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Etablissement sportif/ Fermeture administrative/ Entraîneurs étrangers/ Contrôle des qualifications

CAA de LYON

N° 16LY04458
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. POMMIER, président
Mme Rozenn CARAËS, rapporteur
Mme VIGIER-CARRIERE, rapporteur public
PLANES, avocat

 

lecture du jeudi 18 octobre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L’entreprise à but non lucratif de droit britannique British ski academy (BSA) a demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler la décision du 2 mars 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie a suspendu ses activités d’encadrement, d’animation, d’enseignement et d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin.

Par un jugement n° 1601503 du 27 octobre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 décembre 2016, l’entreprise à but non lucratif de droit britannique British ski academy, représentée par MeC…, demande à la cour :

1°) d’annuler le jugement du 27 octobre 2016 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d’annuler la décision du 2 mars 2016 par laquelle le préfet de la Haute-Savoie l’a suspendue de ses activités d’encadrement, d’animation, d’enseignement et d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin et de l’entraînement de ses pratiquants ;

3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 3 500 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
– la décision du 2 mars 2016 méconnaît l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 dès lors que la mise en demeure n’avait pas pour objet d’engager une procédure contradictoire et qu’il n’est pas fait état de sa réponse dans l’arrêté critiqué ni d’une vérification auprès de la préfecture de l’Isère ;
– l’arrêté est entaché d’une erreur de droit dès lors qu’il est fondé sur l’article R. 212-88 du code du sport, issu de la transposition de la directive 2005/36/CE sur la reconnaissance des qualifications professionnelles au sein de l’Union européenne, mais ne prend pas en compte les modifications substantielles apportées par la directive 2013/55/UE ; depuis le 18 janvier 2016, date limite de transposition dans la législation des Etats membres, cette directive 2013/55/UE s’applique de plein droit dans la législation française et se substitue directement aux textes en vigueur dans le code du sport en l’absence de transposition dans les délais ; les articles R. 212-92 et suivants du code du sport n’étaient plus applicables à la date où l’arrêté a été pris ;
– l’article 5 de la directive interdit la restriction au niveau national et l’expérience professionnelle est reconnue comme une qualification ; si la formation est réglementée, il suffit de démontrer que l’entraîneur est légalement établi dans son pays ; la notion de sécurité ne peut plus être opposée ; Mme D…a produit à l’appui de sa déclaration les pièces visées dans la directive et notamment son immatriculation d’activité en Pologne, la copie de son diplôme de formation et la copie de son casier judiciaire et, par suite, il devait être fait application de l’article 5 de la directive et non des articles du code du sport devenus inapplicables depuis le 18 janvier 2016 ;
– en application de l’article 7 de la directive, l’exigence d’une déclaration par un Etat membre est possible lors de la première prestation et sans formalisme particulier et la déclaration autorise le prestataire à exercer son activité ; Mme D…et Mme E…étaient déclarées ; Mme D…bénéficiait d’une présomption de qualification qui l’autorisait à travailler en France, la demande de pièces complémentaires est irrégulière dès lors qu’elle ne respecte pas les dispositions de la directive 2013/55/UE ; la combinaison des articles 5 et 7 de la directive la dispense de produire tout justificatif personnel supplémentaire pour pouvoir exercer en France son activité professionnelle ;
– à titre subsidiaire, l’établissement était parfaitement en règle au regard des dispositions applicables antérieurement au 18 janvier 2016 dès lors qu’une réponse motivée a été adressée à la préfecture de l’Isère le 22 février et que l’arrêté critiqué ne fait pas état de cette réponse et est, par suite, entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ; l’arrêté ne fait pas état des deux déclarations de Mme E…et MmeD… ; la détention d’un récépissé, dont la preuve de l’absence d’une telle détention appartient au préfet, n’est qu’une formalité non substantielle dès lors que l’article R. 212-93 prévoit que l’absence de réponse de la préfecture vaut autorisation ; la motivation de l’arrêté ne constate pas un exercice irrégulier en France ; l’arrêté a été pris sur la base d’informations partielles, juridiquement et factuellement incomplètes ; les prétendues lettres du 22 décembre 2015 à l’appui desquelles il n’est produit qu’un accusé de réception postal unique ne peuvent produire aucun effet et ne sont pas opposables aux tiers et ne constituent pas une réponse régulière à la déclaration de libre prestation de services des personnes ; les entraîneurs de la BSA ayant régulièrement déclaré une activité de libre prestation de services en 2015 et aucune réponse ne leur étant parvenue dans le délai d’un mois, ils sont réputés exercer légalement leur activité en France, les services de l’Etat ne peuvent plus leur demander d’informations complémentaires et doivent leur délivrer un récépissé ;

Par un mémoire enregistré le 28 juillet 2017, le ministre des sports conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
– en prononçant la fermeture de l’établissement en application de l’article L. 322-5 du code du sport, le préfet de la Haute-Savoie a pris une mesure de police qui a été motivée en application de l’article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ; la procédure contradictoire prévue par l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 a été respectée dès lors que par lettre du 27 janvier 2016 le préfet de la Haute-Savoie a mis en demeure BSA de fournir la liste des entraîneurs intervenant pour son compte, de régulariser dans un délai de 15 jours leur situation et de cesser immédiatement l’emploi des éducateurs non déclarés et qu’à défaut de respect de ces obligations, il envisageait de proposer la fermeture administrative de l’établissement ;
– Mme E…etD…, de nationalité polonaise, exerçaient les fonctions d’entraîneurs pour le compte de BSA sans posséder les qualifications requises ; BSA employait d’autres entraîneurs non titulaires d’un récépissé de déclaration de prestations de services ou d’une carte professionnelle d’éducateur sportif en violation des articles L. 212-1 et suivants du code du sport ;
– en ce qui concerne MmeD…, celle-ci n’a pas fourni au pôle national les justificatifs exigés par l’article A. 212-182-2 du code du sport ; les courriers adressés à Mme D… sont précis et personnalisés ; les circonstances que ces courriers ne mentionnent ni leur envoi sous forme de lettre recommandée avec avis de réception ni la date de réception des dossiers de déclaration sont sans incidence sur leur régularité dès lors que les pièces du dossier prouvent la date de réception par Mme D…et l’administration n’a pas opposé à l’intéressée un délai mais le caractère incomplet des dossiers de demande de déclaration ;
– le préfet n’avait pas l’obligation de mentionner dans son arrêté les demandes de déclaration préalable d’activités et il n’a commis aucune erreur fait ou d’appréciation en estimant que Mme D…exerçait son activité en France illégalement ;
– les modifications apportées par la directive 2013/55/UE ne permettent pas d’écarter l’obligation faite à BSA de régulariser la situation des entraîneurs ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 ;
– le code du sport ;
– le code des relations entre le public et l’administration ;
– le code de justice administrative.

 

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Caraës,
– et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public,

 

1. Considérant que l’entreprise à but non lucratif de droit britannique, British ski academy (BSA), a pour objet d’entraîner et d’encadrer les jeunes skieurs anglais afin de les préparer à participer aux compétitions internationales de ski et de snowboard organisées par la fédération internationale de ski (FIS) ; qu’elle dispose depuis 1996 d’un établissement dans la commune des Houches qui dispense des entraînements pour les courses ; qu’après une mise en demeure, le préfet de la Haute-Savoie a, par arrêté du 2 mars 2016, décidé, sur le fondement du 2ème alinéa de l’article L. 322-5 du code du sport, de suspendre l’exercice par cet établissement des activités d’encadrement, d’animation, d’enseignement, d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin et de l’entrainement de ses pratiquants, au motif que la BSA a employé plusieurs entraineurs non titulaires d’un récépissé de déclaration de prestation de services ou d’une carte professionnelle d’éducateur sportif ; que la BSA relève appel du jugement du 27 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du préfet de la Haute-Savoie du 2 mars 2016 ;

Sur la légalité de l’arrêté du préfet de la Haute-Savoie :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 121-1 du code des relations entre le public et l’administration, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2016,  » Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d’une procédure contradictoire préalable.  » ; qu’aux termes de l’article L. 121-2 de ce code,  » Les dispositions de l’article L. 121-1 ne sont pas applicables : (…)3° Aux décisions pour lesquelles des dispositions législatives ont instauré une procédure contradictoire particulière (…)  » ; qu’aux termes de l’article L. 122-1 du même code,  » Les décisions mentionnées à l’article L. 211-2 n’interviennent qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. / L’administration n’est pas tenue de satisfaire les demandes d’audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique.  » ;

3. Considérant, ainsi que l’ont retenu à bon droit les premiers juges, que la suspension des activités, exercées par la BSA dans son établissement des Houches, d’encadrement, d’animation, d’enseignement, d’accompagnement contre rémunération de l’activité de ski alpin et de l’entraînement de ses pratiquants, qui est fondée sur  » des éléments de constatations, d’audition et de vérification administrative « , constitue une mesure de police devant être motivée ; que, par suite, les dispositions du code du sport n’ayant pas organisé de procédure contradictoire particulière, le préfet de la Haute-Savoie était tenu, avant de prendre la décision critiquée, de permettre à l’établissement BSA de présenter ses observations ; qu’il ressort des pièces du dossier que, par lettre du 27 janvier 2016, le préfet de la Haute-Savoie a mis en demeure la BSA de se mettre en conformité avec la réglementation et lui a précisé qu’à défaut de cette mise en conformité, l’établissement pourrait faire l’objet d’une fermeture administrative ; que, par courrier du 22 février 2016, l’établissement a accusé réception de la mise en demeure du préfet de la Haute-Savoie et a fait part de ses observations quant à la régularité de la situation des entraîneurs ; que la circonstance que l’arrêté ne fait pas état précisément de sa réponse est sans incidence sur la régularité de la procédure suivie alors, au surplus, que l’arrêté critiqué précise  » qu’il y a eu divers échanges de courriers depuis 2014  » ; que, par suite, l’arrêté du 2 mars 2016 ne méconnaît pas les dispositions précitées du code des relations entre le public et l’administration ;

4. Considérant que si l’arrêté attaqué ne fait pas état des deux déclarations de Mme E… et MmeD…, il indique qu’à la suite du contrôle exercé le 1er mars 2016 et ayant donné lieu à un procès-verbal de constatation, ces deux personnes n’ont pas été en mesure de présenter un récépissé de prestation de services ou une carte professionnelle d’éducateur sportif en méconnaissance des articles L. 212-1 et L. 212-11 du code du sport ; que l’arrêté précise encore, en se fondant sur les dispositions de l’article L. 322-5 du même code, que  » les prestations ainsi rendues ne garantissent pas, dans l’environnement spécifique enneigé où elles se déroulent la sécurité des usagers notamment en raison, d’une part, de qualification professionnelle reconnue et, d’autre part, de déclarations conformes aux règlements et procédures en vigueur à l’autorité administrative  » ; que, par suite, la décision du 2 mars 2016 satisfait aux exigences de motivation en fait et en droit ;

5. Considérant qu’aux termes de l’article L. 322-5 du code du sport,  » L’autorité administrative peut s’opposer à l’ouverture ou prononcer la fermeture temporaire ou définitive d’un établissement qui ne présenterait pas les garanties prévues aux articles L. 322-1 et L. 322-2 et ne remplirait pas les obligations d’assurance mentionnées à l’article L. 321-7./ L’autorité administrative peut également prononcer la fermeture temporaire ou définitive d’un établissement employant une personne qui enseigne, anime ou encadre une ou plusieurs activités physiques ou sportives mentionnées à l’article L. 212-1 sans posséder les qualifications requises.  » ;

