Archives de catégorie : Vie du Master 2 Droit de la Montagne

Pyrénées-Orientales/ Chasse au grand tétras/ Illégalité

Conseil d’État

N° 411084   
ECLI:FR:CECHS:2018:411084.20181121
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre
Mme Marie-Laure Denis, rapporteur
Mme Julie Burguburu, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats


lecture du mercredi 21 novembre 2018 REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Le Groupe ornithologique du Roussillon a demandé au tribunal administratif de Montpellier d’annuler pour excès de pouvoir l’arrêté n° 2013-275-0002 du 2 octobre 2013 par lequel le préfet des Pyrénées-Orientales a, d’une part, attribué à l’association communale de chasse agréée de Llo un plan de chasse pour le prélèvement d’un spécimen de l’espèce grand tétras pour la saison 2013-2014 et, d’autre part, fixé les conditions générales de chasse. Par un jugement n° 1305601 du 6 mars 2015, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l’arrêté préfectoral du 2 octobre 2013.

Par un arrêt n° 15MA01921 du 30 mars 2017, la cour administrative d’appel de Marseille a, rejeté l’appel formé par la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés respectivement le 31 mai 2017 et le 25 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre d’Etat, ministre de la transition écologique et solidaire demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à son appel.


Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
– la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 du Parlement européen et du Conseil concernant la conservation des oiseaux sauvages ;
– le code de l’environnement ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de Mme Marie-Laure Denis, conseiller d’Etat,

– les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l’association Groupe ornithologique du Roussillon.



Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 2 octobre 2013, le préfet des Pyrénées-Orientales a attribué au président de l’association communale de chasse agrée de Llo un plan de chasse pour le prélèvement d’un spécimen de l’espèce grand tétras pour la saison de chasse 2013/2014 et a fixé les conditions générales de la chasse. Le tribunal administratif de Montpellier a, à la demande du Groupe Ornithologique du Roussillon, annulé cet arrêté. Le ministre chargé de la chasse se pourvoit en cassation contre l’arrêt par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté son appel contre ce jugement.

2. D’une part, aux termes de l’article 7 de la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009 concernant la conservation des oiseaux sauvages :  » Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour maintenir ou adapter la population de toutes les espèces d’oiseaux visées à l’article 1er à un niveau qui corresponde notamment aux exigences écologiques, scientifiques et culturelles, compte tenu des exigences économiques et récréationnelles « . Aux termes de l’article 7 de cette directive :  » 1. En raison de leur niveau de population, de leur distribution géographique et de leur taux de reproductivité dans l’ensemble de la Communauté, les espèces énumérées à l’annexe II peuvent faire l’objet d’actes de chasse dans le cadre de la législation nationale. Les États membres veillent à ce que la chasse de ces espèces ne compromette pas les efforts de conservation entrepris dans leur aire de distribution (…). / 4. Les États membres s’assurent que la pratique de la chasse (…) telle qu’elle découle de l’application des mesures nationales en vigueur, respecte les principes d’une utilisation raisonnée et d’une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d’oiseaux concernées, et que cette pratique soit compatible, en ce qui concerne la population de ces espèces, notamment des espèces migratrices, avec les dispositions découlant de l’article 2. / Ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s’applique la législation sur la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance (…) « .

3. D’autre part, aux termes de l’article L. 420-1 du code de l’environnement :  » La gestion durable du patrimoine faunique et de ses habitats est d’intérêt général. La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, culturel, social et économique, participe à cette gestion et contribue à l’équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines en assurant un véritable équilibre agro-sylvo-cynégétique. / Le principe de prélèvement raisonnable sur les ressources naturelles renouvelables s’impose aux activités d’usage et d’exploitation de ces ressources. Par leurs actions de gestion et de régulation des espèces dont la chasse est autorisée ainsi que par leurs réalisations en faveur des biotopes, les chasseurs contribuent au maintien, à la restauration et à la gestion équilibrée des écosystèmes en vue de la préservation de la biodiversité. Ils participent de ce fait au développement des activités économiques et écologiques dans les milieux naturels, notamment dans les territoires à caractère rural « . Aux termes de l’article L. 425-6 du même code, dans sa rédaction en vigueur à la date de l’arrêté préfectoral contesté :  » Le plan de chasse détermine le nombre minimum et maximum d’animaux à prélever sur les territoires de chasse. Il tend à assurer le développement durable des populations de gibier et à préserver leurs habitats, en conciliant les intérêts agricoles, sylvicoles et cynégétiques (…) « .

