UTN – Limite basse (surface)

CAA Nancy, 1ère chambre

  • N° 21NC02491
  • Inédit au recueil Lebon

Lecture du jeudi 29 juin 2023

Président

  1. WALLERICH

Rapporteur

  1. Marc WALLERICH

Rapporteur public

Mme ANTONIAZZI

Avocat(s)

LEONEM AVOCATS

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SCI de construction La Kaelberhutte, Mme T… Q…, M. L… Q…, M. et Mme L… N…, Mme A… E… et M. G… K…, Mme A… M…, Mme A… I…, Mme U… C…, M. D… O…, Mme F… O…, M. et Mme R… H…, Mme P… B… et M. J… B…, représentés par la SELARL Leonem Avocats, prise en la personne de Me David Bozzi, ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler l’arrêté du 28 mai 2019, par lequel le maire de la commune de Breitenbach a accordé un permis de construire trois yourtes et deux annexes à la SARL Un autre monde, ainsi que la décision du maire de la commune, du 13 août 2019, rejetant leur recours gracieux du 25 juillet 2019 tendant au retrait dudit permis.

Par un jugement n° 1907790 du 15 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ce recours.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 septembre 2021 et des mémoires complémentaires enregistrés le 21 mars 2023, le 24 avril 2023 et le 25 avril 2023 la SCI de construction La Kaelberhutte, Mme T… Q…, M. L… Q…, M. et Mme L… N…, Mme A… E… et M. G… K…, Mme A… M…, Mme A… I…, Mme U… C…, M. D… O…, Mme F… O…, M. et Mme R… H…, Mme P… B… et M. J… B… demandent à la Cour :

1°) d’annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 15 juillet 2021 ;

2°) d’annuler l’arrêté du 28 mai 2019 par lequel le maire de la commune de Breitenbach a accordé à la SARL Un autre monde un permis de construire trois yourtes et deux annexes, ainsi que la décision du maire de la commune du 13 août 2019 de rejet de leur recours gracieux tendant au retrait dudit permis ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Breitenbach et de la SARL Un autre monde, une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :
– ils ont un intérêt à agir ;
– c’est à tort que les premiers juges ont écarté les moyens soulevés en première instance ;
– l’arrêté litigieux méconnaît les dispositions de l’article R. 431-30 du code de l’urbanisme ;
– les articles 1N, 2N et 11N du PLU méconnaissent les dispositions des articles L. 151-8, L. 151-11, L. 151-13 et L. 122-9 du code de l’urbanisme. Partant, et en vertu de l’application du principe de l’exception d’illégalité, l’arrêté litigieux est illégal eu égard aux dispositions immédiatement antérieures remises en vigueur ;
– l’arrêté méconnaît les dispositions des articles 1N et 2N du règlement du PLU ;
– l’arrêté méconnaît les dispositions de l’article 3N du règlement du PLU ;
– l’arrêté méconnaît les dispositions de l’article 4N du règlement du PLU ;
– l’arrêté méconnaît les dispositions de l’article 9N du règlement du PLU ;
– l’arrêté méconnaît les dispositions de l’article 10N du règlement du PLU ;
– l’arrêté méconnaît les dispositions de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme et de l’article 11N du règlement du PLU ;
– l’arrêté méconnaît les règles relatives aux unités touristiques nouvelles ;
– l’arrêté est illégal par voie d’exception, dès lors que l’autorisation de défrichement sur laquelle il repose est entachée d’illégalité ;
– l’arrêté est illégal en tant qu’il n’a pas fait l’objet d’une évaluation environnementale au sens du point 47 de l’annexe de l’article R. 122-2 du code de l’environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 12 novembre 2021, le 17 avril 2023 et le 10 mai 2023, la SARL Un autre monde, représentée par la SELAS M et S…, prise en la personne de Me Laurent Keller, conclut au rejet de la requête, à l’annulation du jugement en tant qu’il a rejeté ses conclusions présentées sur le fondement de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme, à la condamnation des appelants à une somme de 46 280 euros augmentée de 36 632 euros sur ce même fondement, et à ce que soit mis à leur charge le versement d’une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles, sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la requête est irrecevable dès lors que les requérants ne justifient d’un intérêt leur donnant qualité à agir ;
– les moyens présentés par les appelants ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 18 octobre 2022 et 13 avril 2023 au greffe de la cour, la commune de Breitenbach, représentée par la SCP Racine Strasbourg, prise en la personne de Me Anne-Claire Muller-Pistré, conclut au rejet de la requête, et à ce que soit mis à la charge des appelants, le versement d’une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles, sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
– la requête est irrecevable ;
– le moyen tiré de l’exception d’illégalité de l’autorisation de défrichement est inopérant ;
– tous les autres moyens ne sont pas fondés.

La clôture de l’instruction a été fixée au 25 mai 2023 par une ordonnance du 25 avril 2023.

Un mémoire complémentaire, enregistré le 25 mai 2023, a été présenté pour les requérants.

Un mémoire en défense complémentaire, enregistré le 25 mai 2023 a été présenté pour la commune de Breitenbach.