6. Considérant que si la BSA soutient, en s’appuyant sur les courriers adressés à l’administration par MmeE…, M.B…, Mme D…et M.F…, directeur sportif, que les entraîneurs ont effectué des déclarations de libre prestation de services dans les conditions prévues par le code du sport, il ressort des mentions de l’arrêté litigieux que « d’autres entraîneurs exercent au cours de l’année 2016 pour le compte de British ski academy sans y être autorisées, à savoir Kip Carrington, RoryG…, Conrad Pridy , Jenny Stielow, Lynn Mill, Duane Baird » ; que si, dans son mémoire de première instance, le préfet indique que Mme E…était en situation régulière, il ne ressort pas des pièces du dossier que les autres entraîneurs mentionnés dans l’arrêté ont été régulièrement déclarés ; qu’à ce titre, le pôle national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme a informé Mme A…G…que sa déclaration du 2 mars 2016 était irrecevable dès lors que la procédure de libre établissement était réservée aux ressortissants des Etats membres de la communauté européenne ou des Etats partie à l’accord sur l’espace économique européen; que, par ailleurs, Mme D…a procédé à sa déclaration par courrier du 7 décembre 2015, réceptionné le 9 décembre 2015, sans répondre au courrier du pôle du 22 décembre 2015, reçu à l’adresse communiquée par le conseil des requérants le 24 décembre, demandant des pièces complémentaires ; qu’ainsi, si l’arrêté critiqué est entaché d’une erreur d’appréciation quant à la situation de MmeE…, la BSA n’établit pas que les autres entraîneurs cités dans l’arrêté litigieux étaient en situation régulière ; que, par suite, le préfet aurait pris en l’espèce la même décision s’il s’était uniquement fondé sur l’exercice irrégulier de l’activité d’entraîneur de Mme D…et M. G…ainsi que sur la situation des autres entraîneurs dont il n’est pas établi qu’elle serait régulière ;

7. Considérant que la BSA soutient, à l’appui de sa requête, que le préfet de la Haute-Savoie aurait commis une erreur de droit en décidant la fermeture temporaire de son établissement situé aux Houches au motif qu’elle emploie plusieurs entraîneurs non titulaires d’un récépissé de déclaration de prestation de services ou d’une carte professionnelle d’éducateur sportif et ce alors que les entraîneurs qu’elle avait recrutés avaient régulièrement déclaré une activité de libre prestation de services en 2015 ; qu’elle invoque le bénéfice des articles 5 et 7 de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 dont le délai de transposition expirait le 18 janvier 2016, soit antérieurement à la date de la décision attaquée ; que ces dispositions n’ont été transposées en droit interne que par l’ordonnance n° 2016-1809 du 22 décembre 2016 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles de professions réglementées ;

8. Considérant que la transposition en droit interne des directives communautaires, qui est une obligation résultant du Traité instituant la Communauté européenne, revêt, en outre, en vertu de l’article 88-1 de la Constitution, le caractère d’une obligation constitutionnelle ; que, pour chacun de ces deux motifs, il appartient au juge national, juge de droit commun de l’application du droit communautaire, de garantir l’effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l’égard des autorités publiques ; que tout justiciable peut en conséquence demander l’annulation des dispositions règlementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives et, pour contester une décision administrative, faire valoir, par voie d’action ou par voie d’exception, qu’après l’expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister des dispositions réglementaires, ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives ; qu’en outre, tout justiciable peut se prévaloir, à l’appui d’un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d’une directive, lorsque l’Etat n’a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ;

9. Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la directive du 20 novembre 2013 :  » Sans préjudice de dispositions spécifiques du droit communautaire ni des articles 6 et 7 de la présente directive, les États membres ne peuvent restreindre, pour des raisons relatives aux qualifications professionnelles, la libre prestation de services dans un autre État membre: a) si le prestataire est légalement établi dans un État membre pour y exercer la même profession (ci-après dénommé « État membre d’établissement »), et b) en cas de déplacement du prestataire, s’il a exercé cette profession dans un ou plusieurs États membres pendant au moins une année au cours des dix années qui précèdent la prestation lorsque la profession n’est pas réglementée dans l’État membre d’établissement. La condition exigeant l’exercice de la profession pendant une année n’est pas d’application si la profession ou la formation conduisant à la profession est réglementée  » ; qu’aux termes de l’article 7 de cette même directive,  » 1. Les États membres peuvent exiger que, lorsque le prestataire se déplace d’un État membre à l’autre pour la première fois pour fournir des services, il en informe préalablement l’autorité compétente de l’État membre d’accueil par une déclaration écrite comprenant les informations relatives aux couvertures d’assurance ou autres moyens de protection personnelle ou collective concernant la responsabilité professionnelle. Une telle déclaration est renouvelée une fois par an si le prestataire compte fournir des services d’une manière temporaire ou occasionnelle dans cet État membre au cours de l’année concernée. Le prestataire peut fournir cette déclaration par tout moyen. 2. En outre, lors de la première prestation de service ou en cas de changement matériel relatif à la situation établie par les documents, les États membres peuvent exiger que la déclaration soit accompagnée des documents suivants: a) une preuve de la nationalité du prestataire; b) une attestation certifiant que le détenteur est légalement établi dans un État membre pour y exercer les activités en question, et qu’il n’encourt, lorsque l’attestation est délivrée, aucune interdiction même temporaire d’exercer; c) une preuve des qualifications professionnelles; d) pour les cas visés à l’article 5, paragraphe 1, point b), la preuve par tout moyen que le prestataire a exercé les activités en question pendant au moins une année au cours des dix années précédentes (…). / 2 bis. La présentation par le prestataire d’une déclaration requise conformément au paragraphe 1 autorise ce prestataire à accéder à l’activité de services ou à exercer cette activité sur l’ensemble du territoire de l’État membre concerné. Un État membre peut demander les informations supplémentaires énumérées au paragraphe 2, concernant les qualifications professionnelles du prestataire si: a) la profession est réglementée de manière différente sur certaines parties du territoire de cet État membre; b) une telle réglementation est également applicable à tous les ressortissants de cet État membre; c) les différences que présente cette réglementation se justifient par des raisons impérieuses d’intérêt général liées à la santé publique ou à la sécurité des bénéficiaires des services; et d) l’État membre n’a pas d’autre moyen d’obtenir ces informations. (…) / 4. Lors de la première prestation de services, dans le cas de professions réglementées qui ont des implications en matière de santé ou de sécurité publiques et qui ne bénéficient pas d’une reconnaissance automatique en vertu du titre III, chapitre II, III ou III bis, l’autorité compétente de l’État membre d’accueil peut procéder à une vérification des qualifications professionnelles du prestataire avant la première prestation de services. Une telle vérification préalable n’est possible que si son objectif est d’éviter des dommages graves pour la santé ou la sécurité du destinataire du service, du fait du manque de qualification professionnelle du prestataire, et dans la mesure où elle n’excède pas ce qui est nécessaire à cette fin. Au plus tard un mois à compter de la réception de la déclaration et des documents joints, visés aux paragraphes 1 et 2, l’autorité compétente informe le prestataire de sa décision :a) de permettre la prestation de services sans vérifier ses qualifications professionnelles ; b) ayant vérifié ses qualifications professionnelles :i) d’imposer au prestataire de services une épreuve d’aptitude; ou ii) de permettre la prestation des services.  » ;

10. Considérant qu’il résulte de ces dispositions de la directive du 20 novembre 2013 que l’autorité administrative est en droit de procéder à des investigations supplémentaires quant aux qualifications professionnelles du prestataire avant la première prestation de services en vue de s’assurer de la sécurité des clients de l’établissement ; que l’article R. 212-93 du code du sport, dans sa rédaction telle qu’issue du décret n° 2009-1116 du 15 septembre 2009 et antérieure à la transposition de la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013, est conforme à cet objectif ; que, par suite, l’entreprise BSA ne peut soutenir qu’en procédant à un contrôle de la qualification professionnelle de Mme D…et en sollicitant des informations complémentaires à la suite du dépôt de sa déclaration de libre prestation de services sur le fondement des dispositions de l’article R. 212-93 du code du sport avant transposition de la directive 2013/55/UE du 20 septembre 2013, le préfet de la Haute-Savoie aurait commis une erreur de droit ;

11. Considérant que l’entreprise requérante soutient que si trois lettres datées du 22 décembre 2015 concernant M.F…, Mme E…et Mme D…auraient été adressées par l’administration, celle-ci n’a versé au débat qu’un accusé de réception postal unique, et par conséquent ces lettres et notamment celle concernant Mme D…ne peuvent produire aucun effet et ne sont pas opposables ; que, toutefois, les trois courriers datés du 22 décembre 2015 sont précis, personnalisés et font mention du nom de leur destinataire et de leur domiciliation chez leur conseil ; qu’il ressort ainsi suffisamment des pièces du dossier que ces lettres par laquelle le pôle national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme dépendant de la préfecture de l’Isère a demandé des pièces complémentaires pour instruire leur demande, notamment celle présentée par Mme D…le 7 décembre 2015, reçue le 9 décembre dans les services du pôle, ont été notifiées, de façon régulière, par lettre recommandée avec accusé de réception à l’adresse indiquée dans le courrier de demande ; que la circonstance que ce pli n’a pas été réclamé est sans incidence sur la régularité de cette notification ;

12. Considérant qu’aux termes de l’article R. 212-93 du code du sport, dont les dispositions sont compatibles avec la directive 2013/55/UE du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013,  » Dans le mois qui suit la réception du dossier de déclaration, le préfet notifie au prestataire, selon le cas : 1° Le cas échéant, une demande motivée d’informations complémentaires ainsi que le délai supplémentaire rendu nécessaire avant l’expiration duquel il l’informera de sa décision, en tout état de cause avant la fin du deuxième mois qui suit la réception du complément d’informations ; / En l’absence de réponse dans les délais ci-dessus mentionnés, le prestataire est réputé exercer légalement son activité sur le territoire national.  » ;

13. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme D…n’a pas répondu à la demande de pièces complémentaires adressée par le pôle national des métiers de l’encadrement du ski et de l’alpinisme le 22 décembre 2015 ; que si l’intéressée a déposé une nouvelle demande le 29 février 2016, cette demande ne contenait pas les pièces sollicitées par le pôle ; que, par suite, en l’absence de transmission des éléments d’information nécessaires à l’instruction de la demande, la BSA ne peut se prévaloir de ce que la préfecture aurait dû délivrer un récépissé en l’absence de respect du délai d’un mois suivant la réception du dossier de Mme D… prévu par les dispositions de l’article R. 212-93 du code du sport ;

14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que l’entreprise à but non lucratif BSA n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les frais liés au litige :

15. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit mis à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la BSA au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :

 

Article 1er : La requête de la British ski academy est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la British ski academy et au ministre des sports.

Délibéré après l’audience du 20 septembre 2018, à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur,
Mme Caraës, premier conseiller,

 

Lu en audience publique le 18 octobre 2018.

Forêts de montagne/ Accident/ Compétence juridictionnelle/ Faute de police (non)

CAA de MARSEILLE

N° 17MA00828
Inédit au recueil Lebon
2ème chambre – formation à 3
M. VANHULLEBUS, président
Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK, rapporteur
M. ARGOUD, rapporteur public
LUDOT, avocat

 

lecture du jeudi 18 octobre 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B…C…a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Vernet-les-Bains et l’Office national des forêts (ONF) à lui payer la somme de 95 000 euros en réparation des préjudices résultant d’un accident subi sur un chemin de randonnée.
Par un jugement n° 1503782 du 19 janvier 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 28 février 2017, le 8 août 2017, le 5 octobre 2017 et le 17 novembre 2017, M.C…, représenté par MeA…, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 janvier 2017 ;

2°) de condamner in solidum la commune de Vernet-les-Bains et l’ONF à lui payer la somme de 124 000 euros ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune et de l’ONF les dépens et la somme de 10 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
– le juge administratif est compétent pour connaître des conclusions dirigées contre l’ONF chargé de la gestion et de la prévention des risques naturels et de la conservation, de la protection et de la surveillance des forêts ;
– il est également compétent dès lors que le massif du Canigou fait partie du domaine public de l’Etat ;
– l’ONF n’a pas assuré correctement ces missions ;
– le maire de la commune de Vernet-les-Bains a failli dans l’exercice de ses pouvoirs de police ;
– la responsabilité de la commune est également engagée pour défaut d’entretien normal et pour caractère exceptionnellement dangereux de l’ouvrage public ;
– le lieu de l’accident est établi ;
– l’information donnée aux promeneurs n’était pas suffisante ;
– les préjudices qu’il a subis doivent être réparés.

