CAA de LYON – 1ère chambre
- N° 23LY00598
- Inédit au recueil Lebon
Lecture du mardi 04 mars 2025
Président
Mme MAUCLAIR
Rapporteur
Mme Claire BURNICHON
Rapporteur public
Mme DJEBIRI
Avocat(s)
DPA DUCROT AVOCATS ASSOCIES
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A… E…, M. D… E… et Mme C… B… ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de Megève a déclaré d’intérêt général le projet de restructuration du domaine skiable de Rochebrune et a approuvé la mise en compatibilité n° 3 du plan local d’urbanisme de la commune avec la déclaration de projet.
Par un jugement n° 1908367 du 29 décembre 2022, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur requête.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 16 février 2023 et des mémoires enregistrés les 8 septembre 2023, 14 décembre 2023 et 5 mars 2024, Mme A… E…, M. D… E…, décédé le 11 janvier 2024, et Mme C… B…, représentés par la SCP Ducrot Associés » DPA « , demandent à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du 29 décembre 2022 ;
2°) d’annuler la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de Megève a déclaré d’intérêt général le projet de restructuration du domaine skiable de Rochebrune et a approuvé la mise en compatibilité n° 3 du plan local d’urbanisme de la commune avec la déclaration de projet ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Megève le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
– leur requête est recevable dès lors qu’ils ont délivré un mandat à un tiers pour exercer un recours gracieux ;
– le jugement attaqué est irrégulier en ce que la note en délibéré adressée au tribunal par le cabinet Legal performances ne leur a pas été communiquée alors que le rapporteur public avait conclu à l’annulation de la délibération lors de l’audience ; cette note en délibéré semble avoir eu pour effet d’inverser le sens de la décision ; le principe du contradictoire est méconnu ;
– c’est à tort que les premiers juges ont considéré que le rapport de présentation était suffisant quant à la démonstration de l’intérêt général du projet ; sur les 173 pages de la note de présentation, seule une trentaine de lignes présentent l’intérêt général qui s’attache au projet et ces lignes font référence à une précédente étude non jointe au dossier réalisé en 2014-2015 ; il n’est pas précisé de justification concrète de l’impérieuse nécessité de déplacer ces installations au regard des enjeux forts identifiés dans le rapport de présentation ; cette insuffisance a privé les habitants de la commune d’une garantie ;
– le dossier soumis à enquête publique aurait dû comporter une étude d’impact en application des dispositions de l’article L. 126-1 du code de l’environnement ainsi que l’addendum en réponse à l’avis de la Mission régionale d’autorité environnementale (MRAE) ;
– la commune de Megève a soumis sa procédure de déclaration de projet aux dispositions de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme alors que le projet en litige relève de l’article L. 126-1 du code de l’environnement ; il était soumis à étude d’impact et à des modalités particulières d’informations et de participation du public qui n’ont pas été respectées ainsi qu’aux dispositions de l’article L. 411-1 du code de l’environnement ;
– le projet comporte des atteintes fortes au milieu naturel comme l’indique l’avis délibéré de la MRAE Auvergne-Rhône-Alpes au sujet de la restructuration du domaine de Rochebrune ; la MRAE relève également un important déboisement ; ils ont également fait établir un inventaire de la faune et de la flore présente sur leurs parcelles et impactées par la déclaration de projet et un botaniste a listé les habitats naturels menacés de disparition et les espèces faune et flore qui sont susceptibles de disparaître et qui sont sur les listes des espèces à protéger ; le projet vient impacter une zone humide et des espèces très menacées ; les justifications apportées au regard des atteintes portées à l’environnement ne sont pas suffisantes ; le volet climatique n’est pas abordé dans le rapport de présentation ; l’intérêt général de l’opération n’est pas démontré en méconnaissance des dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l’environnement, L. 123-6 du même code et des articles 3 à 6 de la charte de l’environnement et il n’est que temporaire dès lors que les installations devront être démantelées dans une vingtaine d’années ; la théorie du bilan coût avantage n’est pas en faveur de l’intérêt général de cette déclaration de projet ;
– l’implantation de la gare de départ de télésièges en zone rouge du PPRN méconnaît le principe de précaution et ne prend pas en compte les risques spécifiques des ouvrages de protection qui sont susceptibles d’être créés en cas de rupture ou de surverse ;
– le projet en litige méconnaît les dispositions de l’article L. 342-23 du code du tourisme ;
– la délibération en litige n’est pas compatible avec le schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) de l’Arve et avec des dispositions D 2.1, D 2.3 et D 2.8 du plan de gestion des risques d’inondation (PGRI) du bassin Rhône-Méditerranée approuvé par arrêté du 7 décembre 2015 ; le projet n’est pas compatible avec le contrat de rivière ;
– le projet est incompatible avec les dispositions des orientations d’aménagement et du règlement du plan local d’urbanisme (PLU).