Ils n’ont pas été communiqués en application de l’article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– le code de l’environnement ;
– le code de l’urbanisme ;
– le code de la construction et de l’habitation ;
– le code de la santé publique ;
– l’arrêté du 7 septembre 2009 fixant les prescriptions techniques applicables aux installations d’assainissement non collectif recevant une charge brute de pollution organique inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5 ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Wallerich, président,
– les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,
– et les observations de Me Juliac-Degrelle, pour la SCI de construction la Kaelberhutte et autres, ainsi que celles de Me Martinez-White, pour la SARL Un autre monde.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 28 mai 2019, le maire de la commune de Breitenbach a délivré un permis de construire trois yourtes et deux annexes sur un terrain situé au lieu-dit la Kaelberhutte à Breitenbach, à la SARL Un autre monde, sollicité le 7 mars 2019. La SCI de construction la Kaelberhutte et les autres requérants ont formulé un recours gracieux, tendant au retrait dudit permis. Ce recours a été rejeté par une décision du maire du 13 août 2019. Par une requête introduite devant le tribunal administratif de Strasbourg, les requérants ont sollicité l’annulation de l’arrêté du 28 mai 2019 et de la décision du 13 août 2019. Par un jugement du 15 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande. La SCI de construction la Kaelberhutte et les autres requérants relèvent appel de ce jugement.

Sur la légalité interne de l’arrêté du 28 mai 2019 :

En ce qui concerne le moyen tiré de l’exception d’illégalité du règlement du plan local d’urbanisme (PLU) de Breitenbach :

2. Aux termes de l’article L. 600-12 du code de l’urbanisme :  » Sous réserve de l’application des articles L. 600-12-1 et L. 442-14, l’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le plan local d’urbanisme, le document d’urbanisme en tenant lieu ou la carte communale immédiatement antérieur « . Aux termes de l’article L. 600-12-1 du même code :  » L’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un schéma de cohérence territoriale, d’un plan local d’urbanisme, d’un document d’urbanisme en tenant lieu ou d’une carte communale sont par elles-mêmes sans incidence sur les décisions relatives à l’utilisation du sol ou à l’occupation des sols régies par le présent code délivrées antérieurement à leur prononcé dès lors que ces annulations ou déclarations d’illégalité reposent sur un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet « .

3. Il résulte de l’article L. 600-12-1 du code de l’urbanisme que l’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un document local d’urbanisme n’entraine pas l’illégalité des autorisations d’urbanisme délivrées lorsque cette annulation ou déclaration d’illégalité repose sur un motif étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet en cause. Il appartient au juge, saisi d’un moyen tiré de l’illégalité du document local d’urbanisme à l’appui d’un recours contre une autorisation d’urbanisme, de vérifier d’abord si l’un au moins des motifs d’illégalité du document local d’urbanisme est en rapport direct avec les règles applicables à l’autorisation d’urbanisme. Un vice de légalité externe est étranger à ces règles, sauf s’il a été de nature à exercer une influence directe sur des règles d’urbanisme applicables au projet. En revanche, sauf s’il concerne des règles qui ne sont pas applicables au projet, un vice de légalité interne ne leur est pas étranger. En outre, lorsqu’un motif d’illégalité non étranger aux règles d’urbanisme applicables au projet est susceptible de conduire à remettre en vigueur tout ou partie du document local d’urbanisme immédiatement antérieur, le moyen tiré de l’exception d’illégalité du document local d’urbanisme à l’appui d’un recours en annulation d’une autorisation d’urbanisme ne peut être utilement soulevé que si le requérant soutient également que cette autorisation méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur.

4. Les requérants font valoir que les dispositions des articles 1N, 2N et 11N du règlement du PLU méconnaissent les articles L. 151-11, L. 151-13, L. 151-8 et L. 122-9 du code de l’urbanisme, et que le projet méconnaît les règles du document immédiatement antérieur.

5. Dans un premier temps, aux termes de l’article L. 151-11 du code de l’urbanisme, dans sa version applicable au litige :  » I.- Dans les zones agricoles, naturelles ou forestières, le règlement peut : / 1° Autoriser les constructions et installations nécessaires à des équipements collectifs dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière du terrain sur lequel elles sont implantées et qu’elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages ; / 2° Désigner, en dehors des secteurs mentionnés à l’article L. 151-13, les bâtiments qui peuvent faire l’objet d’un changement de destination, dès lors que ce changement de destination ne compromet pas l’activité agricole ou la qualité paysagère du site. Le changement de destination est soumis, en zone agricole, à l’avis conforme de la commission départementale de la préservation des espaces agricoles, naturels et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime, et, en zone naturelle, à l’avis conforme de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites. / II. – Dans les zones agricoles ou forestières, le règlement peut autoriser les constructions et installations nécessaires à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles, lorsque ces activités constituent le prolongement de l’acte de production, dès lors qu’elles ne sont pas incompatibles avec l’exercice d’une activité agricole, pastorale ou forestière sur le terrain sur lequel elles sont implantées et qu’elles ne portent pas atteinte à la sauvegarde des espaces naturels et des paysages. L’autorisation d’urbanisme est soumise pour avis à la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers « . Aux termes de l’article L. 151-13 du même code :  » Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d’accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions ; / 2° Des aires d’accueil et des terrains familiaux locatifs destinés à l’habitat des gens du voyage au sens de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage ; / 3° Des résidences démontables constituant l’habitat permanent de leurs utilisateurs. / Il précise les conditions de hauteur, d’implantation et de densité des constructions, permettant d’assurer leur insertion dans l’environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. / Il fixe les conditions relatives aux raccordements aux réseaux publics, ainsi que les conditions relatives à l’hygiène et à la sécurité auxquelles les constructions, les résidences démontables ou les résidences mobiles doivent satisfaire. / Ces secteurs sont délimités après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l’article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. /Leur caractère exceptionnel s’apprécie, entre autres critères, en fonction des caractéristiques du territoire, du type d’urbanisation du secteur, de la distance entre les constructions ou de la desserte par les réseaux ou par les équipements collectifs « . Aux termes de l’article R. 151-25 du même code :  » Peuvent être autorisées en zone N : (…) 2° Les constructions, installations, extensions ou annexes aux bâtiments d’habitation, changements de destination et aménagements prévus par les articles L. 151-11, L. 151-12 et L. 151-13, dans les conditions fixées par ceux-ci « . Aux termes de l’article L. 122-9 du code de l’urbanisme :  » Les documents et décisions relatifs à l’occupation des sols comportent les dispositions propres à préserver les espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard « .

6. Il résulte de la combinaison de ces articles que des constructions autres que celles nécessaires à des équipements collectifs ou à la transformation, au conditionnement et à la commercialisation des produits agricoles, ainsi que les changements de destination, ne sont autorisées en zone naturelle que si elles sont insérées dans l’environnement et compatibles avec le maintien du caractère naturel de la zone.

7. Il résulte de la combinaison des articles 1N et 2N du règlement du PLU, que sont autorisés en secteur NG3 :  » L’aménagement et la réfection des constructions existantes ;/ L’extension limitée à 20% de l’emprise au sol existante à la date d’approbation du PLU des constructions existantes. / Les installations d’hébergement temporaire touristique démontable et sans dalle (yourtes), ainsi que les installations qui y sont liées « . Aussi, l’article 11N du règlement du PLU dispose que :  » 5. Les toitures devront être conçues de façon à reprendre l’esprit des formes des yourtes (toiture à pan concave ou à un seul pan par exemple) / 6. Les façades des constructions annexes (sanitaires) devront être traitées en matériaux rappelant celles des yourtes ou en matériaux rappelant l’aspect bois ou l’aspect « pierres ». / 7 ; Les constructions annexes aux yourtes devront être recouvertes d’une toiture végétalisée. Lorsqu’elles sont corrélées à au moins deux yourtes, les constructions annexes (sanitaires) devront être contiguës. / 8. Le traitement des yourtes et de leurs annexes devra être harmonieux sur l’ensemble du site « .

8. Les requérants font valoir que la zone NG3 n’est pas constituée en secteur de taille et de capacité limitées et que, par conséquent, le périmètre de ce secteur a été fixé en méconnaissance des articles L. 151-11 et L. 151-13 du code de l’urbanisme. De même, ils considèrent que les occupations du sol autorisées au sein de cette zone ne permettent pas de maintenir le caractère montagnard, naturel et forestier du site, dès lors qu’elles nécessitent un important défrichement de la zone représentant une superficie de 0,7 hectares pour le projet litigieux. Les dispositions de l’article L. 122-9 du code de l’urbanisme sont applicables au cas d’espèce, dès lors que le terrain d’assiette se situe dans un site inscrit du massif des Vosges. D’une part, il ressort des pièces du dossier que la commune détient environ 750 hectares de forêt, que la zone NG3 jouxte une zone AC de 7 hectares sur laquelle est implantée une exploitation agricole, qui s’ouvre sur une large zone naturelle où l’habitat est diffus et que la sensibilité paysagère de la zone est qualifiée de  » faible à moyenne « , hors axe de vision principal et point de vue. Ainsi et en tout état de cause, eu égard à une analyse globale de la situation, si le secteur NG3 n’a pas été formellement délimité en secteur de taille et de capacité limitées, il n’en demeure pas moins qu’il reste circonscrit à 1,36 hectares et que, si la réalisation du projet nécessite effectivement un défrichement, les articles 1N et 2N du règlement PLU ne sont pas incompatibles avec les exigences de préservation des espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard. D’autre part, les dispositions relatives à l’aspect extérieur, tendent à insérer les yourtes, autant que faire se peut, dans leur environnement, en prévoyant notamment la mise en place d’une toiture végétalisée et le rappel de l’aspect bois ou pierre pour les annexes, le tout afin de rendre harmonieuse l’intégralité du projet dans son environnement. Ainsi, si la construction de yourtes n’est pas ordinaire sur le territoire de la commune de Breitenbach, et plus généralement dans la région concernée, il n’en demeure pas moins que le PLU exige qu’elles s’intègrent au mieux dans le paysage et le patrimoine naturel et culturel montagnard. Par conséquent, il ne ressort pas des pièces du dossier que les dispositions des articles 1N, 2N et 11N seraient incompatibles avec les exigences de préservation des espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel, culturel et montagnard. Partant, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les articles 1N, 2N et 11N du règlement du PLU méconnaîtraient les articles L. 122-9, L. 151-11 et L. 151-13 du code de l’urbanisme.

9. Les requérants font valoir que la création du secteur NG3 est incohérente avec les objectifs du projet d’aménagement et de développement durables, notamment avec ses orientations A1, A4, A5, B2 et C2, en tant qu’elle conduit nécessairement à un étalement urbain en dehors de l’enveloppe urbaine, à modifier la topographie naturelle du terrain, à l’urbanisation d’un secteur agricole et naturel, à un important déboisement, à nuire à la qualité écologique et paysagère, ainsi qu’aux continuités écologiques, et à la destruction d’une partie de la ressource ligneuse de la commune, et que, dès lors, elle méconnaît les dispositions de l’article L. 151-8 du code de l’urbanisme.