 

Par un mémoire, enregistré le 22 mars 2017, la Caisse nationale de santé demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 janvier 2017 ;

2°) de condamner in solidum la commune de Vernet-les-Bains, Groupama Méditerranée et l’ONF à lui payer la somme de 62 675,33 euros, ainsi que les intérêts au taux légal ;

3°) de mettre à la charge solidaire de la commune, de Groupama Méditerranée et de l’ONF les dépens et la somme de 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu’elle est fondée à demander la condamnation du tiers responsable à lui rembourser le montant des débours qu’elle a exposés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 août 2017 et le 22 septembre 2017, l’ONF conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. C…la somme de
3 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
– le juge administratif est incompétent pour connaître de sa responsabilité dans le cadre de sa gestion du domaine privé forestier ;
– à titre subsidiaire, le lieu exact de l’accident n’est pas précisé ;
– l’article L. 221-6 du code forestier est inapplicable au litige en l’absence de convention ;
– il ne lui appartient pas de prendre des mesures de sécurité du public contre les risques naturels ;
– le rocher ne s’est pas détaché d’un couloir d’éboulis dont il serait chargé de
l’entretien ;
– il convient de ramener les prétentions indemnitaires de M. C…à de plus justes proportions ;

– l’indemnisation qui peut être allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire comprend celle demandée au titre d’un arrêt de travail ;
– l’existence d’un préjudice d’agrément n’est pas établie.

 

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2017, la commune de Vernet-les-Bains conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. C…la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :
– la forêt n’est pas un ouvrage public ;
– elle n’est pas propriétaire de cette forêt ;
– l’information donnée aux randonneurs est suffisante ;
– il convient de ramener les prétentions indemnitaires de M. C…à de plus justes proportions ;
– l’indemnisation qui peut être allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire comprend celle demandée au titre d’un arrêt de travail ;
– l’existence d’un préjudice d’agrément n’est pas établie.

 

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2017, la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Méditerranée – Groupama Méditerranée conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. C…la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :
– la réalité des faits n’est pas établie ;
– la commune a balisé le chemin et signalé les risques d’éboulement ;
– le site n’a pas le caractère d’un ouvrage exceptionnellement dangereux ;
– il convient de ramener les prétentions indemnitaires de M. C…à de plus justes proportions ;
– l’indemnisation qui peut être allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire comprend celle demandée au titre d’un arrêt de travail ;
– l’existence d’un préjudice d’agrément n’est pas établie.

 

Vu les autres pièces du dossier.

 

Vu :
– le code forestier ;
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative.

 

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

 

 

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,
– les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
– et les observations de MeE…, représentant Groupama Méditerranée et de
Me D…substituant la SCP Henry-Chichet-Pailles, représentant la commune de Vernet-les-Bains.
Considérant ce qui suit :

1. M. C…a été blessé le 26 juillet 2013 par la chute d’un rocher alors qu’il se promenait sur le chemin de randonnée n° 7 dénommé  » Cascades des Anglais et Gorges du Saint Vincent  » situé sur la commune de Vernet-les-Bains, dans le massif forestier du Canigou, géré par l’Office National des Forêts (ONF). Il relève appel du jugement du 19 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande de condamnation solidaire de la commune de Vernet-les-Bains et de l’ONF à réparer les préjudices qu’il a subis.
Sur la régularité du jugement :

2. Lorsqu’un établissement public tient de la loi la qualité d’établissement public industriel et commercial (EPIC), les litiges nés de ses activités relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire, à l’exception de ceux relatifs à celles de ses activités qui, telles la réglementation, la police ou le contrôle, ressortissent par leur nature de prérogatives de puissance publique. Aux termes de l’article L. 221-1 du code forestier :  » L’Office national des forêts est un établissement public national à caractère industriel et commercial placé sous la tutelle de l’Etat.  » Aux termes de l’article L. 221-2 du même code :  » L’Office national des forêts est chargé de la mise en oeuvre du régime forestier et exerce cette mission dans le cadre des arrêtés d’aménagement prévus à l’article L. 212-1. Il est également chargé de la gestion et de l’équipement des bois et forêts mentionnés au 1° du I de l’article L. 211-1.  » Selon l’article L. 221-6 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur :  » L’Office national des forêts peut être chargé, en vertu de conventions passées avec des personnes publiques ou privées, de la réalisation, en France ou à l’étranger, d’opérations de gestion, d’études, d’enquêtes et de travaux en vue de (…) 3° La prévention des risques naturels « .

 

3. M. C…recherche la responsabilité de l’ONF en raison d’une part, de ses missions de gestion et prévention des risques naturels et d’autre part, d’entretien de la forêt dans le massif du Canigou lequel, contrairement à ce qu’il soutient, appartient au domaine privé de l’Etat, quand bien même le lieu appartiendrait à un site classé, serait inscrit en zone  » Natura 2000 « , en zone spéciale de conservation et en tant que  » Grand site de France « . Il ne résulte toutefois pas de l’instruction que l’ONF aurait conclu avec l’Etat une convention lui permettant d’exercer sur les lieux de l’accident une mission au titre de la prévention des risques naturels. Le défaut d’entretien reproché par ailleurs à l’ONF par le requérant ne met pas en cause l’exercice, par cet établissement public, de prérogatives de puissance publique. C’est par suite à bon droit que le tribunal administratif a rejeté les conclusions dirigées contre l’ONF comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

 

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la responsabilité fondée sur le défaut d’entretien normal et le caractère exceptionnellement dangereux de l’ouvrage public :

4. Le chemin de randonnée emprunté par M. C…n’étant pas affecté à la circulation générale, il ne peut être qualifié d’ouvrage public. Dans ces conditions, le requérant ne peut utilement invoquer le défaut d’entretien normal de cet ouvrage, ni son caractère exceptionnellement dangereux.
En ce qui concerne la responsabilité du maire au titre de ses pouvoirs de police
générale :

5. Aux termes de L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales :  » La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (…) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, (…) les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels (…).  » Selon l’article L. 2212-4 du même code :  » En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l’article L. 2212-2, le maire prescrit l’exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances « . En vertu de ces dispositions, il incombe au maire de la commune d’assurer la sécurité des promeneurs et notamment de signaler les dangers qui excèdent ceux contre lesquels les intéressés doivent normalement se prémunir.

6. Un panneau de danger est apposé sur le sentier de la cascade des Anglais avertissant les randonneurs du caractère très accidenté du terrain, leur demandant de rester vigilants et de ne pas utiliser les passerelles de franchissement de la cascade pour jouer ou se balancer. Il ne résulte par ailleurs pas de l’instruction que le risque qui s’est réalisé excèderait les risques ordinaires contre lesquels les randonneurs doivent se prémunir lorsqu’ils circulent sur des sentiers de montagne. Cette signalisation suffisante n’appelait aucune mesure complémentaire d’information. Dans ces conditions, et comme l’a jugé à bon droit le tribunal administratif, le maire n’a pas fait preuve de carence dans l’exercice de ses pouvoirs de police.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. C…et la Caisse nationale de santé ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.

 

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la commune de Vernet-les-Bains, de la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Méditerranée – Groupama Méditerranée et de l’ONF, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, les sommes que M. C…et la Caisse nationale de santé demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. C…les sommes demandées au même titre par la commune de Vernet-les-Bains, la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Méditerranée – Groupama Méditerranée et l’ONF.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C…et les conclusions de la Caisse nationale de santé sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de l’ONF, de la commune de Vernet-les-Bains et de la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Méditerranée – Groupama Méditerranée présentées en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B…C…, à la Caisse nationale de santé, à l’Office National des Forêts, à la commune de Vernet-les-Bains et à la caisse régionale d’assurances mutuelles agricoles Méditerranée – Groupama Méditerranée.

Falaises d’escalade/ Domanialité privée

CAA Marseille, 14 sept. 2018, E. c./ Cne de Saint-Léger-de-Peyre : n° 17MA01609)

 

M. A… E…a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Saint-Léger-de-Peyre (Lozère) à lui verser la somme de 45 000 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation du préjudice résultant de la remise en cause de l’autorisation dont il bénéficiait pour organiser des activités d’escalade sur des terrains appartenant à la commune.

Par un jugement n° 1501659 du 28 février 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 20 avril 2017, le 15 juin 2017, le 22 août 2017, le 27 septembre 2017 et le 3 mai 2018, M. E…, représenté par Me B…, demande à la Cour :

1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 28 février 2017 ;

2°) de condamner la commune de Saint-Léger-de-Peyre à lui verser la somme de 45 000 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation de son préjudice ;

3°) d’ordonner, si nécessaire, une mesure d’expertise afin de procéder à la description et au chiffrage des travaux qu’il a réalisés ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Léger-de-Peyre la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

5°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Léger-de-Peyre le versement à son avocat d’une somme de 2 500 euros au titre des articles 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

– il justifie de sa qualité et de son intérêt à agir ;
– il a présenté une demande préalable d’indemnisation ;
– les parcelles en litige appartiennent au domaine public communal ;
– il était titulaire d’une convention d’occupation du domaine public sur les parcelles en litige ;
– la commune ne justifie d’aucun motif d’intérêt général pour procéder à la résiliation de cette convention ;
– celle-ci était illégale faute de comporter un terme ;
– il justifie des compétences techniques nécessaires pour assurer la conformité du site aux normes ;
– à défaut de mise en oeuvre de la responsabilité contractuelle de la commune, il est fondé à demander à être indemnisé sur le terrain de l’enrichissement sans cause ;
– son préjudice doit être calculé en fonction du montant des dépenses qu’il a exposées pour la réalisation des installations autorisées par la commune ainsi que du manque à gagner résultant de l’annulation de réservations.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 août 2017, la commune de Saint-Léger-de-Peyre, représentée par Me D…, conclut au rejet de la requête et à ce qu’une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. E… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

– la demande de première instance est irrecevable en tant qu’elle émane d’une personne physique et non de la personne morale ayant bénéficié de l’autorisation en litige ;
– les moyens soulevés par M. E… ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l’arrêt était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office, tiré de ce que le litige qui oppose M. E… à la commune de Saint-Léger-de-Peyre, qui tend à la recherche de la responsabilité extra contractuelle de cette dernière encourue à l’occasion de la gestion de son domaine privé, relève de la compétence de la juridiction de l’ordre judiciaire.

Par ordonnance du 3 mai 2018, la clôture d’instruction a été fixée au 25 mai 2018.

Un mémoire présenté pour M. E… en réponse au moyen relevé d’office a été enregistré le 14 juin 2018.

M. E… a été admis au bénéfice de l’aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code général de la propriété des personnes publiques ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Guidal,
– et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.

1. Considérant que la commune de Saint-Léger-de-Peyre est propriétaire de parcelles cadastrées D 471 et D 1153 au lieu dit  » les gorges de l’enfer  » ; que par une première délibération du 18 février 2007, le conseil municipal a autorisé M. E…, qui exploite à titre individuel une entreprise commerciale sous la dénomination  » le club nautique du Gévaudan « , à organiser une activité d’escalade sur ces parcelles et à équiper le site en vue de l’exercice de cette activité ; que, par une seconde délibération du 25 janvier 2015, le conseil municipal de Saint-Léger-de-Peyre a chargé le comité départemental de la fédération française des clubs alpins et de montagnes d’élaborer un projet de convention et de règlement d’utilisation de ce site ; que si cette délibération mentionnait que son ouverture au public ne remettait pas en cause l’accès du Club nautique du Gévaudan, M. E… a estimé qu’il ne pouvait plus, à compter de cette date, y exercer de fait son activité ; que M. E… a alors saisi la commune de Saint-Léger-de-Peyre d’une demande tendant à la réparation du préjudice qu’il estime avoir subi en raison des frais engagés pour l’aménagement du site et l’annulation de différentes prestations qu’il y avait organisées ; que la commune a laissé cette demande sans réponse ; que M. E… relève appel du jugement du 28 février 2017 par laquelle le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande d’indemnisation ;
Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques :  » Sous réserve de dispositions législatives spéciales, le domaine public d’une personne publique (…) est constitué des biens lui appartenant qui sont soit affectés à l’usage direct du public, soit affectés à un service public pourvu qu’en ce cas ils fassent l’objet d’un aménagement indispensable à l’exécution des missions de ce service public  » ;

3. Considérant que si de 2007 à 2015 les parcelles en litige étaient accessibles au public et non seulement aux clients de M. E…, et notamment si des randonneurs et des pêcheurs pouvaient de manière occasionnelle les traverser, il ne résulte pas de l’instruction que la commune avait décidé d’affecter ces parcelles à l’usage direct du public ; qu’elles n’ont pas davantage été affectées à un service public ni fait l’objet d’un quelconque aménagement à cette fin ; qu’elles n’entraient pas, dès lors, dans les prévisions de l’article L. 2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques ; que, de même, il ne ressort pas des pièces du dossier qu’elles auraient constitué un accessoire indissociable d’un bien appartenant au domaine public de la commune, au sens des dispositions de l’article L. 2111-2 du code ; qu’il suit de là que les parcelles en cause ne constituaient pas des dépendances du domaine public de la commune mais des dépendances de son domaine privé ;

4. Considérant que la délibération du 18 février 2007 du conseil municipal de Saint-Léger-de-Peyre qui autorise à titre purement gracieux M. E… à pratiquer l’activité d’escalade sur ces parcelles de son domaine privé, sous sa responsabilité, a le caractère d’une autorisation unilatérale ; qu’ainsi, à supposer que le conseil municipal ait entendu par sa délibération du 25 janvier 2015 mettre fin à l’autorisation délivrée précédemment à M. E…, il n’a ce faisant nullement rompu un contrat, qui ne pouvait au demeurant être regardé comme un contrat d’occupation du domaine public compte tenu de ce qui a été dit au point 3 ; qu’en remettant en cause les conditions d’utilisation des parcelles en litige par M. E…, la commune de Saint-Léger-de-Peyre s’est seulement bornée à accomplir un acte de gestion de son domaine privé sans en affecter ni le périmètre ni la consistance ; que, dès lors, le litige qui oppose M. E… à la commune, qui tend à la recherche de la responsabilité extra contractuelle de cette dernière encourue à l’occasion de la gestion de son domaine privé, relève de la compétence de la juridiction de l’ordre judiciaire ;

5. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu d’annuler le jugement en date du 28 février 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes s’est reconnu compétent pour connaître de la demande du requérant et, statuant par voie d’évocation, de rejeter cette demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître ;
Sur les frais liés au litige :

6. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Saint-Léger-de-Peyre, qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire droit aux conclusions de cette dernière présentées au titre des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 28 février 2017 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. E… devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée comme portée devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Saint-Léger-de-Peyre et de M. E… présentées en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A… E…et à la commune de Saint-Léger-de-Peyre.
Copie en sera adressé au préfet de Lozère.

Délibéré après l’audience du 31 août 2018 où siégeaient :

– M. Pocheron, président,
– M. Guidal, président-assesseur,
– Mme C…, première conseillère.

Lu en audience publique, le 14 septembre 2018.
2
N° 17MA01609
ia

Analyse
Abstrats : 17-03-02-02-01-02 Compétence. Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction. Compétence déterminée par un critère jurisprudentiel. Domaine. Domaine privé. Autorisation d’occupation.
24-02-03-02-03 Domaine. Domaine privé. Contentieux. Compétence de la juridiction judiciaire. Contentieux de la responsabilité.

Moniteur stagiaire/ Accident sur stade de slalom/ ESF et exploitant/ Obligation de sécurité?

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 27 juin 2018
N° de pourvoi: 17-17796
Publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Ortscheidt, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)
________________________________________

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Donne acte à M. X… du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société SEM des remontées mécaniques de Megève ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Chambéry, 9 mars 2017), que M. X…, moniteur stagiaire adhérent du syndicat des moniteurs de l’ESF de Megève (le syndicat), a été victime d’un accident de ski survenu le 22 mars 2012 lors d’un entraînement sur une piste de slalom du domaine skiable de Megève, le laissant paraplégique ; qu’il a assigné la société SEM des remontées mécaniques de Megève (la société), l’Ecole du ski français (l’ESF), le Régime social des indépendants (le RSI) et la société A… aux fins d’obtenir réparation de son préjudice ; que le syndicat est intervenu volontairement à l’instance ;

Attendu que M. X… fait grief à l’arrêt de rejeter ses demandes formées contre le syndicat, alors, selon le moyen, qu’un organisme sportif est tenu d’une obligation contractuelle de sécurité, de prudence et de diligence envers les sportifs exerçant une activité dans les locaux ou terrains dont il a l’usage et sur des installations mises à leur disposition, quand bien même ceux-ci pratiquent librement cette activité ; qu’au cas d’espèce, les juges du fond ont relevé que la piste sur laquelle s’était produit l’accident subi par M. X…, moniteur stagiaire de ski en lien contractuel avec le syndicat, était de manière permanente fermée au public et mise à la disposition dudit syndicat, qui s’en servait pour les entraînements et les passages de tests ; qu’aussi, le syndicat était tenu d’une obligation contractuelle de sécurité à l’égard de M. X… à raison de l’utilisation de la piste, peu important que l’accident fût survenu alors que la victime effectuait un entraînement « libre » non organisé officiellement par le syndicat et en compagnie d’un moniteur traceur assumant lui-même la responsabilité de ses actes ; qu’en décidant, au contraire, que le syndicat n’était tenu d’aucune obligation de sécurité à l’égard de M. X…, la cour d’appel a violé l’article 1147 ancien du code civil ;

Mais attendu qu’après avoir constaté que la piste sur laquelle a eu lieu l’accident dépend du domaine skiable accessible par gravité à partir du sommet des remontées mécaniques, et que, si aucune partie ne s’est expliquée sur les conditions juridiques de la mise à disposition de cette piste à l’ESF de Megève, il est toutefois admis par tous que la société, concessionnaire de la mission de service public d’exploitation des remontées mécaniques, en assure l’entretien et le damage, l’arrêt retient qu’il n’incombe pas au syndicat une obligation générale de sécurité, à défaut de preuve d’un engagement contractuel de sa part, qui seul pourrait être à la source d’une telle obligation ; que, de ces constatations et énonciations, la cour d’appel a déduit, à bon droit, que le syndicat n’était pas tenu d’une obligation de sécurité permanente sur cette piste, en-dehors des entraînements et compétitions organisés par lui ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille dix-huit.

SAE/ Accident/ Responsabilité de l’association gestionnaire

Cour de cassation
chambre civile 1
Audience publique du mercredi 7 mars 2018
N° de pourvoi: 16-28310
Non publié au bulletin Rejet

Mme Batut (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Coutard et Munier-Apaire, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat(s)

 

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Donne acte à l’association club La Cordée perrosienne (l’association) et la société Zurich Insurance Public Limited (la société Zurich) du désistement de leur pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la Mutuelle assurance des instituteurs de France (MAIF) et contre la Mutuelle des étudiants de Bretagne Atlantique ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 6 octobre 2016), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 15 décembre 2011, pourvois n° 10-23.528, 10-24.545, Bull. 2011, I, n° 219), que M. X… est devenu paraplégique à la suite d’une chute dont il a été victime, le 15 octobre 2001, alors qu’il descendait une voie d’escalade sur un mur artificiel appartenant à l’association et qu’il était assuré au sol par M. Y… ; qu’il a assigné en réparation de son préjudice corporel l’association, la société Zurich et la société Generali assurances IARD (la société Generali), assureurs de cette dernière, ainsi que la MAIF, assureur de l’Association sportive universitaire de Lannion dont lui-même et M. Y… étaient adhérents, et la Mutuelle des étudiants de Bretagne Atlantique ; que la société Generali a assigné en garantie M. Y… et la Fédération française de sport universitaire ; que la caisse primaire d’assurance maladie des Côtes-d’Armor est intervenue volontairement à l’instance ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, pris en leurs première, deuxième, troisième et cinquième branches, rédigés en termes identiques et réunis :

Attendu que les sociétés Zurich et Generali font grief à l’arrêt de déclarer l’association entièrement responsable du dommage et, en conséquence, de condamner in solidum les deux assureurs de celle-ci à réparer l’intégralité du préjudice subi par M. X…, alors, selon le moyen :

1°/ que l’association sportive exploitante d’une salle d’escalade communale, qui met à la disposition des participants du matériel afin de leur permettre d’exercer librement cette activité en dehors de tout enseignement, n’est pas tenue de vérifier in situ leurs compétences et satisfait à son obligation de sécurité, de prudence et de diligence dès lors que les participants lui ont indiqué être compétents et qu’ils ont refusé la formation qui leur était proposée ; que, dès lors, en retenant, pour considérer que l’association avait engagé sa responsabilité à l’égard de M. X…, que ce dernier et son compagnon M. Y… avaient pu utiliser le mur d’escalade sans que leur aptitude à le faire en toute sécurité ait été vérifiée in situ par M. A…, le président du club, après avoir pourtant constaté que MM. X… et Y… s’étaient vu proposer une formation et l’avaient expressément refusée, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;

2°/ que la détermination de l’étendue de l’obligation de sécurité de moyen pesant sur l’association sportive mettant à la disposition du public des installations en libre accès doit dépendre du degré d’autonomie et de la liberté d’action laissée aux participants, de sorte que l’on ne saurait lui imposer de vérifier in situ l’aptitude de ces derniers à pratiquer l’activité lorsqu’en raison de la liberté d’action qu’ils conservent, cette mesure ne serait pas de nature à exclure une imprudence ou une négligence de leur part ; que, dès lors, en retenant, pour considérer que l’association était seule responsable de l’accident dont M. X… a été victime, que ce dernier et son camarade, M. Y…, avaient pu utiliser le mur d’escalade sans que leur aptitude à le faire en toute sécurité ait été vérifiée in situ par M. A…, le président du club, qui s’était satisfait de ce qu’ils n’avaient pas donné suite à sa proposition de formation, et qu’une telle vérification aurait permis de constater l’inexpérience de M. Y… et le défaut de coordination des deux hommes, après avoir constaté que l’accident était la conséquence de l’imprudence de M. X… et de l’inattention momentanée de M. Y…, circonstances à l’égard desquelles la vérification des compétences des deux hommes aurait été sans incidence, la cour d’appel a violé l’article 1147 du code civil ;

3°/ que la pratique libre d’un sport, même surveillée, exclut tout encadrement, lequel excède la simple surveillance en ce qu’il suppose des interventions de l’encadrant afin de fournir des explications ou des conseils ; que, dès lors, en retenant, par motifs adoptés, pour considérer que l’association avait manqué à son obligation de sécurité, qu’elle aurait dû fournir un encadrement adapté puisque la convention avec l’ASUL précisait que la séance libre était surveillée, la cour d’appel, qui a imposé une obligation excédant celle contractée par l’association, a violé les articles 1134 et 1147 du code civil ;

4°/ que la faute de la victime qui a contribué à la réalisation du dommage est de nature à exonérer le tiers dont la faute a contribué au dommage de tout ou partie de sa responsabilité ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que la chute de M. X… résultait, d’une part, d’un défaut d’expérience de M. Y…, d’autre part, d’un manque total de coordination entre les deux jeunes gens et, de troisième part, de l’imprudence personnelle de M. X… ; qu’en retenant, néanmoins, pour considérer que l’association était seule responsable de l’accident dont M. X… avait été victime, qu’il était constant que le club n’avait pas vérifié l’aptitude des jeunes gens à utiliser le mur d’escalade en toute sécurité et que la chute de M. X… était imputable à ce manquement dès lors que l’examen de leurs connaissances réelles in situ aurait permis de constater l’inexpérience de M. Y… et le défaut de coordination des deux hommes, sans tenir compte du rôle causal de l’imprudence personnelle de M. X… qui était pourtant de nature à réduire la part de responsabilité de l’association, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l’article 1147 du code civil ;

Mais attendu qu’ayant retenu que MM. X… et Y… avaient pu utiliser le mur d’escalade sans que leur aptitude à le faire en toute sécurité ait été vérifiée, le moniteur s’étant satisfait de ce qu’ils n’avaient pas donné suite à sa proposition de formation, et que la chute de M. X… était imputable à ce seul manquement, en ce que l’examen de leur connaissance réelle in situ par le moniteur lui aurait en effet incontestablement permis de constater l’inexpérience de M. Y… et le défaut de coordination des deux hommes, la cour d’appel en a déduit, à bon droit, que l’association était responsable de l’accident dont M. X… avait été victime ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait, partant, irrecevable en sa quatrième branche, n’est pas fondé pour le surplus ;

Et sur la quatrième branche du moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexé :

Attendu que ce grief n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne l’association club La Cordée perrosienne et la société Zurich Insurance Public Limited aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne l’association club La Cordée perrosienne et la société Zurich Insurance Public Limited à payer à M. X… la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ;

Convention d’aménagement/ Résiliation/ Mesures d’exécution

Conseil d’État

N° 407865
ECLI:FR:CECHR:2018:407865.20180711
Publié au recueil Lebon
7ème – 2ème chambres réunies
M. François Lelièvre, rapporteur
M. Olivier Henrard, rapporteur public
SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS ; SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL, avocats

 

lecture du mercredi 11 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

La commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 ont demandé à la cour administrative d’appel de Marseille d’enjoindre à la société d’aménagement d’Isola (SAI) 2000 d’exécuter son arrêt n° 12MA01668 du 7 juillet 2014 et la décision n° 384280 du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat statuant au contentieux annulant partiellement cet arrêt, de porter le taux de l’astreinte à 10 000 euros par jour de retard et de procéder à la liquidation de l’astreinte provisoire.

