CAA de LYON
N° 17LY00340 et s.
Inédit au recueil Lebon
6ème chambre
M. POMMIER, président
M. Joseph POMMIER, rapporteur
Mme COTTIER, rapporteur public
PLANES, avocat
lecture du jeudi 5 décembre 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
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Texte intégral
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. D… A… a demandé au tribunal administratif de Lyon, dans le dernier état de ses écritures le 14 octobre 2016 :
1°) d’annuler la décision du 24 février 2014 par laquelle le préfet de la région Rhône-Alpes a décidé de le soumettre à une épreuve d’aptitude à la suite de sa déclaration d’activité en vue de s’établir en qualité de moniteur de ski sur le territoire français ;
2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 2 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire enregistré le 25 juin 2014, la ministre des droits de la femme, de la ville, de la jeunesse et des sports a conclu au rejet de la requête.
Par un jugement n° 1403048 du 22 novembre 2016, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 24 février 2014 et a condamné l’Etat à verser une somme de 900 euros à M. A… au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par un recours enregistré le 23 janvier 2017, le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports demande à la cour :
1°) d’annuler ce jugement n° 1403048 du tribunal administratif de Lyon du 22 novembre 2016 ;
2°) de rejeter la requête de M. A….
Il soutient que :
– le jugement est irrégulier en tant qu’il ne mentionne pas le moyen d’ordre public que le tribunal administratif était susceptible de relever d’office, ainsi qu’il en avait informé les parties ;
– c’est à tort que les premiers juges ont estimé que le préfet de la région Rhône-Alpes aurait commis une erreur de droit en fondant sa décision sur l’irrecevabilité de la demande de libre établissement en application des dispositions du 3° de l’article R. 212-90 du code du sport ;
– contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, l’activité de moniteur de ski alpin n’est pas réglementée au Royaume-Uni et relève donc de l’article 13 §. 2 de la directive 2005/36 transposé au 2° de l’article R. 212-90 du code du sport ;
– à titre subsidiaire, le préfet n’a pas entaché sa décision du 24 février 2014 d’erreur manifeste d’appréciation en prescrivant à M. A… de passer une épreuve d’aptitude afin de vérifier sa capacité à garantir la sécurité des pratiquants et des tiers dès lors que sa formation ne permettait pas de s’assurer du respect de cette exigence.
Par un mémoire enregistré le 7 mars 2019, M. A…, représenté par Me E…, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête d’appel du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports ;
2°) de confirmer le jugement n° 1403048 du tribunal administratif de Lyon ;
3°) d’annuler la décision du 24 février 2014 ayant implicitement rejeté sa demande de délivrance d’une carte professionnelle de moniteur de ski alpin ;
4°) d’enjoindre au ministre de lui délivrer la carte professionnelle ;
5°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens invoqués par le ministre sont mal fondés et soutient en outre :
– que l’avis de la commission de reconnaissance des qualifications est irrégulier dès lors, d’une part, qu’il a été rendu postérieurement à la date de la décision attaquée, d’autre part, qu’il n’est pas motivé, enfin, qu’il est entaché d’une erreur de droit en tant qu’il compare ses qualifications avec celles des autres diplômes britanniques et qu’il ne prend pas en compte le niveau de qualification au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui requis sur le territoire national ;
– que l’avis de la section permanente du ski alpin de la commission de la formation et de l’emploi du Conseil supérieur des sports de montagne est irrégulier dès lors, d’une part, qu’il n’est ni daté ni signé, d’autre part, qu’il se fonde sur le Memorandum of Understanding qui n’a pas de valeur juridique, de plus, qu’il n’est pas motivé, enfin, qu’il ne prend pas en compte le niveau de qualification au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui requis sur le territoire national ;
– que l’État français avait reconnu en 2011 le caractère réglementé de la formation des moniteurs de ski au Royaume-Uni.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
– la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles ;
– le code du sport ;
– l’arrêté du 11 avril 2012 relatif à la formation spécifique du diplôme d’État de ski – moniteur national de ski alpin ;
– l’arrêté du 25 octobre 2004 fixant les conditions d’obtention de la partie spécifique du brevet d’État d’éducateur sportif du premier degré, option ski alpin ;
– le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.
Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. Pommier, président ;
– les conclusions de Mme Cottier, rapporteur public ;
– les observations de M. B…, représentant le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports ;
– et les observations de Me E…, représentant M. A….
Considérant ce qui suit :
1. M. D… A…, ressortissant britannique, est titulaire depuis le 10 janvier 2013 de l' » Alpine Level 3 ISIA « , diplôme britannique de moniteur de ski alpin délivré par la British association of snowport instructors (BASI). Le 22 octobre 2013, il a adressé au préfet de la région Rhône-Alpes une déclaration d’activité, en qualité de ressortissant de l’Union européenne, en vue d’obtenir la carte professionnelle lui permettant de s’établir comme moniteur de ski alpin en France. Par une décision du 24 février 2014, le préfet de la région Rhône-Alpes a décidé de soumettre M. A… à une épreuve d’aptitude. Par un jugement n° 1403048 du 22 novembre 2016, dont le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports relève appel, le tribunal administratif de Lyon a annulé cette décision.
Sur la portée de la décision du 24 février 2014 :
2. Contrairement à ce que soutient M. A…, et alors d’ailleurs que l’article R. 212-90-2 du code du sport distingue bien le cas où le préfet décide de ne pas délivrer de carte professionnelle et le cas où il décide de soumettre le déclarant à une épreuve d’aptitude, la décision contestée prise par le préfet de la région Rhône-Alpes le 24 février 2014 ne s’analyse pas, eu égard à ses termes et à son contenu, comme un refus, même implicite, de délivrance d’une carte professionnelle de moniteur de ski, mais seulement comme la décision de le soumettre à l’épreuve d’aptitude prévue à l’article R. 212-90-1 du code du sport, en vue de lui délivrer, en cas de réussite, ladite carte.
Sur la régularité du jugement :
3. Aux termes de l’article R. 611-7 du code de justice administrative : » Lorsque la décision lui paraît susceptible d’être fondée sur un moyen relevé d’office, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l’instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu’y fasse obstacle la clôture éventuelle de l’instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. « .
4. Le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports soutient que le jugement attaqué est irrégulier en tant qu’il ne mentionne pas la lettre par laquelle la formation de jugement avait informé les parties qu’elle était susceptible de relever d’office un moyen d’ordre public. Il ressort des pièces du dossier de première instance que, par un courrier en date du 12 octobre 2016, le tribunal administratif de Lyon a informé les parties qu’il était susceptible de relever d’office le moyen d’ordre public tiré de ce que le préfet était en situation de compétence liée pour rejeter la demande dont il était saisi. Cependant, il ressort des termes du jugement contesté que le tribunal administratif n’a pas retenu le moyen qu’il envisageait de relever d’office. Dans cette circonstance, l’omission de visa de la lettre du 12 octobre 2016 n’est pas de nature à entacher d’irrégularité le jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
5. Le ministre soutient que, contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, la formation de moniteur de ski alpin n’est pas réglementée au Royaume-Uni et que la situation de M. A… relève donc du 2° de l’article R. 212-90 du code du sport et non du 3° de ce même article.
6. Il ressort du jugement attaqué que, pour annuler la décision du 24 février 2014 par laquelle le préfet de la région Rhône-Alpes a décidé de soumettre M. A… à une épreuve d’aptitude à la suite de sa déclaration d’activité en vue de s’établir en qualité de moniteur de ski sur le territoire français, le tribunal administratif de Lyon a estimé que la situation de ce dernier répondait aux exigences du 3° de l’article R. 212-90 du code du sport.
7. Aux termes de l’article L. 212-1 du code du sport, dans sa rédaction alors applicable : » I.- Seuls peuvent, contre rémunération, enseigner, animer ou encadrer une activité physique ou sportive ou entraîner ses pratiquants, à titre d’occupation principale ou secondaire, de façon habituelle, saisonnière ou occasionnelle, sous réserve des dispositions du quatrième alinéa du présent article et de l’article L. 212-2 du présent code, les titulaires d’un diplôme, titre à finalité professionnelle ou certificat de qualification :/ 1° Garantissant la compétence de son titulaire en matière de sécurité des pratiquants et des tiers dans l’activité considérée ;/ 2° Et enregistré au répertoire national des certifications professionnelles dans les conditions prévues au II de l’article L. 335-6 du code de l’éducation./ (…)./ II.- Le diplôme mentionné au I peut être un diplôme étranger admis en équivalence (…) « .
