification faite à la direction départementale des finances publiques des Hautes-Pyrénées ne lui est pas opposable ; seule la notification faite le 24 novembre 2016 au pôle juridictionnel a pu faire courir le délai d’appel ; le recours n’est donc pas tardif ;
– l’application des articles 1447-0 et 1647 B sexies du code général des impôts conduit à une compensation entre le dégrèvement au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale et le montant de la contribution de la cotisation foncière des entreprises ; les dispositions de l’article 1647 sexies B n’imposent pas l’émission d’un avis de mise en recouvrement ; le dégrèvement au titre du plafonnement de la CET en fonction de la valeur ajoutée s’impute directement sur le montant de la CFE, seule imposition émise ; il ne s’agit pas d’un reversement de sommes indûment restituées ; le mode opératoire suivi par l’administration n’a laissé subsister aucune imposition indue à la charge de la société ;
– les socles en béton sur lesquels sont fixés les gares et les pylônes, de grande dimension et dont la réalisation a nécessité des enfouissements profonds et des moyens matériels et financiers importants, sont des constructions véritables ; la structure la plus complexe de ces éléments est enterrée et ils sont destinés à rester perpétuellement à demeure.

Par des mémoires enregistrés les 30 juin 2017, 19 novembre 2017 et 30 janvier 2018, la SEMAP conclut au rejet du recours et demande que soit mise à la charge de l’Etat une somme de 2 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– le recours du ministre est tardif et donc irrecevable ; les dispositions de l’article R. 200-4 du livre des procédures fiscales ne sont pas applicables ; c’est à juste titre, en vertu de l’article R. 280-18 du livre des procédures fiscales, que le jugement a été notifié le 14 octobre 2016 à la direction des finances publiques des Hautes-Pyrénées, qui a suivi l’affaire ;
– s’agissant du télésiège  » Sérias « , la SEMAP a démontré la faible dimension des dés de bétons sur lesquels sont fixés les pylônes et leur coût de réalisation limité, de sorte qu’il convient d’exclure leur coût du prix de revient à retenir pour la détermination de la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière ; le surcoût liés aux moyens mis en oeuvre pour la mise en place des socles ne saurait être pris en compte ;
– il en va de même s’agissant du télésiège  » Privilège  » ;
– seuls les ouvrages en maçonnerie des gares des deux télésièges présentent le caractère de véritables constructions passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties ; les études doivent être retenues pour leur seule part afférente au génie civile taxable ; les prix de revient taxables à prendre en compte s’élèvent donc à 167 112 euros pour le télésiège  » Sérias  » et à 86 381 euros pour le télésiège  » Privilège « .

Un mémoire présenté par le ministre de l’action et des comptes publics le 13 février 2018, qui se borne à confirmer ses précédentes écritures, n’a pas été communiqué.

Par une ordonnance en date du 30 janvier 2018, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 15 février 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :
– le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Laurent Pouget,
– les conclusions de M. Guillaume de La Taille Lolainville, rapporteur public,
– et les observations de MeA…, représentant la SEMAP.

Considérant ce qui suit :

1. La société d’économie mixte de Peyragudes (SEMAP), concessionnaire du domaine skiable de Peyresourde-Les-Agudes, a été imposée à la cotisation foncière des entreprises au titre des années 2012 et 2013 à partir des déclarations qu’elle avait déposées. Il en est résulté des impositions d’un montant de 120 585 euros pour 2012 et de 124 125 euros pour 2013. La SEMAP a toutefois obtenu, pour chacune des années considérées, des dégrèvements au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée. En revanche, les réclamations de la SEMAP tendant à ce qu’il soit tenu compte d’une moindre valeur locative en ce qui concerne deux télésièges de son domaine ont fait l’objet de décisions de rejet de la part du service, contestées par la société devant le tribunal administratif de Pau. La SEMAP relève appel, sous le n° 16BX00182, du jugement n° 1401678 du 17 novembre 2015 par lequel ce tribunal a, d’une part, constaté un non-lieu à statuer à hauteur d’un dégrèvement prononcé par l’administration et a, d’autre part, rejeté pour le surplus sa demande tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle a été assujettie au titre de 2012. Sous le n° 16BX03976, la société relève appel du jugement n° 1501726 du 11 octobre 2016 en ce que celui-ci n’a pas fait intégralement droit à ses conclusions à fin de décharge de la cotisation foncière des entreprises établie au titre de l’année 2013. Enfin, sous le n° 17BX00788, le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce même jugement en tant que celui-ci a accordé à la SEMAP une réduction partielle de la cotisation foncière des entreprises qui lui a été assignée au titre de 2013 et a mis à la charge de l’Etat une somme de 1 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