10. Aux termes de l’article L. 151-5 du code de l’urbanisme :  » Le projet d’aménagement et de développement durables définit : 1° Les orientations générales des politiques d’aménagement, d’équipement, d’urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques ; (…) Il ne peut prévoir l’ouverture à l’urbanisation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers que s’il est justifié, au moyen d’une étude de densification des zones déjà urbanisées, que la capacité d’aménager et de construire est déjà mobilisée dans les espaces urbanisés. Pour ce faire, il tient compte de la capacité à mobiliser effectivement les locaux vacants, les friches et les espaces déjà urbanisés pendant la durée comprise entre l’élaboration, la révision ou la modification du plan local d’urbanisme et l’analyse prévue à l’article L. 153-27. « . Aux termes de l’article L. 151-8 du même code :  » Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d’aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d’utilisation des sols permettant d’atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3 « .

11. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d’urbanisme entre le règlement et le projet d’aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d’une analyse globale le conduisant à se placer à l’échelle du territoire couvert par le document d’urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d’aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l’inadéquation d’une disposition du règlement du plan local d’urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d’aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l’existence d’autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.

12. En premier lieu, eu égard au caractère intégralement démontable de l’ensemble des installations projetées et à leur nombre limité, le projet autorisé ne conduit pas à un étalement urbain en dehors du centre urbanisé de la commune. En second lieu, si la topographie du terrain à vocation à être modifiée, il ressort des pièces du dossier que pour la construction de la yourte n°1, le terrain ne sera pas modifié, que pour la construction des annexes ainsi que celle des yourtes n°2 et n° 3, la topographie naturelle du terrain sera légèrement modifiée, du fait d’une retenue des terres nécessaire à l’implantation de la structure, afin de stabiliser le terrain, mais que la pente naturelle a vocation à être conservée. De plus, si la réalisation du projet conduit effectivement à un défrichement, son étendue sera limitée et son impact visuel faible eu égard à la surface forestière du ban communal, et son absence d’incompatibilité avec la préservation des espaces, paysages et milieux caractéristiques du patrimoine naturel et culturel montagnard. Par ailleurs la ressource ligneuse ne sera pas substantiellement réduite. Enfin, en ce qui concerne la préservation des continuités écologiques, la réalisation de projets autorisés en zone NG3 implique un défrichement d’une partie de la forêt. Par conséquent il ne ressort pas des pièces du dossier que la création de la zone NG3, eu égard à sa superficie, à son emplacement et aux règles qui encadrent les constructions qu’elle autorise, révèle une incohérence avec les objectifs mentionnés par les requérants, alors au demeurant que le PADD poursuit également l’objectif d’encourager le développement économique en valorisant le potentiel touristique et naturel du territoire comme source d’économie locale

13. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l’exception d’illégalité du règlement de PLU de Breitenbach doit être écarté tel qu’il est articulé, et en toutes ses branches.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article R.431-30 du code de l’urbanisme :

14.Aux termes de l’article R. 431-30 du code de l’urbanisme :  » Lorsque les travaux projetés portent sur un établissement recevant du public, la demande est accompagnée des dossiers suivants, fournis en trois exemplaires :/ a) Un dossier permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles d’accessibilité aux personnes handicapées, comprenant les pièces mentionnées aux articles R. 111-19-18 et R. 111-19-19 du code de la construction et de l’habitation ;/ b) Un dossier permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles de sécurité, comprenant les pièces mentionnées à l’article R. 123-22 du même code « . Aux termes de l’article R. 111-19-18 du code de la construction et de l’habitation :  » Le dossier, mentionné au a de l’article R. 111-19-17, comprend les pièces suivantes (…) : 3° Une notice expliquant comment le projet prend en compte l’accessibilité aux personnes handicapées, en ce qui concerne : / a) Les dimensions des locaux et les caractéristiques des équipements techniques et des dispositifs de commande utilisables par le public qui sont définis par arrêté du ministre chargé de la construction ; / b) La nature et la couleur des matériaux et revêtements de sols, murs et plafonds ; / c) Le traitement acoustique des espaces ; / d) Le dispositif d’éclairage des parties communes « .

15. Les insuffisances affectant le dossier de demande de permis de construire au regard des prescriptions de l’article R. 111-19-18 du code de la construction et de l’habitation n’entachent d’illégalité la décision que si, compte tenu de la nature de la construction projetée et de ces insuffisances ainsi que des autres pièces dont elle dispose pour y suppléer, l’autorité compétente n’a pas été mise à même de s’assurer que les conditions d’accès à l’établissement des personnes handicapées respectent la réglementation.

16.Les requérants font valoir que le dossier de demande de permis de construire est incomplet, dès lors que la notice d’accessibilité ne contient aucun élément relatif au traitement acoustique des espaces et au dispositif d’éclairage des parties communes. Ils estiment que ces omissions n’ont pas permis au service instructeur d’apprécier la conformité du projet aux règles d’accessibilité. Or, si la notice d’accessibilité ne fait effectivement pas état du traitement acoustique des espaces, pas plus que du dispositif d’éclairage des parties communes, la notice de sécurité mentionne les matériaux utilisés pour la construction des yourtes, qui permettent d’évaluer l’isolation acoustique des lieux. En revanche, les pièces du dossier ne mentionnent pas les éléments relatifs au dispositif d’éclairage des parties communes. Il s’ensuit qu’aucun élément du dossier de demande de permis ne permettait au service instructeur d’apprécier le respect, par le dispositif envisagé, des dispositions en vigueur en la matière. Néanmoins, il s’agit du seul élément manquant. Par conséquent, cette seule omission n’a pas été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable. Partant, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l’arrêté du 28 mai 2019 méconnaît les dispositions de l’article R.431-30 du code de l’urbanisme.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance des articles 1N et 2N du règlement du PLU de Breitenbach :

17. Aux termes de l’article 1N du règlement du PLU :  » Toutes les occupations et utilisations du sol non autorisées sous conditions particulières à l’article 2N sont interdites « . Aux termes de l’article 2N :  » En sous-secteur NG3 sont admis, en sus des OUS admises dans toute la zone : / 14. L’aménagement et la réfection des constructions existantes ;/ 15. L’extension limitée à 20% de l’emprise au sol existante à la date d’approbation du PLU des constructions existantes. / 16. Les installations d’hébergement temporaire touristique démontable et sans dalle (yourtes), ainsi que les installations qui y sont liées « .

