Sans surprise ni miracle, confirmation sèche de l’arrêt d’appel. Clap de fin, donc, dans cette affaire à l’origine d’un « déconventionnement » massif des sites naturel d’escalade lancé par la FFME au printemps 2020. Le « monde d’après » reste incertain… PY
Cour de cassation
chambre civile 2
Audience publique du jeudi 16 juillet 2020
N° de pourvoi: 19-14033
Non publié au bulletin Rejet
M. Pireyre (président), président
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Célice, Texidor, Périer, avocat(s)
Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :
CIV. 2
CM
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 16 juillet 2020
Rejet
M. PIREYRE, président
Arrêt n° 693 F-D
Pourvoi n° W 19-14.033
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 16 JUILLET 2020
1°/ l’association Fédération française de la montagne et de l’escalade, dont le siège est […] ,
2°/ la société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est […] ,
ont formé le pourvoi n° W 19-14.033 contre l’arrêt rendu le 21 janvier 2019 par la cour d’appel de Toulouse (1re chambre section 1), dans le litige les opposant :
1°/ à M. T… J…,
2°/ à Mme V… Y…,
tous deux domiciliés […] ,
3°/ à la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne, dont le siège est […] ,
4°/ à la sécurité sociale pour les indépendants, dont le siège est […] , venant aux droits du Régime social des indépendants,
5°/ au groupement d’intérêt économique (GIE) Humanis, dont le siège est […] ,
défendeurs à la cassation.
Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Besson, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de l’association Fédération française de la montagne et de l’escalade et de la société Allianz IARD, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. J… et Mme Y…, et l’avis de Mme Nicolétis, avocat général, après débats en l’audience publique du 3 juin 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Besson, conseiller rapporteur, Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen, et Mme Cos, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1.Selon l’arrêt attaqué (Toulouse, 21 janvier 2019), M. J…, guide de haute montagne, et Mme Y… ont été victimes le 3 avril 2010 d’un accident alors qu’ils gravissaient ensemble une paroi du site d’escalade de la commune de […] (la commune), dans le département des Pyrénées-Orientales.
2. Ce site faisait l’objet d’une convention, qui avait été conclue le 7 juillet 1990 entre la commune et la Fédération française de la montagne et de l’escalade (la FFME), et qui en confiait la garde à cette dernière, autorisée à en faire usage en vue de la pratique de l’escalade, sous l’engagement de l’entretenir en bon état et de veiller à la sécurité des usagers et des tiers.
3. L’accident, provoqué par la chute d’un rocher s’étant détaché de la paroi sur laquelle M. J… et Mme Y… progressaient et ayant entraîné la chute de M. J…, a causé de graves blessures à ce dernier ainsi qu’à Mme Y….
4. C’est ainsi que, se fondant sur la convention conclue le 7 juillet 1990, M. J… et Mme Y… ont assigné la FFME et son assureur, la société Allianz IARD (l’assureur), en responsabilité et indemnisation sur le fondement des articles 1382, 1383 et 1384 anciens du code civil, et appelé en cause, en leur qualité de tiers payeurs, le Régime social des indépendants de Midi-Pyrénées (le RSI), la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute-Garonne (la caisse) ainsi que le groupement d’intérêt économique Humanis, venant aux droits de la société Novalis.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses deux premières branches :
5. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Et sur le moyen pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
6. La FFME et l’assureur font grief à l’arrêt de dire que la première est responsable, sur le fondement de l’article 1384 du code civil, des préjudices corporels et moraux subis par M. J… et Mme Y… à la suite de l’accident survenu le 3 avril 2010, de fixer à certaines sommes les préjudices corporels de ces derniers, ainsi que l’indemnité revenant aux tiers payeurs, de condamner in solidum la FFME et l’assureur à payer certaines sommes à M. J… et à Mme Y… en réparation de leurs préjudices, et d’enjoindre à l’assureur de payer une certaine somme au RSI, devenu la Sécurité sociale pour les indépendants, et à la FFME et l’assureur, in solidum, à payer à cet organisme une indemnité forfaitaire de gestion, alors » que le gardien de la chose peut s’exonérer de sa responsabilité en cas de force majeure ; qu’en l’espèce, en se bornant à juger qu’« aucun élément de la cause ne permet de retenir une cause étrangère présentant les caractères cumulés d’extériorité, d’imprévisibilité et d’irrésistibilité » et que « le détachement du rocher résultant du vice même de la paroi et donc du caractère intrinsèque de la chose, la FFME ne peut se prévaloir d’un cas fortuit ou de force majeure », sans constater la cause exacte de la chute du rocher, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1384 alinéa 1er du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
7. Pour décider que la FFME, qui avait conservé la garde de la voie d’escalade, ne pouvait se prévaloir d’une cause d’exonération de la responsabilité de plein droit pesant sur elle, l’arrêt retient tout d’abord que l’absence de faute du gardien ne lui permet pas d’échapper aux conséquences de cette responsabilité.
8. Il énonce ensuite qu’aucun élément de la cause ne permet de retenir une cause étrangère, le fait d’un tiers ou de la victime présentant les caractères cumulés d’extériorité, d’imprévisibilité et d’irrésistibilité, que la faute des victimes n’est pas alléguée, l’un étant guide de haute montagne et l’autre pratiquante régulière d’escalade depuis une vingtaine d’années, et que le fait d’un tiers ayant concouru à la production du dommage, dont la charge de la preuve pèse sur celui qui l’invoque, n’est nullement établi.
9. Il énonce enfin que le détachement du rocher résultant du vice même de la paroi, et donc du caractère intrinsèque de la chose, la FFME ne peut se prévaloir d’un cas fortuit ou de force majeure et qu’elle est donc tenue de réparer l’intégralité de ses conséquences dommageables in solidum avec son assureur.
10. En l’état de ces motifs, il ne peut être reproché à la cour d’appel de ne pas avoir constaté la cause exacte de la chute du rocher, alors qu’elle a au contraire retenu que cette chute avait eu pour origine le vice même de la paroi.
11. Le moyen n’est, par conséquent, pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi