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Avalanche/ Défaut de signalétique/ Faute de l’autorité de police (oui)/ Responsabilité de la commune (oui)

CAA de BORDEAUX

N° 17BX03610
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre – formation à 3
M. DE MALAFOSSE, président
M. Laurent POUGET L., rapporteur
Mme DE PAZ, rapporteur public
SCP MALESYS-BILLAUD, avocat

lecture du vendredi 28 juin 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

________________________________________

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C…B…a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner la commune de Cazeaux-de-Larboust à lui verser la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice moral résultant du décès accidentel de son épouse.

Par un jugement n° 1401547 du 21 septembre 2017, le tribunal administratif de Toulouse a condamné la commune de Cazeaux-de-Larboust à verser à M. B…une indemnité de 25 000 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 novembre 2017, la commune de Cazeaux-de-Larboust, représentée par MeA…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 21 septembre 2017 et de rejeter la demande présentée devant le tribunal par M. B…;

2°) subsidiairement, de limiter à 20 000 euros le montant du préjudice indemnisable et de fixer à 50 %, soit 10 000 euros, la part de responsabilité imputable à la commune ;

3°) de mettre à la charge de M. B…la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– le risque évalué par Météo France était limité ; il n’existait aucun risque particulier à 1 300 mètres d’altitude et le lieu de l’accident n’était pas répertorié comme propice aux avalanches ; aucun signalement particulier ne s’imposait donc ; si un affichage a été apposé le lendemain, c’est pour tenir compte de l’accident qui venait d’avoir lieu ; au demeurant, le risque général des randonnées en moyenne et haute montagne était signalé par la commune au moyen de cinq panneaux, dont quatre en des lieux de passage obligés pour les randonneurs suivant l’itinéraire parcouru en l’espèce par la victime ;
– la randonnée en montagne est par nature dangereuse ; les départs de neige sont possibles dans les couloirs surplombés par des plaques ; Mme B…a commis une imprudence fautive en ne tenant pas suffisamment compte des avertissements figurant sur les panneaux, de nature à exonérer la commune à tout le moins de la moitié de sa responsabilité ;
– le montant du préjudice du requérant ne saurait excéder 20 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mars 2018, M. B…conclut au rejet de la requête, demande que l’indemnité au paiement de laquelle la commune de Cazeaux-de-Larboust a été condamnée soit portée à 30 000 euros, et sollicite que soit également mise à la charge de cette dernière la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :
– l’information sur les risques n’a été apposée que le lendemain de l’accident ; le bulletin de risque d’avalanches faisait état de départs spontanés de coulées humides ; le lieu de l’accident était dépourvu de neige et rien ne pouvait alerter les victimes ; la commune ne pouvait pour sa part ignorer le danger ; au demeurant, depuis l’accident en cause, d’autres avalanches sont survenues au même endroit ; le sentier n° 39 était répertorié comme couloir naturel d’avalanche ;
– aucune imprudence fautive ne peut être reprochée à la victime ;
– compte tenu du lien conjugal, l’indemnisation de son préjudice n’a pas été surévaluée par le tribunal.

Par ordonnance du 31 janvier 2019, la clôture d’instruction a été fixée au 1er mars 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de M. Laurent Pouget,
– et les conclusions de Mme Déborah De Paz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B…a été victime le 5 avril 2012 d’une avalanche ayant provoqué son décès, alors qu’elle effectuait une randonnée avec des membres de sa famille sur le sentier n° 39 situé dans le secteur de la vallée du Lis, sur le territoire de la commune de Cazeaux-de-Larboust. Saisi par M.B…, le tribunal administratif de Toulouse, par un jugement du 21 septembre 2017, a condamné la commune de Cazeaux-de-Larboust à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation du préjudice moral causé par le décès de son épouse. La commune relève appel de ce jugement. M.B…, par la voie de l’appel incident, demande que l’indemnité qui lui a été allouée soit portée à 30 000 euros.

Sur l’appel principal de la commune :

2. Aux termes de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales :  » La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (…) Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, (…) les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels (…) de pourvoir d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours et, s’il y a lieu, de provoquer l’intervention de l’administration supérieure (…) « .

3. Il résulte de l’instruction que le secteur de la vallée du Lis dans lequel se situe le sentier balisé qu’ont emprunté M. et Mme B…et leurs compagnons le 5 avril 2012, menant aux sites dits du Ru d’Enfer, du Gouffre d’Enfer et des Mines des Crabioules, était nécessairement connu des autorités locales comme étant propice aux risques liés aux coulées de neiges, y compris en période de fonte, dès lors qu’il est classé par le plan de prévention des risques naturels adopté le 5 mars 2004 en zone rouge  » avalanches  » en hiver et en zone rouge  » inondations  » du printemps à l’automne. Ainsi, quand bien même aucune avalanche n’avait été récemment répertoriée sur les sentiers dudit secteur, le risque pouvait néanmoins y être regardé comme réel et actuel, ce d’autant que les parcours de randonnée coupent parfois, comme c’est précisément le cas à l’emplacement de l’accident de MmeB…, les couloirs d’avalanches qu’empruntent naturellement au printemps les coulées de neige de fonte provoquées par l’effet du redoux sur les plaques de neige instables situées à des altitudes supérieures. Or, selon les constatations faites par les services de gendarmerie, ce n’est que le lendemain de l’accident qu’un panneau informant les randonneurs de ce risque a été apposé au départ même des sentiers. Si la commune de Cazeaux-de-Larboust fait valoir que cinq panneaux étaient implantés avant même l’accident en différents emplacements stratégiques (entrée de la vallée, Pont de la Cièrque, Bordes du Lis, Bourdalès et parking de l’auberge du Lis), elle ne peut être regardée comme établissant cette antériorité en ce qui concerne les quatre derniers de ces panneaux, dès lors que ni les photographies, ni l’attestation d’un élu qu’elle produit ne permettent de déterminer la date de mise en place desdits panneaux. Les mentions de l’attestation, corroborées sur ce point par le rapport de gendarmerie, permettent en revanche de tenir pour établi qu’un panneau était en place le long de la route départementale, à l’entrée de la vallée et du territoire communal. Toutefois, ce seul panneau, situé à 1 mètre du bord de la route et sur lequel ont été apposées des affichettes lisibles uniquement par des piétons, ne saurait constituer une signalétique adéquate du danger d’avalanche auquel Mme B…et ses compagnons ont été exposés. Dans ces conditions, c’est à juste titre que le tribunal administratif a estimé que le maire de Cazeaux-de-Larboust n’avait pas pris toutes les mesures appropriées pour informer les promeneurs des dangers particuliers présentés par le site, et que cette carence du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police est constitutive d’une faute de nature à engager la responsabilité de la commune.

4. Par ailleurs, les procès-verbaux de gendarmerie relèvent la méconnaissance qu’avaient du milieu montagnard M. et Mme B…et leurs compagnons, et il n’est pas contesté qu’alors même que le bulletin d’estimation du risque d’avalanche du massif luchonnais pour la journée du 5 avril 2012 mentionnait un phénomène de purge dans les pentes raides susceptible d’engendrer des avalanches de taille moyenne à assez grosse, aucune mise en garde n’a été faite à cet égard par le syndicat d’initiative de Luchon, qui leur a recommandé l’itinéraire qu’ils ont suivi. Et, compte tenu notamment de l’altitude relativement basse à laquelle ils évoluaient, aucun élément manifeste ne permettait aux intéressés de penser qu’ils couraient le risque d’être touchés par une avalanche. Dans ces conditions, la commune de Cazeaux-de-Larboust ne peut s’exonérer, fut-ce partiellement, de sa responsabilité en invoquant une faute par imprudence des victimes.

Sur l’appel incident de M.B… :

5. Il ne résulte pas de l’instruction que les premiers juges aient fait une inexacte appréciation du préjudice d’affection subi par M. B…à raison du décès de son épouse en fixant à 25 000 euros le montant de l’indemnité destinée à réparer ce préjudice.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Cazeaux-de-Larboust n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse l’a condamnée à verser une indemnité à M. B…en réparation de son préjudice d’affection, et ce dernier n’est, pour sa part, pas fondé à soutenir que c’est à tort que le tribunal a fixé à 25 000 euros le montant de cette indemnité.

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre une somme quelconque à la charge de M. B…au titre des frais exposés par la commune de Cazaux-de-Larboust et non compris dans les dépens. Il convient en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de cette commune la somme de 1 500 euros à verser à M. B…en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Cazeaux-de-Larboust et les conclusions d’appel incident de M. B…sont rejetées.

Taxe communale sur les remontées mécaniques/ Base de liquidation erronée

CAA de BORDEAUX

N° 17BX01693
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. LARROUMEC, président
M. Axel BASSET, rapporteur
Mme MOLINA-ANDREO, rapporteur public
TOURNY AVOCATS, avocat

lecture du lundi 24 juin 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédures contentieuses antérieures :

I. Sous le n° 1600562, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi a demandé au tribunal administratif de Pau de le décharger des sommes de 58 673,53 euros et 12 975,45 euros mises à sa charge dans deux titres de recettes référencés n° 1653 bordereau 113 et n° 1726 bordereau 125, rendus exécutoires le 26 novembre 2015 par le maire de la commune de Bagnères-de-Bigorre, correspondant au paiement de la taxe sur les remontées mécaniques restant due au titre de l’année 2015.

II. Sous le n° 1600571, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi a demandé au tribunal administratif de Pau de le décharger de la somme de 59 853,62 euros mises à sa charge dans un titre de recettes référencé n° 1381 bordereau 95, rendu exécutoire le 26 novembre 2015 par le maire de la commune de Bagnères-de-Bigorre, correspondant au paiement de la taxe sur les remontées mécaniques restant due au titre de l’année 2013.

III. Sous le n° 1600572, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi a demandé au tribunal administratif de Pau de le décharger de la somme de 60 745,42 euros mise à sa charge dans un titre de recettes référencé n° 1382 bordereau 95, rendu exécutoire le 26 novembre 2015 par le maire de la commune de Bagnères-de-Bigorre, correspondant au paiement de la taxe sur les remontées mécaniques restant due au titre de l’année 2014.

Par un jugement n°s 1600562, 160571, 160572 du 28 mars 2017, le tribunal administratif de Pau a déchargé le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi des sommes de 58 673,53 euros, 12 975,45 euros, 59 853,62 euros et 60 745,42 euros susmentionnées et mis à la charge de la commune de Bagnères-de-Bigorre une somme de 1 500 euros à verser au syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 30 mai 2017, la commune de Bagnères-de-Bigorre, représentée par MeB…, demande à la cour d’annuler ce jugement du 28 mars 2017 du tribunal administratif de Pau.