4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions, et notamment de celles de la directive 2009/147/CE du 30 novembre 2009, éclairées par la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, devenue la Cour de justice de l’Union européenne qu’elles poursuivent un objectif d’intérêt général de protection des espèces d’oiseaux sauvages qui doit être concilié, en vertu de l’article 2 de la directive, avec des exigences économiques et récréationnelles. En vertu de l’article 7 de la directive, les espèces concernées peuvent en principe faire l’objet d’actes de chasse, dès lors qu’ils ne compromettent pas les efforts de conservation entrepris dans leur aire de distribution et qu’ils respectent les principes d’une utilisation raisonnée et d’une régulation équilibrée du point de vue écologique des espèces d’oiseaux concernées.

5. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’en relevant que l’effectif de grands tétras mâles a connu une diminution de l’ordre de 70 % à l’échelle de l’ensemble des Pyrénées françaises entre 1960 et 2009, que l’effectif de l’espèce demeure inférieur au seuil critique de cinq cents unités à la date de l’arrêté attaqué dans le département des Pyrénées-Orientales et même inférieur à cent dans l’unité de gestion  » Canigou-Puigmal-Carança  » dont relève l’association de chasse agréée de Llo, alors que l’indice de reproduction est insuffisant pour assurer la conservation favorable de l’espèce à court et moyen terme dans son aire de répartition naturelle, s’agissant d’un oiseau sédentaire, la cour administrative d’appel a porté sur les faits de l’espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

6. Compte tenu de ces constatations souveraines, en jugeant que le prélèvement, ne serait-ce que d’un seul spécimen, était de nature à compromettre les efforts de conservation de l’espèce, qui ne peuvent être regardés comme suffisants pour empêcher une diminution sensible des effectifs de grand tétras susceptible de conduire, à terme, à la disparition de l’espèce au sein de l’unité de gestion  » Canigou-Puigmal-Carança  » comme au sein de l’ensemble du département des Pyrénées-Orientales, la cour n’a pas commis les erreurs de droit reprochées.

7. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre de la transition écologique et solidaire doit être rejeté.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3000 euros qui sera versée à l’association Groupe ornithologique du Roussillon au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.




D E C I D E :
————–
Article 1er : Le pourvoi du ministre d’Etat, ministre de la transition écologique et solidaire est rejeté.
Article 2 : L’Etat versera à l’association Groupe ornithologique du Roussillon une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre d’Etat, ministre de la transition écologique et solidaire et à l’association Groupe ornithologique du Roussillon.

Urbanisme en montagne : instruction du Gouvernement du 12 octobre 2018

Presque deux ans après la « loi Montagne 2 », le gouvernement a (enfin) publié le 12 octobre 2018 une instruction globale sur le droit de l’urbanisme applicable en montagne ( à l’exception de la rénovation des chalets d’alpage, dans l’attente d’un décret à venir). Cette instruction a pour but d’être un instrument au service des élus et des communes de montagne, afin de leur permettre d’assurer la sécurité juridique de leurs documents d’urbanisme et de leurs autorisations de construire. Elle est le fruit d’une large (et difficile) concertation.

Voir la circulaire et, surtout, ses fiches techniques ici :
http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/loi-montagne-4094

La circulaire est également sur le site circulaires.gouv.fr

 

 

Accident sur névé/ Faute du guide (non)

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mardi 20 mars 2018
N° de pourvoi: 17-81228
Non publié au bulletin Rejet

M. Soulard (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat(s)


 

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :


M. Dominique X…, partie civile,

contre l’arrêt de la cour d’appel de CHAMBÉRY, chambre correctionnelle, en date du 11 janvier 2017, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 15 décembre 2015, n° 14-86.591), dans la procédure suivie contre M. Jean-Pierre Y… du chef de la contravention de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 30 janvier 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bellenger, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Zita ;

