CAA de LYON
N° 16LY03856
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. BOUCHER, président
M. Antoine GILLE, rapporteur
Mme VACCARO-PLANCHET, rapporteur public
COGNAT, avocat
lecture du mardi 10 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. et Mme B… ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler l’arrêté du 17 décembre 2013 par lequel le maire de la commune de Lanslevillard a autorisé la société d’économie mixte du Mont-Cenis à exécuter des travaux modificatifs pour le téléski de Terre Grasse.
Par un jugement n° 1403508 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 22 novembre 2016, M. et Mme B…, représentés par Me A…, demandent à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 20 septembre 2016 ;
2°) d’annuler pour excès de pouvoir l’autorisation du 17 décembre 2013 et la décision du 1er avril 2014 rejetant le recours gracieux formé à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Lanslevillard la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
– l’implantation de l’ouvrage en face de leur résidence principale leur donne intérêt à agir à l’encontre de l’autorisation du 20 septembre 2016 ;
– contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, le projet devait faire l’objet d’un nouveau permis, et non d’une simple autorisation modificative, et le dossier de demande ne fait état d’aucun dispositif approprié pour permettre l’évacuation des eaux pluviales ;
– le projet méconnaît les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-21 du code de l’urbanisme, ainsi que celles des articles UL. 11 et UL. 4 du règlement du plan local d’urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2017, la société d’économie mixte du Mont-Cenis, représentée par la société d’avocats Droit public consultants, conclut au rejet de la requête et demande qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la demande des requérants devant le tribunal administratif n’était pas recevable, faute de recours dans le délai de deux mois suivant l’affichage de l’autorisation en litige et faute de notification par les requérants de leur recours administratif au titre de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme ;
– les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
– les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
– et les observations de Me C… pour la société d’économie mixte du Mont-Cenis ;
1. Considérant que, par un arrêté du 9 juillet 2013, le maire de la commune de Lanslevillard a délivré à la société d’économie mixte du Mont-Cenis (SEMMC) l’autorisation mentionnée à l’article L. 472-1 du code de l’urbanisme en vue de l’exécution de travaux portant sur la réalisation d’un téléski à enrouleurs au lieu-dit « Au Vas du Bas / Terre Grasse » ; que, par arrêté du 17 décembre 2013, le maire de Lanslevillard à délivré à la SEMMC une autorisation portant sur la modification de cet ouvrage ; que M. et Mme B… relèvent appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l’annulation de cette autorisation modificative ;
Sur la légalité de l’autorisation modificative du 17 décembre 2013 :
En ce qui concerne la nécessité d’une nouvelle autorisation :
2. Considérant que l’autorisation délivrée à la SEMMC le 17 décembre 2013 tend à modifier celle du 9 juillet 2013 lui permettant de construire la remontée mécanique dite de Terre Grasse ; que les modifications autorisées, qui se limitent au déplacement de quelques mètres vers l’amont des deux pylônes support de cet ouvrage et à l’élévation de 6 à 9 mètres de la hauteur de l’un de ces deux pylônes, sont sans incidence sur la conception générale du projet initial ; que ces travaux ne nécessitaient donc pas une autorisation distincte mais une simple modification de l’autorisation initiale ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu’une nouvelle autorisation aurait du être sollicitée doit être écarté ;
En ce qui concerne les risques liés à l’ouvrage :
3. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme : » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations. » ; que si les requérants font état du risque de chute d’un des pylônes support du téléski de Terre Grasse sur les propriétés voisines, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de la probabilité d’une telle chute ou de la gravité de ses conséquences, que le maire de Lanslevillard a, en autorisant la modification des caractéristiques de cette remontée mécanique, entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de ces dispositions ;
En ce qui concerne l’atteinte au caractère des lieux :
4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur : » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales. » ; qu’aux termes de l’article UL. 11 du règlement du plan local d’urbanisme (PLU) de Lanslevillard : » Par le traitement de leur aspect extérieur, les constructions doivent s’intégrer au paysage environnant en prenant en compte : / – les caractéristiques du contexte bâti dans lequel elles s’insèrent, / – les spécificités architecturales des constructions avoisinantes, sans pour toutefois exclure la création architecturale, / – les contraintes fonctionnelles et techniques propres à l’équipement » ;
5. Considérant que la décision en litige, ainsi qu’il a été dit, se borne à autoriser le déplacement de quelques mètres de deux pylônes supports du téléski autorisé le 9 juillet 2013 et le rehaussement de l’un d’eux ; que ces modifications ne sont pas en elles-mêmes de nature à affecter l’aspect général et l’intégration dans le paysage du téléski de Terre Grasse ; que, par suite, M. et Mme B… ne sont pas fondés à soutenir que le maire de Lanslevillard a, en délivrant cette autorisation modificative, fait une inexacte application des dispositions précitées de l’article UL. 11 du règlement du PLU de la commune, dont les exigences ne sont pas moindres que celles de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme dont la violation est également invoquée ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces articles UL. 11 et R. 111-21 doit dès lors être écarté ;
En ce qui concerne l’écoulement des eaux pluviales :
6. Considérant qu’aux termes du paragraphe 3 de l’article UL. 4 du règlement du PLU de Lanslevillard : » Les aménagements réalisés sur tout terrain devront être tels qu’ils garantissent l’écoulement direct des eaux pluviales, sans aggraver la situation antérieure. Le constructeur réalisera les dispositifs appropriés pour une évacuation vers un exutoire. Ces aménagements sont à la charge exclusive du propriétaire qui doit réaliser les dispositifs adaptés à l’opération et au terrain » ; que si les requérants font valoir que, contrairement aux exigences de ces dispositions, le dossier de demande de l’autorisation en litige ne fait pas apparaître de dispositif d’évacuation des eaux pluviales vers un exutoire, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas même allégué, que le déplacement des pylônes en cause et la modification de la hauteur de l’un d’eux soit, non plus d’ailleurs que la présence même de ces pylônes, de nature à affecter les conditions d’écoulement des eaux pluviales sur la piste de ski que longe cet équipement ; que le moyen doit être écarté ;
7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme B… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ;
Sur les frais liés au litige :
8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions des requérants formées au titre des frais exposés et dirigées contre la SEMMC, qui n’est pas partie perdante dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge des requérants le versement à la SEMMC de la somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B… est rejetée.