2. Les requêtes n° 16BX00182 et 16BX03976 ainsi que le recours n° 17BX00788 présentent à juger des questions semblables et ont fait l’objet d’une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l’étendue du litige en appel au titre de 2012 :

3. Par décision du 12 novembre 2015, qui n’a pas été produite devant le tribunal avant la clôture de l’instruction, l’administration a dégrevé la SEMAP de ses cotisations foncières pour 2012 à hauteur de 39 484 euros. Par suite, les conclusions de la SEMAP relatives à la cotisation foncière des entreprises au titre de l’année 2012 sont devenues sans objet à concurrence de ce montant. Dans cette mesure, il n’y a pas lieu pour la cour d’y statuer.

Sur la recevabilité du recours du ministre au titre de 2013 :

4. Selon l’article R. 200-18 du livre des procédures fiscales :  » A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de la direction générale des finances publiques (…) qui a suivi l’affaire, celui-ci dispose d’un délai de deux mois pour transmettre, s’il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. Le délai imparti pour saisir la cour administrative d’appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l’alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre « . Aux termes de l’article R. 200-4 du même livre, dans sa rédaction issue du décret n° 2016-1099 du 11 août 2016, applicable à compter du 1er septembre 2016 :  » Les notifications et communications faites à l’administration sont adressées par le tribunal administratif au directeur compétent en application du 1° bis du I de l’article 408 de l’annexe II au code général des impôts (…) « . Aux termes de l’article 408 de l’annexe II au code général des impôts, dans sa version applicable à la même date :  » (…) 1° bis. Le directeur départemental ou, le cas échéant, régional des finances publiques du département dans lequel est situé le siège du tribunal administratif (…) a seul pouvoir de soumettre d’office au tribunal administratif les réclamations contentieuses mentionnées à l’article L. 190 du livre des procédures fiscales, de représenter l’Etat devant le tribunal administratif dans les instances engagées à la suite de ces réclamations (…) « .

5. Il résulte de ces dispositions que doit être regardé comme le service qui a suivi l’affaire au sens des dispositions précitées de l’article R. 200-18 du livre des procédures fiscales la direction départementale ou, le cas échéant, régionale des finances publiques du département dans lequel est situé le siège du tribunal administratif, qui avait qualité pour représenter l’Etat devant le tribunal administratif. Seule la notification du jugement à cette direction est de nature à faire courir le délai de transmission du jugement et du dossier au ministre puis le délai d’appel imparti au ministre.

6. Le siège du tribunal administratif de Pau étant situé dans le département des Pyrénées-Atlantiques, la notification initiale du jugement n° 1501726 du 11 octobre 2016, statuant sur la contribution foncière des entreprises due par la SEMAP au titre de l’année 2013, au directeur départemental des finances publiques des Hautes-Pyrénées ne peut être regardée comme ayant été régulière. Elle n’est donc de nature à avoir fait courir ni le délai de transmission du jugement et du dossier au ministre ni le délai d’appel imparti au ministre. Ce n’est que le 24 novembre 2016 que le jugement a été régulièrement notifié au directeur départemental des finances publiques des Pyrénées-Atlantiques, déclenchant ainsi le délai de recours. Par suite, le délai fixé par l’article R. 200-18 du livre des procédures fiscales n’était pas venu à expiration à la date à laquelle le recours du ministre a été enregistré au greffe de la cour administrative d’appel de Bordeaux, le 15 mars 2017.

7. Il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir opposée par la SEMAP sur le fondement de l’article R. 200-18 du livre des procédures fiscales au recours du ministre présenté au titre de 2013 ne peut être accueillie.

Sur la régularité des jugements attaqués :

En ce qui concerne l’étendue des litiges en première instance :

8. Si, s’agissant de l’année 2012, le tribunal a prononcé, par le jugement n° 1401678 du 17 novembre 2015, un non-lieu à statuer partiel, l’administration n’avait pourtant justifié devant lui, avant la clôture de l’instruction, d’aucune décision de dégrèvement qui serait intervenue en cours d’instance. Par suite le tribunal n’a pu, sans commettre d’irrégularité, regarder les conclusions de première instance de la SEMAP comme étant partiellement devenues sans objet. Dès lors, l’article 1er du jugement attaqué prononçant ce non-lieu partiel doit être annulé. Il y a lieu d’évoquer les conclusions correspondantes.