Elle soutient que :
– si le SMVTPM s’oppose systématiquement au recouvrement de la taxe communale depuis près de 15 ans, soit par l’omission ou la minoration des déclarations trimestrielles ou annuelles, soit par la contestation en justice ou par le retard des paiements en dépit des condamnations prononcées, en remettant en cause le principe même d’assujettissement à la taxe sur les remontées mécaniques du fait qu’il exploitait un téléphérique, cette analyse a été écartée par l’ensemble des juridictions administratives, et notamment le Conseil d’Etat dans un arrêt n° 337428 du 11 mars 2011 et la cour administrative d’appel de Bordeaux dans un arrêt n° 11BX01267 du 4 décembre 2012 ;
– le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors qu’il s’est borné, pour prononcer la décharge des impositions dues au titre des années 2013 à 2015, à faire référence à une délibération du 22 septembre 2012 qui n’existe pas ;
– sur le fond, les délibérations du SMVTPM des 21 décembre 2012, 6 septembre 2013, 22 décembre 2014 et 6 mai 2015 proposent une grille tarifaire du prix des remontées mécaniques contraire au principe d’égalité des usagers du service public dès lors que, par la ventilation qu’elles opèrent artificiellement, elles font supporter aux usagers souhaitant seulement bénéficier du transport vers le pic du midi le coût d’un musée ou de l’accès à un restaurant, le tarif le plus élevé excédant ainsi le coût réel du service rendu aux usagers ;
– le SMVTPM entretenant une opacité relative au montant réel de la recette brute de la billetterie et manquant à son obligation déclarative réelle exigée pourtant par l’article R. 2333-70 du code général des collectivités territoriales, la fixation du montant de l’assiette de l’impôt retenu par la commune de Bagnères-de-Bigorre par reconstitution nécessaire de la recette brute de la billetterie devra être confirmée.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 septembre 2018, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi (SMVPTM), représenté par MeA…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Bagnères-de-Bigorre sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :
– si la commune estime qu’il ne faut pas distinguer, dans le montant de recettes brutes, la part résultant de l’activité liée aux remontées mécaniques de celle résultant des autres activités exploitées sur le site du Pic du Midi, ce qui l’a conduite à calculer la taxe sur les remontées mécaniques due par le Syndicat Mixte de Valorisation Touristique du Pic du Midi sur l’ensemble des recettes brutes, sans rechercher si elles sont liées au transport, les recettes de la billetterie du téléphérique, qui constitue à la fois la gare de départ de la remontée mécanique et la porte d’entrée sur le site du Pic du Midi, n’incluent pas la seule activité remontée mécanique au regard des autres activités qui y sont organisées, la billetterie de la Régie du Pic du Midi ne délivrant pas des titres de transport mais des billets d’accès et de visite d’un site aménagé ;
– compte tenu de ce que la cour administrative d’appel de Bordeaux a, dans un arrêt n° 11BX01267 4 décembre 2012, jugé que le syndicat mixte n’établissait pas que le billet délivré à l’usager pour l’utilisation du téléphérique lui offrirait d’autres prestations que celle de l’accès au sommet, il a, par une délibération du 22 septembre 2012, modifié les tarifs afin qu’ils fassent clairement apparaître les prestations offertes, à savoir l’aller-retour en téléphérique et la visite découverte du sommet / musée, cette nouvelle tarification ayant été confirmée par délibérations des 21 décembre 2012, 6 septembre 2013, 22 décembre 2014 et 18 mai 2015, à partir d’éléments objectifs ;
– à cet égard, pour déterminer la part des remontées mécaniques, le Syndicat Mixte de Valorisation Touristique du Pic du Midi a estimé que celle-ci correspondait, dans le montant du billet vendu pour la visite du site aménagé, aux recettes nécessaires pour compenser les dépenses d’exploitation liées aux remontées mécaniques ;
– à l’inverse, en ne tenant pas compte des déclarations trimestrielles, la commune fixe chaque année l’assiette de la taxe de façon arbitraire, ce qui justifie l’annulation des titres de recettes litigieux ;
– si la position du syndicat a été invalidée par les juridictions administratives, c’est au motif tiré non de ce que la taxe devait porter sur l’ensemble des recettes de la billetterie mais de ce qu’il n’était pas démontré que les billets portaient sur d’autres prestations, ce qui a conduit le syndicat mixte à mettre en place une comptabilité analytique dès l’année 2011 ;
– si la commune conteste les nouveaux tarifs en arguant de ce qu’il s’agirait d’un nouveau moyen pour refuser de payer les taxes litigieuses, elle a clairement, en sa qualité de membre du Syndicat mixte, manifesté son accord et approuvé plusieurs fois la nouvelle grille tarifaire lors du vote des délibérations successives, de sorte que son attitude actuelle est particulièrement déloyale et incompréhensible ;
– en tout état de cause, en votant en faveur des délibérations contestées, la commune a nécessairement et définitivement perdu sa capacité et son intérêt à agir pour contester leur légalité par voie d’action ou d’exception, un tel moyen étant dès lors inopérant ou irrecevable ;
– si la commune soutient que les tarifs constitueraient une atteinte au principe d’égalité et que l’assiette de l’impôt est artificielle et illégitime, le SMVTPM ne fait qu’appliquer les tarifs votés par la commune elle-même et il n’est pas démontré que les tarifs excèdent le prix de revient des services ou que l’un supporte les charges de l’autre ;
– l’absence de communication d’une attestation visée par le service local des impôts ne saurait justifier une détermination arbitraire de l’assiette de la taxe alors qu’aucun élément ne permet de douter de la sincérité des déclarations trimestrielles à partir d’une application stricte des tarifs votés par le SMVTPM, lequel a éprouvé par ailleurs des difficultés pour obtenir ladite attestation ;
– ainsi, une procédure de taxation d’office serait illégitime dans la mesure où la commune a bien reçu les divers éléments avant que les titres soient pris et qu’il était matériellement impossible qu’elle reçoive une attestation visée par les services d’impôts au vu de la date d’émission des titres ;
– contrairement à ce que soutient la commune, il est mathématiquement impossible que la recette liée aux remontées mécaniques dépasse 50 % ;
– s’agissant du titre exécutoire du 26 novembre 2015 n° 1381, bordereau 95, émis pour recouvrer la somme de 59 853,62 euros au titre de l’année 2013, il ne comporte pas l’indication des bases de liquidation à défaut pour la commune d’expliciter la méthode de calcul utilisée pour obtenir la somme de 2 347 200,60 euros.

Par ordonnance du 4 septembre 2018, la clôture d’instruction a été fixée en dernier lieu au 5 octobre 2018.

Un mémoire présenté pour le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi (SMVPTM) a été enregistré le 10 mai 2019, postérieurement à la clôture d’instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le livre des procédures fiscales ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Axel Basset,
– les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteur public ;
– et les observations de MeB…, représentant la commune de Bagnères-de-Bigorre et de MeA…, représentant le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi.

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi assure la gestion de l’ensemble des équipements installés et des services exploités dans la partie sommitale du Pic du Midi ouverte au public ainsi que l’exploitation d’un téléphérique partant d’une gare située sur le territoire de la commune de Bagnères-de-Bigorre et arrivant sur ce site, localisé sur le territoire de la commune de Sers. Dans le cadre d’un litige l’opposant à la commune de Bagnères-de-Bigorre depuis plusieurs années, portant sur les modalités de calcul de la taxe sur les remontées mécaniques prévue à l’article L. 2333-49 du code général des collectivités territoriales, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi a été rendu destinataire de quatre titres de recettes référencés n° 1381 bordereau 95, n° 1382 bordereau 95, n° 1653 bordereau 113 et n° 1726 bordereau 125, rendus exécutoires le 26 novembre 2015 par le maire de la commune de Bagnères-de-Bigorre, pris pour recouvrer les sommes respectives de 59 853,62 euros, 60 745,42 euros, 58 673,53 euros et 12 975,45 euros, correspondant à une part non acquittée de la taxe sur les remontées mécaniques due au titre des années 2013, 2014 et 2015. La commune de Bagnères-de-Bigorre relève appel du jugement du 28 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Pau, saisi par le syndicat mixte, l’a déchargé de l’ensemble des sommes susmentionnées.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article L. 9 du code de justice administrative :  » Les jugements sont motivés. « .

3. La commune de Bagnères-de-Bigorre soutient que le tribunal s’est borné, pour prononcer la décharge des impositions dues au titre des années 2013 à 2015, à faire référence à une délibération du 22 septembre 2012 qui n’existe pas et alors que chaque année de présentation tarifaire implique une délibération. Toutefois, d’une part, il résulte de l’instruction qu’à la suite de la réalisation d’un audit par un expert-comptable, le bureau du syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi a adopté cette délibération du 22 septembre 2012, dûment produite aux débats devant les premier juges, destinée à modifier les modalités de tarifications des billets vendus aux usagers se rendant sur le site du Pic du midi ainsi que la répartition financière des différents produits, afin d’isoler la part des recettes générées par les remontées mécaniques proprement dites et celle issues des autres prestations fournies au public. D’autre part, la seule circonstance que les premiers juges n’aient pas expressément indiqué que cette nouvelle présentation des modalités de tarification ait été reconduite par quatre délibérations de ce même bureau des 21 décembre 2012, 6 septembre 2013, 22 décembre 2014 et 18 mai 2015 ne saurait suffire à faire regarder le jugement attaqué comme entaché d’une insuffisance de motivation et, partant, d’irrégularité sur ce point.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l’article L. 2333-49 du code général des collectivités territoriales :  » Les entreprises exploitant des engins de remontée mécanique peuvent être assujetties en zone de montagne à une taxe communale portant sur les recettes brutes provenant de la vente de titre de transport et dont le produit est versé au budget communal. / Le montant de la taxe est inclus dans le prix du titre de transport et perçu sur l’usager. (…) / Elle est recouvrée par la commune comme en matière de taxe sur le chiffre d’affaires dans les conditions fixées par décret en Conseil d’Etat. « . Aux termes de l’article L. 2333-50 de ce code :  » La taxe communale est instituée par délibération du conseil municipal qui en fixe le taux dans la limite de 3 % des recettes brutes provenant de la vente des titres de transport. « . En vertu de l’article R. 2333-71 dudit code :  » La liquidation est faite par le maire par application du taux fixé par le conseil municipal pour la taxe et de l’assiette de la taxe revenant à la commune dans les conditions de l’article R. 2333-73. / Elle donne lieu à l’émission d’un titre de recettes adressé au receveur municipal. « .

5. Il résulte de l’instruction que, par une délibération du 21 février 1987, le conseil municipal de la commune de Bagnères-de-Bigorre a fixé le montant de la taxe, prévue par les dispositions précitées de l’article L. 2333-49 du code général des collectivités territoriales, au taux maximal de 3 % des recettes brutes provenant de la vente des titres de transport. Pour reconstituer les recettes brutes générées par la vente des billets au public se rendant sur le site touristique du Pic du midi, en considération de ce que ses déclarations trimestrielles ne lui avaient pas été adressées dans les délais fixés par l’article R. 2333-70 du même code, le maire de la commune de Bagnères-de-Bigorre a, par les quatre titres de recettes litigieux, estimé que les recettes déclarées par le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi ne correspondraient qu’à 52 % des recettes brutes destinées à rentrer dans l’assiette de l’impôt et, partant, déterminé le montant de la taxe communale sur la totalité des recettes brutes de la billetterie. Toutefois, il résulte de l’instruction que le Syndicat Mixte de Valorisation Touristique du Pic du Midi a pour objet d’assurer non seulement l’exploitation du téléphérique desservant le site mais aussi la gestion de l’ensemble des activités offertes au public sur la partie sommitale du Pic, lesquelles comprennent l’arrivée du téléphérique, la terrasse Baillaud libre d’accès pour les randonneurs, l’espace musée, les restaurants, la boutique, la Coupole Charvin et l’hébergement. Il résulte également de l’instruction que dans le cadre du litige qui l’opposait à la collectivité territoriale depuis plusieurs années, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi a entrepris de faire réaliser un audit par un cabinet d’expert-comptable afin d’évaluer précisément, dans le coût des billets vendus aux usagers du site, la part des recettes brutes générées par les remontées mécaniques proprement dites et celle issues de l’ensemble des autres prestations fournies au public, sur la base duquel une nouvelle tarification a été adoptée puis formalisée dans les cinq délibérations susmentionnées des 22 septembre 2012, 21 décembre 2012, 6 septembre 2013, 22 décembre 2014 et 18 mai 2015. C’est ainsi que, pour l’année 2013, le bureau du syndicat mixte a, par la délibération du 21 décembre 2012, proposé un billet donnant uniquement accès au musée, un billet donnant accès au musée et au transport (comportant une répartition 50 / 50), un billet donnant accès au musée, au transport et au restaurant (avec une répartition 29,49/29,49/41,03), ainsi que des billets intégrant également des animations et des nuitées, les professionnels bénéficiant d’un régime de faveur. D’une part, en se bornant à se prévaloir de ce que le SMVTPM procède depuis l’année 2013 à une ventilation artificielle de la constitution du prix des billets, la commune appelante ne conteste pas sérieusement les résultats de l’audit ainsi réalisé par le syndicat mixte et n’apporte aucun élément comptable et financier probant de nature à le remettre en cause. D’autre part, dès lors qu’il incombe au juge du plein contentieux, saisi d’un recours dirigé contre un état exécutoire, de statuer sur le bien-fondé des sommes en litige, la collectivité territoriale ne saurait utilement exciper de l’illégalité des cinq délibérations susmentionnées au motif tiré de ce qu’elles proposeraient une grille temporaire du prix des billets contraires au principe d’égalité applicable entre les usagers du service public. Dès lors, et ainsi que l’a relevé à bon droit le tribunal, le syndicat mixte doit être regardé comme apportant la preuve de ce que la commune de Bagnères-de-Bigorre a, par les titres de recettes litigieux, calculé le montant de la taxe due sur une base de liquidation erronée.

6. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin de statuer sur le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure d’imposition, que la commune de Bagnères-de-Bigorre n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a déchargé, pour ce motif, le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi des sommes litigieuses de 58 673,53 euros, 12 975,45 euros, 59 853,62 euros et 60 745,42 euros.

Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une quelconque somme à verser à la commune de Bagnères-de-Bigorre au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances particulières de l’espèce, de mettre à la charge de l’appelante la somme que le syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi demande sur le fondement de ces mêmes dispositions.

DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Bagnères-de-Bigorre est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bagnères-de-Bigorre et au syndicat mixte de valorisation touristique du Pic du Midi.

 

PLU St-Bon-Tarentaise (Courchevel)/ Légalité

CAA de LYON

N° 18LY03129
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. BOUCHER, président
M. Antoine GILLE, rapporteur
Mme VACCARO-PLANCHET, rapporteur public
SELARL ITINERAIRES AVOCATS, avocat

lecture du jeudi 13 juin 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

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Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Le syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze », M. et Mme G…, M. et Mme F…, M. et Mme A…, la SCI Catlau, la SCI Marion et M. E… ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la délibération du 31 janvier 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune nouvelle de Courchevel a approuvé le plan local d’urbanisme (PLU) de la commune déléguée de Saint-Bon-Tarentaise, ou, à défaut, d’annuler le classement en zone 1AUc1 et 2AU des parcelles situées au lieu-dit « Praz-Ouest ».

Par un jugement du 12 juin 2018, le tribunal administratif de Grenoble, après l’avoir jointe sous le n° 1704300 à dix autres demandes aux fins analogues, a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 13 août 2018 sous le n° 18LY03129, le syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze », M. et Mme F…, M. et Mme A… et la SCI Marion, représentés par la SELARL Itinéraires Avocats Cadoz-Lacroix-Rey-Verne, demandent à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 12 juin 2018 ;
2°) d’annuler la délibération du 31 janvier 2017 approuvant le PLU de Courchevel, ainsi que la décision rejetant leur recours gracieux, à tout le moins en tant qu’elle approuve la délimitation des zones à urbaniser 1AUc1 et 2AU au Praz-Ouest et instaure des secteurs de taille et de capacités d’accueil limitées Ab, Nra, Nl, Ne et Ng ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Courchevel la somme de 5 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :
– le jugement est irrégulier, faute pour le tribunal d’avoir respecté le principe du contradictoire en ne les informant pas du moyen d’ordre public qui a fondé le rejet des requêtes aux points 61, 62 et 63 du jugement ;
– le jugement est irrégulier, faute pour le tribunal d’avoir pris en considération et répondu aux moyens soulevés dans son mémoire du 25 avril 2018 alors que celui-ci a été enregistré avant l’émission de l’avis d’audience ;
– la procédure suivie est entachée d’irrégularité dès lors que des modifications ont été apportées au projet après l’enquête publique sans procéder de celle-ci et en portant atteinte à l’économie générale du projet ;
– le classement du secteur du Praz Ouest en zones à urbaniser 1AUc1 et 2AU ne répond à aucun parti d’urbanisme et procède d’une erreur manifeste d’appréciation ;
– le zonage 1AUc1 du secteur du Praz Ouest, insuffisamment desservi par les voies et réseaux, qui ne prévoit pas d’orientations d’aménagement et de programmation et dont le règlement ne permet pas de satisfaire aux objectifs poursuivis, méconnaît l’article R. 151-20 du code de l’urbanisme et procède d’une erreur manifeste d’appréciation ;
– le zonage 2AU au Praz Ouest est entaché d’erreur manifeste d’appréciation dès lors qu’il recouvre un périmètre excessif, contredit l’inscription des terrains en cause dans les trames verte et bleue du PLU et n’est pas justifié par des besoins et un projet urbain définis ;
– le PLU méconnaît le principe d’urbanisation limitée en l’absence de schéma de cohérence territoriale posé par les articles L. 122-2 ancien et L. 142-2 nouveau du code de l’urbanisme ;
– le PLU méconnaît le principe de préservation des terres nécessaires aux activités agricoles, pastorales et forestières posé par les articles L. 145-3-1 ancien et L. 122-10 nouveau du code de l’urbanisme ;
– les zone et secteurs 2AU au Praz Ouest, UC et 1AUh à Courchevel-Moriond, et 1AUh au Jardin alpin méconnaissent le principe d’urbanisation en continuité posé aux articles L. 145-3 ancien et L. 122-5 nouveau du code de l’urbanisme ;
– l’institution des secteurs Ab, Nra, Nl, Ne et Ng ne satisfait pas aux exigences de l’article L. 151-13 du code de l’urbanisme et n’est pas justifiée dans le rapport de présentation comme l’impose l’article R. 151-2 du même code.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 janvier 2019, la commune de Courchevel, représentée par la SELAS Adamas affaires publiques, conclut au rejet de la requête ou, à titre subsidiaire, à ce que la cour fasse application de l’article L. 600-9 du code de justice administrative, et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

L’instruction a été close le 30 janvier 2019 par une ordonnance du même jour prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Les requérants ont produit un nouveau mémoire enregistré le 20 février 2019.

La SCI de Courcherole, représentée par l’AARPI Frêche et Associés, a produit un mémoire en intervention enregistré le 1er mars 2019.

Par un mémoire enregistré le 25 avril 2019, la commune de Courchevel a répondu à la mesure d’instruction prescrite par la cour en application de l’article R. 613-1-1 du code de justice administrative.

Par un mémoire enregistré le 17 mai 2019, les requérants ont produit leurs observations en réponse à la communication des éléments produits par la commune de Courchevel le 25 avril 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
– les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
– et les observations de Me C… pour les requérants, ainsi que celles de Me B… pour la commune de Courchevel ;

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération du 31 janvier 2017, le conseil municipal de la commune nouvelle de Courchevel a approuvé le plan local d’urbanisme (PLU) de la commune déléguée de Saint-Bon-Tarentaise. Le syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze », M. et Mme F…, M. et Mme A… et la SCI Marion ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler cette délibération ainsi que la décision de rejet de leur recours gracieux. Le syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze » et autres relèvent appel du jugement du 12 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Grenoble, après l’avoir jointe à dix autres requêtes dirigées contre la même délibération, a rejeté leur demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative :  » Lorsque l’affaire est en état d’être jugée, les parties peuvent être informées de la date ou de la période à laquelle il est envisagé de l’appeler à l’audience. Cette information précise alors la date à partir de laquelle l’instruction pourra être close dans les conditions prévues (…) par le dernier alinéa de l’article R. 613-2. (…) « . Aux termes du dernier alinéa de l’article R. 613-2 du même code :  » (…) lorsque la date prévue par l’article R. 611-11-1 est échue, l’instruction peut être close à la date d’émission de l’avis d’audience. Cet avis le mentionne. « .

3. Par un courrier du 22 février 2018 pris en application de l’article R. 611-11-1 cité ci-dessus, le tribunal administratif de Grenoble a indiqué aux parties qu’il était envisagé d’inscrire le dossier à une audience au cours du deuxième trimestre 2018 et que, si celles-ci souhaitaient produire, elles devaient le faire avant le 16 mars 2018, date à compter de laquelle l’instruction pourrait être close par l’émission d’une ordonnance de clôture ou d’un avis d’audience. Pour écarter le mémoire produit par les requérants le 25 avril 2018 comme étant intervenu après clôture de l’instruction, les premiers juges se sont fondés sur la circonstance qu’alors même qu’il avait été diffusé dans l’application Télérecours postérieurement à l’enregistrement de ce mémoire, un avis d’audience mentionnant qu’il valait clôture de l’instruction avait été émis le même jour.

4. Toutefois, pour l’application des dispositions citées ci-dessus des articles R. 611-11-1 et R. 613-2 du code de justice administrative et lorsque la notification de cet avis est faite par le moyen de l’application informatique Télérecours mentionnée à l’article R. 414-1 de ce code, un avis d’audience portant clôture de l’instruction ne saurait être regardé comme ayant été émis avant sa mise à disposition dans cette application. Alors qu’il ressort des pièces du dossier que le mémoire en litige, qui contenait des moyens nouveaux, a été produit avant que l’avis d’audience ne soit mis à disposition des parties dans l’application Télérecours, les requérants sont fondés à soutenir que le jugement qu’ils contestent a été rendu au terme d’une procédure irrégulière et, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre moyen d’irrégularité qui est soulevé, à demander l’annulation du jugement du 12 juin 2018 en ce qu’il statue sur leur demande.

5. Il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par les requérants devant le tribunal administratif de Grenoble.

Sur la légalité de la délibération du 31 janvier 2017 :

En ce qui concerne la participation d’un élu intéressé à l’élaboration et au vote du PLU :

6. Aux termes de l’article L. 2131-11du code général des collectivités territoriales :  » Sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l’affaire qui en fait l’objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires. « . Il résulte de ces dispositions que la participation au vote permettant l’adoption d’une délibération d’un conseiller municipal y ayant un intérêt qui ne se confond pas avec ceux de la généralité des habitants de la commune est de nature à en entraîner l’illégalité. De même, sa participation aux travaux préparatoires et aux débats précédant l’adoption d’une telle délibération est susceptible de vicier sa légalité si le conseiller municipal intéressé a été en mesure d’exercer une influence sur la délibération. S’agissant d’une délibération déterminant des prévisions et règles d’urbanisme applicables dans l’ensemble d’une commune, la circonstance qu’un conseiller municipal intéressé au classement d’une parcelle ait participé aux travaux préparatoires et aux débats précédant son adoption ou à son vote n’est de nature à entraîner son illégalité que s’il ressort des pièces du dossier que, du fait de l’influence que ce conseiller a exercée, la délibération prend en compte son intérêt personnel.

7. Au soutien de leur contestation de la délibération du 31 janvier 2017, les requérants relèvent que la parcelle n° 1362 située à Saint-Bon-le-Haut et appartenant à Mme D…, conseillère municipale qui a participé aux délibérations précédentes du conseil municipal de Courchevel des 29 avril et 10 décembre 2015, a bénéficié d’un classement en zone constructible alors que le projet de plan arrêté envisageait le classement de ce terrain en zone agricole. Toutefois, cette seule circonstance ne suffit pas à établir que, du fait de l’influence particulière qu’aurait exercée Mme D…, qui n’a au demeurant pas participé à son adoption, la délibération en litige aurait pris en compte son intérêt personnel.

En ce qui concerne la convocation et l’information des membres du conseil municipal :

8. Les requérants font valoir qu’il n’est pas justifié de la régularité de la convocation et de l’information des membres du conseil municipal de Courchevel au regard en particulier des exigences des articles L. 2121-10, L. 2121-11 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales lorsque ce conseil s’est réuni le 29 avril 2015 en vue de débattre, conformément aux prévisions de l’article L. 123-9 devenu L. 153-12 du code de l’urbanisme, sur les orientations générales du projet d’aménagement et de développement durables (PADD) de la commune, lorsqu’il s’est réuni le 10 décembre 2015 en vue de tirer le bilan de la concertation et d’arrêter le projet de PLU et, enfin, lorsqu’il s’est réuni le 31 janvier 2017 en vue d’approuver le PLU en litige. Les requérants ne contestent toutefois en rien les éléments circonstanciés produits par la commune de Courchevel dans son mémoire en défense du 22 février 2018 justifiant de la convocation et de l’information régulières de ses élus lors de chacune de ces réunions, en particulier à l’occasion du débat sur le PADD dont la teneur ressort du compte-rendu établi à cette occasion. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne l’affichage régulier des délibérations des 29 avril et 10 décembre 2015 :

9. Les requérants soutiennent également que la délibération approuvant le PLU est intervenue à l’issue d’une procédure irrégulière, faute de justification de l’opposabilité des délibérations du conseil municipal des 29 avril et 10 décembre 2015 déjà mentionnées au point 8, au regard en particulier des exigences de publication des articles L. 2131-1 et R. 2121-11 du code général des collectivités territoriales ainsi que de l’article R. 123-18 du code de l’urbanisme. Ils ne contestent toutefois pas les éléments circonstanciés produits par la commune de Courchevel dans son mémoire en défense du 22 février 2015, en particulier les certificats d’affichage des 9 juin 2015 et 19 janvier 2016 justifiant du caractère exécutoire des délibérations en cause. Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la publication des modalités de l’enquête publique :

10. Les requérants soutiennent que l’arrêté prescrivant l’enquête publique prévu à l’article R. 123-9 du code de l’environnement et l’avis d’enquête mentionné à l’article R. 123-11 de ce code ne font pas mention des informations relatives à la date et au lieu des réunions d’information et d’échange envisagées. Toutefois, et alors que la mention de telles réunions ne doit être faite, en vertu du 6° de l’article R. 123-9 du code de l’environnement, que  » le cas échéant « , il est constant que de telles réunions n’étaient pas envisagées et ne se sont d’ailleurs pas tenues. Par suite, le moyen ne peut qu’être écarté.

En ce qui concerne la modification du projet après l’enquête publique :

11. Aux termes de l’article L. 153-21 du code de l’urbanisme :  » A l’issue de l’enquête, le plan local d’urbanisme, éventuellement modifié pour tenir compte des avis qui ont été joints au dossier, des observations du public et du rapport du commissaire ou de la commission d’enquête, est approuvé par (…) le conseil municipal (…) « . En vertu de ces dispositions, il est loisible à l’autorité compétente de modifier le projet de PLU après l’enquête publique sous réserve que cette modification procède de celle-ci et ne remette pas en cause l’économie générale du projet.

12. Pour soutenir, en premier lieu, que le projet de PLU a été adopté en violation de ces dispositions, les requérants font valoir que diverses modifications qu’ils relèvent ont été apportées au projet de PLU après l’enquête publique et sans procéder de celle-ci. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, en particulier des énonciations du rapport de synthèse établi par la commission d’enquête publique accompagné du tableau récapitulatif que celle-ci a établi, d’une part, que, s’agissant de l’institution d’un secteur UCb, plusieurs observations ont été formulées au cours de l’enquête publique ayant trait au principe comme au contenu d’une réglementation spécifique à la « boucle de Nogentil » et, d’autre part, que la suppression des emplacements réservés n° 5 et 10, la suppression de la zone UC dans le secteur des Chenus et l’institution d’orientations d’aménagement et de programmation pour la zone UH-1AUH située entre le Jardin Alpin et Bellecôte font suite aux réserves émises par les services de l’Etat dans l’avis qu’ils ont rendu sur le projet de PLU le 8 mars 2016.

13. Pour soutenir, en second lieu, que le projet de PLU aurait dû faire l’objet d’une nouvelle enquête publique avant son approbation, les requérants font valoir qu’il a été procédé après l’enquête publique à un nombre important de modifications du projet dont certaines revêtaient un caractère substantiel, en particulier l’assouplissement des règles de stationnement en zone UA, la majoration de la règle de hauteur à Courchevel, la réduction de la zone 1AUc de Saint-Bon, la suppression de la zone 2AU du Laiton ou l’extension de la zone UC dans le secteur du Plantret. Toutefois, contrairement à ce qui est soutenu en termes généraux par les requérants, il ne ressort pas des pièces du dossier que les modifications en cause ont eu pour effet, par leur ampleur ou leur contrariété avec les orientations initialement retenues, de modifier l’économie générale du projet soumis à enquête.

En ce qui concerne la violation du principe d’urbanisation en continuité :

14. Aux termes de l’article L. 122-5 du code de l’urbanisme, relatif à l’aménagement et à la protection de l’espace montagnard :  » L’urbanisation est réalisée en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants (…) « .

15. Si la délibération attaquée classe en zone à urbaniser un ensemble de parcelles d’une superficie approximative de 6 hectares situé, dans le secteur dit du « Praz Ouest », en bordure d’espaces naturels et boisés, tant le secteur 1AUc1 que le secteur 2AU qui en relèvent jouxtent les secteurs bâtis classés en zone urbaine UB et UC qui se trouvent dans la partie ouest de l’ensemble urbanisé d’une vingtaine d’hectares que constitue la station-village de Courchevel-Le Praz en continuité duquel ils se trouvent ainsi. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le classement de ces deux secteurs en zone à urbaniser méconnaît les dispositions précitées de l’article L. 122-5 du code de l’urbanisme.

16. Au soutien de leur contestation, les requérants relèvent également, sans cependant fournir d’autre précision, l’institution de secteurs classés UC et 1AUh situés selon eux en discontinuité de l’existant au lieu-dit Le Belvédère, à Courchevel-Moriond. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le secteur 1AUh en litige, d’une superficie approximative d’un hectare, se situe au nord-ouest et dans la continuité des secteurs bâtis classés en zone urbaine UB et UC qui, en fonction de la configuration des lieux, se sont constitués le long de la route du Belvédère qui les dessert. D’autre part, la zone UC d’une superficie approximative de 0,4 ha située dans les lacets de cette même route du Belvédère a pour sa part été délimitée, après recueil de l’avis favorable de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, en application de l’article L. 122-7 du code de l’urbanisme dont les dispositions dérogent sur ce point aux exigences de l’article L. 122-5 du même code.

17. Les requérants contestent également, au regard de l’exigence d’urbanisation en continuité, la situation des deux secteurs classés en zone d’urbanisation future 1AUh situés au sud du Jardin Alpin. Toutefois, il est constant que le premier de ces secteurs, d’une superficie approximative de 2 500 m² et dont l’ouverture à l’urbanisation est au demeurant conditionnée à la délivrance préalable d’une autorisation au titre des unités touristiques nouvelles, se situe au sud du secteur bâti qu’il jouxte, classé en zone urbaine UH et correspondant aux installations d’un complexe hôtelier. Le second de ces secteurs, dit « du Hameau », situé au sud et dans le prolongement du Jardin Alpin, a, pour sa part et en tout état de cause, fait l’objet, par arrêté du préfet coordonnateur du massif des Alpes du 14 février 2014, d’une autorisation au titre des unités touristiques nouvelles que les dispositions de l’article L. 122-17 du code de l’urbanisme soustraient à l’exigence de continuité posée à l’article L. 122-5 de ce code.

En ce qui concerne la préservation des terres nécessaires aux activités agricoles, pastorales et forestières :

18. Aux termes de l’article L. 122-10 du code de l’urbanisme, relatif à l’aménagement et à la protection de l’espace montagnard :  » Les terres nécessaires au maintien et au développement des activités agricoles, pastorales et forestières, en particulier les terres qui se situent dans les fonds de vallée, sont préservées. La nécessité de préserver ces terres s’apprécie au regard de leur rôle et de leur place dans les systèmes d’exploitation locaux. Sont également pris en compte leur situation par rapport au siège de l’exploitation, leur relief, leur pente et leur exposition « . Ces dispositions ne sauraient être regardées comme interdisant de classer des terres agricoles dans des zones réservées à des activités économiques autres que l’agriculture ou à l’habitat, mais elles impliquent de n’admettre l’urbanisation des terres agricoles que pour satisfaire des besoins justifiés et dans une mesure compatible avec le maintien et le développement des activités agricoles, pastorales et forestières.

19. Les requérants soutiennent que le classement en zone à urbaniser et sur près de 6 hectares de l’ensemble de parcelles situé à l’ouest de la station de Courchevel-Le Praz n’est pas justifié au regard des exigences de l’article L. 122-10 du code de l’urbanisme. Ils font pour cela valoir, outre l’enjeu paysager que représente la préservation des terres agricoles ainsi que les avis réservés émis par la chambre d’agriculture et l’Institut national de l’origine et de la qualité sur le projet qui leur était soumis, que les bases de données font apparaître une exploitation effective des parcelles concernées comme prairies permanentes, ainsi que la faiblesse de la surface agricole utile par rapport au territoire communal, l’importance que revêt la préservation des prairies pour l’exploitation laitière et, dans la perspective des études menées pour l’élaboration du schéma de cohérence territoriale (SCoT) « Tarentaise Vanoise », l’identification du secteur en cause par le rapport de présentation du PLU parmi les espaces agricoles d’importance. Il ressort toutefois des pièces du dossier, en particulier des développements que le rapport de présentation réserve en ses pages 53 à 64 à la situation de l’agriculture dans la commune, qu’abstraction faite des alpages dont l’exploitation est marquée par un certain dynamisme, les prairies permanentes constituent l’essentiel de la surface agricole utile communale, qui dépasse 1 000 hectares, et que la commune est confrontée à un phénomène de déprise agricole, en particulier pour les prés de fauche situés à proximité des hameaux, qui a d’ailleurs amené la commune à financer l’entretien des prés de pâture afin de lutter contre la progression des friches. Dans ces conditions, il n’apparaît pas que le rôle et la place des terrains dont font état les requérants dans le système d’exploitation local faisaient obstacle à leur classement en zone à urbaniser. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le classement qu’ils contestent a été décidé en méconnaissance des dispositions précitées de l’article L. 122-10 du code de l’urbanisme.

En ce qui concerne la méconnaissance de l’article L. 142-4 du code de l’urbanisme :

20. Aux termes de l’article L. 142-4 du code de l’urbanisme :  » Dans les communes où un schéma de cohérence territoriale n’est pas applicable : / 1° Les zones à urbaniser délimitées après le 1er juillet 2002 ainsi que les zones naturelles, agricoles ou forestières d’un plan local d’urbanisme ou d’un document en tenant lieu ne peuvent être ouvertes à l’urbanisation à l’occasion de l’élaboration ou d’une procédure d’évolution d’un document d’urbanisme. « .

21. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, l’ouverture à l’urbanisation doit, pour l’application en l’espèce des dispositions précitées de l’article L. 142-4 du code de l’urbanisme, s’apprécier au regard des seules prévisions du PLU approuvé le 17 novembre 2011 et non de celles du plan d’occupation des sols antérieur approuvé en 1996 et remis un temps en vigueur du fait de l’annulation de la délibération du 17 novembre 2011 par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 avril 2014 qui a été annulé par un arrêt de la cour du 7 mars 2017. Si les requérants font valoir qu’une partie des terrains du secteur du « Praz Ouest » que la délibération critiquée classe en zone à urbaniser 2AU ne pouvait légalement faire l’objet d’un tel classement avant l’adoption du SCoT dès lors que ces terrains relevaient précédemment d’une zone naturelle, il ressort toutefois des pièces du dossier que le règlement de cette zone 2AU n’y autorise en l’état que les changements de destination, l’adaptation, la réfection et l’extension limitée des constructions existantes, et subordonne l’ouverture à l’urbanisation de ce secteur à une évolution du PLU. Dans ces conditions, la délibération critiquée ne saurait sur ce point être regardée comme ouvrant une zone naturelle à l’urbanisation au sens de l’article L. 142-4 du code de l’urbanisme. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté.

En ce qui concerne la violation de l’article L. 151-13 du code de l’urbanisme :

22. Aux termes de l’article L. 151-13 du code de l’urbanisme :  » Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions ; / 2° Des aires d’accueil et des terrains familiaux locatifs destinés à l’habitat des gens du voyage (…) ; / 3° Des résidences démontables constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs. / Il précise les conditions de hauteur, d’implantation et de densité des constructions, permettant d’assurer leur insertion dans l’environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. (…) « .

23. Le syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze » et autres exposent que le PLU qu’ils contestent institue en zone agricole un secteur Ab où sont autorisées l’extension des constructions à usage d’habitation ou la construction d’annexes, ainsi que divers secteurs de zone naturelle relatifs aux restaurants d’altitude pour le secteur Nra, à l’accueil de constructions et d’installations de loisirs pour le secteur Nl qui fait également l’objet d’orientations d’aménagement et de programmation, à l’accueil d’équipements incompatibles avec le voisinage des zones habitées pour le secteur Ne et à l’accueil des constructions et aménagements destinés au stationnement des résidents pour le secteur Ng. Ils soutiennent qu’eu égard à leur superficie, qui représente au total près de 40 ha dont près de 13 ha pour le seul secteur Nl situé dans le secteur du Praz, et au caractère lacunaire du règlement qui leur est applicable, l’institution de ces secteurs, qui n’est pas justifiée dans le rapport de présentation, méconnaît le caractère exceptionnel et les exigences de limitation de taille et de capacité d’accueil posés par l’article L. 151-13 du code de l’urbanisme.

24. Toutefois, en vertu des dispositions des articles L. 151-11 et L. 151-12 du code de l’urbanisme, sous les conditions que fixent ces articles et en dehors même des secteurs dits « de taille et de capacité d’accueil limités » mentionnés à l’article L. 151-13 de ce code dont les requérants invoquent la violation, le règlement des zones agricoles, naturelles ou forestières d’un PLU peut, en principe et comme en l’espèce s’agissant des secteurs Ab, Ne et Nl, autoriser les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs ou prévoir que les bâtiments d’habitation puissent, dans ces mêmes zones, faire l’objet d’extensions ou d’annexes. Alors que, contrairement à ce qui est affirmé, le rapport de présentation du PLU en litige explicite, en particulier en ses pages 38 à 40, les motifs ayant présidé à l’institution des secteurs en débat, dont la réglementation vise en particulier, s’agissant des secteurs Ng, à limiter la hauteur des constructions autorisées et, s’agissant des secteurs Nra, à encadrer les possibilités d’extension des établissements concernés, il ressort des écritures mêmes des requérants que les secteurs Nra et Ng du PLU de Courchevel couvrent respectivement moins de 2 et 0,7 hectares. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le PLU en litige méconnait l’article L. 151-13 du code de l’urbanisme doit être écarté.

En ce qui concerne le classement des terrains situés dans le secteur « Praz Ouest » :

25. Aux termes de l’article L. 151-8 du code de l’urbanisme :  » Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d’utilisation des sols permettant d’atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 « . En vertu de l’article L. 151-9 de ce code :  » Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger (…) « . Aux termes de l’article R. 123-6 alors en vigueur du code de l’urbanisme dont la teneur est désormais reprise à l’article R. 151-20 de ce code :  » Les zones à urbaniser sont dites « zones AU ». Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l’urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d’eau, d’électricité et, le cas échéant, d’assainissement existant à la périphérie immédiate d’une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l’ensemble de cette zone, les orientations d’aménagement et de programmation et le règlement définissent les conditions d’aménagement et d’équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d’une opération d’aménagement d’ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d’aménagement et de programmation et le règlement. Lorsque les voies publiques et les réseaux d’eau, d’électricité et, le cas échéant, d’assainissement existant à la périphérie immédiate d’une zone AU n’ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l’ensemble de cette zone, son ouverture à l’urbanisation peut être subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d’urbanisme. « .

26. La délibération attaquée classe en zone à urbaniser un ensemble de parcelles d’une superficie approximative de 6 hectares situé, dans le secteur dit « Praz Ouest », sur laquelle est également instituée la servitude d’inconstructibilité mentionnée au 5° de l’article L. 151-41 du code de l’urbanisme. Alors que la partie orientale de ce secteur est classée en zone 1AUc1, que le règlement définit comme un secteur à urbaniser à court et moyen terme à dominante de chalets, le reste de ce secteur fait l’objet d’un classement en zone 2AU du PLU, que son règlement définit comme un secteur d’extension de l’urbanisation à moyen et long terme, à dominante de bâtiments collectifs et/ou de chalets, dont les voies publiques et réseaux ne sont pas suffisants pour assurer la desserte de l’ensemble des constructions susceptibles d’y être édifiées et dont l’ouverture à l’urbanisation est subordonnée à une évolution du PLU.

27. D’une part, il appartient aux auteurs d’un PLU de déterminer le parti d’aménagement à retenir pour le territoire concerné par ce plan en tenant compte de la situation existante et des perspectives d’avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu’au cas où elle est entachée d’une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts. D’autre part, et au regard du caractère global de l’analyse à laquelle il doit être procédé pour déterminer si, à l’échelle du territoire couvert par le PLU, son règlement contrarie les orientations générales et objectifs que les auteurs du PLU ont définis dans le PADD, compte tenu de leur degré de précision, l’inadéquation d’une disposition du règlement du PLU à une orientation ou un objectif du PADD ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l’existence d’autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

S’agissant de la zone 1AUc1 :

28. Au soutien de leur demande d’annulation du PLU en litige, les requérants contestent en premier lieu la légalité du classement en zone 1AUc1 de la partie orientale du secteur « Praz Ouest ».

29. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le classement en litige répond aux objectifs que les auteurs du PLU se sont donnés et que précise le PADD, d’une part et au titre de l’axe n° 1 du PADD visant à conforter et diversifier le positionnement touristique de la commune, de promouvoir le secteur du Praz comme pôle de vie à proximité des secteurs de loisirs, et, d’autre part et au titre de l’axe n° 2 du PADD visant à répondre aux besoins de la population permanente, actuelle et future, de favoriser et de soutenir le développement de l’habitat permanent en y privilégiant des formes urbaines d’habitat intermédiaire permettant d’assurer à la fois une certaine densité et le maintien de la silhouette du village.

30. Il ressort également du dossier que le secteur en cause, qui s’insère dans l’ensemble urbanisé de la station de Courchevel-Le Praz en bordure duquel il se trouve, est desservi par la route de la Fromagerie, qui rejoint la route départementale n° 98 en entrée de station, ainsi que, comme le font apparaître les plans des réseaux à l’échelle 1/5000e figurant en annexe au PLU en litige dont les indications sont confirmées par les plans et photographies annotés produits par la commune, par les réseaux publics de distribution d’eau et d’évacuation des eaux usées. Il ne ressort pas du dossier, en particulier des documents photographiques produits par les parties et faisant apparaître les dimensions de la voie publique, que les caractéristiques de ces voies et réseaux ne permettraient pas d’assurer dans des conditions suffisantes la desserte du secteur en litige, d’une superficie approximative de 0,8 ha et où la construction d’une vingtaine de logements est envisagée. Alors que les requérants ne sauraient en tout état de cause se prévaloir de l’obligation faite aux auteurs du PLU de prévoir des OAP et résultant selon eux de l’article R. 151-20 du code de l’urbanisme dans sa rédaction issue du décret n° 2015-1783 du 28 décembre 2015, qui n’est pas applicable en l’espèce, il ne ressort pas davantage du dossier que les prescriptions du règlement de la zone en question, en particulier celles de son article 1AU2 renvoyant à l’article UC2 et n’excluant ainsi pas la réalisation d’autres constructions que des constructions à usage d’habitation, ou encore les règles d’implantation par rapport aux emprises publiques, les règles de hauteur ou l’exigence d’une proportion minimale d’espaces libres, feraient obstacle au respect des objectifs que se sont fixés les auteurs du PLU en ce qui concerne l’urbanisation de ce secteur, laquelle devra se faire dans le cadre d’une opération d’ensemble, ou la préservation des possibilités d’y pratiquer le ski de fond.

31. Dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les choix opérés par les auteurs du PLU de Courchevel en approuvant le classement 1AUc1 qu’ils critiquent ne traduisent aucun parti d’urbanisme, contrarient les orientations générales et objectifs que les auteurs du PLU ont définis dans le PADD ou méconnaissent les dispositions citées ci-dessus de l’article R. 123-6 devenu R. 151-20 du code de l’urbanisme. Les circonstances dont les requérants font état ne suffisent pas davantage pour considérer que ces choix procèdent d’une erreur manifeste d’appréciation.

S’agissant de la zone 2AU :

32. Le syndicat des copropriétaires de la résidence « Le lac-La Loze » et autres contestent le classement en zone 2AU d’un ensemble de terrain, d’une superficie approximative de 5 hectares, également situé dans le secteur du « Praz Ouest ». Ce classement subordonne l’ouverture à l’urbanisation de ce secteur à une évolution du PLU et y institue la servitude de projet urbain mentionnée au 5° de l’article L. 151-41 du code de l’urbanisme pour n’y autoriser en l’état que les changements de destination, l’adaptation, la réfection et l’extension limitée des constructions existantes.

33. Ces choix répondent aux objectifs que les auteurs du PLU se sont donnés et que précise le PADD, d’une part et dans la perspective de son « axe n° 1 » visant à conforter et diversifier le positionnement touristique de la commune, de promouvoir le secteur du Praz comme pôle de vie à proximité des secteurs de loisirs, et, d’autre part et dans la perspective de son « axe n° 2″ visant à répondre aux besoins de la population permanente, actuelle et future, de favoriser et de soutenir le développement de l’habitat permanent, de créer des conditions favorables pour l’implantation de nouvelles activités autres que touristiques ou d’accompagner la dynamique urbaine du Praz.

34. Les auteurs du PLU ont ainsi entendu, comme le traduisent en particulier les orientations générales n° 7 de l’axe n° 2 du PADD, assurer l’organisation, la composition urbaine à venir et l’échelonnement de l’urbanisation de la commune, dont les objectifs en termes de développement de la capacité d’hébergement sont définis à un horizon de quinze années, en subordonnant l’ouverture à l’urbanisation de ce secteur, identifié comme présentant un enjeu fort pour le développement de la commune, à la réalisation préalable d’une étude d’aménagement d’un nouveau quartier en front de neige prenant en compte les différentes dimensions du projet urbain en termes de formes et fonctions urbaines, de déplacements ou de prise en compte de l’environnement et des paysages. Alors que le secteur en cause, bordé par la route départementale n° 98 et la route de Freney, se situe à proximité de la zone Nl du front de neige du Praz, pour laquelle des OAP portant sur l’implantation d’équipements de loisirs ont également été définies, et dans la continuité de l’ensemble urbanisé de la station de Courchevel-Le Praz en bordure duquel il se trouve, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les choix opérés par les auteurs du PLU de Courchevel en approuvant le classement 2AU qu’ils critiquent ne traduisent aucun parti d’urbanisme, sont contradictoires et contrarient les orientations générales et objectifs que les auteurs du PLU ont définis dans le PADD. Compte tenu de ce qui précède ainsi que de ce qui a été dit au point 19, et alors que, comme le rappelle l’article R. 123-6 du code de l’urbanisme alors en vigueur, les secteurs à caractère naturel peuvent légalement être classés en zone à urbaniser, les circonstances dont les requérants font état, tirées notamment de l’identification des terrains en cause par le PLU parmi les prairies montagnardes présentant des enjeux agricoles, paysagers et écologiques ne suffisent pas davantage pour considérer que ces choix procèdent d’une erreur manifeste d’appréciation.