Par des mémoires en défense enregistrés les 3 juillet 2023, 17 janvier 2024, 20 février 2024 et 22 mars 2024, la commune de Megève, représentée par la Selas Legal Performances, conclut au rejet de la requête et à ce qu’il soit mis à la charge des requérants le versement de la somme de 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la requête de première instance est irrecevable en raison de sa tardiveté en ce que le recours gracieux reçu le 18 octobre 2019 n’a pas eu pour effet de proroger le délai de recours contentieux dès lors qu’il a été présenté par un expert foncier mais n’était pas accompagné d’un acte exprès permettant de s’assurer que cet expert était régulièrement mandaté par les requérants ; à supposer que les requérants aient confié un mandat à cet expert foncier pour se rapprocher de la mairie par la voie d’une » réclamation amiable « , ce mandat ne porte pas sur une mission de contestation de la légalité de cette délibération et l’expert foncier a manifestement outrepassé sa mission ;
– les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 25 mars 2024, la clôture de l’instruction a été fixée en dernier lieu au 8 avril 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de l’environnement ;
– le code du tourisme ;
– le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;
Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Burnichon, première conseillère,
– les conclusions de Mme Djebiri, rapporteure publique,
– les observations de Me Giraudon pour les requérants et de Me Boiron-Bertrand substituant Me Antoine pour la commune de Megève.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A… E…, M. D… E… et Mme C… B… sont propriétaires d’un chalet situé sur un parcelle cadastrée section E n° 1804 au lieudit » La Fley » sur le territoire de la commune de Megève. M. E… étant décédé en cours d’instance, Mmes E… et B… relèvent appel du jugement du 29 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l’annulation de la délibération du 23 juillet 2019 par laquelle le conseil municipal de Megève a déclaré d’intérêt général le projet de restructuration du domaine skiable de Rochebrune et a approuvé la mise en compatibilité n° 3 du plan local d’urbanisme (PLU) de la commune.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l’article R. 731-3 du code de justice administrative : » A l’issue de l’audience, toute partie à l’instance peut adresser au président de la formation de jugement une note en délibéré « . En vertu de l’avant-dernier alinéa de l’article R. 741-2 du même code, relatif aux mentions obligatoires de la décision juridictionnelle, celle-ci doit faire » mention (…) de la production d’une note en délibéré « . S’il a toujours la faculté, dans l’intérêt d’une bonne justice, de rouvrir l’instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans une note en délibéré émanant d’une des parties à l’instance, le juge n’est tenu de le faire à peine d’irrégularité de sa décision que si cette note contient l’exposé d’une circonstance de fait ou d’un élément de droit dont la partie qui l’invoque n’était pas en mesure de faire état avant la clôture de l’instruction et qui est susceptible d’exercer une influence sur le jugement de l’affaire.
3. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier de première instance que la note en délibéré, produite par la commune de Megève après l’audience publique mais avant le rendu du jugement et enregistrée le 16 décembre 2022, a été versée au dossier et visée dans le jugement attaqué. Il ressort de l’analyse de cette note en délibéré que les éléments de fait et de droit qu’elle expose n’ont pas été susceptibles d’exercer une influence sur le jugement de l’affaire et que son contenu n’a pas été pris en compte par les premiers juges. Ainsi, en se bornant à viser la note en délibéré sans procéder à la réouverture de l’instruction et à la communication de cette pièce, les juges de première instance n’ont pas méconnu le principe du contradictoire énoncé à l’article L. 5 du code de justice administrative et n’ont pas entaché leur jugement d’irrégularité.
Sur la légalité de la délibération du 23 juillet 2019 :
4. En premier lieu, d’une part, aux termes de l’article L. 153-54 du code de l’urbanisme : » Une opération faisant l’objet d’une déclaration d’utilité publique, d’une procédure intégrée en application de l’article L. 300-6-1 ou, si une déclaration d’utilité publique n’est pas requise, d’une déclaration de projet, et qui n’est pas compatible avec les dispositions d’un plan local d’urbanisme ne peut intervenir que si : / 1° L’enquête publique concernant cette opération a porté à la fois sur l’utilité publique ou l’intérêt général de l’opération et sur la mise en compatibilité du plan qui en est la conséquence ; / 2° Les dispositions proposées pour assurer la mise en compatibilité du plan ont fait l’objet d’un examen conjoint de l’Etat, de l’établissement public de coopération intercommunale compétent ou de la commune et des personnes publiques associées mentionnées aux articles L. 132-7 et L. 132-9. /Le maire de la ou des communes intéressées par l’opération est invité à participer à cet examen conjoint « . Aux termes de l’article L. 153-55 du même code : » Le projet de mise en compatibilité est soumis à une enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement : /(…) / 2° Par le président de l’établissement public de coopération intercommunale compétent ou le maire dans les autres cas. /(…) « . Aux termes de l’article L. 153-57 du même code : » A l’issue de l’enquête publique, (…)la commune : /(…) / 2° Décide la mise en compatibilité du plan dans les autres cas « .
5. D’autre part, aux termes de l’article R. 123-8 du code de l’environnement : » Le dossier soumis à l’enquête publique comprend les pièces et avis exigés par les législations et réglementations applicables au projet, plan ou programme. /Le dossier comprend au moins : / 1° Lorsqu’ils sont requis, l’étude d’impact et son résumé non technique, le rapport sur les incidences environnementales et son résumé non technique, et, le cas échéant, la décision prise après un examen au cas par cas par l’autorité mentionnée au IV de l’article L. 122-1 ou à l’article L. 122-4, l’avis de l’autorité environnementale mentionné au III de l’article L. 122-1 et à l’article L. 122-7 du présent code ou à l’article L. 104-6 du code de l’urbanisme, ainsi que la réponse écrite du maître d’ouvrage à l’avis de l’autorité environnementale ; /(…) « . Aux termes de l’article L. 122-6 du code précité : » L’évaluation environnementale comporte l’établissement d’un rapport qui identifie, décrit et évalue les effets notables que peut avoir la mise en œuvre du plan ou du programme sur l’environnement ainsi que les solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d’application géographique du plan ou du programme. Ce rapport présente les mesures prévues pour éviter les incidences négatives notables que l’application du plan ou du programme peut entraîner sur l’environnement, les mesures prévues pour réduire celles qui ne peuvent être évitées et les mesures prévues pour compenser celles qui ne peuvent être évitées ni réduites. Il expose les autres