Par un arrêt n° 16MA02502 du 12 décembre 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a rejeté cette requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 février, 15 mai 2017 et 25 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit à leur requête ;

3°) de mettre à la charge de la SAI 2000 la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 ;
– la loi n° 95-125 du 8 février 1995 ;
– le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. François Lelièvre, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la commune d’Isola et du syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de la société d’aménagement d’Isola 2000.

 

Sur le cadre juridique applicable :

1. Considérant que si, en principe, il n’appartient pas au juge administratif d’intervenir dans l’exécution d’un contrat administratif en adressant des injonctions à ceux qui ont contracté avec l’administration lorsque celle-ci dispose à l’égard de ces derniers des pouvoirs nécessaires pour assurer l’exécution du contrat, il en va autrement quand l’administration ne peut user de moyens de contrainte à l’encontre de son cocontractant qu’en vertu d’une décision juridictionnelle, notamment après l’expiration des relations contractuelles ; qu’en pareille hypothèse, le juge du contrat est en droit de prononcer, à l’encontre du cocontractant de l’administration, une condamnation, éventuellement sous astreinte à une obligation de faire ; que la demande adressée en 2007 par la commune d’Isola et par le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 au tribunal administratif de Nice tendait précisément à obtenir, à la suite de la résiliation pour un motif d’intérêt général, le 6 mars 2001, de la convention d’aménagement conclue en 1992 par le syndicat mixte avec la société d’aménagement et de promotion de la station d’Isola (SAPSI), aux droits de laquelle est venue la société d’aménagement d’Isola 2000 (SAI 2000), la restitution, en application de l’article 20 de cette convention, des parcelles qui lui avaient été cédées par la commune ;

2. Considérant que le tribunal administratif de Nice, par un jugement du 9 mars 2012, et la cour administrative d’appel de Marseille, par un arrêt du 7 juillet 2014, confirmé sur ce point par la décision du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat, statuant au contentieux, ont prononcé à l’encontre de la SAI 2000 une injonction de restituer lesdits terrains assortie d’une astreinte, en leur qualité de juge du contrat ; que la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 ont, par la suite, saisi la cour administrative d’appel de Marseille pour lui demander d’assurer l’exécution de ces décisions ; que leurs conclusions doivent être regardées comme tendant à ce que le juge de l’exécution assure l’exécution effective des obligations de faire assorties d’une astreinte que le juge du contrat avait prescrites ;

3. Considérant que les dispositions du livre IX du code de justice administrative ne s’appliquent qu’aux injonctions et astreintes que, depuis la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980 et la loi n° 95-125 du 8 février 1995, les juridictions administratives peuvent prononcer à l’encontre d’une personne morale de droit public ou d’un organisme privé chargé de la gestion d’un service public ; qu’elles ne sont, en revanche, pas applicables lorsque le juge du contrat, saisi par l’administration en vue de prononcer une obligation de faire à l’encontre de l’ancien cocontractant de l’administration, fait application du principe général selon lequel les juges ont la faculté de prononcer une injonction assortie d’une astreinte en vue de l’exécution de leurs décisions ;

Sur la juridiction compétente pour prononcer des mesures d’exécution :

4. Considérant que la juridiction compétente pour connaître d’une demande d’exécution du jugement d’un tribunal administratif est le tribunal qui a rendu cette décision ou, en cas d’appel, la juridiction d’appel, alors même que cette dernière aurait rejeté l’appel formé devant elle ; que la seule circonstance qu’un jugement ou un arrêt ait fait l’objet d’un pourvoi en cassation est sans incidence sur la compétence du tribunal administratif ou de la cour administrative d’appel pour prononcer les mesures qu’implique l’exécution de ce jugement ou de cet arrêt ; que, toutefois, il en va différemment dans l’hypothèse où un jugement ou un arrêt a fait l’objet d’un pourvoi en cassation et où le Conseil d’Etat règle l’affaire au fond, y compris lorsque le jugement ou l’arrêt n’a fait l’objet que d’une annulation partielle ;

5. Considérant que l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille a été annulé partiellement par la décision du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat, statuant au contentieux ; que le Conseil d’Etat ayant, par cette même décision, réglé l’affaire au fond dans la mesure de la cassation prononcée, il est seul compétent pour prononcer les mesures qu’implique l’exécution de sa décision et de la partie du dispositif de l’arrêt de la cour qui est devenue définitive ; qu’il suit de là que la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 sont fondés, sans qu’il soit besoin d’examiner le moyen de leur pourvoi, à demander l’annulation de l’arrêt attaqué par lequel la cour administrative d’appel de Marseille a statué sur leurs conclusions à fin d’exécution de son arrêt du 7 juillet 2014 ;

6. Considérant qu’il appartient au Conseil d’Etat de statuer, comme juge de l’exécution, sur les conclusions présentées par la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 devant la cour administrative d’appel de Marseille ;

 

 

Sur la portée de la chose jugée par le tribunal administratif de Nice, la cour administrative d’appel de Marseille et le Conseil d’Etat :

7. Considérant que la chose jugée résulte, en l’espèce, de la combinaison de l’article 1er du jugement du 9 mars 2012 du tribunal administratif de Nice, de la partie, devenue définitive, de l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille et de la décision du 14 mars 2016 du Conseil d’Etat statuant au contentieux ; qu’il résulte des dispositifs de ces décisions successives, d’une part, qu’il est enjoint à la SAI 2000 de procéder à la restitution à la commune d’Isola des parcelles lui appartenant, sous réserve du paiement à cette dernière société d’une somme de 2 196 617 euros actualisée selon l’indice du coût de la construction de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) à la date du transfert de propriété ; que, d’autre part, cette injonction est assortie, à l’encontre de la SAI 2000, d’une astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter d’un délai de trois mois suivant la notification du jugement dans l’hypothèse où cette société s’opposerait à la restitution des parcelles ; que, par ailleurs, la SAI 2000 a droit, en exécution de l’arrêt de la cour, au versement de la plus-value apportée aux terrains sur lesquels un golf d’altitude de 18 trous et un circuit de glace ont été construits par l’aménageur, injonction étant faite au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 de saisir le service des Domaines pour qu’il évalue cette plus-value et, à défaut d’accord amiable sur cette base, à la partie la plus diligente de saisir le juge de l’expropriation ; qu’enfin, la SAI 2000 doit verser à la commune d’Isola et au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 la somme de 2 250 000 euros dont sera déduite une indemnité correspondant au prix de la cession de la parcelle AC n° 86 intervenue le 15 septembre 1970, augmenté pour tenir compte de l’évolution de l’indice du coût de la construction de l’INSEE entre cette date et le 28 novembre 2006 ;

8. Considérant que, contrairement à ce qui est soutenu par la SAI 2000, la restitution à la commune des parcelles restant la propriété de l’aménageur, ordonnée par l’article 1er du jugement du 9 mars 2012 du tribunal administratif de Nice, est subordonnée uniquement au paiement simultané de la somme de 2 196 617 euros actualisée ; qu’il résulte, en effet, de l’article 2 de l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille, qui n’a pas affecté l’article 1er du jugement frappé d’appel, que la détermination du montant de la plus-value apportée à certains terrains par l’aménageur, qui n’est pas enserrée dans le délai de trois mois fixé pour les restitutions et est assortie de modalités qui ne pourront être effectives que dans un délai excédant cette durée de trois mois, n’est pas une condition préalable pour que cette restitution intervienne ; que la restitution ainsi visée concerne également les parcelles ayant fait l’objet de la plus-value ;

Sur les conclusions tendant à la liquidation de l’astreinte :

9. Considérant que, dans les circonstances particulières rappelées au point 5, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, est compétent pour statuer sur les conclusions tendant à la liquidation de l’astreinte prononcée par le jugement du 9 mars 2012 du tribunal administratif de Nice tel qu’il a été réformé par l’arrêt de la cour ;

10. Considérant qu’ainsi qu’il a été dit au point 7, une astreinte provisoire de 1 000 euros par jour de retard a été prononcée à l’encontre de la SAI 2000, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement du tribunal administratif, dans l’hypothèse où la restitution des parcelles ne serait pas intervenue du seul fait de cette société ; que le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et la commune d’Isola demandent la liquidation de l’astreinte sur la période comprise entre le 22 janvier 2015 et la date de la décision du Conseil d’Etat à intervenir ;

11. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le 22 janvier 2015, le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et la commune d’Isola ont demandé à la SAI 2000 de comparaître devant un notaire afin de procéder au transfert de propriété des parcelles litigieuses moyennant le paiement des sommes dues en application de l’arrêt du 7 juillet 2014 de la cour administrative d’appel de Marseille ; que la SAI 2000 a refusé d’accéder à cette demande tant que ne lui serait pas versé le montant de la plus-value apportée aux terrains sur lesquels le golf d’altitude de 18 trous et le circuit de glace ont été construits par l’aménageur ; que, par un mémoire enregistré le 4 septembre 2015, la SAI 2000 a, conformément à l’article 2 de l’arrêt de la cour administrative d’appel, saisi le juge de l’expropriation aux fins de fixer l’indemnité au titre de la plus-value apportée par les travaux qu’elle avait réalisés sur certaines parcelles ; que par un jugement du 22 juin 2017, le juge de l’expropriation du tribunal de grande instance de Nice s’est déclaré incompétent au motif du caractère d’ordre public des règles relatives à la compétence du juge de l’expropriation, auxquelles l’article 20 de la convention de 1992 n’a pu déroger ; que, par un arrêt avant-dire droit du 5 juillet 2018, la cour d’appel d’Aix-en-Provence, saisie d’un appel contre ce jugement, a estimé que le litige ressortissait à la compétence des juridictions administratives et a renvoyé au tribunal des conflits le soin de décider de la question de compétence ainsi soulevée ;

12. Considérant qu’ainsi qu’il a été indiqué au point 8, la restitution des parcelles n’était pas subordonnée à la fixation et au versement du montant de la plus-value apportée à certains terrains par l’aménageur ; que, toutefois, eu égard à la difficulté de déterminer la portée exacte de la chose jugée sur ce point par les différentes décisions juridictionnelles, laquelle est précisée par les points 7 et 8 de la présente décision, l’inexécution de l’injonction ne peut être regardée, dans les circonstances particulière de l’espèce, comme intervenue du seul fait de la SAI 2000 ; que, dans ces conditions, il n’y a pas lieu de procéder à la liquidation de l’astreinte prononcée à l’encontre de la SAI 2000 par le tribunal administratif de Nice ;

Sur l’édiction de nouvelles mesures d’exécution :

13. Considérant que, pour assurer l’exécution des mesures prescrites par le juge du contrat, telles qu’explicitées au point 8, il y a lieu d’enjoindre à la SAI 2000 de signer l’acte procédant au transfert de propriété des parcelles lui appartenant au bénéfice de la commune d’Isola, sous réserve du paiement simultané à cette dernière société d’une somme de 2 196 617 euros actualisée selon l’indice du coût de la construction de l’INSEE à la date du transfert de propriété ; que la restitution devra intervenir dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ;

14. Considérant que la commune d’Isola et le syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 demandent que le taux de l’astreinte prononcée par le tribunal administratif dans son jugement du 9 mars 2012 soit, à l’avenir, porté à 10 000 euros par jour de retard ; que ces conclusions doivent être regardées comme tendant à ce que la mesure d’injonction édictée au point précédent soit assortie d’une astreinte d’un tel montant ; que dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de prononcer contre la SAI 2000, à défaut pour elle de justifier de l’exécution de la présente décision dans le délai fixé au point précédent, une astreinte de 1 000 euros par jour de retard jusqu’à la date à laquelle cette décision aura reçu exécution ;

Sur les frais liés au litige :

15. Considérant que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

 

D E C I D E :
————–
Article 1er : L’arrêt du 12 décembre 2016 de la cour administrative d’appel de Marseille est annulé.
Article 2 : Il est enjoint à la SAI 2000 de signer l’acte procédant au transfert de propriété des parcelles lui appartenant au bénéfice de la commune d’Isola, sous réserve du paiement simultané à cette dernière société d’une somme de 2 196 617 euros actualisée selon l’indice du coût de la construction de l’INSEE à la date du transfert de propriété, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 3 : Une astreinte de 1 000 euros par jour est prononcée à l’encontre de la SAI 2000 s’il n’est pas justifié de l’exécution de la présente décision dans le délai mentionné à l’article 2 ci-dessus. La SAI 2000 communiquera à la section du rapport et des études copies des actes justifiant des mesures prises pour exécuter la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions présentées par la SAI 2000 au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune d’Isola, au syndicat mixte pour l’aménagement et l’exploitation de la station d’Isola 2000 et à la société d’aménagement d’Isola 2000.