18. Contrairement à ce qu’ils soutiennent, l’article 2N du règlement du PLU n’interdit pas la réalisation de terrassement pour les places de stationnement, que nécessiteront la construction des yourtes, pour stationner les véhicules des personnes hébergées dans ces yourtes. Le moyen précité ne peut dès lors qu’être écarté.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 3N du règlement du PLU de Breitenbach :

19. Aux termes de l’article 3N du règlement du PLU :  » Les voies publiques ou privées doivent avoir des caractéristiques adaptées à l’approche du matériel de lutte contre l’incendie, des véhicules d’enlèvement des ordures ménagères et aux opérations qu’elles doivent desservir « .

20. Si les requérants font valoir que le chemin d’accès au terrain d’assiette du projet, qui mesure un peu moins de trois mètres de large, ne permet pas une desserte suffisante et présente une certaine dangerosité, compte tenu notamment de la capacité d’accueil maximale des yourtes d’une cinquantaine de personnes en journée, et des conditions météorologiques hivernales qui entraînent, en cas de neige, un rétrécissement de la chaussée praticable, il ressort des pièces du dossier, comme l’ont relevé les premiers juges, que ce chemin dessert, outre le terrain d’assiette du projet, uniquement la yourte déjà installée par la société pétitionnaire, qui a vocation à intégrer le nouveau projet, ainsi que la ferme exploitée par l’un des requérants, et est donc déjà emprunté par des véhicules, sans qu’il ne soit établi que des problèmes particuliers de sécurité et d’accès se seraient déjà posés. Compte tenu de la vocation touristique du projet, de sa taille et de sa capacité d’accueil limitées, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’emplacement des places de stationnement, la végétation qui l’entoure et l’accroissement de fréquentation du chemin seraient de nature à le rendre plus dangereux. Le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 3N du règlement du plan local d’urbanisme pourra également être écarté.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 4N du règlement du PLU de Breitenbach :

21. Aux termes de l’article 4N du règlement du PLU :  » 2. En l’absence de réseau collectif de distribution d’eau potable, le captage, forage ou puits particulier devront préalablement être autorisés et réalisés dans les conditions fixées par la réglementation en vigueur (…) / 4. A défaut de de réseau d’assainissement collectif, l’assainissement autonome est admis sous réserve de respecter la réglementation en vigueur (…) « . Aux termes de l’article 5 de l’arrêté du 7 septembre 2009 fixant les prescriptions techniques applicables aux installations d’assainissement non collectif recevant une charge brute de pollution organique inférieure ou égale à 1,2 kg/j de DBO5 :  » 4° Le dimensionnement de l’installation exprimé en nombre d’équivalents-habitants est égal au nombre de pièces principales au sens de l’article R. 111-1-1 du code de la construction et de l’habitation, à l’exception des cas suivants, pour lesquels une étude particulière doit être réalisée pour justifier les bases de dimensionnement : /les établissements recevant du public, pour lesquels le dimensionnement est réalisé sur la base de la capacité d’accueil ; (…) « .

22. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l’avis de l’Agence régionale de santé du 11 avril 2019, que la mise en œuvre du dispositif d’alimentation en eau potable ne nécessitait qu’une déclaration, qui a, par ailleurs, été réalisée. De plus, le syndicat des eaux et de l’assainissement d’Alsace-Moselle a attesté, le 26 mars 2019, de la conformité du projet aux exigences réglementaires relatives à l’assainissement autonome en vigueur, au vu du dossier de demande de permis de construire comportant le nombre et le type de constructions, ainsi que la capacité d’accueil maximale. Ainsi, il ressort de cette attestation que le dimensionnement de l’installation d’assainissement autonome peut être déterminé eu égard aux nombres de pièces principales. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 4N du règlement du PLU doit être écarté comme non fondé.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 9N du règlement du PLU de Breitenbach :

23. Aux termes de l’article 9N du règlement du PLU :  » En sous-secteur NG3, l’emprise au sol cumulée des constructions nouvelles à usage d’hébergement touristique est limitée à 300 m² par unité foncière, y compris les installations techniques (sanitaires) « .

24. Les requérants se prévalent d’une erreur de calcul, dès lors que selon eux l’emprise au sol serait de 292,52 mètres carrés, et non de 271,80 mètres carrés, tel qu’indiqué sur le plan de masse. Or, il s’avère que cette erreur a déjà été rectifiée, à juste titre, par les juges de première instance, qui ont porté l’emprise au sol à 297,52 mètres carrés, résultant des données des plans de masse produits prenant en compte la construction d’une yourte de huit mètres de diamètre, soit une emprise au sol de 50,26 mètres carrés, de deux yourtes de sept mètres de diamètre, soit une emprise au sol de 38,48 mètres carrés chacune, de deux bâtiments annexes d’une emprise au sol de 117 et 48,3 mètres carrés, et de panneaux photovoltaïques d’une emprise au sol de cinq mètres carrés.

25. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, ne devaient pas être prises en compte la surface de la citerne d’eau, qui sera enterrée, ni celle des places de stationnement, qui ne feront l’objet d’aucun aménagement, à l’exception de la place PMR qui nécessitera un terrassement en terre pour stabiliser le sol, ni celle du cheminement en bois et les plateformes d’accès aux yourtes, dont il n’est pas établi qu’il serait de nature à créer de l’emprise au sol.

26. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 9N du règlement du PLU n’est pas fondé.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article 10N du règlement du PLU de Breitenbach :

27. Aux termes des règles générales du règlement du PLU :  » La hauteur des constructions est mesurée par rapport au niveau moyen du terrain d’assiette avant travaux éventuels d’affouillement ou d’exhaussement du sol nécessaires à la réalisation du projet et le point le plus haut du plan de toiture (faîtage ou sommet de l’acrotère) « . Aux termes de l’article 10N du règlement du PLU, en sous-secteur NG3 :  » La hauteur maximale des constructions est fixée à 5 mètres hors tout « .

28. Si les requérants soutiennent que les yourtes seront visibles depuis le chemin d’accès et leurs habitations à une hauteur supérieure à celle autorisée, la vue qu’ils auront est sans incidence sur le respect des règles de hauteur au sens réglementaire du terme. Par ailleurs, les requérants font valoir que les règles de hauteur ne sont pas respectées, dès lors qu’il n’y a pas un seul point de référence comme l’exige le PLU, et que la yourte n° 3 représente selon eux une hauteur de 5,75 mètres. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, aucune des yourtes ne dépasse la hauteur autorisée par rapport au niveau moyen du terrain d’assiette, calculé par bâtiment, en fonction des mesures du terrain naturel mentionnées sur les plans de masse, propres à chacun de ces bâtiments. Si, la hauteur a été calculée à partir d’un point de référence différent pour chacune des constructions, il n’apparaît pas que cette méthode soit contraire aux dispositions du règlement du PLU alors que au demeurant la méthode proposée par les requérants ne permet pas d’obtenir une valeur exacte du niveau moyen du terrain d’assiette qui s’étend bien au-delà de l’emprise des constructions. De plus, il ressort des pièces du dossier que toutes les yourtes sont inférieures à 5 mètres de haut. Partant, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l’arrêté contesté méconnaît les dispositions de l’article 10N du règlement du PLU.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme et de l’article 11N du règlement du PLU de Breitenbach :

29. Aux termes de l’article R. 111-1 du code de l’urbanisme :  » Le règlement national d’urbanisme est applicable aux constructions et aménagements faisant l’objet d’un permis de construire, d’un permis d’aménager ou d’une déclaration préalable ainsi qu’aux autres utilisations du sol régi par le présent code. / Toutefois les dispositions des articles R. 111-3, R. 111-5 à R. 111-19 et R. 111-28 à R. 111-30 ne sont pas applicables dans les territoires dotés d’un plan local d’urbanisme ou d’un document d’urbanisme en tenant lieu « . Aux termes de l’article R. 111-27 du même code :  » Le projet peut être refusé ou n’être accepté que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu’à la conservation des perspectives monumentales « . Aux termes de l’article 11N du règlement du PLU :  » 1. L’autorisation de construire peut-être refusée ou n’être accordée que sous réserve de l’observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l’aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, ainsi qu’aux paysages naturels ou urbains. 2. La création de talus ou remblais artificiels est interdite. 3. Les matériaux de surfaces extérieures des bâtiments à implanter devront être traités de manière à optimiser l’insertion des bâtiments dans leur environnement en évitant les teintes vives. Ils devront être d’aspect naturel, non réfléchissants et dans des teintes qui s’insèrent dans leur environnement proche. 4. Les dispositifs d’exploitation d’énergie renouvelable sont autorisés sur les bâtiments. / DE PLUS, EN SOUS-SECTEUR NG3 / 5. Les toitures devront être conçues de façon à reprendre l’esprit des formes des yourtes (toiture à pan concave ou à un seul pan par exemple). / 6. Les façades des constructions annexes (sanitaires) devront être traitées en matériaux rappelant celles des yourtes ou en matériaux rappelant l’aspect bois ou l’aspect « pierres ». / 7. Les constructions annexes aux yourtes devront être recouvertes d’une toiture végétalisée. Lorsqu’elles sont corrélées à au moins deux yourtes, les constructions annexes (sanitaires) devront être contiguës. / 8. Le traitement des yourtes et de leurs annexes devra être harmonieux sur l’ensemble du site « .

30. Dès lors qu’elles ont le même objet que celles de l’article R. 111-27 du code de l’urbanisme et qu’elles posent des exigences qui ne sont pas moindres, c’est par rapport aux dispositions du règlement du plan local d’urbanisme que doit être appréciée la légalité de la décision attaquée.

31. En l’espèce, les requérants soutiennent, en se fondant notamment sur l’avis défavorable émis par l’architecte des bâtiments de France, en date du 22 mars 2019, que le projet litigieux est de nature à porter atteinte au caractère et à l’intérêt des paysages naturels caractéristiques du site inscrit du massif des Vosges, ainsi qu’au caractère des lieux avoisinants, dès lors qu’il implique un défrichement de 0,7 hectares, la suppression à venir d’arbres, la modification de la pente du terrain naturel, la rupture avec le patrimoine local alsacien et les habitations avoisinantes.