solutions envisagées et les raisons pour lesquelles, notamment du point de vue de la protection de l’environnement, le projet a été retenu. Il définit les critères, indicateurs et modalités retenus pour suivre les effets du plan ou du programme sur l’environnement afin d’identifier notamment, à un stade précoce, les impacts négatifs imprévus et envisager, si nécessaire, les mesures appropriées./Le rapport sur les incidences environnementales contient les informations qui peuvent être raisonnablement exigées, compte tenu des connaissances et des méthodes d’évaluation existant à la date à laquelle est élaboré ou révisé le plan ou le programme, de son contenu et de son degré de précision et, le cas échéant, de l’existence d’autres plans ou programmes relatifs à tout ou partie de la même zone géographique ou de procédures d’évaluation environnementale prévues à un stade ultérieur. « . Enfin, aux termes de l’article R. 151-3 du code de l’urbanisme : » Au titre de l’évaluation environnementale, le rapport de présentation : / 1° Décrit l’articulation du plan avec les autres documents d’urbanisme et les plans ou programmes mentionnés aux articles L. 131-4 à L. 131-6, L. 131-8 et L. 131-9 avec lesquels il doit être compatible ou qu’il doit prendre en compte ; / 2° Analyse l’état initial de l’environnement et les perspectives de son évolution en exposant, notamment, les caractéristiques des zones susceptibles d’être touchées de manière notable par la mise en œuvre du plan ; / 3° Analyse les incidences notables probables de la mise en œuvre du plan sur l’environnement, notamment, s’il y a lieu, sur la santé humaine, la population, la diversité biologique, la faune, la flore, les sols, les eaux, l’air, le bruit, le climat, le patrimoine culturel architectural et archéologique et les paysages et les interactions entre ces facteurs, et expose les problèmes posés par l’adoption du plan sur la protection des zones revêtant une importance particulière pour l’environnement, en particulier l’évaluation des incidences Natura 2000 mentionnée à l’article L. 414-4 du code de l’environnement ; / 4° Explique les choix retenus mentionnés au premier alinéa de l’article L. 151-4 au regard notamment des objectifs de protection de l’environnement établis au niveau international, communautaire ou national, ainsi que les raisons qui justifient le choix opéré au regard des solutions de substitution raisonnables tenant compte des objectifs et du champ d’application géographique du plan ; / 5° Présente les mesures envisagées pour éviter, réduire et, si possible, compenser, s’il y a lieu, les conséquences dommageables de la mise en œuvre du plan sur l’environnement ; / 6° Définit les critères, indicateurs et modalités retenus pour l’analyse des résultats de l’application du plan mentionnée à l’article L. 153-27 et, le cas échéant, pour le bilan de l’application des dispositions relatives à l’habitat prévu à l’article L. 153-29. Ils doivent permettre notamment de suivre les effets du plan sur l’environnement afin d’identifier, le cas échéant, à un stade précoce, les impacts négatifs imprévus et envisager, si nécessaire, les mesures appropriées ; / 7° Comprend un résumé non technique des éléments précédents et une description de la manière dont l’évaluation a été effectuée. / Le rapport de présentation au titre de l’évaluation environnementale est proportionné à l’importance du plan local d’urbanisme, aux effets de sa mise en œuvre ainsi qu’aux enjeux environnementaux de la zone considérée. /(…) « .
6. D’une part, contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne ressort pas des dispositions précitées et notamment celles de l’article L. 153-54 du code de l’urbanisme que le dossier soumis à enquête publique doive comporter une présentation du projet assortie de la démonstration de son intérêt général ainsi qu’une explication dans un rapport de présentation des éléments modifiés du PLU par la mise en compatibilité.
