CAA de LYON
N° 19LY03809 19LY03812
lecture du mardi 30 juin 2020
1. La SAS Société d’exploitation des remontées mécaniques de Morzine et Avoriaz (SERMMA) a été assujettie à la cotisation foncière des entreprises dans les rôles de la commune de Morzine pour un montant de 724 438 euros au titre de l’année 2012. Par une première décision du 18 octobre 2013, l’administration lui a accordé, sur le fondement de l’article 1647 B sexies du code général des impôts, le dégrèvement de cette imposition, à hauteur de 398 864 euros, au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée. Par une seconde décision du 3 février 2014, l’administration a fait droit à la demande de la société tendant à réduction de la cotisation foncière des entreprises, à hauteur de 579 398 euros, compte tenu du retrait de ses bases d’imposition de la valeur locative des terrains d’assise des pistes de ski qu’elle exploite. Dès lors que la réduction des bases d’imposition de la société à la cotisation foncière des entreprises au titre de l’année 2012 était de nature à remettre en cause le dégrèvement accordé au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée de la même année, l’administration a déduit ce dernier montant du dégrèvement accordé à raison de la réduction des bases d’imposition de la société à la cotisation foncière des entreprises et a en conséquence limité le dégrèvement à prononcer à 180 534 euros. A la suite de la demande présentée par la société SERMMA devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à la réduction, à hauteur de 398 622 euros, de la cotisation foncière des entreprises et de la taxe additionnelle pour frais de chambre de commerce et d’industrie établies au titre de l’année 2012, l’administration a demandé que la réduction de la cotisation foncière des entreprises résultant de la révision des bases d’imposition de la société soit compensée par le reversement des sommes qui lui ont été indûment restituées au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée. Par un arrêt du 3 mai 2018, la cour administrative d’appel a rejeté l’appel que la société a formé contre l’article 3 du jugement du 27 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions tendant à la réduction de la cotisation foncière des entreprises établie au titre de l’année 2012. Par une décision n° 421991 du 4 octobre 2019, le Conseil d’Etat, saisi d’un pourvoi en cassation contre cet arrêt, a annulé l’arrêt de la cour et lui a renvoyé l’affaire.
Sur les conclusions à fin de décharge :
2. Aux termes de l’article 1447-0 du code général des impôts : » Il est institué une contribution économique territoriale composée d’une cotisation foncière des entreprises et d’une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. « . Aux termes de l’article 1647 B sexies du même code : » I. – Sur demande du redevable effectuée dans le délai légal de réclamation prévu pour la cotisation foncière des entreprises, la contribution économique territoriale de chaque entreprise est plafonnée en fonction de sa valeur ajoutée. (…) / II. Le plafonnement prévu au I du présent article s’applique sur la cotisation foncière des entreprises et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises diminuées, le cas échéant, de l’ensemble des réductions et dégrèvements dont ces cotisations peuvent faire l’objet (…) / III. – Le dégrèvement s’impute sur la cotisation foncière des entreprises. / (…) V. Le reversement des sommes indûment restituées est demandé selon les mêmes règles de procédure et sous les mêmes sanctions qu’en matière de cotisation foncière des entreprises « .
3. Aux termes de l’article L. 203 du livre des procédures fiscales : » Lorsqu’un contribuable demande la décharge ou la réduction d’une imposition quelconque, l’administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l’expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l’imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l’assiette ou le calcul de l’imposition au cours de l’instruction de la demande « .
4. Il résulte de la combinaison des textes cités aux points 2 et 3 que les sommes accordées à un contribuable au titre du plafonnement de sa contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée s’imputent sur la cotisation foncière des entreprises due par celui-ci. Dès lors, l’administration peut, en application des dispositions de l’article L. 203 du livre des procédures fiscales, effectuer ou demander, pour une année donnée, la compensation entre la réduction de cette cotisation qu’un contribuable demande et le reversement de celles des sommes précitées qui lui ont été indûment restituées.
5. Les dispositions précitées du III de l’article 1647 B sexies du code général des impôts imposent à l’administration de diminuer le montant de la cotisation foncière des entreprises due par un contribuable, par imputation, du montant du dégrèvement qui lui est accordé au titre du plafonnement de sa contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée. En revanche, ces dispositions n’autorisent pas l’administration à diminuer le montant de la réduction de cotisation foncière des entreprises dont peut bénéficier le même contribuable à la suite d’une révision à la baisse de ses bases d’imposition, par une telle imputation, des sommes qui lui ont été restituées au titre du dégrèvement accordé au titre du plafonnement de la contribution économique territoriale mais qui n’auraient pas dû l’être compte tenu de cette révision de base. En effet, sauf s’il y a compensation en application des dispositions de l’article L. 203 du livre des procédures fiscales, ces sommes ne peuvent donner lieu qu’à une procédure de reversement dans les conditions fixées par le V de l’article 1647 B sexies du code général des impôts.
6. L’administration a demandé au tribunal administratif de Grenoble, sur le fondement de l’article L. 203 du livre des procédures fiscales, la compensation entre l’insuffisance d’imposition consécutive à la remise en cause du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée et l’excès d’imposition résultant de la réduction des bases d’imposition de la société SERMMA à la cotisation foncière des entreprises. Le tribunal administratif de Grenoble a fait droit à cette demande.
7. L’administration établit que la réduction des bases d’imposition de la société requérante à la cotisation foncière des entreprises a eu pour conséquence de remettre en cause le dégrèvement qui lui avait été accordé à la suite de sa demande de plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée. Les droits omis résultant du plafonnement accordé à tort par l’administration sont supérieurs au montant qui résulte de la réduction des bases imposables de la société à la cotisation foncière des entreprises. Il résulte de l’instruction que la compensation sollicitée concerne le même contribuable et porte sur la même période d’imposition. Si la société requérante soutient que la compensation ne pouvait être opérée, s’agissant de deux impositions distinctes, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que les sommes accordées à un contribuable au titre du plafonnement de sa contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée s’imputent sur la cotisation foncière des entreprises due par celui-ci et qu’en conséquence, une telle compensation peut être admise. Enfin, l’administration, qui a demandé une compensation entre l’insuffisance d’imposition consécutive à la remise en cause du plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée et l’excès d’imposition résultant de la réduction de ses bases d’imposition à la cotisation foncière des entreprises, n’a, contrairement à ce que soutient la société requérante, pas sollicité une compensation entre deux dégrèvements mais entre une surimposition et une insuffisance d’imposition. Il s’ensuit que l’administration a pu à bon droit solliciter la compensation de ces deux éléments.
8. Il résulte de ce qui précède que la société SERMMA n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Sur les frais liés à l’instance :
9. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l’Etat qui n’a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à la société SERMMA la somme qu’elle réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société SERMMA est rejetée.