En ce qui concerne la violation de l’article L. 151-41 du code de l’urbanisme :

35. Aux termes de l’article L. 151-41 du code de l’urbanisme :  » Le règlement peut délimiter des terrains sur lesquels sont institués : / (…) / 5° Dans les zones urbaines et à urbaniser, des servitudes interdisant, sous réserve d’une justification particulière, pour une durée au plus de cinq ans dans l’attente de l’approbation par la commune d’un projet d’aménagement global, les constructions ou installations d’une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement. Ces servitudes ne peuvent avoir pour effet d’interdire les travaux ayant pour objet l’adaptation, le changement de destination, la réfection ou l’extension limitée des constructions existantes. (…) « .

36. Ainsi qu’il a été dit, la délibération en litige institue sur les zones 1AUc1 et 2AU du secteur de Praz Ouest la servitude d’inconstructibilité mentionnée au 5° de l’article L. 151-41 du code de l’urbanisme pour n’y autoriser en l’état que les changements de destination, l’adaptation, la réfection et l’extension limitée des constructions existantes. Dès lors que ne sont pas prévues d’autres possibilités de construire que celles qu’imposent les termes mêmes de la loi, le règlement de ces zones n’avait pas à définir le seuil dont cet article L. 151-41 prévoit la fixation. Par suite, le moyen tiré du défaut de fixation d’un tel seuil ne peut qu’être écarté.

37. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation de la délibération du conseil municipal de Courchevel du 31 janvier 2017 approuvant le PLU de la commune déléguée de Saint-Bon-Tarentaise.

Sur les frais liés au litige :

38. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il en soit fait application à l’encontre de la commune de Courchevel, qui n’est pas partie perdante. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge solidaire des requérants le versement à la commune de Courchevel de la somme globale de 2 000 euros au titre des frais qu’elle a exposés.

DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 12 juin 2018 est annulé en tant qu’il statue sur la demande n° 1704300 du syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze » et autres.
Article 2 : La demande du syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze » et autres devant le tribunal administratif de Grenoble et le surplus des conclusions de leur requête d’appel sont rejetés.
Article 3 : Les requérants verseront solidairement à la commune de Courchevel la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au syndicat des copropriétaires de la résidence « Le Lac-La Loze », premier dénommé pour l’ensemble des requérants, et à la commune de Courchevel.

Accident de VTT/ Faute de police/ Responsabilité/ Appréciation des préjudices

CAA de LYON

N° 17LY00798
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. POMMIER, président
Mme Cécile COTTIER, rapporteur
Mme CARAËS, rapporteur public
SARL CABINET LAURENT FAVET, avocat

lecture du jeudi 9 mai 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

________________________________________

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le tribunal administratif de Grenoble a déclaré, par jugement du 12 novembre 2013, la commune de Flumet responsable de 90% des conséquences dommageables de l’accident de VTT subi par M.E…, survenu le 8 août 2006, et a ordonné une expertise aux fins d’évaluation des préjudices.

Le tribunal administratif de Grenoble, par jugement du 27 mai 2014, a ordonné un complément d’expertise.

M. E…a demandé au tribunal administratif de Grenoble, dans le dernier état de ses écritures le 13 juillet 2016, la condamnation de la commune de Flumet à lui verser :
– 149 926 euros en réparation de ses préjudices ;
– 5 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
La caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Savoie a demandé au tribunal administratif de Grenoble, dans le dernier état de ses écritures le 8 septembre 2016, la condamnation de la commune de Flumet à lui verser une somme de 82 789,18 euros en remboursement de ses prestations ainsi que l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Par jugement n° 1002144 du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la commune de Flumet à verser à M. E… une somme de 112 351 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2010. Les intérêts échus le 22 janvier 2011 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date seront capitalisés pour produire eux-mêmes intérêts. Le tribunal administratif a également condamné la commune à verser à la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Savoie une somme de 74 510 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2013 en remboursement de ses débours et une somme de 1 047 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Le tribunal administratif de Grenoble a également mis à la charge de la commune de Flumet les frais d’expertise ainsi qu’une somme de 1 500 euros à verser à M. E…au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Il a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 février 2017 et un mémoire enregistré le 20 décembre 2017, la commune de Flumet représentée par la SELARL Cabinet Laurent Favet, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant que le tribunal administratif de Grenoble a alloué à M. E…la somme de 112 351 euros et de fixer l’indemnisation due à 77 321 euros et à titre subsidiaire à 80 021 euros ;

2°) de rejeter la demande formulée par M. E…au titre de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

La commune de Flumet soutient que :
– la somme allouée par les premiers juges au titre du déficit fonctionnel temporaire est excessive dès lors que l’expert n’a pas retenu de déficit fonctionnel temporaire à compter du 25 octobre 2008 ; le taux journalier doit être fixé à 16,50 euros pour une incapacité temporaire totale ; une somme maximale de 11 531 euros devra lui être allouée ;
– la somme allouée par les premiers juges au titre des souffrances endurées évaluées par l’expert à 4,5 sur une échelle de 7 est excessive au regard de la jurisprudence ; compte tenu du taux de responsabilité de 90%, une somme maximale de 7 920 euros devra lui être allouée ;
– la somme allouée par les premiers juges au titre du déficit fonctionnel permanent évalué à 32 % est excessive au regard de la jurisprudence et de son âge de consolidation (33 ans au 13 mai 2010) ; compte tenu du taux de responsabilité de 90%, une somme maximale de 56 250 euros devra lui être allouée ;
– la somme allouée par les premiers juges au titre du préjudice esthétique permanent évalué à 2 sur une échelle de 7 est excessive au regard de la jurisprudence ; compte tenu du taux de responsabilité de 90%, une somme maximale de 1 620 euros devra lui être allouée ;
– la somme allouée par les premiers juges au titre du préjudice d’agrément est excessive au regard de la jurisprudence et n’est pas justifiée ; M. E…n’établit pas avoir dû abandonner la pratique du ski de haut niveau et la compétition à la suite de cet accident ; compte tenu du taux de responsabilité de 90% la somme due devra être limitée à 2 700 euros dès lors qu’il peut pratiquer le ski et a pu reprendre une activité cycliste ;

Par des mémoires enregistrés les 8 août 2017 et 15 janvier 2018, M.E…, représenté par MeB…, demande à la cour de rejeter la requête de la commune de Flumet et par la voie de conclusions en appel incident demande que les sommes lui étant dues à raison de l’accident du 8 août 2006 soient portées à un montant de 149 855 euros et soient assorties des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2010 et de la capitalisation des intérêts à compter du 22 janvier 2011. Il formule également des conclusions tendant à ce que les frais d’expertise soient mis à la charge de la commune de Flumet et à ce que ladite commune lui verse en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 3 000 euros dans le cadre de l’instance d’appel.

Il soutient que :
– la commune de Flumet se borne à demander une minoration des sommes allouées en première instance sans argumentation étayée ;
– c’est à bon droit que le tribunal administratif lui a alloué 15 394,50 euros au titre de son déficit temporaire compte tenu des éléments mentionnés par l’expert, de la date de consolidation de son état de santé au 13 mai 2010, et du taux de 32% de déficit permanent constaté au 13 mai 2010 ; sa demande de 22 euros par jour où il a subi une incapacité totale n’est pas excessive ;
– l’expert a sous-évalué les souffrances endurées en fixant le taux à 4,5 sur une échelle de 7 dès lors qu’il a dû subir six interventions chirurgicales sérieuses entre le 8 août 2006 et le 13 mai 2008 et a souffert d’importantes souffrances psychologiques ; il a fait l’objet d’une assistance et d’un traitement psychologique avant consolidation et est suivi après consolidation sur le plan psychologique par le centre ressources des personnes cérébro-lésées ;
– c’est à bon droit que le tribunal administratif lui a alloué une somme de 75 960 euros pour son déficit fonctionnel permanent et de 4 500 euros pour son préjudice esthétique permanent ;
– il a subi un important préjudice d’agrément du fait de cet accident car il a dû interrompre son activité de ski de haut niveau et notamment de ski alpin Freeride pour lequel il a obtenu plusieurs récompenses dont certaines en 2003 ; il ne peut plus pratiquer le cyclisme et notamment le VTT à haut niveau et se borne à utiliser une bicyclette de ville pour de courts déplacements ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– la loi n° n°91-674 du 10 juillet 1991 ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :

– le rapport de Mme Cottier, premier conseiller ;
– les conclusions de Mme Caraës, rapporteur public ;
– et les observations de Me D…pour la commune de Flumet ;
Considérant ce qui suit :
1. M. E…a fait une chute de vélo le 8 août 2006 alors qu’il circulait sur l’itinéraire de VTT du  » Diamant vert « , sur la piste dite du  » signal du Sac  » située sur le territoire de la commune de Flumet. Le tribunal administratif de Grenoble, par jugement du 12 novembre 2013 devenu définitif, a retenu une faute du maire dans l’exercice de ses pouvoirs de police engageant la responsabilité de la commune de Flumet, en limitant toutefois la part de responsabilité de cette dernière à 90% du fait d’une imprudence fautive de M.E…. Suite aux expertises avant-dire-droit diligentées par le tribunal administratif de Grenoble aux fins d’évaluation des préjudices de M. E…en lien direct avec cet accident, le tribunal, par jugement du 20 décembre 2016, a condamné la commune de Flumet à lui verser une somme de 112 351 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2010 et leur capitalisation à compter du 22 janvier 2011. Le tribunal administratif de Grenoble a également condamné la commune de Flumet à verser à la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Savoie une somme de 74 510 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 décembre 2013 et une somme de 1 047 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. La commune de Flumet fait appel du jugement du 20 décembre 2016 en tant qu’il fixe à 112 351 euros la somme due à M. E…et demande la minoration des sommes devant être versées en réparation des préjudices subis par ce dernier. M. E…conclut au rejet de la requête et par la voie de conclusions en appel incident demande que les sommes lui étant dues soient portées, compte tenu du pourcentage de responsabilité de 90% qui incombe à la commune, à un montant de 149 855 euros.
Sur l’évaluation des préjudices :

S’agissant des préjudices temporaires :