9. S’agissant de l’année 2013, c’est à juste titre et sans commettre d’irrégularité, contrairement à ce que prétend la SEMAP, que le tribunal, par le jugement n° 1501726 du 11 octobre 2016, a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur de 42 330 euros compte tenu du dégrèvement intervenu en cours de procédure et dûment justifié.

En ce qui concerne l’omission à statuer invoquée :

10. La société requérante soutient que le tribunal n’a pas analysé son mémoire produit le 27 octobre 2015 dans l’instance n° 1401678 et a omis de statuer sur son argumentation tendant à ce que seuls entrent dans le calcul pour la détermination de la base d’imposition à la cotisation foncière des entreprises les coûts des prestations de génie civil et d’études afférentes aux gares d’arrivée et de départ des télésièges. Toutefois, le tribunal, qui n’était pas tenu de répondre à chacun des arguments des parties, a visé et analysé le mémoire du 27 octobre 2015 et a détaillé, aux points 9 à 13 du jugement, les motifs pour lesquels il a décidé de valider les éléments de calcul invoqués par l’administration. Le moyen doit, par conséquent, être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne le calcul de l’impôt :

11. Aux termes de l’article 2 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, repris à l’article 1447-0 du code général des impôts :  » Il est institué une contribution économique territoriale composée d’une cotisation foncière des entreprises et d’une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises « . Aux termes l’article 1647 B sexies du même code :  » I.- Sur demande du redevable effectuée dans le délai légal de réclamation prévu pour la cotisation foncière des entreprises, la contribution économique territoriale de chaque entreprise est plafonnée en fonction de sa valeur ajoutée (…) II. Le plafonnement prévu au I s’applique sur la cotisation foncière des entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises diminuées, le cas échéant, de l’ensemble des réductions et dégrèvements dont ces cotisations peuvent faire l’objet (…) III. Le dégrèvement s’impute sur la cotisation foncière des entreprises. « .

12. En premier lieu, c’est, contrairement à ce que soutient la SEMAP, par une exacte application de ces dispositions, et sans qu’y fassent obstacle les dispositions des articles L. 203 et R. 203 du livre des procédures fiscales, lesquelles n’ont pas été mises en oeuvre en l’espèce, que l’administration, ayant fait droit à la demande de plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée présentée au titre de l’année 2012 par la société sur le fondement des dispositions précitées du I de l’article 1647 sexies B du code général des impôts, a imputé le dégrèvement de 53 270 euros en résultant sur la cotisation foncière des entreprises, qui constitue l’une des composantes de la contribution économique territoriale ainsi que l’énonce l’article 1447-0 du code général des impôts, à laquelle la société avait été assujettie au titre de la même année, ramenant le montant total de cette cotisation à 67 315 euros. De la même manière, s’agissant de l’année 2013, l’administration, qui a prononcé le 23 juin 2014 un dégrèvement d’un montant de 51 252 euros au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée, a pu régulièrement imputer ce dégrèvement sur la cotisation foncière des entreprises établie au titre de la même année, ramenant la somme due par la SEMAP à 72 873 euros.

13. En second lieu, l’administration a admis d’abandonner, pour le calcul de la valeur locative des biens de la SEMAP passibles de la taxe foncière, la prise en compte des éléments non maçonnés des installations de télésièges. En conséquence de la valeur locative ainsi révisée, les cotisations dues par la société au titre des années 2012 et 2013 ont été finalement réévaluées par le service aux montants de 27 831 euros au titre de 2012, et de 28 591 euros au titre de 2013. Par suite, compte tenu des dégrèvements déjà prononcés au titre du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée, l’administration a accordé à la SEMAP, par des décisions en date du 12 novembre 2015, de nouveaux dégrèvements d’un montant de 39 484 euros pour 2012 et de 42 330 euros pour 2013. La SEMAP n’est pas fondée à soutenir que, ce faisant, l’administration aurait commis la moindre erreur dans le calcul de l’impôt.

En ce qui concerne la détermination de la base imposable :

14. D’une part, aux termes de l’article 1467 du code général des impôts :  » La cotisation foncière des entreprises a pour base la valeur locative des biens passibles d’une taxe foncière situés en France (…) dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence (…), à l’exception de ceux qui ont été détruits ou cédés au cours de la même période (…) « .

