CAA de MARSEILLE
N° 12MA03856
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. d’HERVE, président
Mme Isabelle GOUGOT, rapporteur
M. SALVAGE, rapporteur public
SCP BERENGER – BLANC – BURTEZ – DOUCEDE & ASSOCIES, avocat
lecture du lundi 9 février 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Texte intégral
Vu la requête, enregistrée le 17 septembre 2012 au greffe de la cour administrative d’appel de Marseille sous le n°12MA003856, présentée pour la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM), représentée par son président en exercice, M.C…, dont le siège social est sis 24, rue de la Laumière à Paris (75019), par la SCP d’avocats » Berenger-A… -Burtez-Doucède » ; elle demande à la Cour :
1°) d’annuler le jugement n° 1007937 du 16 juillet 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête tendant à l’annulation de l’arrêté en date du 12 juillet 2010 par lequel le préfet de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, préfet coordonnateur du massif des Alpes, a autorisé la création d’une unité touristique nouvelle dite » Espace 3000 – Chaberton » située sur le territoire de la commune de Montgenèvre, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux en date du 7 septembre 2010, qui a été réceptionnée le 13 septembre suivant par les services préfectoraux ;
2°) d’annuler les décisions précitées ;
……………………………………………………………………………………………………
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention alpine, signée à Salzbourg le 7 novembre 1991, et ses Protocoles d’application dans les domaines du tourisme et de la protection des sols, qui ont été approuvés par la loi n° 2005-492 du 19 mai 2005 ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son Préambule et l’article 34 ;
Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu le code de l’urbanisme ;
Vu le code de l’environnement ;
Vu le décret n° 2004-51 du 12 janvier 2004 ;
Vu le décret n° 2006-1683 du 22 décembre 2006 ;
Vu le décret n° 2010-365 du 9 avril 2010 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 19 janvier 2015 :
– le rapport de Mme Gougot, première conseillère ;
– les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;
– et les observations de Me A… pour la FFCAM et de Me B…pour la commune de Montgenèvre ;
Après avoir pris connaissance des notes en délibéré, enregistrées d’une part le 20 janvier 2015 pour la commune de Montgenèvre, par Me B…et, d’autre part le 21 janvier 2015 pour la FFCAM par la SCP d’avocats » Bérenger-A… -Burtez-Doucède et associés » ;
Sur la régularité du jugement :
1. Considérant que le tribunal administratif de Marseille a rejeté comme irrecevable pour défaut d’intérêt à agir la demande présentée par la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM) au motif qu’ » une fédération nationale ne justifie pas d’un intérêt lui donnant qualité pour attaquer une décision administrative qui n’est susceptible d’intéresser qu’une des instances locales qu’elle regroupe ; […] qu’il n’est ni allégué ni établi que plusieurs clubs ou comités, que la fédération requérante regroupe, seraient susceptibles d’être intéressés par la mesure contestée, qui n’a d’effet que dans une aire géographique limitée constituée par le secteur du col du Chaberton sur le territoire de la commune de Montgenèvre, dans lequel la fédération dispose d’une association dénommée » club alpin français de Briançon » qui serait susceptible d’être directement concernée par la création d’une unité touristique nouvelle, par l’arrêté préfectoral en date du 10 juillet 2012 contesté, en vue d’étendre le domaine skiable de la station située sur le territoire de cette commune […] alors même qu’elle dispose d’un agrément ministériel au titre de l’article 40 de la loi du 10 juillet 1976 » ; que toutefois, aux termes de l’article L. 142-1 du code de l’environnement : » Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l’environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. Toute association de protection de l’environnement agréée au titre de l’article L. 141-1 ainsi que les associations mentionnées à l’article L. 433-2 justifient d’un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l’environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l’agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément. » ; que la FFCAM a reçu par arrêté du 2 mars 1978 l’agrément prévu à l’article L. 141-1 du code de l’environnement ; qu’il ressort de ses statuts qu’elle a notamment pour objet social de » veiller à la sauvegarde de l’intégrité et de la beauté de la nature en montagne ainsi qu’à la protection du milieu montagnard » et « d’intervenir sur les projets d’équipement se situant sur les lieux de pratique dans le souci de rechercher une meilleure harmonisation des intérêts en cause » ; qu’elle a ainsi intérêt à agir contre l’autorisation de créer un pôle touristique nouveau sur le site resté à l’état naturel du col du Chaberton sur le territoire de la commune de Montgenèvre, alors même que cette préoccupation de sauvegarde des espaces naturels s’inscrit dans un objet statutaire plus large ; que la FFCAM est par suite fondée à soutenir que c’est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande comme irrecevable ; que le jugement en date du 16 juillet 2012 doit dès lors être annulé ;
2. Considérant qu’il y a lieu pour la Cour d’évoquer et de statuer sur la demande présentée au tribunal administratif de Marseille par la FFCAM ;
Sur l’intervention de la société de chasse de Montgenèvre :
3. Considérant que la société de chasse de Montgenèvre a intérêt à l’annulation de l’arrêté attaqué ; que son intervention doit être admise ;
Sur la légalité :
En ce qui concerne la légalité externe :
S’agissant de l’exception d’illégalité de l’arrêté du 26 mars 2010 portant mise à disposition du public du dossier de demande de création d’unité touristique nouvelle :
4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 145-8 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue du décret n°2006-1683 du 22 décembre 2006 : » Dès la notification prévue au I de l’article R. 145-7, le préfet du département prescrit par arrêté la mise à la disposition du public du dossier joint à la demande de création d’unité touristique nouvelle. Cet arrêté, publié au recueil des actes administratifs de l’Etat dans le département, fixe : a) La date à compter de laquelle le dossier est tenu à la disposition du public et la durée pendant laquelle il peut être consulté, qui ne peut être inférieure à un mois ; b) Les heures et lieux où le public peut prendre connaissance du dossier et formuler ses observations sur un ou plusieurs registres ouverts à cet effet. Mention de l’arrêté ainsi que de la date à laquelle la commission spécialisée du comité de massif ou la formation spécialisée des unités touristiques nouvelles de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites examinera la demande est insérée une semaine au moins avant le début de la consultation du public dans un journal diffusé dans le département et affichée dans les mairies des communes intéressées et, le cas échéant, au siège de l’établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d’urbanisme. Quinze jours au moins avant la date fixée pour l’examen de la demande, le préfet adresse au président et aux membres de la commission compétente un compte rendu des observations recueillies. » ; que selon l’article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958 issu de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 : » la loi détermine les principes fondamentaux de la préservation de l’environnement » ; qu’il est spécifié à l’article 7 de la Charte de l’environnement, à laquelle le Préambule de la Constitution fait référence en vertu de la même loi constitutionnelle que » Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement. » ; que ces dernières dispositions, comme l’ensemble des droits et devoirs définis dans la Charte de l’environnement, et à l’instar de toutes celles qui procèdent du Préambule de la Constitution, ont valeur constitutionnelle ; qu’elles s’imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs ;
5. Considérant que la FFCAM soutient que la procédure préalable à l’édiction de l’autorisation litigieuse est irrégulière, en raison de l’illégalité de l’arrêté du 26 mars 2010 par lequel le préfet a prescrit la mise à disposition du public du dossier de création de l’unité touristique nouvelle du col du Chaberton ; qu’à cet effet elle soutient que cet arrêté est illégal en tant qu’il se fonde sur l’article R.145-8 du code de l’urbanisme, qui, dans sa rédaction issue du décret du 22 décembre 2006, relatif à l’urbanisme en montagne et modifiant le code de l’urbanisme, a empiété sur la compétence du législateur telle que prévue à l’article 34 de la Constitution, et à l’article 7 de la Charte de l’environnement ; que ce faisant, la fédération requérante n’a pas invoqué une question prioritaire de constitutionnalité de la loi mais s’est bornée à invoquer l’inconstitutionnalité du décret lui-même au regard de la Constitution ; que le ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité ne peut par suite utilement soutenir que ce moyen serait irrecevable dès lors qu’il n’est pas présenté par un écrit distinct et motivé en application de l’article 23-1 de l’ordonnance n°58-1067 du 7 novembre 1958 ;
6. Considérant que les dispositions précitées de la Constitution et de la Charte de l’environnement issues de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005, ont réservé au législateur le soin de préciser » les conditions et les limites » dans lesquelles doit s’exercer le droit de toute personne à accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques et à participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ; qu’en conséquence, ne relèvent du pouvoir réglementaire, depuis leur entrée en vigueur, que les mesures d’application des conditions et limites fixées par le législateur ; que, toutefois, les dispositions compétemment prises dans le domaine réglementaire, tel qu’il était déterminé antérieurement, demeurent… ; qu’il résulte de ce qui précède que, depuis la date d’entrée en vigueur de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005, une disposition réglementaire ne peut intervenir dans le champ d’application de l’article 7 de la Charte de l’environnement que pour l’application de dispositions législatives, notamment parmi celles qui figurent dans le code de l’environnement et le code de l’urbanisme, que celles-ci soient postérieures à cette date ou antérieures, sous réserve, alors, qu’elles ne soient pas incompatibles avec les exigences de la Charte ; que l’article L. 145-11 du code de l’environnement, qui se borne à énoncer des principes dont la portée a vocation à être définie dans le cadre d’autres lois, ne saurait être regardé comme déterminant les conditions et limites requises par l’article 7 de la Charte de l’environnement ; qu’en l’absence de fixation par le législateur de ces conditions et limites, avant la loi 2014-366 qui a modifié sur ce point l’article L. 145-11 du code de l’urbanisme, l’article R. 145-8 du code de l’urbanisme dont les dispositions, qui prévoient des modalités d’information du public, concourent de manière indivisible à l’établissement d’une procédure de consultation et de participation qui entre dans le champ d’application de l’article 7 de la Charte de l’environnement, a par suite été pris par une autorité incompétente ;
7. Considérant toutefois, que le moyen tiré de l’illégalité de la procédure d’adoption d’un acte administratif à raison de celle, soulevée par la voie de l’exception, du texte qui la régit, est au nombre des moyens, qui relèvent de la légalité externe, relatifs à la procédure d’élaboration de l’acte attaqué ;que l’irrégularité de procédure n’est toutefois de nature à entacher la décision prise à l’issue de l’enquête publique que si elle a pu avoir pour effet de nuire à l’information du public ou si elle a été de nature à exercer une influence sur cette décision ; qu’en l’espèce, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’irrégularité de la procédure de mise à disposition du public en tant que sa mise en oeuvre procède d’un texte illégal à raison de l’incompétence de son signataire ait eu une incidence sur les modalités effectives d’information du public, alors notamment que le dossier a été mis à disposition du public du 12 avril 2010 au 12 mai 2010 et que des observations ont pu être faites par des associations de protection de l’environnement telles le club alpin français, les associations » ARNICA MONTANA » et » LE CRAVE » » l’amicale des chasseurs de Montgenèvre », l’association » SOS environnement » ainsi que par des élus, des acteurs économiques, des professionnels du tourisme et des particuliers ; que par suite et en tout état de cause, le moyen tiré de l’irrégularité de la procédure qui aurait été conduite sur le fondement de dispositions réglementaires illégales au regard de l’article 7 de la Charte de l’environnement doit être écarté ;
S’agissant de l’absence d’étude d’impact :
8. Considérant qu’aucun texte n’impose qu’une autorisation de création d’une unité touristique nouvelle soit précédée d’une étude d’impact prévue aux articles L. 122-1 et R. 122-5 du code de l’environnement ; que par ailleurs aux termes de l’article L.414-4 du code de l’environnement : » I. – Lorsqu’ils sont susceptibles d’affecter de manière significative un site Natura 2000, individuellement ou en raison de leurs effets cumulés, doivent faire l’objet d’une évaluation de leurs incidences au regard des objectifs de conservation du site, dénommée ci-après » Evaluation des incidences Natura 2000 » : […] III. – Les documents de planification, programmes ou projets ainsi que les manifestations ou interventions soumis à un régime administratif d’autorisation, d’approbation ou de déclaration au titre d’une législation ou d’une réglementation distincte de Natura 2000 ne font l’objet d’une évaluation des incidences Natura 2000 que s’ils figurent : 1° Soit sur une liste nationale établie par décret en Conseil d’Etat… « , l’article R. 414-19 du même code prévoyant que » I.