RM/ Autorisation modificative

CAA de LYON

N° 16LY03856
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre – formation à 3
M. BOUCHER, président
M. Antoine GILLE, rapporteur
Mme VACCARO-PLANCHET, rapporteur public
COGNAT, avocat

 

lecture du mardi 10 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

 

Procédure contentieuse antérieure

 

M. et Mme B… ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d’annuler l’arrêté du 17 décembre 2013 par lequel le maire de la commune de Lanslevillard a autorisé la société d’économie mixte du Mont-Cenis à exécuter des travaux modificatifs pour le téléski de Terre Grasse.

 

Par un jugement n° 1403508 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

 

Procédure devant la cour

 

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2016, M. et Mme B…, représentés par Me A…, demandent à la cour :
1°) d’annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 20 septembre 2016 ;
2°) d’annuler pour excès de pouvoir l’autorisation du 17 décembre 2013 et la décision du 1er avril 2014 rejetant le recours gracieux formé à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Lanslevillard la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :
– l’implantation de l’ouvrage en face de leur résidence principale leur donne intérêt à agir à l’encontre de l’autorisation du 20 septembre 2016 ;
– contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, le projet devait faire l’objet d’un nouveau permis, et non d’une simple autorisation modificative, et le dossier de demande ne fait état d’aucun dispositif approprié pour permettre l’évacuation des eaux pluviales ;
– le projet méconnaît les dispositions des articles R. 111-2 et R. 111-21 du code de l’urbanisme, ainsi que celles des articles UL. 11 et UL. 4 du règlement du plan local d’urbanisme.

 

Par un mémoire en défense enregistré le 1er février 2017, la société d’économie mixte du Mont-Cenis, représentée par la société d’avocats Droit public consultants, conclut au rejet de la requête et demande qu’une somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la demande des requérants devant le tribunal administratif n’était pas recevable, faute de recours dans le délai de deux mois suivant l’affichage de l’autorisation en litige et faute de notification par les requérants de leur recours administratif au titre de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme ;
– les moyens de la requête ne sont pas fondés.

 

Vu les autres pièces du dossier ;

 

Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative ;

 

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

 

Après avoir entendu au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Antoine Gille, président-assesseur ;
– les conclusions de Mme Véronique Vaccaro-Planchet, rapporteur public ;
– et les observations de Me C… pour la société d’économie mixte du Mont-Cenis ;

 

1. Considérant que, par un arrêté du 9 juillet 2013, le maire de la commune de Lanslevillard a délivré à la société d’économie mixte du Mont-Cenis (SEMMC) l’autorisation mentionnée à l’article L. 472-1 du code de l’urbanisme en vue de l’exécution de travaux portant sur la réalisation d’un téléski à enrouleurs au lieu-dit « Au Vas du Bas / Terre Grasse » ; que, par arrêté du 17 décembre 2013, le maire de Lanslevillard à délivré à la SEMMC une autorisation portant sur la modification de cet ouvrage ; que M. et Mme B… relèvent appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande tendant à l’annulation de cette autorisation modificative ;

 

Sur la légalité de l’autorisation modificative du 17 décembre 2013 :

 

En ce qui concerne la nécessité d’une nouvelle autorisation :

 

2. Considérant que l’autorisation délivrée à la SEMMC le 17 décembre 2013 tend à modifier celle du 9 juillet 2013 lui permettant de construire la remontée mécanique dite de Terre Grasse ; que les modifications autorisées, qui se limitent au déplacement de quelques mètres vers l’amont des deux pylônes support de cet ouvrage et à l’élévation de 6 à 9 mètres de la hauteur de l’un de ces deux pylônes, sont sans incidence sur la conception générale du projet initial ; que ces travaux ne nécessitaient donc pas une autorisation distincte mais une simple modification de l’autorisation initiale ; que, dès lors, le moyen tiré de ce qu’une nouvelle autorisation aurait du être sollicitée doit être écarté ;

 

En ce qui concerne les risques liés à l’ouvrage :

3. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme :  » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations.  » ; que si les requérants font état du risque de chute d’un des pylônes support du téléski de Terre Grasse sur les propriétés voisines, il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de la probabilité d’une telle chute ou de la gravité de ses conséquences, que le maire de Lanslevillard a, en autorisant la modification des caractéristiques de cette remontée mécanique, entaché sa décision d’une erreur manifeste d’appréciation au regard de ces dispositions ;

 

En ce qui concerne l’atteinte au caractère des lieux :

4. Considérant qu’aux termes de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction alors en vigueur :  » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales.  » ; qu’aux termes de l’article UL. 11 du règlement du plan local d’urbanisme (PLU) de Lanslevillard :  » Par le traitement de leur aspect extérieur, les constructions doivent s’intégrer au paysage environnant en prenant en compte : / – les caractéristiques du contexte bâti dans lequel elles s’insèrent, / – les spécificités architecturales des constructions avoisinantes, sans pour toutefois exclure la création architecturale, / – les contraintes fonctionnelles et techniques propres à l’équipement  » ;

5. Considérant que la décision en litige, ainsi qu’il a été dit, se borne à autoriser le déplacement de quelques mètres de deux pylônes supports du téléski autorisé le 9 juillet 2013 et le rehaussement de l’un d’eux ; que ces modifications ne sont pas en elles-mêmes de nature à affecter l’aspect général et l’intégration dans le paysage du téléski de Terre Grasse ; que, par suite, M. et Mme B… ne sont pas fondés à soutenir que le maire de Lanslevillard a, en délivrant cette autorisation modificative, fait une inexacte application des dispositions précitées de l’article UL. 11 du règlement du PLU de la commune, dont les exigences ne sont pas moindres que celles de l’article R. 111-21 du code de l’urbanisme dont la violation est également invoquée ; que le moyen tiré de la méconnaissance de ces articles UL. 11 et R. 111-21 doit dès lors être écarté ;

 

En ce qui concerne l’écoulement des eaux pluviales :

6. Considérant qu’aux termes du paragraphe 3 de l’article UL. 4 du règlement du PLU de Lanslevillard :  » Les aménagements réalisés sur tout terrain devront être tels qu’ils garantissent l’écoulement direct des eaux pluviales, sans aggraver la situation antérieure. Le constructeur réalisera les dispositifs appropriés pour une évacuation vers un exutoire. Ces aménagements sont à la charge exclusive du propriétaire qui doit réaliser les dispositifs adaptés à l’opération et au terrain  » ; que si les requérants font valoir que, contrairement aux exigences de ces dispositions, le dossier de demande de l’autorisation en litige ne fait pas apparaître de dispositif d’évacuation des eaux pluviales vers un exutoire, il ne ressort pas des pièces du dossier, et n’est d’ailleurs pas même allégué, que le déplacement des pylônes en cause et la modification de la hauteur de l’un d’eux soit, non plus d’ailleurs que la présence même de ces pylônes, de nature à affecter les conditions d’écoulement des eaux pluviales sur la piste de ski que longe cet équipement ; que le moyen doit être écarté ;

7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme B… ne sont pas fondés à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande ;

 

Sur les frais liés au litige :

 

8. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’il soit fait droit aux conclusions des requérants formées au titre des frais exposés et dirigées contre la SEMMC, qui n’est pas partie perdante dans la présente instance ; que, dans les circonstances de l’espèce, il y a lieu de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge des requérants le versement à la SEMMC de la somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés ;

 

 

DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme B… est rejetée.

Quad Festival Randos du Cantal/ Interdiction/ Légalité

CAA de LYON

N° 15LY04123
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre – formation à 3
M. POMMIER, président
Mme Emilie BEYTOUT, rapporteur
Mme VIGIER-CARRIERE, rapporteur public
SCP MARTIN -LAISNE, DETHOOR-MARTIN, PORTAL,GALAND, avocats

 

lecture du jeudi 5 juillet 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure

La société Macadam Holding et Globe Trotter a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d’annuler l’arrêté du 30 septembre 2014 par lequel le préfet du Cantal a interdit les randonnées dénommées  » Quad Festival Randos  » qu’elle souhaitait organiser du 3 au 5 octobre 2014.

Par un jugement n° 1402102 du 4 novembre 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

 

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 31 décembre 2015, la société Macadam Holding et Globe Trotter, représentée par MeA…, demande à la cour :
1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 4 novembre 2015 ;
2°) d’annuler l’arrêté du préfet du Cantal du 30 septembre 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l’Etat une somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la compétence de l’auteur de l’arrêté n’est pas rapportée ;
– le préfet du Cantal a commis une erreur de droit en soumettant sa demande au régime de l’autorisation alors qu’elle relevait du régime de la déclaration ;
– le préfet était tenu de lui délivrer un récépissé dès lors que son dossier de déclaration était complet ;
– l’interdiction litigieuse porte atteinte à la liberté d’aller et venir, à la liberté du commerce et de l’industrie et à l’égalité entre les différents usagers du domaine public, alors qu’aucune menace à l’ordre public ne justifiait une telle mesure.

Par un mémoire en défense enregistré le 28 août 2017, le ministre de l’intérieur conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu’aucun des moyens soulevés n’est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code du sport ;
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de Mme Beytout, premier conseiller,
– et les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public.