15. D’autre part, aux termes de l’article 1380 du code général des impôts :  » La taxe foncière est établie annuellement sur les propriétés bâties sises en France à l’exception de celles qui sont expressément exonérées par les dispositions du présent code « . Selon l’article 1381 du même code :  » Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties: / 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d’usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d’exploitation ; (…) « .

16. L’administration a pris en compte, pour la détermination du prix de revient des télésièges  » Sérias  » et  » Privilège « , notamment le coût de réalisation des socles de fondation bétonnés sur lesquels sont fixés tant les gares amont et aval que les pylônes supportant les câbles de transport des nacelles, ainsi que la fraction correspondante des dépenses d’études de génie civil. La SEMAP admet la prise en compte du coût des fondations des gares et de la fraction correspondante des études, mais conteste en revanche que puisse être inclus dans la base imposable le coût de revient des socles des pylônes. Elle fait valoir à cet égard que ces derniers, pris isolément, sont de simples blocs de béton au volume et au prix de revient peu significatifs, qui ne sauraient dès lors constituer des constructions susceptibles d’entrer dans le champ d’application de la taxe foncière sur les propriétés bâties.

17. Il résulte de l’instruction que les socles des pylônes sont des éléments maçonnés qui, profondément enfouis tout au long de la ligne de remontée séparant les gares, sont fixés au sol à perpétuelle demeure. Ils ont nécessité, par l’engagement de moyens matériels et financiers importants, la réalisation d’un coffrage, l’installation de fers à béton et la mise en oeuvre d’un volume moyen de béton par unité de 10,88 m3 pour le télésiège  » Privilège  » et de 13,52 m3 pour le télésiège  » Sérias « , soit, globalement, davantage que les volumes de bétons utilisés pour les gares de départ et d’arrivée. Ils doivent, dans ces conditions, être considérés comme présentant le caractère de véritables constructions au sens des dispositions précitées du 1° de l’article 1381 du code général des impôts. Ainsi, c’est à juste titre que leur valeur locative a été incluse dans les bases d’imposition de la SEMAP à la cotisation foncière des entreprises au titre des années litigieuses.

18. Il résulte des points 11 et suivants, d’une part, et sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir partielle opposée par le ministre, que, dans les instances n° 16BX00182 et 16BX03976, les conclusions en décharge de première instance et d’appel de la SEMAP sur lesquelles il y a encore lieu de statuer doivent être rejetées, d’autre part, que dans l’instance n° 17BX00788, le ministre est seulement fondé à soutenir que c’est à tort que, par l’article 2 du jugement n° 1501726 du 11 octobre 2016, le tribunal administratif de Pau a accordé à la SEMAP une décharge partielle de la cotisation foncière des entreprises à laquelle elle avait été assujettie au titre de l’année 2013.

Sur les frais de procès mis à la charge de l’Etat par le jugement n° 1501726 :

19. Compte tenu du dégrèvement d’une fraction conséquente de la cotisation foncière des entreprises établie au titre de 2013, prononcée par l’administration en cours de procédure devant le tribunal, dans l’instance n° 1501726, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions du ministre des finances et des comptes publics tendant à l’annulation de l’article 3 du jugement attaqué du 11 octobre 2016 mettant à la charge de l’Etat une somme de 1 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, quand bien même la décharge accordée par l’article 2 du même jugement est infirmée par le présent arrêt.

Sur les conclusions présentées par la société requérante au titre des dispositions de l’article L.761-1 du code de justice administrative :

20. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre une somme quelconque à la charge de l’Etat en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Il n’y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la SEMAP, dans l’instance n° 16BX00182, dans la mesure où elles tendent à la décharge d’une somme de 39 484 euros.
Article 2 : L’article 1er du jugement n° 1401678 du 17 novembre 2015 et l’article 2 du jugement n° 1501726 du 11 octobre 2016 du tribunal administratif de Pau sont annulés.
Article 3 : La SEMAP est rétablie au rôle de la cotisation foncière des entreprises au titre de l’année 2013 pour la part de cette cotisation ayant donné lieu à la décharge prononcée par l’article 2 du jugement n° 1501726.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l’action et des comptes publics et à la société d’économie mixte de Peyragudes.
Délibéré après l’audience publique du 15 mars 2018 à laquelle siégeaient :
M. Aymard de Malafosse, président,
M. Laurent Pouget, président-assesseur,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 10 avril 2018.

Le rapporteur,
Laurent POUGET
Le président,
Aymard de MALAFOSSE Le greffier,
Christophe PELLETIER
La République mande et ordonne au ministre de l’action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution du présent arrêt.