7. D’autre part, si les requérants soutiennent que le dossier soumis aux habitants de Megève ne porte pas de façon cohérente, claire et pédagogique sur ses différentes composantes et que la démonstration de l’intérêt général fait défaut au regard des enjeux forts pour l’environnement, très impacté par le projet, il ressort toutefois des pièces du dossier que la note de présentation de la déclaration de projet emportant mise en compatibilité du PLU procède à une description du site et du projet, lequel répond en particulier aux objectifs du projet d’aménagement et de développement durables (PADD) du PLU, notamment la gestion et le confortement raisonnés des infrastructures liées aux sports d’hiver (objectif II.3 du PADD) dans le cadre des projets de sécurisation et d’amélioration de la fonctionnalité des domaines skiables de la commune. Elle précise que le projet en litige doit permettre la réorganisation et la restructuration du domaine skiable de Rochebrune afin de rationaliser le nombre d’installations de remontées mécaniques, les pistes et les installations de production de neige, et de permettre un transfert plus aisé entre les secteurs de Rochebrune, Petite Fontaine et Cote 2000. Si cette note renvoie à une étude menée en 2014-2015 par le cabinet DSCA, les requérants ne remettent pas en cause cette étude qui a relevé, d’une part, que le téléski de Rochefort, qui permet l’accès au domaine de Cote 2000, n’est pas adapté aux skieurs débutants, avec une forte pente et deux pistes d’accès uniquement de niveau rouge et, d’autre part, que le téléski des Lanchettes, qui constitue la principale installation permettant le retour vers le secteur de Petite Fontaine, a un débit trop limité entrainant une longue file d’attente, la longueur importante de l’installation avec une pente très soutenue par endroit et avec un angle, rendant l’installation difficile d’accès pour les skieurs de niveau débutant et moyen et ne donne accès qu’à une piste de niveau rouge. Cette note, après avoir décrit le site et le projet et notamment la présentation des trois installations créées (un téléski et deux télésièges), procède à un descriptif de l’état initial de l’environnement en précisant la méthodologie d’inventaire réalisée, les résultats d’inventaires des habitats naturels, les zones règlementaires et d’inventaires et la biodiversité (ZNIEFF de type I et II et zone humides) recensées sur la commune, expose ensuite la fonctionnalité des réseaux écologiques présents sur le secteur, évoque le schéma régional de cohérence écologique (SRCE) de la région et les trames vertes et bleues sur la commune, au regard des différents enjeux présents. Cette note de présentation analyse également le contexte paysager du secteur, la ressource en eau et son contexte réglementaire avec le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Rhône-Méditerranée 2016-2021, le contrat de rivière » Arly-Chaise-Doron « , les zones humides et l’alimentation en eau potable de la commune via les sept captages présents ainsi que les enjeux de la déclaration de projet sur la ressource en eau, les sols et sous-sols, la ressource énergétique et les facteurs climatiques. Sont ensuite examinés la qualité de l’air, la gestion des déchets et du bruit, les risques naturels et technologiques avant une présentation de la synthèse de l’ensemble de ces enjeux et des perspectives d’évolution de l’état initial de l’environnement. Cette note, en troisième partie, comporte un » rapport explicatif » de la déclaration de projet et dans sa quatrième partie, une évaluation environnementale qui permet de conclure à la nécessité de modifier le zonage pour le mettre en conformité avec le PLU et notamment une modification de la délimitation du domaine skiable dès lors que le projet implique une extension de 4,01 ha du domaine skiable. Il est également mentionné les problématiques de ce projet au regard du SDAGE Rhône-Méditerranée 2016-2021 et les mesures préconisées, la compatibilité du projet avec le contrat de rivière, avec le SRCE notamment et analyse les effets attendus de la mise en œuvre du projet sur l’environnement et les mesures envisagées pour éviter, réduire et compenser les effets du projet sur les habitats naturels, la faune et la flore, sur les habitats et les espèces d’intérêt communautaire du site Natura 2000 le plus proche de la zone d’étude (à environ 7 kms), les zones d’inventaires, des cours d’eau et milieux associés, les continuités écologiques selon les différentes phases du projet (travaux, exploitation), ainsi que les effets temporaires et permanent sur les paysages, la ressource en eau, sur les sols et sous-sols, les ressources énergétiques, gaz à effet de serre et qualité de l’air, les effets en phase travaux et en phase d’exploitation sur la production de déchets, l’exposition des populations au bruit, sur les risques naturels et technologiques. Enfin, cette note comporte une explication des choix retenus pour établir le projet avant de comprendre un » résumé non technique » qui reprend notamment les enjeux environnementaux et les incidences et mesures du projet sur l’environnement. En conséquence, contrairement à ce que soutiennent les requérants, la note de présentation du projet de mise en compatibilité du PLU, comporte, conformément aux dispositions précitées et notamment celles de R. 151-3 du code de l’urbanisme, les enjeux du projet au regard de l’intérêt général et des atteintes à l’environnement qu’il est susceptible d’emporter.
8. En deuxième lieu, aux termes de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme : » L’Etat et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent, après enquête publique réalisée conformément au chapitre III du titre II du livre Ier du code de l’environnement, se prononcer, par une déclaration de projet, sur l’intérêt général d’une action ou d’une opération d’aménagement au sens du présent livre ou de la réalisation d’un programme de construction. (…). / (…) / Lorsque l’action, l’opération d’aménagement ou le programme de construction est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, les dispositions nécessaires pour mettre en compatibilité les documents d’urbanisme ou pour adapter les règlements et servitudes mentionnés au deuxième alinéa font l’objet d’une évaluation environnementale, au sens de la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil, du 27 juin 2001, relative à l’évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l’environnement. /(…). « . Aux termes de l’article L. 300-1 du même code, dans sa version en vigueur : » Les actions ou opérations d’aménagement ont pour objets (…) d’organiser le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs (…)./L’aménagement, au sens du présent livre, désigne l’ensemble des actes des collectivités locales ou des établissements publics de coopération intercommunale qui visent, dans le cadre de leurs compétences, d’une part, à conduire ou à autoriser des actions ou des opérations définies dans l’alinéa précédent et, d’autre part, à assurer l’harmonisation de ces actions ou de ces opérations./(…) « .
9. Le projet en litige vise à réorganiser et restructurer le domaine skiable de Rochebrune par la création de trois installations (un téléski et deux télésièges) et tend à rationaliser le nombre d’installations de remontées mécaniques, les pistes et les installations de production de neige afin de permettre un transfert plus aisé entre les secteurs de Rochebrune, Petite Fontaine et Cote 2000. Il relève d’une opération d’aménagement au sens des dispositions précitées de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme qui relève du livre III de la partie législative du code de l’urbanisme relatif à l’aménagement foncier et nécessite, ainsi qu’il a été décidé par le président de la mission régionale d’autorité environnementale Auvergne Rhône-Alpes du conseil général de l’environnement et du développement durable dans sa décision du 18 juillet 2018 après examen au cas par cas, une évaluation environnementale afin de procéder à la mise en compatibilité du PLU par la déclaration de projet précitée. Cette opération d’aménagement, au sens de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme, est toutefois distincte du projet public de travaux, d’aménagements ou d’ouvrages soumis à étude d’impact au sens de l’article L. 126-1 du code de l’environnement, qui relève d’une procédure différente, ce qui est au demeurant confirmé par l' » Addendum au rapport de présentation » du 26 juin 2019 qui précise dans son préambule qu' » une grande majorité des interrogations levées par la MRAE trouvent leur réponse dans l’étude d’impact réalisée au titre de la rubrique 43 de l’annexe du R. 122-2 du code de l’environnement « , laquelle concerne les » pistes de ski, remontées mécaniques et aménagements associés « . Les requérants ne peuvent ainsi utilement soutenir que le dossier soumis à enquête publique était incomplet en l’absence d’étude d’impact de l’article L. 126-1 du code de l’environnement, ni, à défaut de précision suffisante, de l’absence de l’addendum au rapport de présentation précitée lors de l’enquête publique qui a eu lieu du 15 avril 2019 au 17 mai suivant.
