CAA de LYON
N° 13LY00135
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre – formation à 3
M. BOUCHER, président
M. Hervé DROUET, rapporteur
M. CLEMENT, rapporteur public
PORTEJOIE & ASSOCIES, avocat
lecture du mardi 1 décembre 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L’association Vent Libre, Mme B…E…, M. D…H…, M. G…C…et M. A… F…ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d’annuler les arrêtés nos SPA-2011-47, SPA-2011-48, SPA-2011-49 et SPA-2011-50 du 19 octobre 2011 par lesquels le préfet du Puy-de-Dôme a autorisé sur le territoire de la commune d’Eglisolles le changement d’usage respectivement des parcelles cadastrées section AW nos 125, 126, 130 et 161 appartenant à la section de Moissonnières, des parcelles cadastrées section AW nos 128, 129, 133 et 134 appartenant à la section de Molhac, des parcelles cadastrées section AV nos 53, 54 et 55 appartenant à la section de Rouffix et des parcelles cadastrées section AT n° 302 et section AV nos 1, 49, 50, 51, 52 et 278 appartenant à la section de Sicaud, afin de permettre l’implantation d’éoliennes sur ces parcelles.
Par un jugement n° 1102316 du 20 novembre 2012, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2013, l’association Vent Libre, Mme B… E…, M. D… H…, M. G… C…et M. A… F…, représentés par la SCP I…, demandent à la Cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 novembre 2012 ;
2°) d’annuler les quatre arrêtés préfectoraux du 19 octobre 2011 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat le versement à chacun d’une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
– le jugement attaqué est irrégulier en ce qu’il a décliné à tort la compétence de la juridiction administrative, dès lors que les arrêtés en litige qui visent à permettre l’installation d’éoliennes par la conclusion de baux emphytéotiques conférant des droits réels sur des parcelles boisées ont pour effet de modifier la consistance du domaine privé des sections de commune concernées ;
– les arrêtés en litige méconnaissent l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales, dès lors que l’absence de commission syndicale dans les sections de Molhac, de Rouffix et de Sicaud ne répond pas aux conditions fixées par le deuxième alinéa de l’article L. 2411-3 et par l’article L. 2411-5 dudit code ;
– les arrêtés en litige méconnaissent l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales, dès lors que c’est le maire, et non le conseil municipal, qui a saisi le préfet à fin de convocation des électeurs des sections concernées ;
– la procédure de consultation des électeurs des sections concernées est irrégulière, dès lors que la question posée lors de cette consultation a porté, non pas sur le changement d’usage des parcelles mais sur la signature par le maire, après consultation du conseil municipal, de promesses de bail en vue d’installer des éoliennes sur les parcelles ;
– les arrêtés en litige méconnaissent l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales, dès lors qu’en l’absence d’accord de la majorité des électeurs des sections concernées, le conseil municipal de la commune d’Eglisolles ne pouvait valablement délibérer sur le changement d’usage des parcelles ;
– la délibération du 16 septembre 2011 par laquelle le conseil municipal de la commune d’Eglisolles a autorisé son maire à signer la promesse de bail est irrégulière, dès lors que la séance du 16 septembre 2011 du conseil municipal a débuté avant l’heure de convocation et que les personnes souhaitant assister à la réunion ont été éconduites alors que le huis-clos n’avait pas été demandé ;
– le processus qui a conduit à l’édiction des arrêtés en litige a été caractérisé par un manque de transparence, de concertation, d’information et de communication à l’égard des habitants et propriétaires des sections concernées ;