8. Aux termes de l’article R. 212-90 du même code, dans sa rédaction alors applicable : » Est réputé satisfaire à l’obligation de qualification requise pour exercer tout ou partie des activités dans les fonctions mentionnées à l’article L. 212-1 tout ressortissant d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen qui se trouve dans l’une des situations suivantes : (…) 2° Justifier avoir exercé l’activité, dans un Etat membre de la Communauté européenne ou un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen qui ne réglemente pas l’accès à l’activité ou son exercice, à temps plein pendant deux ans au moins au cours des dix années précédentes ou pendant une durée équivalente en cas d’exercice à temps partiel et être titulaire d’une ou plusieurs attestations de compétences ou d’un ou plusieurs titres de formation délivrés par l’autorité compétente d’un de ces Etats attestant la préparation à l’exercice de l’activité pour tout ou partie des activités dans les fonctions mentionnées à l’article L. 212-1 ainsi qu’un niveau de qualification au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui requis sur le territoire national, au sens de l’article 11 de la directive 2005 / 36 / CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles ; 3° Etre titulaire d’un titre attestant un niveau de qualification au moins équivalent au niveau immédiatement inférieur à celui requis sur le territoire national au sens de l’article 11 de la directive 2005 / 36 / CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles délivré par l’autorité compétente d’un Etat membre de la Communauté européenne ou d’un autre Etat partie à l’accord sur l’Espace économique européen qui ne réglemente pas l’accès à l’activité ou son exercice, sanctionnant une formation réglementée visant spécifiquement l’exercice de tout ou partie des activités dans les fonctions mentionnées à l’article L. 212-1 et consistant en un cycle d’études complété, le cas échéant, par une formation professionnelle, un stage professionnel ou une pratique professionnelle ; (…) « .
9. Pour établir que la formation britannique de moniteur de ski alpin n’est pas réglementée au sens des dispositions précitées du 3° de l’article R. 212-90 du code du sport, le ministre a versé au débat un échange de courriels entre l’administration française et le United Kingdom National Contact Point for Professional Qualifications (UK NCP), dont il n’est pas contesté qu’il est le » point de contact » britannique dédié pour déterminer les équivalences des qualifications professionnelles britanniques pour la bonne application de la directive 2005/36/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 septembre 2005 relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles. Dans ses courriels du 5 juin 2014, le UK NCP précise ainsi que ni l’activité ni la profession de moniteur de ski alpin ne sont réglementées au Royaume-Uni et invite à se référer pour l’examen de la demande de libre établissement à l’article 13 §2 de la directive, dispositions reprises en partie au 2° de l’article R. 212-90 du code du sport. Le ministre a également produit un extrait traduit d’un rapport d’octobre 2015 commandé par la Commission européenne et intitulé » mapping of professional qualifications and relevant training for the profession of ski instructor in the EU-28, EEA and Switzerland « , figurant sur le site internet de l’Union qui, d’une part, confirme que la profession de moniteur de ski n’est pas réglementée au Royaume-Uni, d’autre part, précise que la formation pour exercer cette profession n’y est pas non plus réglementée.
10. Pour justifier du caractère réglementé de la formation de moniteur de ski alpin au Royaume-Uni, M. A… verse au dossier des courriels datés des 5 et 6 janvier 2015 et échangés entre un agent du Département des affaires, de l’innovation et des compétences britannique, M. C…, et la Confédération européenne des employés en plein air. Cependant, ces seuls éléments ne sont pas de nature à infirmer les données énoncées au point précédent d’où il résulte suffisamment que la formation de moniteur de ski alpin au Royaume-Uni ne peut pas être considérée comme présentant un caractère réglementé. Il n’apparaît pas non plus que le préfet de la Haute-Savoie aurait en 2011 développé une analyse aboutissant à établir que la formation de moniteur de ski serait réglementée au Royaume-Uni. Il s’ensuit que le ministre est fondé à soutenir que c’est à tort que, pour annuler la décision litigieuse, le tribunal administratif de Lyon a estimé que la situation de M. A… répondait aux exigences des dispositions du 3° de l’article R. 212-90 du code du sport.
11. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par M. A… devant le tribunal administratif et la cour.