10. En troisième lieu, compte tenu de ce qui vient d’être dit et en l’absence d’éléments nouveaux en appel, le moyen tiré de ce que la délibération attaquée méconnaît les dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l’environnement doit être écarté par les motifs retenus par les premiers juges qu’il y a lieu pour la cour d’adopter.
11. En quatrième lieu, pour l’application des dispositions de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme précité, il appartient à l’autorité compétente d’établir, de manière précise et circonstanciée, sous l’entier contrôle du juge, l’intérêt général qui s’attache à la réalisation de l’opération constituant l’objet de la mise en compatibilité du plan local d’urbanisme, au regard notamment des objectifs économiques, sociaux et urbanistiques poursuivis par la collectivité publique intéressée.
12. Il ressort des pièces du dossier et ainsi qu’il a été dit, que la note de présentation soumise à enquête publique précise que la commune de Megève, en Haute-Savoie, qui est un ancien village de montagne qui s’est converti, petit à petit, depuis le début du 20ème siècle, en une station touristique de renommée internationale, tout en conservant une activité agricole importante, bénéficie d’une vocation touristique qui s’appuie notamment sur l’existence d’une offre étendue, diversifiée et de qualité en équipements, activités et hébergements. Le projet de développement économique de la commune doit, ainsi que cela ressort du PLU, se concrétiser par des projets visant le maintien de son attractivité touristique, tout en s’inscrivant dans le cadre d’une protection renforcée des qualités paysagères et environnementales du territoire. Le projet en litige, qui répond en particulier aux objectifs du PADD du PLU, lequel constitue le projet de territoire de la commune de Megève, s’inscrit dans les enjeux de l’attractivité touristique de la station, en ce qu’il est nécessaire de permettre la gestion et le confortement raisonnés des infrastructures liées aux sports d’hiver. Enfin, et ainsi qu’il a été relevé par le commissaire-enquêteur, le projet en litige emportera également une mise en sécurité du site pour les jeunes skieurs et les débutants, compte tenu des aménagements actuels qui sont qualifiés d' » anciens » et de » vétustes . Il résulte de ce qui précède que la commune de Megève a pu, compte tenu de l’objet de ce projet et de l’importance du tourisme dans cette commune, estimer, sans faire une inexacte application des dispositions de l’article L. 300-6 du code de l’urbanisme que le projet déclaré et la mise en compatibilité de son PLU présentait un intérêt général au sens de ces dispositions.
13. Par ailleurs, si les requérants évoquent que la mise en œuvre du projet en litige impliquera le déboisement de près de dix hectares, emportant la disparition de l’habitat de plusieurs espèces protégées, cette question relève de la mise en œuvre des opérations de défrichement relevant d’une législation distincte et d’une autorisation distincte d’ailleurs contestée par les requérants devant le tribunal administratif de Grenoble et est donc sans incidence sur la légalité de la mise en compatibilité du PLU en litige. De plus, si les requérants produisent une expertise patrimoniale relative à l’incidence de la mise en œuvre du projet sur les espèces protégées, la note de présentation et plus particulièrement l’étude environnementale modifiée après les observations de la MRAE, prévoit explicitement, ainsi qu’il a été dit au point 7, les incidences notables probables de la mise en compatibilité sur l’environnement, et des mesures pour éviter, réduire et, le cas échéant, compenser les incidences négatives et notamment la réalisation, courant mai 2019 d’un dossier de dérogation pour la destruction d’espèces protégées et la mise en place, en tant que mesures compensatoires, » d’ilots de senescence » qui seront classés en espaces boisés classés au sein du PLU. De plus, si cette note précise que l’impact sur les milieux ouverts est important dès lors que 5,8 hectares de milieux prairiaux seront impactés par le projet, celui-ci est principalement temporaire et des mesures de réduction seront mises en œuvre, seulement 0,2 ha devant être définitivement détruits par la mise en place des pylônes et des gares des remontées. Par ailleurs, seulement deux zones humides ont été identifiées sur la zone d’étude. Enfin, le volet climatique est également examiné par cette note de présentation qui indique qu’une » tendance à la baisse de l’enneigement est difficile à prouver sur ces vingt-sept dernières années. L’influence du massif du Mont-Blanc permet sans aucun doute à Megève de bénéficier d’un microclimat favorable au maintien des précipitations neigeuses, quand d’autres stations souffrent d’une baisse remarquable de leur enneigement « . Au regard de l’ensemble de ces éléments, les atteintes susceptibles d’être portées à l’environnement par la mise en place du projet n’apparaissent pas excessives au regard de l’objectif d’intérêt général poursuivi par le projet en litige.