– le motif des arrêtés en litiges fondé sur les objectifs du Grenelle de l’environnement, est entaché d’erreur de fait et d’erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article 23 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009, dès lors que l’implantation d’un parc éolien dans la vallée de l’Ance n’est pas indispensable et peut être évité ;
– le motif des arrêtés en litiges tiré de ce que le projet s’inscrit dans le schéma éolien du parc naturel régional du Livradois-Forez est entaché d’erreur de fait et d’erreur manifeste d’appréciation, eu égard à l’intérêt qui s’attache à la préservation de ce paysage naturel emblématique du Livradois-Forez qu’est la vallée de l’Ance et au fait que la charte du parc naturel régional a attribué à la commune d’Eglisolles le label de silhouette de village à préserver, l’implantation d’un parc éolien portant, par ses dimensions et par sa localisation, une atteinte grave au caractère et à l’intérêt de ce site remarquable et à l’harmonie et à la mise en valeur du paysage ; qu’en outre, le schéma éolien du parc naturel régional ne saurait fonder l’implantation d’éoliennes sur le territoire de la commune d’Eglisolles, dès lors que la cartographie établie contient une contradiction en prévoyant sur ce secteur une zone destinée à l’implantation d’éoliennes soumises à permis de construire qui chevauche celle considérée comme « haut lieu » sur laquelle doit être mise en place une démarche globale et concertée de protection et de valorisation ;
– le motif des arrêtés en litiges tiré de la sous-exploitation des parcelles concernées et de l’absence de leur mise en valeur est entaché d’erreur de fait et d’erreur manifeste d’appréciation, dès lors que la plupart des zones concernées sont en réalité exploitées et génèrent des revenus non négligeables, dont un bénéfice net de plus de 12 000 euros en 2010 ;
– les arrêtés en litige portent atteinte au droit de propriété garanti notamment par l’article 544 du code civil ;
– le motif des arrêtés en litiges selon lequel le projet représente une source de revenus pour chaque section est entaché d’erreur de fait et d’erreur manifeste d’appréciation, dès lors que l’implantation d’un parc éolien diminuerait les ressources issues de la gestion forestière en raison du déboisement de surfaces nécessaires, la valeur des terres sectionnales en raison de la réduction des surfaces exploitables et la valeur des habitations voisines en raison des nuisances paysagères et sonores engendrées par le fonctionnement des éoliennes ;
– le motif des arrêtés en litiges tiré de ce que le projet représente une aide financière pour la commune et la communauté de communes est entaché d’erreur de fait et d’erreur manifeste d’appréciation, dès lors que les retombées financières et fiscales au profit des collectivités locales seront en réalité minimes ;
– les arrêtés en litige sont entachés d’erreur manifeste d’appréciation, dès lors que le projet d’implantation de parc éolien porte atteinte aux richesses naturelles et environnementales exceptionnelles du site qui profite d’un classement en zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et qu’il présente des risques potentiels pour la santé humaine.
La requête a été communiquée au ministre de l’intérieur et à la commune d’Eglisolles agissant pour les sections de commune, qui n’ont pas produit de mémoire.
Par ordonnance du 30 avril 2013, la clôture de l’instruction a été fixée au 31 mai 2013.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de l’environnement ;
– la loi du 10 juin 1793 ;
– la loi du 9 ventôse an XII ;
– le décret du 21 septembre 1805 ;
– la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 ;
– le décret n° 2011-874 du 25 juillet 2011 portant classement du parc naturel régional du Livradois-Forez ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Drouet, président-assesseur ;
– les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;
– et les observations de MeI…, pour l’association Vent Libre, MmeE…, M. H…, M. C…et M.F….
1. Considérant que l’association Vent Libre, MmeE…, M.H…, M. C…et M. F… relèvent appel du jugement du 20 novembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître leur demande tendant à l’annulation des arrêtés nos SPA-2011-47, SPA-2011-48, SPA-2011-49 et SPA-2011-50 du 19 octobre 2011 du préfet du Puy-de-Dôme autorisant sur le territoire de la commune d’Eglisolles le changement d’usage respectivement des parcelles cadastrées section AW nos 125, 126, 130 et 161 appartenant à la section de Moissonnières, des parcelles cadastrées section AW nos 128, 129, 133 et 134 appartenant à la section de Molhac, des parcelles cadastrées section AV nos 53, 54 et 55 appartenant à la section de Rouffix et des parcelles cadastrées section AT n° 302 et section AV nos 1, 49, 50, 51, 52 et 278 appartenant à la section de Sicaud, afin de permettre d’y implanter des éoliennes ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :
2. Considérant qu’il résulte des dispositions combinées des lois des 10 juin 1793 et 9 ventôse an XII et du décret impérial additionnel à celui du 9 ventôse an XII que la juridiction administrative est compétente pour connaître des contestations qui peuvent s’élever en matière de partage et de jouissance des biens communaux et des biens sectionnaux ;
3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable à la date des décisions en litige : » Dans le cas où, en application du deuxième alinéa de l’article L. 2411-3 et de l’article L. 2411-5, la commission syndicale n’est pas constituée, le changement d’usage ou la vente de tout ou partie des biens de la section est décidé par le conseil municipal statuant à la majorité absolue des suffrages exprimés, après accord de la majorité des électeurs de la section convoqués par le représentant de l’Etat dans le département. / L’engagement de tout ou partie des biens de la section dans une association syndicale ou une autre structure de regroupement foncier est proposé par le conseil municipal ou par la moitié des électeurs de la section. Le désaccord ne peut être exprimé que par un vote du conseil municipal statuant à la majorité des suffrages exprimés ou par la majorité des électeurs de la section convoqués par le représentant de l’Etat dans le département. / En cas de désaccord ou en l’absence de vote des électeurs de la section sur les propositions visées aux deux alinéas précédents, il est statué par arrêté motivé du représentant de l’Etat dans le département. / (…) » ;
4. Considérant que la demande présentée par l’association Vent Libre et autres devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand tend à l’annulation d’arrêtés préfectoraux autorisant sur le territoire de la commune d’Eglisolles le changement d’usage de parcelles des sections de Moissonnières, de Molhac, de Rouffix et de Sicaud, afin de permettre l’implantation d’éoliennes sur ces parcelles boisées qui sont utilisées pour l’affouage ; que, dans ces conditions, ces arrêtés doivent être regardés comme affectant les conditions de jouissance de ces parcelles sectionnales ; qu’ainsi, le litige soulevé se rattache à la jouissance de biens sectionnaux au sens des dispositions combinées des lois des 10 juin 1793 et 9 ventôse an XII et du décret impérial additionnel à celui du 9 ventôse an XII ; qu’il appartient, dès lors, à la juridiction administrative de connaître de ce litige ; que les requérants sont, par suite, fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;
5. Considérant qu’il y a lieu d’évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l’association Vent Libre et autres devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Sur la légalité des arrêtés du préfet du Puy-de-Dôme du 19 octobre 2011 :
6. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article L. 2411-3 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable à la date des décisions en litige : » Les membres de la commission syndicale, choisis parmi les personnes éligibles au conseil municipal de la commune de rattachement, sont élus selon les mêmes règles que les conseillers municipaux des communes de moins de 2 500 habitants, sous réserve de l’application des dispositions du troisième alinéa du présent article et de celles du premier alinéa de l’article L. 2411-5. Après chaque renouvellement général des conseils municipaux, lorsque la moitié des électeurs de la section ou le conseil municipal lui adressent à cette fin une demande dans les six mois suivant l’installation du conseil municipal, le représentant de l’Etat dans le département convoque les électeurs de la section dans les trois mois suivant la réception de la demande. » ; que selon l’article L. 2411-5 du même code : » La commission syndicale n’est pas constituée et ses prérogatives sont exercées par le conseil municipal, sous réserve des dispositions des articles L. 2411-8 et L. 2411-16, lorsque le nombre des électeurs appelés à désigner ses membres est inférieur à dix ou lorsque la moitié au moins des électeurs n’a pas répondu à deux convocations successives du représentant de l’Etat dans le département faites à un intervalle de deux mois. Il en est de même lorsque les revenus ou produits des biens de la section sont inférieurs à un montant minimal annuel moyen fixé dans les conditions prévues par un décret. (…) » ;