-La liste nationale des documents de planification, programmes ou projets ainsi que des manifestations et interventions qui doivent faire l’objet d’une évaluation des incidences sur un ou plusieurs sites Natura 2000 en application du 1° du III de l’article L. 414-4 est la suivante :[…] 5° Les projets de création ou d’extension d’unités touristiques nouvelles soumises à autorisation en application de l’article L. 145-11 du code de l’urbanisme… » ; que les articles L. 414-4 et R. 414-19 du code de l’environnement n’étaient toutefois pas applicables au projet litigieux dont le dossier de demande a été déposé en préfecture le 18 mars 2010, ainsi que cela résulte tant des visas de l’arrêté préfectoral attaqué que des écritures du préfet en défense, dès lors que l’article 3 du décret susvisé du 9 avril 2010 relatif à l’évaluation des incidences » Natura 2000 « , publié au journal officiel le 11 avril 2010 a prévu que » Les demandes d’autorisation et les déclarations déposées avant le premier jour du quatrième mois suivant la date de publication du présent décret au Journal officiel de la République française restent soumises aux dispositions de la sous-section 5 de la section 1 du chapitre IV du titre Ier du livre IV du code de l’environnement dans leur rédaction antérieure à celle résultant du présent décret. » ; que par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 122-1, R. 122-5, L. 414-4 et R. 414-19 du code de l’environnement doivent être écartés, comme inopérants alors même que la demande d’autorisation mentionnerait qu’une étude d’impact serait réalisée ;
S’agissant de l’irrégularité de l’avis du 14 juin 2010 émis par la commission spécialisée des unités touristiques nouvelles du comité du massif des Alpes :
9. Considérant qu’en vertu de l’article 2 du décret du 12 janvier 2004 susvisé relatif à la composition et au fonctionnement des comités de massif du massif des Alpes, du massif central, du massif jurassien, du massif des Pyrénées et du massif vosgien : » Le comité de massif est composé, selon la superficie des massifs, de 49 à 83 membres, soit :1° D’un collège d’élus locaux dont l’effectif est égal à plus de la moitié des membres du comité ; il comprend :a) Des conseillers régionaux désignés par chaque conseil régional ;b) Des conseillers généraux désignés par chaque conseil général parmi ceux qui sont élus dans un canton situé en tout ou partie dans le massif ;c) Des représentants des communes situées dans le massif, proposés par l’Association des maires de France et des établissements publics de coopération intercommunale regroupant des communes situées dans le massif, proposés par l’Association des communautés de France ;2° D’un collège de représentants des activités économiques ; il comprend :a) Des représentants des chambres d’agriculture, des chambres de commerce et d’industrie et des chambres de métiers et de l’artisanat ayant en tout ou partie le massif pour ressort, proposés par chacune des chambres consulaires, dans la limite de trois sièges pour chacune d’elles ;b) Des représentants des organisations syndicales représentatives des secteurs de l’agriculture et de la
sylviculture, de l’industrie, du sport ou du tourisme ayant en tout ou partie le massif pour ressort, proposés par ces organisations dans la limite de deux sièges pour chacun de ces trois secteurs ;c) Des représentants des organisations territoriales régionales ou départementales du tourisme ayant en tout ou partie le massif pour ressort, proposés par ces organisations dans la limite de trois sièges ;d) Des représentants des organisations syndicales les plus représentatives de travailleurs salariés ayant en tout ou partie le massif pour ressort, proposés par ces organisations dans la limite de trois sièges.3° D’un collège de représentants d’associations, d’organismes gestionnaires de parcs et de personnalités qualifiées dans le domaine de la montagne ; il comprend :a) Des représentants des associations de tourisme et de sports de nature ;b) Des représentants des associations agréées de protection de la nature et de l’environnement et des représentants des fédérations régionales de chasse et de pêche ;c) Des représentants des organismes gestionnaires des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux situés en tout ou partie dans le massif, dans la limite de quatre sièges ;d) Des personnalités qualifiées, dont une choisie pour sa connaissance scientifique de la montagne et une autre pour sa connaissance du développement local, dans la limite de quatre sièges. Le deuxième et le troisième collège disposent du même nombre de membres. » ; que selon l’article 3 du même décret : » Les membres du comité de massif sont nommés par arrêté du préfet coordonnateur de massif. Les représentants des régions, des communes et de leurs groupements sont nommés pour la durée de leur mandat électif. Les représentants des départements sont nommés lors de chaque renouvellement triennal des conseils généraux. Les membres du comité de massif des deuxième et troisième collèges sont nommés pour six ans. Le mandat est renouvelable. Tout membre qui cesse d’appartenir au comité de massif, quel qu’en soit le motif, est remplacé par une personne appartenant à la même catégorie pour la durée du mandat restant à courir. » ; qu’aux termes de l’article 7 du même décret dans sa rédaction alors applicable : « Pour les avis prévus à l’article 7 de la loi du 9 janvier 1985 susvisée sur les projets d’unités touristiques nouvelles, le comité de massif constitue en son sein une commission spécialisée dont l’effectif ne peut comprendre plus du tiers de ses membres. La moitié des sièges plus un est attribuée aux représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements. Le comité de massif doit assurer une représentation équilibrée des catégories composant les deuxième et troisième collèges./Ses avis sont adoptés à la majorité des membres présents…. » ; qu’aux termes de l’article 8 du même décret : » Le préfet coordonnateur est assisté, pour l’ensemble de ses missions de mise en oeuvre de la politique de massif, d’un commissaire à l’aménagement, au développement et à la protection du massif. Il assure le secrétariat du comité de massif, de sa commission permanente, de la commission spécialisée et des groupes de travail créés en application de l’article 5. » ;
10. Considérant, d’une part, qu’il résulte de ces dispositions que M. Chomienne, commissaire à l’aménagement, au développement et à la protection du massif, qui était chargé d’assister le préfet coordonnateur dans l’exercice de ses missions de mise en oeuvre de la politique de massif, était nécessairement compétent pour présider au nom du préfet, la commission spécialisée du comité de massif des Alpes ; qu’en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’irrégularité alléguée aurait exercé une influence sur l’arrêté litigieux pris ensuite par le préfet ; que, par suite, le moyen, présenté pour la première fois devant la cour, tiré de l’irrégularité de la composition de la commission spécialisée, en tant qu’elle était irrégulièrement présidée, doit être écarté ;
11. Considérant, d’autre part, que si la FFCAM relève qu’en application de l’article 3 du décret précité du 12 janvier 2004 les élections régionales qui se sont déroulées les 14 et 21 mars 2010 ont mis fin aux fonctions des membres désignés par les conseils des régions Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur, une telle circonstance n’est pas constitutive d’un vice de procédure si la moitié des sièges plus un demeure attribuée aux représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements ; qu’en l’espèce, la FFCAM ne démontre pas que l’expiration des mandats électifs de deux conseillers régionaux désignés au sein de la commission spécialisée ait en l’espèce impliqué la perte par les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements de la majorité des sièges au sein de cette commission ; que par conséquent, le moyen tiré devant la cour de l’irrégularité de la composition de la commission spécialisée, en tant qu’elle ne comportait pas une majorité de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements doit être écarté comme manquant en fait ;
S’agissant du moyen tiré de ce que l’arrêté préfectoral attaqué prescrirait une révision du plan local d’urbanisme de la commune de Montgenèvre :
12. Considérant que la FFCAM ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l’article L. 145-9 selon lesquelles » Une unité touristique nouvelle ne peut être réalisée que dans une commune disposant d’un plan local d’urbanisme opposable aux tiers. « , dans leur rédaction en vigueur jusqu’au 24 février 2006 qui n’était plus applicable à la date d’édiction de l’arrêté litigieux ; que par ailleurs, elle ne saurait sérieusement soutenir qu’en rappelant seulement la nécessité d’une révision du plan local d’urbanisme de la commune de Montgenèvre, le préfet des Hautes-Alpes aurait empiété sur les compétences communales ;
Sur la légalité interne :
En ce qui concerne la composition du dossier :
13. Considérant qu’en vertu de l’article R. 145-6 du code de l’urbanisme : » La demande est accompagnée d’un dossier comportant un rapport et des documents graphiques précisant :/1° L’état des milieux naturels, des paysages, du site et de son environnement, comprenant le cas échéant l’historique de l’enneigement local, l’état du bâti, des infrastructures et des équipements touristiques existants avec leurs conditions de fréquentation, ainsi que les principales caractéristiques de l’économie locale ;/2° Les caractéristiques principales du projet et, notamment, de la demande à satisfaire, des modes d’exploitation et de promotion des hébergements et des équipements, ainsi que, lorsque le projet porte sur la création ou l’extension de remontées mécaniques, les caractéristiques du domaine