14. En cinquième lieu, aux termes de l’article L. 342-20 du code du tourisme : » Les propriétés privées ou faisant partie du domaine privé d’une collectivité publique peuvent être grevées, au profit de la commune, (…), d’une servitude destinée à assurer le passage, l’aménagement et l’équipement des pistes de ski alpin et des sites nordiques destinés à accueillir des loisirs de neige non motorisés (…) « . Aux termes de l’article L. 342-21 du même code : » La servitude est créée par décision motivée de l’autorité administrative compétente sur proposition de l’organe délibérant de la commune, (…), après enquête parcellaire effectuée comme en matière d’expropriation (…) « . Aux termes de l’article L. 342-22 du même code : » Cette décision définit le tracé, la largeur et les caractéristiques de la servitude, ainsi que les conditions auxquelles la réalisation des travaux est subordonnée. (…) « . Enfin, aux termes de l’article L. 342-23 du code du tourisme : » La servitude ne peut grever les terrains situés à moins de vingt mètres des bâtiments à usage d’habitation ou professionnel édifiés ou dont la construction a été autorisée avant la date de délimitation des zones et secteurs prévus à l’article L. 151-38 du code de l’urbanisme, ni les terrains attenant à des maisons d’habitation et clos de murs à la date de cette délimitation sauf : /(…) « . Ces dispositions tendent à l’instauration d’une servitude et relèvent d’une législation distincte de la mise en compatibilité du PLU en litige. Les requérants ne peuvent dès lors utilement s’en prévaloir pour remettre en cause la légalité de la délibération contestée.
15. En dernier lieu, les moyens tirés de ce que le projet en litige, qui tend uniquement à la mise en compatibilité du PLU de la commune de Megève dans le cadre de la restructuration de son domaine skiable, méconnaîtrait, notamment eu égard à l’implantation de la gare de départ de télésièges n° 1, le plan de prévention des risques naturels, le plan de gestion des risques d’inondation (PGRI) du bassin Rhône-Méditerranée approuvé par arrêté du 7 décembre 2015, le contrat de rivière, le SAGE de l’ARVE approuvé par arrêté préfectoral du 23 juin 2018 ou encore qu’il serait incompatible avec les dispositions des orientations d’aménagement et de programmation et le règlement du PLU doivent, compte tenu de l’objet précité de cette délibération, être écartés comme étant inopérants, de tels moyens relevant au surplus de la légalité des autorisations d’urbanisme ultérieurement délivrées pour la mise en œuvre de la déclaration de projet en litige.
16. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin d’examiner la recevabilité de la demande de première instance, que Mmes E… et B… ne sont pas fondées à soutenir que c’est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l’article L. 761- 1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que Mmes E… et B… demandent au titre des frais qu’elles ont exposés soit mise à la charge de la commune de Megève, qui n’est pas partie perdante. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de Mmes E… et B… le versement d’une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Megève.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mmes E… et B… est rejetée.
Article 2 : Mmes E… et B… verseront la somme de 2 000 euros à la commune de Megève au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C… B…, représentant unique en application des dispositions de l’article R. 751-3 du code de justice administrative, et à la commune de Megève.