32. Toutefois, ainsi qu’il a été rappelé aux points précédents, la zone NG3 est un secteur de taille et capacité d’accueil limitées, dans lequel l’implantation de yourtes a été spécifiquement autorisée, sous réserve de respecter certaines caractéristiques propres à ce type d’habitat, que le projet litigieux respecte. La circonstance que le projet nécessite un défrichement de 0,7 hectares ne porte aucune atteinte aux lieux avoisinants dès lors que le projet est implanté en limite d’une grande clairière et que ce défrichement reste limité au regard de l’étendue de boisement qui entoure le site. Enfin, ni le projet, dans son essence même, ni les installations nécessitées par celui-ci telles que la pose de panneaux photovoltaïques d’une emprise au sol de cinq mètres carrés et d’une citerne d’eau enterrée ne sont contraire à l’article 11N ni de nature à porter atteinte au caractère ou à l’intérêt des lieux avoisinants, aux sites, ainsi qu’aux paysages naturels, alors même que ce type d’habitat est insolite et peu répandu dans le massif vosgien, et en dépit du fait que l’architecte des bâtiments de France a émis un avis défavorable au projet.

Sur le moyen tiré de la méconnaissance des règles relatives aux unités touristiques nouvelles :

33. Aux termes de l’article L. 122-15 du code de l’urbanisme :  » Le développement touristique et, en particulier, la création ou l’extension des unités touristiques nouvelles prennent en compte les communautés d’intérêt des collectivités territoriales concernées et la vulnérabilité de l’espace montagnard au changement climatique. Ils contribuent à l’équilibre des activités économiques et de loisirs, notamment en favorisant la diversification des activités touristiques ainsi que l’utilisation rationnelle du patrimoine bâti existant et des formules de gestion locative des constructions nouvelles. / La localisation, la conception et la réalisation d’une unité touristique nouvelle doivent respecter la qualité des sites et les grands équilibres naturels « . Aux termes de l’article L. 122-16 du même code :  » Toute opération de développement touristique effectuée en zone de montagne et contribuant aux performances socio-économiques de l’espace montagnard constitue une  » unité touristique nouvelle « , au sens de la présente sous-section « . L’article L. 122-17 du même code dispose que :  » Constituent des unités touristiques nouvelles structurantes : / 1° Celles dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat ; / 2° Le cas échéant, celles définies comme structurantes pour son territoire par le document d’orientation et d’objectifs du schéma de cohérence territoriale, dans les conditions prévues à l’article L. 141-23 « . Aux termes de l’article R. 122-8 du même code :  » Constituent des unités touristiques nouvelles structurantes pour l’application du 1° de l’article L. 122-17 les opérations suivantes : / 1° La création, l’extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsque ces travaux ont pour effet : / a) La création d’un nouveau domaine skiable alpin ; / b) L’augmentation de la superficie totale d’un domaine skiable alpin existant, dès lors que cette augmentation est supérieure ou égale à 100 hectares ; / 2° Les liaisons entre domaines skiables alpins existants ; / 3° Les opérations de construction ou d’extension d’hébergements et d’équipements touristiques d’une surface de plancher totale supérieure à 12 000 mètres carrés, à l’exclusion des logements à destination des personnels saisonniers ou permanents des équipements et hébergements touristiques ;/ 4° L’aménagement, la création et l’extension de terrains de golf d’une superficie supérieure à 15 hectares ;/ 5° L’aménagement de terrains de camping d’une superficie supérieure à 5 hectares ;/ 6° L’aménagement de terrains pour la pratique de sports ou de loisirs motorisés d’une superficie supérieure à 4 hectares :/ 7° Les travaux d’aménagement de pistes pour la pratique des sports d’hiver alpins, situés en site vierge au sens du tableau annexé à l’article R. 122-2 du code de l’environnement d’une superficie supérieure à 4 hectares ;/ 8° La création d’une remontée mécanique n’ayant pas pour objet principal de desservir un domaine skiable, pouvant transporter plus de dix mille voyageurs par jour sur un dénivelé supérieur à 300 mètres « . Aux termes de l’article L. 122-18 du code de l’urbanisme :  » Constituent des unités touristiques nouvelles locales : / 1° Celles dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat ; / 2° Le cas échéant, celles définies par le plan local d’urbanisme, dans les conditions prévues au II de l’article L. 151-7 « . Aux termes de l’article R. 122-9 du même code :  » Constituent des unités touristiques nouvelles locales, pour l’application du 1° de l’article L. 122-18 : / 1° La création, l’extension ou le remplacement de remontées mécaniques, lorsqu’ils ont pour effet l’augmentation de plus de 10 hectares et de moins de 100 hectares d’un domaine skiable alpin existant ; / 2° L’aménagement, la création et l’extension de terrains de golf d’une superficie inférieure ou égale à 15 hectares ;/ 3° Les opérations suivantes, lorsqu’elles ne sont pas situées dans un secteur urbanisé ou dans un secteur constructible situé en continuité de l’urbanisation : / a) La création ou l’extension, sur une surface de plancher totale supérieure à 500 mètres carrés, d’hébergements touristiques ou d’équipements touristiques ; / b) L’aménagement de terrains de camping d’une superficie comprise entre 1 et 5 hectares ; / c) La création de refuges de montagne mentionnés à l’article L. 326-1 du code du tourisme, ainsi que leur extension pour une surface de plancher totale supérieure à 200 mètres carrés « .