7. Considérant qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que des électeurs des sections de Molhac, de Rouffix et de Sicaud auraient, dans les conditions prévues par les dispositions précitées du deuxième alinéa de l’article L. 2411-3 du code général des collectivités territoriales, adressé au représentant de l’Etat dans le département une demande de convocation des électeurs de ces sections en vue de l’élection des membres des commissions syndicales ; que, par suite, le moyen tiré de l’irrégularité de l’absence de commission syndicale dans les sections de Molhac, de Rouffix et de Sicaud doit être écarté ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu’il ne résulte pas des dispositions précitées de l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales que la saisine du représentant de l’Etat en vue de la convocation des électeurs de la section pour qu’ils se prononcent sur le changement d’usage de biens de la section doive émaner du conseil municipal à l’exclusion du maire ; que, par suite, les requérants ne sauraient utilement soutenir que la procédure serait irrégulière au motif que le préfet a été saisi par le maire de la commune d’Eglisolles de la demande de convocation des électeurs des sections concernées ;
9. Considérant, en troisième lieu, que les requérants font valoir que la procédure de consultation des électeurs des sections est irrégulière en ce que la question posée lors de cette consultation a porté, non pas sur le changement d’usage des parcelles, mais sur la signature par le maire, après consultation du conseil municipal, de promesses de bail en vue d’installer des éoliennes sur les parcelles ; que, toutefois, la question ainsi formulée inclut nécessairement le changement d’usage qui a été autorisé par les arrêtés préfectoraux en litige en vue de l’implantation d’éoliennes ; que, dans ces conditions, la procédure n’est entachée, à cet égard, d’aucune irrégularité ;
10. Considérant, en quatrième lieu, qu’il résulte des dispositions précitées du premier alinéa et du troisième alinéa de l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales, qu’en cas de désaccord sur un changement d’usage des biens de la section entre la majorité des électeurs de la section et le conseil municipal, appelé nécessairement à se prononcer sur ce changement, le représentant de l’Etat dans le département statue sur ce changement d’usage ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir qu’en l’absence d’accord de la majorité des électeurs des sections concernées, le conseil municipal de la commune d’Eglisolles ne pouvait valablement délibérer sur le changement d’usage des parcelles ;
11. Considérant, en cinquième lieu, que les requérants excipent à l’encontre des arrêtés préfectoraux en litige de l’illégalité d’une délibération du 16 septembre 2011 du conseil municipal de la commune d’Eglisolles en relevant que la séance aurait débuté avant l’heure de convocation et que les personnes souhaitant assister à la séance auraient été éconduites alors que le huis-clos n’avait pas été demandé ;
12. Considérant, d’une part, qu’il ressort des mentions des arrêtés en litige concernant les sections de Moissonnières, Molhac et Rouffix, que ces trois arrêtés ont été édictés à la suite, non pas d’une délibération du 16 septembre 2011 du conseil municipal de la commune d’Eglisolles, mais de trois délibérations du 6 juin 2011 de ce conseil se prononçant favorablement sur trois projets de bail portant sur l’installation d’éoliennes sur les territoires de ces trois sections ; qu’ainsi, les requérants ne sauraient utilement invoquer l’illégalité de la délibération du 16 septembre 2011 à l’encontre de ces trois arrêtés préfectoraux ;
13. Considérant, d’autre part, que si l’arrêté concernant la section de Sicaud a été pris à la suite de la délibération du 16 septembre 2011 du conseil municipal de la commune d’Eglisolles approuvant le projet de bail pour l’installation d’éoliennes sur le territoire de cette section, les requérants n’établissent pas, en se bornant à produire un courrier du 2 novembre 2011 du président de l’association Vent Libre au préfet du Puy-de-Dôme, que la séance du 16 septembre 2011 du conseil municipal aurait débuté avant l’heure de convocation, ni que des personnes souhaitant assister à la séance auraient été éconduites ;