 

1. Considérant que, le 2 avril 2014, la société Macadam Holding et Globe Trotter a déposé une déclaration pour organiser du 3 au 5 octobre 2014 un événement dénommé  » Quad Festival Randos « , se composant, d’une part, d’un salon commercial consacré au quad et, d’autre part, de randonnées en quad au départ d’Entraygues-sur-Truyère, entre l’Aveyron et le Cantal ; que le préfet du Cantal a interdit cet événement par un arrêté du 30 septembre 2014 ; que la société Macadam Holding et Globe Trotter relève appel du jugement du 4 novembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur la légalité de l’arrêté du 30 septembre 2014 :
2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales :  » La police municipale est assurée par le maire, toutefois (…) : 3° Le représentant de l’Etat dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ d’application excède le territoire d’une commune (…)  » ; que l’arrêté d’interdiction en litige ne constitue ni un refus de délivrance d’un récépissé de déclaration ni un refus d’autorisation pris sur le fondement de l’article R. 331-18 du code du sport mais doit s’analyser comme une mesure de police prise sur le fondement de l’article L. 2215-1 précité du code général des collectivités territoriales, qu’il vise expressément ;
3. Considérant, en premier lieu, qu’en l’absence de situation de compétence liée, le moyen tiré de l’incompétence de son auteur est opérant ; que le signataire de la décision, M. B… D…, sous-préfet de Saint-Flour, disposait d’une délégation de signature en date du 19 août 2014 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs n° 22 d’août 2014 à l’effet notamment de se substituer au maire dans les cas prévus à l’article L. 2215-1 du code général des collectivités territoriales ; que, par suite, le moyen tiré de l’incompétence de l’auteur de l’arrêté doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu’ainsi qu’il a été indiqué au point 2, l’arrêté en litige constitue une interdiction prise par le représentant de l’Etat dans le cadre de ses pouvoirs de police générale, comme il pouvait le faire, alors même qu’il était par ailleurs saisi par la société Macadam Holding et Globe Trotter d’une déclaration sur le fondement de l’article R. 331-18 du code du sport ; que, par suite, le moyen tiré de l’erreur de droit à avoir appliqué le régime de l’autorisation alors qu’il s’agissait d’une concentration comportant moins de 400 véhicules et soumise à ce titre au régime de la déclaration en vertu de l’article R. 331-18 du code du sport ne peut qu’être écarté, de même que le moyen tiré de ce que le dossier étant complet, le préfet était en situation de compétence liée pour délivrer le récépissé ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu’il ressort des pièces du dossier qu’à la date de l’arrêté en litige subsistait un doute sur le nombre de participants attendus, dès lors que si la société Macadam Holding et Globe Trotter avait indiqué dans sa déclaration la venue de 390 participants, elle n’avait mentionné qu’une centaine de participants dans son évaluation des incidences sur les zones Natura 2000 ; qu’en outre, les mesures prises pour assurer la sécurité des participants et des tiers, à savoir une organisation en groupe de 18 quads avec un ouvreur et un fermeur dotés d’une trousse de secours et de téléphones avec les numéros de secours, la traversée des zones habitées à allure modérée et la mise à disposition de deux secouristes par la fédération française de sauvetage et de secourisme ne disposant pas de véhicules d’intervention, apparaissaient insuffisantes au regard de l’étendue de la zone traversée ; que, de plus, la société Macadam Holding et Globe Trotter n’avait fourni aucune information sur le respect par les participants des règles relatives à la détention du permis de conduire pour les quads lourds, à l’homologation  » route  » des véhicules, à leur immatriculation ou encore au contrôle de leur niveau sonore ; qu’elle n’avait mentionné aucune mesure pour garantir la tranquillité, si ce n’est le passage à faible allure dans les zones habitées, sans garantie au demeurant sur les moyens mis en oeuvre pour assurer l’effectivité d’une telle mesure ; qu’enfin, le nombre annoncé de 390 véhicules participant à ces randonnées ne pouvait être sans conséquences sur la faune et la flore des zones concernées et sur celles des sites d’intérêts communautaires traversés, s’agissant en particulier du risque de détérioration du lit des rivières lors des passages à gué, ainsi que cela ressort de l’avis de la direction départementale des territoires du département du Cantal ; que, par suite, au vu de l’ensemble de ces éléments, le préfet du Cantal n’a pas, en interdisant dans le département les randonnées en quad dénommées  » quad festival randos  » du 3 au 5 octobre 2014, porté une atteinte excessive à la liberté du commerce et d’industrie dont bénéficie la société requérante ni à la liberté d’aller et venir des participants au regard des exigences de l’ordre public et de l’objectif de protection des espèces et des espaces naturels ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que la société Macadam Holding et Globe Trotter ne peut utilement invoquer la méconnaissance du principe d’égalité, eu égard à la différence de situation existant entre la concentration envisagée et les randonnées en quad de particuliers ou d’associations locales ;
7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Macadam Holding et Globe Trotter n’est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cet arrêté ;
Sur les frais liés au litige :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société Macadam Holding et Globe Trotter au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société Macadam Holding et Globe Trotter est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Macadam Holding et Globe Trotter et au ministre de l’intérieur.
Délibéré après l’audience du 7 juin 2018 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
Mme C…et Mme Beytout, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 5 juillet 2018.

1
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N° 15LY04123

Forêt ouverte au public/ Circuit VTT free-ride illégal/ Accident/ Responsabilité de l’ONF (non)

Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 14 juin 2018
N° de pourvoi: 17-14781
Publié au bulletin Rejet

Mme Flise (président), président
SCP Alain Bénabent , SCP Delvolvé et Trichet, avocat(s)

 

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

 

Donne acte à M. C… X…, devenu majeur en cours de procédure, de sa reprise d’instance en son nom personnel ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Versailles, 2 février 2017) et les productions, que M. Florian X…, alors âgé de 17 ans, a été victime le 15 juin 2010, dans la forêt de […] , d’une grave chute de vélo à la suite de laquelle il est demeuré tétraplégique ; que la victime et ses parents, M. Hervé X… et Mme Isabelle X…, agissant tant en leur nom personnel qu’en leur qualité de représentants légaux de leurs enfants, alors mineurs, B… et C… X…, ont assigné l’Office national des forêts (l’ONF) afin de le voir déclaré responsable de cet accident ; que la RATP, la Caisse de coordination aux assurances sociales de la RATP et la Mutuelle du personnel de la RATP ont été appelées en la cause ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Florian X…, M. Hervé X…, Mme Isabelle X…, M. C… X… et Mme B… X… (les consorts X…) font grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à voir dire l’ONF responsable de l’accident litigieux et ordonner une expertise, avant dire droit sur les préjudices, alors, selon le moyen :

1°/ qu’en vertu de l’article L. 380-1, devenu L. 122-10, du code forestier, dans les forêts gérées par l’ONF, l’ouverture des forêts au public implique la mise en oeuvre des mesures nécessaires à la sécurité de ce public ; que l’ouverture au public en l’absence des mesures de sécurité nécessaires constitue par conséquent un manquement générateur de responsabilité, et ce sans qu’il y ait lieu de distinguer selon que les espaces ouverts au public comportent, ou non, des équipements ou aménagements particuliers ; qu’en retenant pourtant que l’ONF, qui « aménage des sentiers, pistes cavalières, aires de jeux ou de pique-nique, etc. », ne serait « débiteur d’une obligation de sécurité [qu’]en ce qui concerne ces équipements » et «ne saurait répondre des éventuels dangers présents dans les espaces qui ne sont pas spécialement aménagés en vue de l’accueil du public », tâche ne correspondant pas « à sa mission », la cour d’appel, distinguant là où la loi ne distingue pas, a violé l’article L. 380-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009 applicable en la cause ;

2°/ qu’en retenant encore que l’ONF « ne saurait répondre des éventuels dangers présents dans les espaces qui ne sont pas spécialement aménagés en vue de l’accueil du public » eu égard « à ses moyens, puisqu’il n’est pas contesté qu’il ne dispose que d’une quinzaine d’agents de terrain », la cour d’appel a statué par un motif inopérant, en violation de l’article L. 380-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009 applicable en la cause ;

3°/ que constitue une faute génératrice de responsabilité le manquement à un devoir général de prudence et de diligence ; qu’un tel manquement est caractérisé lorsque l’établissement en charge de l’accueil du public en forêt, bien qu’informé de la pratique courante de sports dangereux au sein d’espaces qu’il laisse ouverts au public, ne met en oeuvre ni mesures de sécurité, ni mesures de prévention et de mise en garde du public qu’il accueille ; qu’en l’espèce, l’ONF reconnaissait lui-même avoir sciemment décidé de ne prendre aucune mesure de prévention des dangers encourus par les cyclistes venant s’adonner, dans des espaces forestiers laissés ouverts au public, à la pratique du ‘’free-ride » ; qu’il exposait ainsi notamment que «l’absence d’apposition de panneaux qui est reprochée à l’ONF par les demandeurs, loin de constituer une faute, s’explique aisément puisque (…) implanter des panneaux pour de tels circuits constituerait une forme d’officialisation d’un circuit non autorisé et d’une pratique sportive illégale » ; que pour écarter pourtant toute faute de l’ONF, la cour d’appel a retenu que sa connaissance du circuit ayant causé l’accident de M. Florian X… n’étant pas suffisamment établie, il ne pouvait « être retenu contre l’ONF une faute pour ne pas avoir détruit un tel aménagement » ; qu’en limitant ainsi les devoirs de l’ONF à la seule destruction des circuits connus de lui, la cour d’appel a violé les articles 1382, devenu 1240, et 1383, devenu 1241, du code civil ;

Mais attendu que les dispositions de l’article L. 380-1 du code forestier dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2009-1369 du 6 novembre 2009, applicable en la cause, n’instituent pas une présomption de responsabilité pour faute de l’ONF pour les dommages survenus au public dans les forêts visées par ce texte ; qu’ayant relevé qu’il est constant que l’accident a eu lieu sur un circuit « sauvage », non signalisé, aménagé illégalement dans la forêt par des tiers pour leur activité dite de « free ride » consistant à franchir avec un VTT des bosses en effectuant des sauts, voire des figures sur un terrain préalablement modelé par leurs soins, et souverainement estimé qu’il n’est pas établi que l’ONF avait connaissance de l’existence de ce circuit qui était situé à l’écart de toute zone aménagée et n’était accessible qu’après plusieurs minutes de marche sur un chemin, la cour d’appel a pu retenir que l’ONF n’était pas responsable de l’accident litigieux sur le fondement de la responsabilité pour faute ;

D’où il suit que le moyen, inopérant en sa deuxième branche qui s’attaque à des motifs surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ;

Et sur le second moyen, pris en ses quatre premières branches :

Attendu que les consorts X… font encore grief à l’arrêt de les débouter de leurs demandes tendant à voir dire l’ONF responsable de l’accident litigieux et ordonner une expertise, avant-dire droit sur les préjudices, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en l’espèce, pour débouter les consorts X… de leurs demandes au titre de la responsabilité de l’ONF fondée sur la garde du circuit, la cour d’appel a retenu que « le circuit, qui n’a ainsi joué qu’un rôle passif dans la survenance du dommage, ne peut donc être considéré comme en ayant été l’instrument » ; qu’en statuant ainsi, sans provoquer les observations des parties dont aucune ne prétendait que le circuit n’aurait pas été l’instrument du dommage, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que la responsabilité du gardien est subordonnée à la condition que la victime ait rapporté la preuve que la chose a été, en quelque manière et ne fût-ce que pour partie, l’instrument du dommage ; que tel est le cas lorsque la chose inerte intervenue dans la réalisation du dommage présente un caractère dangereux ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a elle-même constaté que M. Florian X… avait « chuté en franchissant une bosse dans un circuit, et est resté tétraplégique » et qu’ « il est incontestable que le circuit était en lui-même potentiellement dangereux, à raison de l’absence de sécurisation de ses abords et de l’importance des obstacles créés » ; qu’il en résultait que le circuit avait joué un rôle actif dans la survenance du dommage et en avait ainsi été l’instrument ; qu’en retenant pourtant que le circuit n’aurait « joué qu’un rôle passif dans la survenance du dommage » et « ne peut donc être considéré comme en ayant été l’instrument », la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l’article 1384, alinéa 1, devenu 1242, du code civil ;

3°/ qu’il suffit à la victime, pour engager la responsabilité du gardien, d’établir que la chose a été, en quelque manière et ne fût-ce que pour partie, l’instrument du dommage ; qu’en l’espèce, pour exclure que le circuit ait été l’instrument du dommage, la cour d’appel a retenu que M. Florian X… et son ami « s’apprêtaient à quitter le circuit, après y avoir évolué », outre « la démarche volontaire de la victime qui s’y est rendue et y a évolué, en parfaite connaissance de sa configuration », son « imprudence fautive », « l’allure inadaptée du cycliste, ou même sa fatigue à la fin de ses évolutions », et qu’« une chute aux conséquences aussi graves aurait parfaitement pu se produire en dehors d’un circuit » ; qu’en statuant par de tels motifs impropres à exclure que le circuit ait été, fût-ce au moins pour partie, l’instrument du dommage de la victime, la cour d’appel a violé l’article 1384, alinéa 1, devenu 1242, du code civil ;

