Cour Administrative d’Appel de Marseille
N° 13MA01586
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. d’HERVE, président
Mme Jeanette FEMENIA, rapporteur
M. SALVAGE, rapporteur public
SELARL PLENOT-SUARES-BLANCO-ORLANDINI, avocat
lecture du lundi 1 juin 2015
Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B…a demandé au tribunal administratif de Nice d’annuler l’arrêté en date du 1er juillet 2010 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un permis de construire pour la réalisation d’une maison d’habitation avec piscine et d’enjoindre à l’administration de ré-instruire sa demande de permis de construire dans un délai d’un mois suivant le jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1004661 du 18 février 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de MmeB….
Procédure devant la cour administrative d’appel :
Par une requête enregistrée au greffe de la cour le 18 avril 2013, MmeB…, représentée par MeC…, demande à la Cour :
1°) d’annuler ce jugement du 18 février 2013 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d’annuler l’arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 1er juillet 2010 ;
3°) d’enjoindre à l’administration d’instruire à nouveau sa demande de permis de construire dans le mois suivant l’arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que le projet ne méconnaît pas l’article L. 145-3-III du code de l’urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2015, la ministre du logement et de l’égalité des territoires conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Un courrier du 02 décembre 2014 adressé aux parties en application des dispositions de l’article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il est envisagé d’appeler l’affaire à l’audience et a indiqué la date à partir de laquelle l’instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article R. 613-1 et le dernier alinéa de l’article R. 613-2.
Vu :
– le jugement et la décision attaqués ;
– les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience par un avis d’audience adressé le 24 avril 2015 portant clôture d’instruction immédiate en application des dispositions de l’article R. 613-2 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Féménia, première conseillère ;
– les conclusions de M. Salvage, rapporteur public ;
– et les observations de Me D…représentant MmeB… ;
1. Considérant que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de Mme B…tendant à l’annulation de l’arrêté en date du 1er juillet 2010 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison d’habitation avec piscine sur une parcelle cadastrée section C n° 577, sise lieudit Les Cials sur le territoire de la commune de Bouson, classée en zone de montagne ; que Mme B…relève appel de ce jugement en soutenant que son projet respecte les dispositions de l’article L. 145-3-III du code de l’urbanisme, dès lors qu’il s’insère au sein d’un groupe de constructions au sens de ces dispositions ;
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Considérant qu’en application de l’article L. 111-1-1 du code de l’urbanisme, les directives territoriales d’aménagement peuvent préciser les modalités d’application des articles L. 145-1 et suivants sur les zones de montagne et s’appliquent aux personnes et opérations qui y sont mentionnées ; que ces dispositions sont reprises au premier alinéa de l’article L. 145-2, selon lequel les directives territoriales d’aménagement précisant les modalités d’application des dispositions du présent chapitre ou, en leur absence, lesdites dispositions sont applicables à toute personne publique ou privée pour l’exécution de tous travaux ou constructions ;
3. Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient à l’autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d’autorisation d’occupation ou d’utilisation du sol mentionnée à l’article L. 145-2 du code de l’urbanisme, de s’assurer, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l’urbanisme particulières aux zones de montagne ; que, dans le cas où le territoire de la commune est couvert par une directive territoriale d’aménagement définie à l’article L. 111-1-1 du même code, ou par un document en tenant lieu, cette conformité doit s’apprécier au regard des éventuelles prescriptions édictées par ce document d’urbanisme, sous réserve que les dispositions qu’il comporte sur les modalités d’application des dispositions des articles L. 145-1 et suivants du code de l’urbanisme soient, d’une part, suffisamment précises et, d’autre part, compatibles avec ces mêmes dispositions ;