Sur le rapport de M. le conseiller Bellenger, les observations de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, de la société civile professionnelle GARREAU, BAUER-VIOLAS et FESCHOTTE-DESBOIS, avocats en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général CORDIER ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué que M. Dominique X… a été blessé au cours d’une course en montagne encadrée par M. Jean-Pierre Y…, guide de haute montagne, après avoir glissé lors du franchissement d’un névé et dévissé ; que, poursuivi pour la contravention de blessures involontaires, M. Y… a été renvoyé des fins de la poursuite; que la partie civile a relevé appel de cette décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, préliminaire, 2, 418, 459, 460, 464, 536, 546, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté M. X… de toutes ses demandes ;

« aux motifs propres que « la recevabilité de la constitution de partie civile de M. Dominique X… n’est pas contestée ; qu’au fond, sur l’appel des seules dispositions civiles d’un jugement de relaxe, la juridiction du second degré ne peut en l’état de la jurisprudence de la Cour de cassation rechercher si les faits qui lui sont déférés constituent une infraction pénale, sous peine de méconnaître le principe de la présomption d’innocence garanti par l’article 6, § 2, de la Convention européenne des droits de l’homme ; que toutefois, l’autorité de chose jugée au pénal ne s’attachant à aucune des dispositions civiles du jugement entrepris, l’appel de la partie civile a pour effet de lui déférer l’action en réparation des conséquences dommageables qui peuvent résulter de la faute civile du prévenu définitivement relaxé, qui doit être démontrée à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite ; qu’en l’espèce, il convient de rechercher, sur la base des articles 1382 et 1383 du code civil, si M. Jean-Pierre Y… est de par son fait, sa négligence ou son imprudence responsable du dommage causé à M. Dominique X…, sachant qu’en sa qualité de guide de haute montagne, il était tenu à une obligation de moyens de sécurité consistant à assurer la progression de ses clients dans les meilleures conditions en anticipant les obstacles prévisibles et après s’être assuré de leur niveau et de la qualité de leur équipement ; qu’il est établi en procédure que l’accident est survenu à 2220 mètres d’altitude dans la première partie de la marche entreprise par le groupe, progressant en direction du refuge Albert 1er ; que les conditions météorologiques, la période de l’année, la topographie des lieux ne rendaient pas impératif l’usage de chaussures de montagne autres que les chaussures de trail portées par M. Dominique X…, ni l’ajout de crampon ou un encordement, ce d’autant que M. Dominique X… était un alpiniste chevronné ; que le chemin, à l’exception des portions recouvertes par des névés était dégagé ; qu’un premier névé avait été traversé peu de temps auparavant sans difficulté et les caractéristiques du névé suivant à franchir, telles que décrites par MM. Jean-Pierre Y… et Gilles Z… qui l’a inspecté à son arrivée sur les lieux ultérieurement mais aussi par M. Claude B… qui l’avait emprunté plusieurs heures auparavant ne justifiaient pas la prise de précautions autres que celles mises en oeuvre par M. Jean-Pierre Y…, soit un appel à la vigilance et son positionnement particulier lors du franchissement de sa partie pentue par M. Dominique X… ; que les causes de la perte d’équilibre de M. Dominique X… demeurent en réalité indéterminées ; qu’il ne ressort en effet que de ses déclarations recueillies à l’hôpital le 10 juillet 2012 et erronées sur d’autres points factuels qu’une plaque de glace vive se trouvait sous la surface du névé ; que de même, aucun lien ne peut être formellement établi entre sa glissade et les chaussures de trail qu’il avait choisies de porter sur cette première portion du parcours moins ardue que sa poursuite après le refuge Albert 1er ; que dans ce contexte, il apparaît qu’aucune faute, imprudence ou négligence en lien avec l’accident survenu ne peuvent être retenues à l’encontre de M. Jean-Pierre Y… ;

« 1°) alors que les juges du fond, statuant sur les intérêts civils, doivent se prononcer dans la limite des conclusions dont ils sont saisis ; que la partie civile a formé appel, le 2 octobre 2013, à l’encontre des dispositions civiles du jugement de relaxe et qu’elle a seulement sollicité que la cour d’appel constate l’existence de l’infraction ; qu’en recherchant néanmoins l’existence d’une faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite, tandis qu’elle n’était saisie d’aucune action en réparation des conséquences dommageables pouvant résulter de la faute civile du prévenu définitivement relaxé, la cour d’appel a violé les dispositions susvisées ;