skiable, faisant apparaître les pistes nouvelles susceptibles d’être créées ;3° Les risques naturels auxquels le projet peut être exposé ainsi que les mesures nécessaires pour les prévenir ;4° Les effets prévisibles du projet sur le trafic et la circulation locale, l’économie agricole, les peuplements forestiers, les terres agricoles, pastorales et forestières, les milieux naturels, les paysages et l’environnement, notamment la ressource en eau et la qualité des eaux, ainsi que les mesures de suppression, compensation et réhabilitation à prévoir, et l’estimation de leur coût ;5° Les conditions générales de l’équilibre économique et financier du projet. » ; que la FFCAM se borne à soutenir que » rien ne démontre que le dossier était complet « , ce que la commune de Montgenèvre conteste en défense en se fondant sur le dossier complet qu’elle a produit en première instance ; que la FFCAM ne peut par ailleurs utilement se prévaloir de l’absence au dossier d’une étude d’impact, qui n’était prévue par aucun texte alors applicable ainsi qu’il a été dit au point 8 ; que par ailleurs, la seule circonstance que l’arrêté ait prescrit la réalisation d’une étude faunistique et floristique complémentaire n’est pas suffisante pour démontrer les lacunes du dossier ; qu’en se bornant à alléguer que le dossier ne représente pas » le point triple de trois stations de départ de télésiège au clos des Morts » qui serait impossible à insérer dans le paysage, sans davantage de précision, la FFCAM ne caractérise pas davantage l’insuffisance du dossier de présentation ; que dans ces conditions, les moyens tirés du caractère incomplet du dossier et celui selon lequel la consultation du public au regard d’un dossier incomplet est irrégulière ne peuvent qu’être écartés, comme non assortis de précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé ;
En ce qui concerne les moyens tirés de la méconnaissance des articles 3 et 5 de la Charte constitutionnelle de l’environnement et de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme :
14. Considérant qu’aux termes de l’article 3 de la Charte de l’environnement : » [toute] personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences » ; qu’en vertu de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors applicable : « … V.-Le développement touristique et, en particulier, la création d’une unité touristique nouvelle doivent prendre en compte les communautés d’intérêt des collectivités locales concernées et contribuer à l’équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant l’utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative pour les constructions nouvelles./Leur localisation, leur conception et leur réalisation doivent respecter la qualité des sites et les grands équilibres naturels. » ;
15. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que le site sur lequel est autorisée la création d’une unité touristique nouvelle pour la réalisation d’un nouveau secteur skiable supérieur à cents hectares sur le massif du Chaberton entrainant l’aménagement de 25 kilomètres de pistes de ski et un équipement de six remontées mécaniques, ne bénéficie d’aucune protection particulière au titre des sites, des monuments historiques, ou des monuments naturels ; que si trente-cinq espèces d’intérêt patrimonial ont été recensées , dont une espèce protégée, la bérardie laineuse ainsi qu’une autre espèce, la gentiane de Schleicher considérée comme en voie de déclin et nécessitant des mesures de préservation, tandis que pour la faune était signalée la présence de lagopèdes, espèce d’intérêt communautaire inscrite à l’annexe IV de la directive oiseaux, la création de l’unité touristique nouvelle autorisée par l’arrêté préfectoral du 12 juillet 2010 ne porte cependant pas à la qualité du site et aux grands équilibres naturels des atteintes telles que le projet serait contraire aux dispositions ci-dessus rappelées de l’article L. 145-3 du code de l’urbanisme et de l’article 3 de la Charte de l’environnement, compte tenu notamment du parti pris d’adapter le projet afin de contourner les stations de végétation et de se tenir le plus loin possible des stations d’espèces protégées ; que le projet prévoit en outre de traiter les sols, de les revégétaliser sur environ 7 hectares et d’édicter un cahier des charges des clauses environnementale selon la norme ISO 14001 ; que la réalisation des travaux est prévue aux périodes les moins défavorables pour la faune existante, pour laquelle la mise en place de systèmes de visualisation des remontées mécaniques est également préconisée ; qu’il est aussi prévu de recréer des habitats favorables au lagopède alpin, au tétras lyre et aux rapaces forestiers ; que des systèmes dissuasifs de pratique du ski hors piste et de gestion de la fréquentation, notamment