En ce qui concerne le déficit fonctionnel temporaire :
2. Il résulte de l’instruction et notamment des différentes expertises réalisées dans le cadre des jugements avant-dire-droit que la consolidation de l’état de santé de M. E…doit être fixée au 13 mai 2010, date à laquelle son taux de déficit fonctionnel permanent a été évalué à 32%, taux non contesté par les parties. Pour la période précédant la consolidation, l’expert, le DrA…, a précisé, sans être contredit, que M. E…a souffert d’un déficit fonctionnel temporaire total du 8 août 2006 au 24 août 2008 et d’un déficit partiel de 50% du 25 août 2008 au 25 octobre 2008. Compte tenu des constats médicaux présents au dossier et du taux de déficit fonctionnel permanent de 32% évalué au 13 mai 2010, les premiers juges ont, à bon droit, retenu que M. E…a souffert d’un déficit fonctionnel temporaire décroissant de 50% à 32% entre le 26 octobre 2008 et le 13 mai 2010. Au vu des éléments médicaux attestant de l’importance de son traumatisme facial avec perte de connaissance, des opérations chirurgicales pratiquées aux fins de réduction des fractures faciales puis d’amélioration de sa vision, des souffrances endurées lors de telles opérations s’étant succédé entre août 2006 et mai 2008 et des soins post-opératoires induits, il y a lieu d’évaluer le préjudice ainsi subi par M. E…entre le 8 août 2006 et le 24 août 2008 à 18 euros par jour soit une somme de 13 464 euros. Pour la période allant du 25 août 2008 au 25 octobre 2008, il y a lieu d’estimer ce préjudice à hauteur de 558 euros. Pour la période comprise entre le 26 octobre 2008 et le 13 mai 2010, il sera fait une juste appréciation de l’indemnité due en la fixant sur la base d’un taux de déficit moyen de 40% à 4 060 euros. Le montant de ce chef de préjudice ainsi calculé s’élève à 18 082 euros. Compte tenu de la part de responsabilité de la commune fixée à 90%, la commune de Flumet versera à M. E…la somme arrondie de 16 274 euros.
En ce qui concerne les souffrances endurées :
3. La commune de Flumet se borne à soutenir que compte tenu du niveau de 4,5 sur une échelle de 7 retenu dans le dernier état des expertises, à savoir celle du DrA…, le montant d’indemnisation fixé par les premiers juges à hauteur de 15 000 euros est excessif. M. E…fait valoir que l’expert a insuffisamment estimé ses souffrances notamment psychologiques, lesquelles ont imposé un traitement et un suivi spécialisé avant et après consolidation et que ses souffrances doivent être indemnisées à hauteur de 40 000 euros.
4. En l’espèce, compte tenu des pièces médicales au dossier relatives aux fractures dont il a souffert et des opérations induites dont plusieurs interventions ophtalmologiques entre août 2006 et mai 2008 et des évaluations neuro psychologiques antérieures à la consolidation faisant état de troubles psychologiques et de troubles du comportement en lien direct avec l’accident en cause et emportant des conséquences négatives importantes sur sa vie personnelle et familiale, il ne résulte pas de l’instruction que les premiers juges aient sous-évalué ou surévalué les souffrances physiques et psychologiques de M. E…en estimant ce chef de préjudice à 15 000 euros. Compte tenu du pourcentage de responsabilité de 90% incombant à la commune de Flumet, il y a lieu de mettre à sa charge une somme de 13 500 euros à verser à M. E….
S’agissant des préjudices permanents :

En ce qui concerne le déficit fonctionnel permanent :

5. Il résulte de l’instruction que pour fixer le taux de déficit permanent à 32% le Dr A… a retenu que M. E…reste atteint d’une diplopie légère, d’un défaut du regard, d’une déficience en larmes, de troubles de la vision latérale,  » de modification de la statique palpébrale avec l’épicanthus droit « , d’une hypoacousie gauche, d’acouphènes et de troubles de la sensibilité cutanée. Il résulte également de l’instruction et notamment des pièces produites en appel par M. E…que ce dernier, outre les séquelles physiques constatées par le DrA…, a fait l’objet, après sa consolidation, d’un suivi psychologique régulier auprès du centre  » Ressources des personnes cérébro-lésées  » directement en lien avec les conséquences de cet accident. Dans les circonstances de l’espèce, compte tenu de l’âge de l’intéressé (33 ans à la date de la consolidation), des séquelles dont il reste atteint, et en l’absence d’élément propre à la situation de M. E…apporté par la requérante de nature à établir que les premiers juges auraient surévalué l’indemnisation de ce chef de préjudice en l’estimant à 84 400 euros, il y a lieu de maintenir ce montant. Compte tenu du pourcentage de responsabilité de 90% mis à la charge de la commune de Flumet, la somme devant être versée par celle-ci à M. E…s’élève à 75 960 euros.
En ce qui concerne le préjudice esthétique permanent :
6. Il résulte de l’instruction que M. E…reste affecté d’un affaissement de la paupière supérieure droite, d’un épicanthus de l’angle interne droit, de cicatrices sur la face et le crâne, éléments qui sont de nature à établir, comme le soutient l’intimé, que la cotation de l’expert à hauteur de 2 sur une échelle de 7 est sous-évaluée. Dans les circonstances de l’espèce, il sera fait une juste appréciation de telles séquelles esthétiques permanentes en maintenant le montant de 5 000 euros fixé par les premiers juges qui n’apparait pas sous-évalué ou surestimé Après application du pourcentage de responsabilité de 90%, la somme due par la commune de Flumet à M. E…s’établit à 4 500 euros.
En ce qui concerne le préjudice d’agrément :
7. S’il résulte de l’instruction que M. E…a pu reprendre une activité de ski et peut utiliser une bicyclette de ville, il n’est pas contesté qu’il n’est plus en capacité depuis son accident de pratiquer le VTT et le ski de type freeride à haut niveau. Il résulte également de l’instruction et notamment d’une attestation établie en 2016 et d’un certificat médical de juin 2017 que, du fait de sa diplopie, M. E…ne peut plus pratiquer l’escalade. Il est aussi établi par les articles de presse figurant au dossier et relatifs à une compétition gagnée en 2003 et les relevés de résultats de la fédération française de ski qu’avant son accident M. E…participait à de nombreuses compétitions de ski de haut niveau et a dû y renoncer du fait de cet accident. Dans de telles circonstances, et la commune de Flumet n’apportant pas d’élément en appel susceptible de démontrer que les premiers juges auraient fait une inexacte appréciation du préjudice d’agrément subi par M. E…en arrêtant celui-ci à la somme de 5 000 euros, il y a lieu de maintenir cette somme. Compte tenu du pourcentage de responsabilité de 90%, la somme devant être versée par la commune de Flumet à M. E…au titre de chef de préjudice s’élève à 4 500 euros.
8. Il résulte de tout ce qui précède que sur la base du pourcentage de responsabilité de 90% fixé par le tribunal administratif, la commune de Flumet doit être condamnée à verser à M. E… une somme totale de 114 734 euros. Par suite, la commune de Flumet n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Grenoble l’a condamnée à verser une somme de 112 351 euros à M.E…. Ce dernier est seulement fondé à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Grenoble a limité à 112 351 euros la somme devant lui être versée par la commune de Flumet.
Sur les intérêts et leur capitalisation :
9. Il est constant que le conseil de M. E…a adressé à la commune de Flumet le 20 janvier 2010 une lettre recommandée avec accusé de réception, tendant à l’indemnisation des préjudices subis à raison de cet accident, laquelle a été reçue par ladite commune le 22 janvier 2010. Les intérêts au taux légal doivent donc courir à compter de cette date.
10. La capitalisation des intérêts a été demandée pour la première fois devant le tribunal administratif le 18 mai 2010. A cette date, il n’était pas dû au moins une année d’intérêts. Par suite, les intérêts échus le 22 janvier 2011 doivent être capitalisés à cette date pour produire eux-mêmes intérêts et à chaque échéance ultérieure.
Sur les frais d’expertise :
11. Les frais des expertises ordonnées par les jugements avant dire droit des 12 novembre 2013 et 27 mai 2014, taxés et liquidés pour un montant total de 1 725 euros sont mis à la charge définitive de la commune de Flumet.
Sur les frais liés au litige :
12. Contrairement à ce que soutient la commune de Flumet, il ne résulte pas de l’instruction que M. E…ait formulé des conclusions au titre de l’article 37 de la loi n° 91-674 du 10 juillet 1991. Dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Flumet le versement à M. E…de la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Flumet est rejetée.
Article 2 : La somme de 112 351 euros que la commune de Flumet a été condamnée à verser à M .E… par le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 20 décembre 2016 est portée à 114 734 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2010 avec capitalisation des intérêts au 22 janvier 2011 et à chaque échéance annuelle ultérieure.

Article 3 : Les frais d’expertise taxés et liquidés pour un montant de 1 725 euros sont mis à la charge définitive de la commune de Flumet.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 20 décembre 2016 est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : La commune de Flumet versera, dans le cadre de l’instance d’appel, une somme de 1 500 euros à M. E…au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C… E…, à la commune de Flumet, à la caisse primaire d’assurance maladie de la Loire et à la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Savoie.

Régies de RM/ Pas de chômage partiel avant la loi du 28/12/2016

CAA de LYON

N° 18LY03336
Inédit au recueil Lebon
5ème chambre – formation à 3
M. CLOT, président
M. Jean-Pierre CLOT, rapporteur
M. LAVAL, rapporteur public
SELARL CAP – ME MOLLION ET ME SENEGAS, avocat

lecture du lundi 6 mai 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

________________________________________

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat mixte Savoie Grand Revard a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la décision du 8 janvier 2016 par laquelle le préfet de la Savoie lui a refusé le bénéfice du dispositif d’activité partielle pour la période du 4 janvier au 5 février 2016 et la décision du 16 mars 2016 par laquelle le ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a rejeté son recours contre ce refus.

Par un jugement n° 1602857 du 29 juin 2018, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 août 2018, le ministre du travail demande à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 juin 2018 ;
2°) de rejeter la demande présentée par le syndicat mixte Savoie Grand Revard devant le tribunal administratif.

Il soutient que le syndicat mixte Savoie Grand Revard, s’il gère un service public industriel et commercial, ne peut prétendre au bénéfice du dispositif de l’activité partielle prévue à l’article L. 5122-1 du code du travail en raison de sa qualité d’établissement public administratif.

Par un mémoire enregistré le 12 février 2019, le syndicat mixte Savoie Grand Revard, représenté par Me Mollion, avocat, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l’État d’une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que, comme l’a jugé le tribunal administratif, la régie de gestion des remontées mécaniques qu’il exploite, qui gère un service public industriel et commercial et dont le personnel relève du droit privé, était éligible au dispositif de l’activité partielle prévu par le code du travail.

La clôture de l’instruction a été fixée au 18 février 2019 par ordonnance du 28 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code du travail ;
– le code du tourisme ;
– le code général des collectivités locales ;
– la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 ;
– la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 ;
– le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Clot, président,
– les conclusions de M. Laval, rapporteur public,
– les observations de Me A…, substituant Me Mollion, avocat du syndicat mixte Savoie Grand Revard ;

Une note en délibéré, présentée pour le syndicat mixte Savoie Grand Revard, a été enregistrée le 8 avril 2019.

Considérant ce qui suit :

1. En raison d’un déficit d’enneigement, le syndicat mixte Savoie Grand Revard, qui gère le domaine skiable du Grand Revard, a, le 28 décembre 2015, sollicité l’autorisation de placer ses salariés en activité partielle. Par une décision du 8 janvier 2016, le préfet de la Savoie lui a opposé un refus. Le 16 mars 2016, le ministre chargé du travail a rejeté son recours contre ce refus. Le ministre du travail fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions.

2. Aux termes de l’article L. 5122-1 du code du travail :  » I. – Les salariés sont placés en position d’activité partielle, après autorisation expresse ou implicite de l’autorité administrative, s’ils subissent une perte de rémunération imputable : /-soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d’établissement ; /-soit à la réduction de l’horaire de travail pratiqué dans l’établissement ou partie d’établissement en deçà de la durée légale de travail. /En cas de réduction collective de l’horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d’activité partielle individuellement et alternativement. /II. – Les salariés reçoivent une indemnité horaire, versée par leur employeur, correspondant à une part de leur rémunération antérieure dont le pourcentage est fixé par décret en Conseil d’État. L’employeur perçoit une allocation financée conjointement par l’État et l’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage. Une convention conclue entre l’État et cet organisme détermine les modalités de financement de cette allocation. /Le contrat de travail des salariés placés en activité partielle est suspendu pendant les périodes où ils ne sont pas en activité. (…) « .