« 2°) alors que, en toute hypothèse, la procédure pénale doit être contradictoire ; qu’en relevant d’office le moyen de droit selon lequel, en raison du revirement opéré par la Cour de cassation le 5 février 2014, la juridiction répressive du second degré saisie du seul appel de la partie civile à l’encontre d’un jugement de relaxe ne pouvait plus rechercher si les faits lui étant déférés sont constitutifs d’une infraction pénale et que l’appel de la partie civile avait pour effet de lui déférer l’action en réparation des conséquences dommageables qui peuvent résulter de la faute civile du prévenu définitivement relaxé, sans recueillir préalablement les observations du prévenu et de la partie civile, la cour d’appel a violé les dispositions susvisées » ;

Attendu que pour débouter la partie civile de ses demandes, l’arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Attendu qu’en statuant ainsi, et dès lors que, saisie du seul appel de la partie civile contre une décision de relaxe, elle devait rechercher l’existence d’une faute civile à partir et dans les limites des fait objet de la poursuite, peu important qu’aucune demande en réparation du préjudice n’ait été formée devant elle, la cour d’appel, qui n’a pas changé le fondement juridique de la demande ni méconnu le principe du contradictoire, a justifié sa décision ;

D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 1382, 1383, 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, 2, 418, 497, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que l’arrêt attaqué a débouté M. X… de toutes ses demandes ;

« aux motifs propres que sur l’appel des seules dispositions civiles d’un jugement de relaxe, la juridiction du second degré ne peut en l’état de la jurisprudence de la Cour de cassation rechercher si les faits qui lui sont déférés constituent une infraction pénale, sous peine de méconnaître le principe de la présomption d’innocence garanti par l’article 6, § 2, de la Convention européenne des droits de l’homme ; que toutefois, l’autorité de chose jugée au pénal ne s’attachant à aucune des dispositions civiles du jugement entrepris, l’appel de la partie civile a pour effet de lui déférer l’action en réparation des conséquences dommageables qui peuvent résulter de la faute civile du prévenu définitivement relaxé, qui doit être démontrée à partir et dans la limite des faits objets de la poursuite ; qu’en l’espèce, il convient de rechercher, sur la base des articles 1382 et 1383 du code civil, si M. Jean-Pierre Y… est de par son fait, sa négligence ou son imprudence responsable du dommage causé à M. Dominique X…, sachant qu’en sa qualité de guide de haute montagne, il était tenu à une obligation de moyens de sécurité consistant à assurer la progression de ses clients dans les meilleures conditions en anticipant les obstacles prévisibles et après s’être assuré de leur niveau et de la qualité de leur équipement ; qu’il est établi en procédure que l’accident est survenu à 2 220 mètres d’altitude dans la première partie de la marche entreprise par le groupe, progressant en direction du refuge Albert 1er ; que les conditions météorologiques, la période de l’année, la topographie des lieux ne rendaient pas impératif l’usage de chaussures de montagne autres que les chaussures de trail portées par M. Dominique X…, ni l’ajout de crampon ou un encordement, ce d’autant que M. Dominique X… était un alpiniste chevronné ; que le chemin, à l’exception des portions recouvertes par des névés était dégagé ; qu’un premier névé avait été traversé peu de temps auparavant sans difficulté et les caractéristiques du névé suivant à franchir, telles que décrites par MM. Jean-Pierre Y… et Gilles Z… qui l’a inspecté à son arrivée sur les lieux ultérieurement mais aussi par M. Claude B… qui l’avait emprunté plusieurs heures auparavant ne justifiaient pas la prise de précautions autres que celles mises en oeuvre par M. Jean-Pierre Y…, soit un appel à la vigilance et son positionnement particulier lors du franchissement de sa partie pentue par M. Dominique X… ; que les causes de la perte d’équilibre de M. Dominique X… demeurent en réalité indéterminées ; qu’il ne ressort en effet que de ses déclarations recueillies à l’hôpital le 10 juillet 2012 et erronées sur d’autres points factuels qu’une plaque de glace vive se trouvait sous la surface du névé ; que de même, aucun lien ne peut être formellement établi entre sa glissade et les chaussures de trail qu’il avait choisies de porter sur cette première portion du parcours moins ardue que sa poursuite après le refuge Albert 1er ; que dans ce contexte, il apparaît qu’aucune faute, imprudence ou négligence en lien avec l’accident survenu ne peuvent être retenues à l’encontre de M. Jean-Pierre Y… ;

« 1°) alors que les règles de fond de la responsabilité civile s’imposent au juge pénal qui en est saisi par la victime ; qu’ayant constaté que M. X… était le client de M. Y…, ce dont il se déduisait l’existence d’un contrat, l’arrêt attaqué retient néanmoins que la responsabilité de ce dernier doit être recherchée « sur la base des articles 1382 et 1383 du code civil » ; qu’en statuant ainsi sur un fondement délictuel, et non contractuel, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;

« 2°) alors que, en toute hypothèse, manque à son obligation de sécurité le guide de haute montagne qui invite son client, chaussé de simples chaussures de trail, dépourvu de crampons et non encordé, à s’engager sur un névé qu’il n’a pas personnellement reconnu sans se placer directement derrière lui de façon à pouvoir parer une glissade ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé les textes susvisés » ;

Attendu que pour débouter la partie civile de ses demandes, l’arrêt énonce que les conditions météorologiques, la période de l’année, la topographie des lieux ne rendaient pas impératif l’usage de chaussures de montagne autres que les chaussures de trail portées par M. Dominique X…, ni l’ajout de crampon ou un encordement, ce d’autant que M. X… était un alpiniste chevronné, que le chemin, à l’exception des portions recouvertes par des névés, était dégagé, qu’un premier névé avait été traversé peu de temps auparavant sans difficulté, que les caractéristiques du névé suivant à franchir ne justifiaient pas la prise de précautions autres que celles mises en oeuvre par M. Y…, soit un appel à la vigilance et son positionnement particulier lors du franchissement de sa partie pentue par M. X… ; que les juges ajoutent que les causes de la perte d’équilibre de M. X… demeurent en réalité indéterminées, qu’aucun lien ne peut être formellement établi entre sa glissade et les chaussures de trail qu’il avait choisi de porter sur cette première portion du parcours moins ardue que sa poursuite après le refuge Albert 1er et que, dans ce contexte, il apparaît qu’aucune faute, imprudence ou négligence en lien avec l’accident survenu ne peut être retenue à l’encontre de M. Y… ;
Attendu qu’en statuant ainsi, et dès lors que l’application des dispositions de l’article 470-1 n’a pas été sollicitée avant la clôture des débats et qu’elle a souverainement apprécié qu’en raison des circonstances, aucune faute civile constituée à partir et dans les limites des faits objet de la poursuite ne pouvait être reprochée au prévenu, la cour d’appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales invoquées ;

D’où il suit que le moyen ne peut qu’être écarté ;
Et attendu que l’arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 2 500 euros la somme que M. X… devra payer à M. Y… au titre de l’article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt mars deux mille dix-huit ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.

Retour sur le colloque de Chambéry « Les remontées mécaniques et le droit »

Les 20-21 novembre 2017, le Centre de Droit Public et Privé des Obligations et de la Consommation (CDPPOC) de la Faculté de Droit de l’Université Savoie Mont Blanc et le Centre de Recherches Juridiques (CRJ) de la Faculté de Droit de l’Université Grenoble Alpes ont organisé avec l’aide des étudiants du M2 droit de la montagne, un colloque national sur le thème des remontées mécaniques et du droit, au Centre des Congrès Le Manège à Chambéry.

L’OBJECTIF ? Clarifier le cadre juridique de la gestion des remontées mécaniques en zone de montagne, mais également en milieu urbain, en pointant les incertitudes existantes, en identifiant les problèmes posés et en proposant des solutions opérationnelles.

L’ORIGINALITÉ ? Associer aux expertises des universitaires celles des praticien·ne·s de la région, métiers du droit (avocats spécialisés, magistrats), de la montagne (professionnel·le·s des remontées mécaniques, des stations, etc.), élus locaux et agents des collectivités territoriales et des services de l’État, etc.

LE RÉSULTAT ? Des regards croisés et des débats riches sur les différentes problématiques confirmant qu’il fallait traiter un tel sujet : cadre légal, gestion des remontées, urbanisme et environnement, financement, contrats, fiscalité, police, sécurité et responsabilité.

Plus de 150 congressistes furent présents, universitaires et professionnel·le·s de la montagne et du droit, milieux associatifs, étudiants. Ils attendent désormais la publication des actes de ces deux journées fructueuses (disponibles au second semestre 2018).

Article Dauphiné Libéré (21/11/2017 ) : Article DL 21nov 2017

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Les remontées mécaniques et le droit