pas des sentiers balisés, sont prévus ; que le projet a de surcroît pris le parti de limiter les terrassements en respectant au maximum les pentes existantes, de privilégier la technique de surfaçage des terrains, dans la mesure du possible en utilisant une » pelle araignée « , d’implanter les trajets des remontées mécaniques et les gares d’accueil en des points limitant leur impact visuel, de galvaniser les pylônes, d’enfouir la ligne haute tension dans le vallon des Baïsses et de nettoyer des vestiges de guerre dans le secteur du Chaberton ; que contrairement à ce qu’affirme l’appelante, il ne ressort pas des pièces du dossier que des mesures de sécurisation renforcées aggravant l’atteinte au site soient nécessaires ; qu’au demeurant, l’arrêté prescrit notamment à l’article 2 la réalisation d’une étude faunistique et floristique complémentaire descriptive des aménagements et moyens détaillés permettant de réduire les effets de fragmentation des écosystèmes, l’établissement d’un dispositif physique d’exclusion des skieurs en vallée étroite et en vallée de La Clarée, répertoriée » Natura 2000 « , l’adhésion du maître d’ouvrage et du maître d’oeuvre, qui devront répondre à la certification » HQE « , pour la réalisation de l’ensemble des aménagements, à la Charte » Chantier vert » et prévoit à l’article 3 la mise en place d’un comité de suivi de cette autorisation sous l’autorité du préfet des Hautes-Alpes pour veiller à la mise en place de ces prescriptions ; que, par suite, la FFCAM n’est pas fondée à soutenir que la décision du préfet des Hautes-Alpes est entachée d’erreur d’appréciation ;
16. Considérant qu’en vertu de l’article 4 de la Charte de l’environnement : » [toute] personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement, dans les conditions définies par la loi » ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 4 de la Charte de l’environnement doit être écarté comme inopérant dès lors que l’arrêté litigieux ne peut être regardé comme ayant pour objet de réparer un dommage causé à l’environnement ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 145-6 du code de l’urbanisme :
17. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 145-6 du code de l’urbanisme au motif que la partie supérieure du projet de route nouvelle serait situé au-dessus de la limite forestière n’est pas assorti de précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance de l’article L. 145-9 du code de l’urbanisme :
18. Considérant que la FFCAM ne peut utilement soutenir que le projet n’aurait pas été présenté dans sa globalité et induirait de nombreux projets satellites pour soutenir que les dispositions de l’article L. 145-9 du code de l’urbanisme ont été méconnues, l’acte attaqué ayant précisément pour objet d’autoriser la création d’une unité touristique nouvelle en application de ces dispositions ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des articles 12 et 14 du protocole » Tourisme » et des articles 6 et 14 du protocole » Protection des sols » de la Convention Alpine :
19. Considérant que les stipulations des articles 12 et 14 du Protocole » Tourisme » ainsi que des articles 6 et 14 du Protocole » Protection des sols » de la Convention alpine, créent seulement des obligations entre les Etats parties à la convention et ne produisent pas d’effets directs dans l’ordre juridique interne ; qu’elles ne peuvent par suite être utilement invoquées par l’appelante à l’encontre de l’autorisation contestée ;
20. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la FFCAM n’est pas fondée à demander l’annulation de l’arrêté préfectoral du 12 juillet 2010 ;
Sur les conclusions au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
21. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle aux conclusions de la FFCAM dirigées contre l’Etat et la commune de Montgenèvre qui n’ont pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante ; qu’il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la FFCAM la somme de 2 000 euros, à verser à la commune de Montgenèvre en application de ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : L’intervention de la société de chasse de Montgenèvre est admise.
Article 2 : Le jugement n° 1007937 du tribunal administratif de Marseille du 16 juillet 2012 est annulé.
Article 3 : La demande présentée par la FFCAM au tribunal administratif de Marseille est rejetée.
Article 4 : La FFCAM versera à la commune de Montgenèvre la somme de 2 000 (deux mille) euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Fédération française des clubs alpins et de montagne, à la commune de Montgenèvre et à la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Copie en sera adressée à la société de chasse de Montgenèvre.
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N° 12MA03856