4. Considérant qu’aux termes de l’article L. 145-3-III du code de l’urbanisme » (…) / III- Sous réserve de l’adaptation, du changement de destination, de la réfection ou de l’extension limitée des constructions existantes et de la réalisation d’installations ou d’équipements publics incompatibles avec le voisinage des zones habitées, l’urbanisation doit se réaliser en continuité avec les bourgs, villages, hameaux, groupes de constructions traditionnelles ou d’habitations existants. (…) » ; que si l’article L. 145-3-III autorise les constructions en continuité d’un habitat groupé, c’est à la condition que les constructions à usage d’habitation qui le composent soient suffisamment proches les unes des autres pour former un ensemble homogène en continuité duquel peut venir s’insérer une construction nouvelle ;
5. Considérant, d’une part, que la directive territoriale d’aménagement (DTA) des Alpes-Maritimes dans sa rédaction du 2 décembre 2003 postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2003-590 du 3 juillet 2003, prescrit que peuvent être densifiés ou étendus sous conditions les secteurs urbains constitués qui sont identifiés sur une carte, comprenant un nombre significatif de maisons très proches les unes des autres et qui sont méthodologiquement révélés par la conjonction d’au moins 5 cercles concentriques sécants de 25 mètres de rayon autour de chacune de ces constructions, sans que cette méthode de détermination puisse revêtir une quelconque portée normative ; que cette même DTA prescrit, d’autre part, que dans le cas où l’extension de l’urbanisation ne peut se réaliser en continuité d’un secteur urbain constitué, elle pourra éventuellement se réaliser dans les conditions prévues au b) du quatrième alinéa de l’article L. 145-3-III, c’est à dire sous forme de hameau ou de groupes d’habitations nouveaux intégrés à l’environnement ou, à titre exceptionnel, et après accord de la chambre d’agriculture et de la commission des sites, sous forme de » zones d’urbanisation future » de taille et de capacité d’accueil limitées ; qu’enfin ce document prescrit que les secteurs d’urbanisation diffuse comprenant 2 à 4 maisons à l’hectare ou ceux susceptibles d’être urbanisés sont également délimités graphiquement, et que s’agissant précisément des secteurs d’urbanisation susceptibles d’être urbanisés, ces derniers se développent lorsque la capacité des secteurs urbains constitués et des secteurs d’urbanisation diffuse s’avèrera insuffisante pour satisfaire les besoins de la population ;
6. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier, et notamment de la photographie panoramique annotée produite, que le terrain d’assiette du projet de Mme B…est situé à flanc de colline dans une zone boisée où près de quatorze constructions ont été édifiées de façon désordonnée, comprise entre la route départementale n° 17 et la route Saint Hospice ; que cet ensemble de bâtiments, loin de former un groupe homogène, s’étale au contraire sur plus de 400 mètres linéaires et constitue un mitage diffus qui, même doté de l’ensemble des réseaux publics, ne peut être qualifié de groupe de constructions au sens des dispositions sus-rappelées du code de l’urbanisme, compte tenu du parti pris d’isolement des constructions qui le composent ; que ce secteur n’est identifié par la DTA des Alpes-Maritimes comme un secteur urbain constitué que pour sa partie Ouest distante de plus de cinquante mètres du terrain d’assiette du projet en litige, qui ne peut donc être regardé comme étant situé en continuité avec ce groupe d’habitation ; qu’il ressort du même document d’urbanisme, que le terrain d’assiette du projet en litige est classé dans un secteur susceptible d’être urbanisé, qui, à la date de la décision attaquée ne pouvait se développer dès lors que la capacité d’accueil des secteurs urbains déjà constitués et des secteurs d’urbanisation diffuse n’était pas épuisée ; qu’en l’absence de continuité avec un groupe d’habitations et en application de l’article L. 145-3-III du code de l’urbanisme, son projet ne pouvait être autorisé ;
7. Considérant, qu’il est de la nature de toute réglementation d’urbanisme de distinguer des zones où les possibilités de construire sont différentes ; que, dès lors Mme B…ne peut, utilement se prévaloir de ce que des règles différentes sont applicables à d’autres secteurs du territoire communal ou à des propriétés autres que la sienne ;
8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme B…n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, les conclusions qu’elle présente en appel à fin d’injonction et au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu’être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B…est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A…B…et à la ministre du logement, de l’égalité des territoires et de la ruralité.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l’audience du 11 mai 2015, à laquelle siégeaient :
M. d’Hervé, président de chambre,
Mme Josset, présidente assesseure,
Mme Féménia, première conseillère.
Lu en audience publique, le 1er juin 2015.