14. Considérant qu’il résulte de ce qui vient d’être dit aux points 11 à 13 que l’exception d’illégalité invoquée à l’encontre des quatre arrêtés préfectoraux en litige doit être écartée ;
15. Considérant, en sixième lieu, que doit être écarté comme dépourvu de précisions suffisantes permettant d’en apprécier le bien-fondé le moyen tiré de ce que le processus qui a conduit à l’édiction des arrêtés en litige a été caractérisé par un manque de transparence, de concertation, d’information et de communication à l’égard des habitants et propriétaires des sections concernées ;
16. Considérant, en septième lieu, que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir des dispositions de l’article 23 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l’environnement, qui se bornent à fixer à l’Etat des objectifs en vue de stopper la perte de biodiversité sauvage et domestique ainsi que de restaurer et de maintenir les capacités d’évolution de cette biodiversité ;
17. Considérant, en huitième lieu, que si les requérants soutiennent que le motif des arrêtés en litige faisant référence aux objectifs du Grenelle de l’environnement visant à favoriser le développement des énergies renouvelables et à porter à 23 % la part de ces énergies renouvelables d’ici 2020 est entaché d’erreur de fait et d’erreur manifeste d’appréciation au regard de l’article 23 de la loi du 3 août 2009, dès lors que, selon eux, l’implantation d’un parc éolien dans la vallée de l’Ance n’est pas indispensable et peut être évité, ce moyen est dépourvu de précisions suffisantes permettant à la Cour d’en apprécier la portée et le bien-fondé ;
18. Considérant, en neuvième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier de première instance que la charte du parc naturel régional du Livradois-Forez, approuvée par décret du 25 juillet 2011, au sein duquel est situé la commune d’Eglisolles, comporte notamment un objectif opérationnel de valorisation d’autres sources d’énergies renouvelables que le bois, dont l’énergie éolienne, pour laquelle ledit parc s’est doté en juillet 2009 d’un schéma éolien comportant quatre secteurs géographiques, comprenant notamment le territoire de la commune d’Eglisolles, où les collectivités locales peuvent envisager de créer des zones de développement de l’éolien ; que si, en vertu de l’annexe V à ladite charte, la vallée de l’Ance, dans laquelle est située la commune d’Eglisolles, a été classée comme haut-lieu pour lequel doit être mise en place une démarche globale et concertée de protection et de valorisation et si la même commune a été classée comme ayant une silhouette de village à préserver au titre de l’objectif stratégique 1.2 « Construire les paysages de demain », la présence de cette commune dans l’un des quatre secteurs géographiques du schéma éolien du parc naturel régional n’est pas incompatible avec ces deux classements, dès lors qu’au titre de l’objectif opérationnel de valorisation d’autres sources d’énergies renouvelables que le bois, le syndicat mixte du parc naturel régional du Livradois-Forez s’engage, en vertu de la charte, à suivre la mise en oeuvre de son schéma éolien et à accompagner les collectivités locales dans leur démarche d’investissement en la matière en veillant notamment à ce que les éoliennes soumises à permis de construire soient localisées dans les secteurs identifiés au plan du parc ou à proximité immédiate, sous réserve d’études approfondies conduites par un paysagiste indépendant des opérateurs éoliens ; qu’en outre, s’agissant des grandes éoliennes, le schéma éolien du parc naturel régional préconise notamment l’inscription des aménagements dans le paysage, la maîtrise du risque de mitage et de prolifération et la maîtrise des effets de dominance ainsi qu’une distance minimale de 700 mètres par rapport à l’habitat ; que, s’agissant des petites éoliennes, le schéma éolien du parc préconise notamment la réalisation d’une étude particulière sur les conditions d’une bonne intégration du projet de construction dans son environnement bâti et paysager et un certain éloignement par rapport aux maisons d’habitation ; que, dans ces conditions, le motif des arrêtés en litige selon lequel les projets de signature de promesses de bail en vue d’installer des éoliennes sur les parcelles sectionnales concernées s’inscrivent dans le schéma éolien du Parc naturel régional du Livradois-Forez n’apparaît entaché ni d’erreur de fait, ni d’erreur manifeste d’appréciation ;
19. Considérant, en dixième lieu, que si les requérants contestent la motivation des arrêtés en litige en ce qu’ils seraient notamment fondés sur la sous-exploitation des parcelles concernées et sur l’absence de leur mise en valeur, le préfet n’a pas retenu de tels motifs en se bornant à relever que « les parcelles concernées sont essentiellement utilisées pour l’affouage et qu’aucune autre mise en valeur n’y est réalisée » ;