4°/ que la victime d’un dommage peut invoquer la responsabilité du gardien de la chose sans que puisse lui être opposée son acceptation des risques ; qu’en retenant pourtant que « s’il est incontestable que le circuit était en lui-même potentiellement dangereux (…) c’est bien cette dernière caractéristique qui a été recherchée par la victime, qui s’y est rendue et y a évolué en toute connaissance de son caractère ‘’sauvage », et en y recherchant précisément des sensations liées à l’importance de son relief, et peut-être aussi à la totale liberté avec laquelle elle pouvait l’utiliser », cependant que, même à l’envisager, la victime ne pouvait se voir opposer son acceptation des risques, la cour d’appel a violé l’article 1384, alinéa 1, devenu 1242, du code civil ;

Mais attendu que, tout en considérant que le circuit était en lui-même potentiellement dangereux, la cour d’appel a relevé que l’accident était dû à un manque de vitesse du vélo lorsque la victime avait tenté de franchir l’ultime bosse du parcours et donc à une allure inadaptée du cycliste et non à l’obstacle lui-même ; que, tenue de vérifier les conditions d’application de l’article 1384, alinéa 1, devenu l’article 1242, alinéa 1, du code civil qui était invoqué, elle n’a pas violé le principe de la contradiction en retenant que le circuit n’avait joué qu’un rôle passif dans l’accident pour en déduire, à bon droit, que celui-ci ne pouvait être considéré comme ayant été l’instrument du dommage, l’accident étant exclusivement imputable à l’imprudence fautive de la victime, de sorte que la responsabilité de l’ONF n’était pas engagée ;

D’où il suit que le moyen, qui critique en sa quatrième branche des motifs surabondants, n’est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen, pris en ses trois dernières branches, annexé, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Concessions de remontées mécaniques/ Biens apportés par l’exploitant/ Qualification de biens de retour

Conseil d’État

N° 402251
ECLI:FR:CESEC:2018:402251.20180629
Publié au recueil Lebon
Section
M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur
M. Olivier Henrard, rapporteur public
SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP JEAN-PHILIPPE CASTON, avocats

 

lecture du vendredi 29 juin 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

 

Texte intégral
Vu la procédure suivante :

Le préfet des Alpes-de-Haute-Provence a demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler, d’une part, les délibérations des 30 octobre 2013 et 28 juillet 2014 par lesquelles la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye a approuvé le protocole d’accord portant sur la reprise de la station de ski  » Sauze – Super Sauze  » et, d’autre part, la délibération du 9 novembre 2013 par laquelle la commune d’Enchastrayes a approuvé la contribution financière qu’elle s’est engagée à verser dans le cadre du protocole relatif à la reprise de cette station de ski. Par deux jugements rendus respectivement sous les n°s 1403085, 1407888 et 1403073 le 18 août 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté chacune des demandes du préfet.

Par un arrêt n°s 15MA04083, 15MA04084 du 9 juin 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a, sur appel du préfet, annulé l’article 2 du premier jugement ainsi que la délibération du conseil communautaire de la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye du 30 octobre 2013 puis a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un pourvoi, enregistré le 8 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’intérieur demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’article 3 de cet arrêt en tant qu’il rejette les conclusions du préfet des Alpes-de-Haute-Provence tendant à l’annulation des délibérations des 9 novembre 2013 et 28 juillet 2014 ;

2°) réglant l’affaire au fond, de faire droit aux conclusions d’appel du préfet des Alpes-de-Haute-Provence.

 

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code général des collectivités territoriales ;
– le code du tourisme ;
– la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 ;
– le code de justice administrative ;

 

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Marc Pichon de Vendeuil, maître des requêtes,

– les conclusions de M. Olivier Henrard, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye et à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société C…Frères, de M. A…C…, de l’indivision B…C…et de la société d’exploitation des remontées mécaniques du Sauze ;

 

Sur le cadre du litige :

1. Considérant qu’il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la station de ski  » Sauze – Super Sauze « , située sur le territoire de la commune d’Enchastrayes, a été créée, aménagée puis exploitée, à partir des années 1930, par différentes personnes privées sur des terrains leur appartenant ou dont elles avaient la jouissance ; que postérieurement à l’intervention de la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne désormais codifiée dans le code du tourisme, qui a qualifié de service public le service des remontées mécaniques et a confié aux communes ou à leurs groupements l’organisation et l’exécution de ce service, tout en laissant une période de quatorze ans pour mettre en conformité avec la loi les conventions antérieurement conclues ou les autorisations d’exploiter antérieurement accordées pour l’exécution du service des remontées, a été conclue le 28 décembre 1998, entre la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye (CCVU) et la SARL C…Frères, une convention de délégation de service public pour l’aménagement du domaine skiable et l’exploitation des remontées mécaniques du Sauze – Super Sauze – La Rente sur la commune d’Enchastrayes, d’une durée de quatorze ans ; qu’à l’expiration de cette convention, et après avoir déclaré infructueuse la procédure de mise en concurrence lancée en vue de la conclusion d’une nouvelle délégation de service public, la CCVU a, par une délibération du 13 juin 2013, décidé la reprise en régie de l’exploitation ; que s’agissant des biens affectés à l’exploitation du service public, leur remise à la CCVU a été ordonnée à la SARL C…Frères par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Marseille en date du 29 juillet 2013 ; que les parties, ainsi que la commune d’Enchastrayes et des tiers ayant disposé de droits sur les biens en cause, ont recherché un accord amiable afin d’arrêter l’inventaire et l’évaluation de ces biens ; qu’un protocole a été approuvé par une délibération du conseil communautaire de la CCVU en date du 28 juillet 2014, prévoyant notamment le rachat des biens en cause par la CCVU pour un montant total de 3 700 000 euros hors taxes, dont 1 200 000 euros hors taxes à verser en une seule fois par la commune d’Enchastrayes dont le conseil municipal avait approuvé le principe d’une telle contribution financière par une délibération du 9 novembre 2013 ;

2. Considérant qu’estimant que ces délibérations étaient illégales, le préfet des Alpes-de-Haute-Provence les a déférées devant le tribunal administratif de Marseille, qui a rejeté ses requêtes par deux jugements du 18 août 2015 ; que par un arrêt du 9 juin 2016, la cour administrative d’appel de Marseille a annulé une délibération du 30 octobre 2013 du conseil communautaire de la CCVU et rejeté le surplus des conclusions des parties ; que le ministre de l’intérieur se pourvoit contre cet arrêt en tant qu’il rejette les conclusions du préfet tendant à l’annulation des délibérations du conseil municipal d’Enchastrayes du 9 novembre 2013 et de la CCVU du 28 juillet 2014 ;

Sur les règles applicables aux biens de la concession :

3. Considérant, en premier lieu, que, dans le cadre d’une concession de service public mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l’acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l’ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique ; que le contrat peut attribuer au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des ouvrages qui, bien que nécessaires au fonctionnement du service public, ne sont pas établis sur la propriété d’une personne publique, ou des droits réels sur ces biens, sous réserve de comporter les garanties propres à assurer la continuité du service public, notamment la faculté pour la personne publique de s’opposer à la cession, en cours de concession, de ces ouvrages ou des droits détenus par la personne privée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu’à l’expiration de la convention, les biens qui sont entrés, en application de ces principes, dans la propriété de la personne publique et ont été amortis au cours de l’exécution du contrat font nécessairement retour à celle-ci gratuitement, sous réserve des clauses contractuelles permettant à la personne publique, dans les conditions qu’elles déterminent, de faire reprendre par son cocontractant les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public ; que le contrat qui accorde au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des biens nécessaires au service public autres que les ouvrages établis sur la propriété d’une personne publique, ou certains droits réels sur ces biens, ne peut, sous les mêmes réserves, faire obstacle au retour gratuit de ces biens à la personne publique en fin de concession ;

5. Considérant, en troisième lieu, que lorsque la convention arrive à son terme normal ou que la personne publique la résilie avant ce terme, le concessionnaire est fondé à demander l’indemnisation du préjudice qu’il subit à raison du retour des biens à titre gratuit dans le patrimoine de la collectivité publique, en application des principes énoncés ci-dessus, lorsqu’ils n’ont pu être totalement amortis, soit en raison d’une durée du contrat inférieure à la durée de l’amortissement de ces biens, soit en raison d’une résiliation à une date antérieure à leur complet amortissement ; que lorsque l’amortissement de ces biens a été calculé sur la base d’une durée d’utilisation inférieure à la durée du contrat, cette indemnité est égale à leur valeur nette comptable inscrite au bilan ; que, dans le cas où leur durée d’utilisation était supérieure à la durée du contrat, l’indemnité est égale à la valeur nette comptable qui résulterait de l’amortissement de ces biens sur la durée du contrat ; que si, en présence d’une convention conclue entre une personne publique et une personne privée, il est loisible aux parties de déroger à ces principes, l’indemnité mise à la charge de la personne publique au titre de ces biens ne saurait en toute hypothèse excéder le montant calculé selon les modalités précisées ci-dessus ;

6. Considérant que les règles énoncées ci-dessus, auxquelles la loi du 9 janvier 1985 n’a pas entendu déroger, trouvent également à s’appliquer lorsque le cocontractant de l’administration était, antérieurement à la passation de la concession de service public, propriétaire de biens qu’il a, en acceptant de conclure la convention, affectés au fonctionnement du service public et qui sont nécessaires à celui-ci ; qu’une telle mise à disposition emporte le transfert des biens dans le patrimoine de la personne publique, dans les conditions énoncées au point 3 ; qu’elle a également pour effet, quels que soient les termes du contrat sur ce point, le retour gratuit de ces biens à la personne publique à l’expiration de la convention, dans les conditions énoncées au point 4 ; que les parties peuvent prendre en compte cet apport dans la définition de l’équilibre économique du contrat, à condition que, eu égard notamment au coût que représenterait l’acquisition ou la réalisation de biens de même nature, à la durée pendant laquelle les biens apportés peuvent être encore utilisés pour les besoins du service public et au montant des amortissements déjà réalisés, il n’en résulte aucune libéralité de la part de la personne publique ;

7. Considérant que, dans l’hypothèse où la commune intention des parties a été de prendre en compte l’apport à la concession des biens qui appartenaient au concessionnaire avant la signature du contrat par une indemnité, le versement d’une telle indemnité n’est possible que si l’équilibre économique du contrat ne peut être regardé comme permettant une telle prise en compte par les résultats de l’exploitation ; qu’en outre, le montant de l’indemnité doit, en tout état de cause, être fixé dans le respect des conditions énoncées ci-dessus afin qu’il n’en résulte aucune libéralité de la part de la personne publique ;

Sur l’arrêt en tant qu’il se prononce sur la qualification des biens en cause et sur les conséquences indemnitaires :

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la cour administrative d’appel de Marseille a commis une erreur de droit et inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis en jugeant que la propriété des biens en cause, alors même qu’ils étaient nécessaires au fonctionnement du service public concédé, n’avait pas été transférée à la communauté de communes dès la conclusion de la convention du seul fait de leur affectation à la concession de service public et que ces biens n’étaient pas régis par les règles applicables aux biens de retour, pour en déduire que le concessionnaire avait droit, du fait de leur retour dans le patrimoine de la CCVU, à une indemnité égale à leur valeur vénale ;

9. Considérant par suite, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens du pourvoi, que l’arrêt attaqué doit être annulé en tant qu’il rejette les conclusions du préfet tendant à l’annulation des délibérations du 9 novembre 2003 de la commune d’Enchastrayes et du 28 juillet 2014 de la CCVU ;

10. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu’une somme soit mise à ce titre à la charge de l’Etat qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

 

D E C I D E :
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Article 1er : L’article 3 de l’arrêt du 9 juin 2016 de la cour administrative d’appel de Marseille est annulé en tant qu’il statue sur les conclusions tendant à l’annulation des délibérations du 9 novembre 2003 de la commune d’Enchastrayes et du 28 juillet 2014 de la CCVU.
Article 2 : L’affaire est renvoyée dans cette mesure à la cour administrative d’appel de Marseille.
Article 3 : Les conclusions de la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye, de la société C…Frères, de M. C…, de l’indivision B…C…et de la société d’exploitation des remontées mécaniques du Sauze, présentées au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre d’Etat, ministre de l’intérieur, à la communauté de communes de la vallée de l’Ubaye et à la société C…Frères, première dénommée, pour tous ses cosignataires.
Copie en sera adressée à la commune d’Enchastrayes et au ministre de l’économie et des finances.