12. M. A… soutient que la décision attaquée du 24 février 2014 méconnaît les dispositions de l’article A. 212-185 du code du sport dans sa rédaction alors applicable dès lors que, pour examiner s’il existait une différence substantielle entre sa qualification professionnelle et celle requise sur le territoire national et, le cas échéant, conclure à l’existence d’une telle différence, le préfet de la région Rhône-Alpes aurait dû se référer au brevet d’Etat d’éducateur sportif option » ski alpin » et non pas, ainsi qu’il l’a fait, au diplôme d’Etat de ski – moniteur national de ski alpin.
13. Aux termes de l’article L. 212-7 du code du sport, dans sa rédaction alors applicable : » Les fonctions mentionnées au premier alinéa de l’article L. 212-1 peuvent être exercées sur le territoire national par les ressortissants des Etats membres de la Communauté européenne ou des Etats parties à l’accord sur l’Espace économique européen qui sont qualifiés pour les exercer dans l’un de ces Etats. (…) Un décret en Conseil d’Etat fixe les conditions d’application du présent article et notamment les conditions auxquelles cet exercice est soumis lorsqu’il existe une différence substantielle de niveau entre la qualification dont les intéressés se prévalent et celle requise en application du I de l’article L. 212-1. Ce décret précise notamment la liste des activités dont l’encadrement, même occasionnel, peut être subordonné, si la sécurité des personnes l’exige compte tenu de l’environnement spécifique et des conditions dans lesquelles elles sont pratiquées, au contrôle préalable de l’aptitude technique des demandeurs et de leur connaissance du milieu naturel, des règles de sécurité et des dispositifs de secours. « .
14. Aux termes de l’article R. 212-90-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : » Pour l’exercice de tout ou partie des activités dans les fonctions mentionnées à l’article L. 212-1, la qualification professionnelle du déclarant, attestée conformément au 1°, au 2°, au 3° ou au 4° de l’article R. 212-90, est regardée comme présentant une différence substantielle avec la qualification professionnelle requise sur le territoire national, lorsque la formation du déclarant n’est pas de nature à garantir la sécurité des pratiquants et des tiers. Lorsque le préfet estime qu’il existe une différence substantielle et après avoir vérifié que cette différence n’est pas entièrement couverte par les connaissances acquises par le déclarant au cours de son expérience professionnelle, il saisit pour avis la commission de reconnaissance des qualifications dans le délai mentionné à l’article R. 212-89. Dans le délai d’un mois à compter de sa saisine, la commission se prononce sur l’existence d’une différence substantielle et propose, le cas échéant, au préfet, si elle estime que les connaissances acquises par le déclarant au cours de son expérience professionnelle ne sont pas de nature à couvrir, en tout ou partie, la différence substantielle constatée, de soumettre celui-ci à une épreuve d’aptitude ou à un stage d’adaptation d’une durée maximum de trois ans, dont elle propose les modalités, en fonction de la différence substantielle constatée et des connaissances acquises par le déclarant au cours de son expérience professionnelle. Après avoir pris connaissance de l’avis de la commission, le préfet peut exiger que le déclarant choisisse soit de se soumettre à une épreuve d’aptitude, soit d’accomplir un stage d’adaptation, dont il précise les modalités, en fonction de la différence substantielle constatée et des connaissances acquises par le déclarant au cours de son expérience professionnelle. Le déclarant fait connaître son choix entre l’épreuve d’aptitude et le stage d’adaptation dans un délai d’un mois. Pour les activités s’exerçant en environnement spécifique au sens des dispositions de l’article L. 212-7, la commission, avant d’émettre son avis, saisit pour avis, lorsqu’ils existent, les organismes de concertation spécialisés. Après s’être prononcée sur l’existence d’une différence substantielle, la commission propose, le cas échéant, au préfet, par dérogation au droit d’option ouvert au déclarant entre l’épreuve d’aptitude et le stage d’adaptation et pour des motifs tenant à la sécurité des personnes, de soumettre le déclarant à une épreuve d’aptitude. Après avoir pris connaissance de l’avis de la commission, le préfet peut exiger que le déclarant se soumette à une épreuve d’aptitude. Un arrêté du ministre chargé des sports détermine, pour chacune des activités s’exerçant en environnement spécifique, les critères d’appréciation de la différence substantielle, le programme, les modalités d’organisation et d’évaluation de l’épreuve d’aptitude et établit la liste des établissements dans lesquels elle est organisée. La commission propose et le préfet détermine celles des matières du programme sur lesquelles le déclarant est testé, en fonction de la différence substantielle constatée et des connaissances acquises par celui-ci au cours de son expérience professionnelle. « .