20. Considérant, en onzième lieu, qu’il est constant que les revenus tirés de la location des parcelles sectionnales bénéficieront aux sections de commune concernées ; que, dès lors, le motif des arrêtés en litige tiré de ce que le projet représente une source de revenus pour chaque section n’est entaché ni d’erreur de fait, ni d’erreur manifeste d’appréciation ;
21. Considérant, en douzième lieu, que le préfet soutient dans ses écritures de première instance, sans être sérieusement contredit sur ce point par les requérants, que l’implantation d’éoliennes génèrera notamment des recettes fiscales avec l’instauration d’une contribution économique territoriale estimée à environ 500 euros par mégawatt et une imposition foncière forfaitaire de 2 200 euros par mégawatt et par éolienne installée ; que, par suite, le motif des arrêtés en litige tiré de ce que le projet représente une aide financière pour la commune et la communauté de communes n’est entaché ni d’erreur de fait, ni d’erreur manifeste d’appréciation ;
22. Considérant, en treizième lieu, que si la commune d’Eglisolles comporte trois zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) de type I dénommées « forêt des Taillades », « hautes chaumes des Pradeaux » et « bois Chétioux et bois du Clovis », il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles sectionnales dont le changement d’usage est autorisé par les arrêtés préfectoraux en litige soient situées à l’intérieur ou à proximité immédiate de ces zones ; que si l’intégralité du territoire de la commune d’Eglisolles est inclus dans la ZNIEFF dite du « Haut-Forez », l’atteinte alléguée à cette zone par le changement d’usage autorisé n’est pas établie par les pièces du dossier ; que, par suite, et alors que ce changement d’usage ne préjuge pas des lieux précis d’implantation des éoliennes, ni de leur nombre, ni de leurs caractéristiques, s’agissant notamment de leur hauteur et de la taille des pales, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés qu’ils attaquent seraient entachés d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de l’existence de ces ZNIEFF ;
23. Considérant, en quatorzième lieu, qu’en l’absence de précision sur les distances séparant les maisons d’habitation des éoliennes dont la construction est envisagée et alors que le schéma éolien du parc naturel régional du Livradois-Forez préconise des distances minimales par rapport à l’habitat, ainsi qu’il a été dit au point 18, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés en litige seraient entachés d’erreur manifeste d’appréciation au regard des risques potentiels pour la santé humaine ;
24. Considérant, en quinzième et dernier lieu, que les arrêtés préfectoraux en litige sont fondés sur les dispositions législatives précitées de l’article L. 2411-16 du code général des collectivités territoriales, lesquelles ont pour objet et pour effet, non pas de priver les sections de communes de leurs droits de propriété, mais de déterminer, conformément à l’intérêt général, les modalités de gestion des biens et droits desdites sections ; que, par suite, le moyen selon lequel ces arrêtés porteraient atteinte au droit de propriété garanti par l’article 544 du code civil, doit être écarté ;
25. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède, et sans qu’il soit besoin d’examiner les fins de non-recevoir opposées en première instance par le préfet du Puy-de-Dôme, que l’association Vent Libre et autres ne sont pas fondés à demander l’annulation des arrêtés nos SPA-2011-47, SPA-2011-48, SPA-2011-49 et SPA-2011-50 du 19 octobre 2011 du préfet du Puy-de-Dôme ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
26. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que les requérants demandent au titre leurs frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas, dans la présente instance, partie perdante ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 20 novembre 2012 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par l’association Vent Libre, MmeE…, M.H…, M. C… et M. F…devant le tribunal administratif de Clermont-Ferrand et le surplus des conclusions de leur requête, sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l’association Vent Libre, à Mme B…E…, à M. D… H…, à M. G… C…, à M. A… F…, au ministre de l’intérieur, à la section de commune de Moissonnières, à la section de commune de Molhac, à la section de commune de Rouffix et à la section de commune de Sicaud.
Copie en sera adressée au préfet du Puy-de-Dôme.
Délibéré après l’audience du 3 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre ;
M. Drouet, président-assesseur ;
Mme Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique le 1er décembre 2015.