34. Les requérants font valoir que le projet constitue une unité touristique nouvelle au sens de l’article L. 122-16 du code de l’urbanisme et qu’il méconnaît les dispositions de l’article L. 122-15 du même code, dès lors qu’il porte une atteinte grave à la qualité des sites et aux grands équilibres naturels du massif vosgien. Or, il ressort des pièces du dossier que le projet ne saurait constituer une unité touristique nouvelle, soumise à un régime spécifique, dès lors qu’il créé une surface de plancher limitée de 211 mètres carrés inférieure à la surface de 500 m2 mentionnée à l’article R. 122-9 du code de l’urbanisme. Par conséquent, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l’arrêté contesté méconnaît les dispositions relatives aux unités touristiques nouvelles.

Sur le moyen tiré de l’exception d’illégalité de l’autorisation de défrichement délivrée le 5 avril 2018 :

35. Une autorisation de défrichement ne forme pas avec un permis de construire une opération complexe, de sorte que les illégalités d’une autorisation de défrichement devenue définitive, ne sauraient être invoquées à l’appui de conclusions dirigées contre un permis de construire.

36. Les requérants font valoir que l’arrêté contesté est illégal par voie d’exception, dès lors que l’autorisation de défrichement sur laquelle il repose est elle-même entachée d’illégalité, en tant que le maire aurait excédé l’autorisation accordée par le conseil municipal, en la sollicitant auprès du préfet. Or, il ressort des pièces du dossier que l’autorisation de défricher a été délivrée le 5 avril 2018 et n’a fait l’objet d’aucune contestation dans le délai de deux mois suivant son affichage pour les tiers et suivant sa notification pour le bénéficiaire. Ainsi, la décision est devenue définitive. Partant, le moyen tiré de l’exception d’illégalité de l’autorisation de défrichement ne peut qu’être écarté.

Sur le moyen tiré de l’absence d’évaluation environnementale :

37. Aux termes du point 47 de l’annexe de l’article R. 122-2 du code de l’environnement, sont soumis à évaluation environnementale,  » les défrichements portant sur une superficie totale, même fragmentée, égale ou supérieure à 25 hectares « . Sont soumis à un examen au cas par cas,  » Les défrichements soumis à autorisation au titre de l’article L. 341-1 du code forestier en vue de la reconversion des sols, portant sur une superficie totale, même fragmentée, de plus de 0,5 hectares « , ainsi que  » les autres déboisements en vue de la reconversion des sols, portant sur une superficie totale, même fragmentée, de plus de 0,5 hectares « .

38. Le préfet de la région Grand Est a été saisi sur le fondement des dispositions précitées, pour un projet portant sur la réalisation de trois yourtes ainsi que des aménagements paysagers constitués de haies sauvages, d’aménagements de lisières, de la plantation d’un verger de hautes tiges et de la création d’une mare, comportant un défrichement de 0,7 hectares et un changement de destinations des sites. L’autorité administrative compétente a décidé, après avoir relevé que le projet se situait dans un massif forestier de 750 hectares, en dehors d’un zonage environnemental caractéristique d’une sensibilité particulière et qu’au regard des éléments fourmis par le pétitionnaire le projet n’est pas susceptible d’impacter notablement l’environnement et la santé, que ce projet n’était pas soumis à évaluation environnementale par une décision du 26 février 2018. Si le projet soumis a été modifié par l’adjonction de deux bâtiments annexes, destinés à la cuisine et aux sanitaires, il n’apparaît pas, eu égard au caractère mineur des adaptations en cause, qu’il aurait dû faire l’objet d’une nouvelle saisine du préfet, alors que la surface de défrichement est demeurée inchangée.

39. Il résulte de ce qui précède que, sans qu’il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir soulevées en défense, les requérants ne sont pas fondés à demander l’annulation du jugement du 15 juillet 2021, de l’arrêté du 28 mai 2019 et de la décision du 13 août 2019 par laquelle le maire a rejeté leur recours gracieux du 25 juillet 2019.

Sur les conclusions présentées par la SARL Un autre monde, sur le fondement de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme :

40. Aux termes de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme :  » Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager est mis en œuvre dans des conditions qui traduisent un comportement abusif de la part du requérant et qui causent un préjudice au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l’auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel « .

41. S’il résulte de l’instruction que la SARL Un autre monde démontre effectivement que la présente instance lui cause un important préjudice financier, il n’en ressort pas qu’il provienne d’un comportement abusif des requérants contestant l’arrêté du 28 mai 2019. Par conséquent, les conclusions à fin d’indemnisation présentées par la SARL Un autre monde, sur le fondement de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme, doivent être rejetées.

Sur les frais d’instance :

42. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SARL Un autre monde et de la commune de Breitenbach, qui ne sont pas dans la présente instance les parties perdantes, la somme demandée par la SCI de construction La Kaelberhutte et les autres requérants, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de la SCI de construction La Kaelberhutte et des autres requérants, le versement d’une somme de 1 500 euros à la SARL Un autre monde, ainsi que le versement d’une somme de 1 500 euros à la commune de Breitenbach, sur le même fondement.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la SCI de construction La Kaelberhutte et des autres requérants est rejetée.
Article 2 : Les conclusions à fin d’indemnisation formulées sur le fondement de l’article L. 600-7 du code de l’urbanisme par la SARL Un autre monde sont rejetées.
Article 3 : Le versement d’une somme de 1 500 euros à la SARL Un autre monde, ainsi que le versement d’une somme de 1 500 euros à la commune de Breitenbach, sont mis à la charge de la SCI de construction la Kaelberhutte et des autres requérants, sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI de construction la Kaelberhutte, représentant unique des autres requérants en application des dispositions de l’article R. 751-3 du code de justice administrative, à la commune de Breitenbach et à la SARL Un autre monde.