15. Aux termes de l’article A. 212-185 de ce code, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : » Pour l’encadrement du ski alpin et de ses activités dérivées, la différence substantielle au sens de l’article R. 212-90-1 et du 3° de l’article R. 212-93, susceptible d’exister entre la qualification professionnelle du déclarant et la qualification professionnelle requise sur le territoire national, est appréciée en référence à la formation du brevet d’Etat d’éducateur sportif, option » ski alpin « , en tant qu’elle intègre : -les compétences techniques de sécurité ; -les connaissances théoriques et pratiques en matière de sécurité. « .
16. Il ressort des énonciations de la décision litigieuse du 24 février 2014 que, pour apprécier la différence substantielle susceptible d’exister entre la qualification professionnelle de M. A… et celle requise sur le territoire français, le préfet de la région Rhône-Alpes s’est fondé sur le diplôme d’Etat de ski – moniteur national de ski alpin, et non sur le brevet d’Etat d’éducateur sportif, option » ski alpin « , qui, pour l’application des dispositions de l’article A. 212-185 du code du sport, a été remplacé par le diplôme d’Etat précité à compter seulement du 31 octobre 2014.
17. Il ressort de la comparaison des arrêtés régissant ces diplômes que les compétences techniques de sécurité et les connaissances théoriques et pratiques en matière de sécurité ont évolué de façon significative entre le brevet d’Etat d’éducateur sportif, option » ski alpin » et le diplôme d’Etat de ski – moniteur national de ski alpin. Si le ministre fait valoir que la référence à l’un ou l’autre de ces diplômes était équivalente dès lors que tous deux comportaient une formation comprenant le test technique Eurotest et que l’absence de réussite à l’Eurotest constituait une différence substantielle de formation, il n’explique toutefois pas en quoi la non obtention de l’Eurotest suffirait à faire regarder la formation du déclarant comme n’étant pas de nature à garantir la sécurité des pratiquants et des tiers. Dans ces conditions, M. A… est fondé à soutenir que le préfet de la région Rhône-Alpes a fait une inexacte application des dispositions des articles R. 212-90-1 et A. 212-185 du code du sport, dans leur rédaction alors applicable, en se méprenant sur le diplôme à prendre en compte pour apprécier la différence substantielle entre la qualification professionnelle du déclarant et celle requise sur le territoire national.
18. Dès lors, et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens présentés par M. A…, il résulte de ce qui précède que le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports n’est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du préfet de la région Rhône-Alpes en date du 24 février 2014.
Sur les conclusions aux fins d’injonction présentées par M. A… :
19. Aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : » Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une mesure d’exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution. La juridiction peut également prescrire d’office cette mesure. « . Aux termes de l’article L. 911-2 du même code : » Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. La juridiction peut également prescrire d’office l’intervention de cette nouvelle décision. « .
20. Compte tenu du moyen d’illégalité retenu, la confirmation par le juge d’appel de l’annulation de la décision du 24 février 2014 n’implique pas nécessairement la délivrance de la carte professionnelle d’éducateur sportif mais seulement le réexamen par l’administration du dossier présenté par M. A… en vue d’exercer la profession de moniteur de ski dans le cadre du libre établissement. Il ne résulte pas de l’instruction que l’administration aurait déjà procédé à un tel réexamen à la suite du jugement frappé d’appel. Il y a lieu en conséquence d’enjoindre à l’administration de procéder audit réexamen dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt
Sur les frais liés au litige :
21. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme demandée par M. A… au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports est rejeté.
Article 2 : Il est enjoint à l’administration de réexaminer, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, la déclaration d’activité adressée par M. A…, en sa qualité de ressortissant de l’Union européenne, en vue d’obtenir la carte professionnelle lui permettant de s’établir comme moniteur de ski alpin en France.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par M. A… est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. D… A… et au ministre des sports.
Délibéré après l’audience du 4 avril 2019 à laquelle siégeaient :
M. Pommier, président de chambre,
M. Drouet, président-assesseur
Mme Caraës, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.
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N° 17LY00341
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Analyse
Abstrats : 15-05-01-01-05 Communautés européennes et Union européenne. Règles applicables. Libertés de circulation. Libre circulation des personnes.
55-005-01 Professions, charges et offices.