3. Aux termes de l’article 61 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, issu de l’article 45 de la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne :  » I.- Pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, est mise en place une expérimentation visant à adapter le dispositif de l’activité partielle aux régies dotées de la seule autonomie financière qui gèrent un service public à caractère industriel et commercial de remontées mécaniques ou de pistes de ski, qui remplissent les conditions mentionnées à l’article L. 2221-1 et au 2° de l’article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales et dont les collectivités territoriales ou établissements publics de rattachement se sont portés volontaires pour cette expérimentation. Dans la mesure du possible, cette expérimentation s’effectue sur un échantillon représentatif des différents territoires de montagne. / Cette expérimentation inclut la mise en place par les collectivités territoriales et les régies concernées, avec l’appui des services de l’État compétents, d’une part, d’une analyse des possibilités de développement économique des petites stations et, d’autre part, d’une démarche active et territorialisée de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, afin de sécuriser les parcours professionnels des salariés saisonniers. / II.-Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement réalise une évaluation de l’impact de l’expérimentation sur la situation économique et financière des régies concernées et sur la situation de l’emploi dans les territoires participants, ainsi que de l’impact des actions complémentaires mises en place par les régies afin de faire face aux difficultés entraînant une baisse de leur activité. / III.-Dans le cadre de cette expérimentation, les salariés employés par les régies mentionnées au I du présent article peuvent être placés en activité partielle dès lors qu’ils sont soumis aux dispositions du code du travail et que leur employeur a adhéré au régime d’assurance chômage en application du 1° de l’article L. 5424-2 du même code. / IV.-Le dispositif expérimental est financé par l’État et par l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce, dans des conditions fixées par décret.  »

4. Aux termes de l’article L. 342-13 du code du tourisme :  » L’exécution du service [des remontées mécaniques] est assurée soit en régie directe, soit en régie par une personne publique sous forme d’un service public industriel et commercial (…) « .

5. Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que jusqu’à l’intervention de la loi du 28 décembre 2016, les dispositions de l’article L. 5122-1 du code du travail ne s’appliquaient pas aux régies dotées de la seule autonomie financière qui gèrent un service public de remontées mécaniques ou de pistes de ski. Dès lors, c’est à tort que, pour annuler les décisions en litige, le tribunal administratif s’est fondé sur le motif tiré de ce que ces dispositions leur étaient applicables compte tenu du caractère industriel et commercial du service dont il s’agit.

6. Il résulte de ce qui précède que, en l’absence d’autre moyen susceptible d’être examiné dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel, le ministre du travail est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions des 8 janvier 2016 et 16 mars 2016 en litige.
7. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat, qui n’a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, verse une somme au syndicat mixte Savoie Grand Revard au titre des frais liés au litige.

DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 29 juin 2018 est annulé.
Article 2 : Les conclusions du syndicat mixte Savoie Grand Revard sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre du travail et au syndicat mixte Savoie Grand Revard.
Délibéré après l’audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président,
M. Souteyrand, président assesseur,
Mme Dèche, premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 6 mai 2019.
Le président rapporteur,
J.-P. ClotLe président assesseur,
E. Souteyrand
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,

CAA de LYON

N° 18LY00833
Inédit au recueil Lebon
5ème chambre – formation à 3
M. CLOT, président
M. Jean-Pierre CLOT, rapporteur
M. LAVAL, rapporteur public

lecture du lundi 6 mai 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

________________________________________

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le syndicat intercommunal pour la protection et l’aménagement du Semnoz (SIPAS) a demandé au tribunal administratif de Grenoble :
– sous le n° 1501127, d’annuler la décision du 9 janvier 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a retiré sa décision du 8 janvier 2015 l’autorisant à exercer une activité partielle pour la période du 5 au 31 janvier 2015 ;
– sous le n° 1504155, d’annuler la décision du 7 mai 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a retiré sa décision du 8 janvier 2015 ;
– sous le n° 1504184, d’annuler la décision du 7 mai 2015 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a retiré sa décision du 9 janvier 2015.

Par un jugement n° 1501127, 1504155, 1504184 du 21 décembre 2017, le tribunal administratif de Grenoble a :
– donné acte du désistement de la demande du SIPAS tendant à l’annulation de la décision du 7 mai 2015 retirant la décision du 9 janvier 2015 (article 1er) ;
– prononcé un non-lieu à statuer sur la demande tendant à l’annulation de la décision du 9 janvier 2015 (article 2) ;
– annulé la décision du préfet de la Haute-Savoie du 7 mai 2015 retirant sa décision du 8 janvier 2015 (article 3).

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 21 février 2018, le ministre du travail demande à la cour :
1°) d’annuler l’article 3 de ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2017 ;
2°) de rejeter les conclusions du SIPAS devant le tribunal administratif tendant à l’annulation de la décision du 7 mai 2015.

Il soutient que le SIPAS, s’il gère un service public industriel et commercial, est un établissement public de coopération intercommunale qui ne peut pas bénéficier des dispositions de l’article L. 5122-1 du code du travail relatives au dispositif de l’activité partielle, réservé aux employeurs privés et aux établissements publics industriels et commerciaux.

La requête a été communiquée au SIPAS qui n’a pas produit d’observations.

La clôture de l’instruction a été fixée au 18 février 2019 par ordonnance du 28 janvier 2019.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code du travail ;
– le code du tourisme ;
– le code général des collectivités locales ;
– la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 ;
– la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 ;
– l’arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 10 avril 2018 portant dissolution du syndicat intercommunal pour la protection et l’aménagement du Semnoz (SIPAS) ;
– le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Clot, président,
– les conclusions de M. Laval, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Le syndicat intercommunal pour la protection et l’aménagement du Semnoz (SIPAS) est chargé de la protection du massif du Semnoz (Haute-Savoie) et de la mise en valeur du site, par le développement, notamment, des activités touristiques et des animations sportives, incluant les remontées mécaniques. En raison d’un déficit d’enneigement, le syndicat a sollicité du préfet de la Haute-Savoie, le 5 janvier 2015, une autorisation préalable lui permettant de placer ses salariés en activité partielle. Cette autorisation lui a été accordée le 8 janvier 2015. Toutefois, le 9 janvier 2015, le préfet a retiré cette décision, estimant que le syndicat ne remplissait pas les conditions pour pouvoir prétendre à l’application de ce dispositif. Le 7 mai 2015, le préfet a retiré ses décisions des 8 et 9 janvier 2015 et refusé au syndicat l’autorisation d’activité partielle. Le ministre du travail fait appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble en tant qu’il a annulé cette décision du 7 mai 2015.
2. Aux termes de l’article L. 5122-1 du code du travail :  » I. – Les salariés sont placés en position d’activité partielle, après autorisation expresse ou implicite de l’autorité administrative, s’ils subissent une perte de rémunération imputable : /-soit à la fermeture temporaire de leur établissement ou partie d’établissement ; /-soit à la réduction de l’horaire de travail pratiqué dans l’établissement ou partie d’établissement en deçà de la durée légale de travail. /En cas de réduction collective de l’horaire de travail, les salariés peuvent être placés en position d’activité partielle individuellement et alternativement. /II. – Les salariés reçoivent une indemnité horaire, versée par leur employeur, correspondant à une part de leur rémunération antérieure dont le pourcentage est fixé par décret en Conseil d’État. L’employeur perçoit une allocation financée conjointement par l’Etat et l’organisme gestionnaire du régime d’assurance chômage. Une convention conclue entre l’Etat et cet organisme détermine les modalités de financement de cette allocation. /Le contrat de travail des salariés placés en activité partielle est suspendu pendant les périodes où ils ne sont pas en activité. (…) « .

3. Aux termes de l’article 61 de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne, issu de l’article 45 de la loi du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne :  » I.- Pour une durée de trois ans à compter de la promulgation de la loi n° 2016-1888 du 28 décembre 2016 de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, est mise en place une expérimentation visant à adapter le dispositif de l’activité partielle aux régies dotées de la seule autonomie financière qui gèrent un service public à caractère industriel et commercial de remontées mécaniques ou de pistes de ski, qui remplissent les conditions mentionnées à l’article L. 2221-1 et au 2° de l’article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales et dont les collectivités territoriales ou établissements publics de rattachement se sont portés volontaires pour cette expérimentation. Dans la mesure du possible, cette expérimentation s’effectue sur un échantillon représentatif des différents territoires de montagne. / Cette expérimentation inclut la mise en place par les collectivités territoriales et les régies concernées, avec l’appui des services de l’État compétents, d’une part, d’une analyse des possibilités de développement économique des petites stations et, d’autre part, d’une démarche active et territorialisée de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, afin de sécuriser les parcours professionnels des salariés saisonniers. / II.-Au plus tard six mois avant le terme de l’expérimentation, le Gouvernement réalise une évaluation de l’impact de l’expérimentation sur la situation économique et financière des régies concernées et sur la situation de l’emploi dans les territoires participants, ainsi que de l’impact des actions complémentaires mises en place par les régies afin de faire face aux difficultés entraînant une baisse de leur activité. / III.-Dans le cadre de cette expérimentation, les salariés employés par les régies mentionnées au I du présent article peuvent être placés en activité partielle dès lors qu’ils sont soumis aux dispositions du code du travail et que leur employeur a adhéré au régime d’assurance chômage en application du 1° de l’article L. 5424-2 du même code. / IV.-Le dispositif expérimental est financé par l’État et par l’Union nationale interprofessionnelle pour l’emploi dans l’industrie et le commerce, dans des conditions fixées par décret.  »

4. Aux termes de l’article L. 342-13 du code du tourisme :  » L’exécution du service [des remontées mécaniques] est assurée soit en régie directe, soit en régie par une personne publique sous forme d’un service public industriel et commercial (…) « .

5. Il résulte de l’ensemble de ces dispositions que jusqu’à l’intervention de la loi du 28 décembre 2016, les dispositions de l’article L. 5122-1 du code du travail ne s’appliquaient pas aux régies dotées de la seule autonomie financière qui gèrent un service public de remontées mécaniques ou de pistes de ski. Dès lors, c’est à tort que, pour annuler la décision en litige, le tribunal administratif s’est fondé sur le motif tiré de ce que ces dispositions leur étaient applicables compte tenu du caractère industriel et commercial du service dont il s’agit.
6. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner l’autre moyen invoqué par le syndicat intercommunal pour la protection et l’aménagement du Semnoz.
7. Le moyen tiré de ce que le retrait d’une décision favorable ne respecte pas les règles applicables aux actes administratifs n’est pas assorti des précisions permettant à la cour d’en apprécier le bien-fondé.

8. Il résulte de ce qui précède que le ministre du travail est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 7 mai 2015 en litige.

DÉCIDE :
Article 1er : L’article 3 du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 21 décembre 2017 est annulé.
Article 2 : Les conclusions du syndicat intercommunal pour la protection et l’aménagement du Semnoz devant le tribunal administratif de Grenoble dirigées contre la décision du préfet de la Haute-Savoie du7 mai 2015 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ministre du travail et à la communauté d’agglomération Grand Annecy, venant aux droits du syndicat intercommunal pour la protection et l’aménagement du Semnoz.
Délibéré après l’audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président,
M. Souteyrand, président assesseur,
Mme Dèche, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 mai 2019.
Le président-rapporteur,
J.-P. ClotLe président assesseur,
E. Souteyrand
La greffière,
A. Le Colleter
La République mande et ordonne à la ministre du travail en ce qui la concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l’exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,