Accident de luge sur un sentier pour piétons/ Responsabilité communale (non)

CAA de LYON

N° 14LY03971

lecture du jeudi 29 septembre 2016

(…) 1. Considérant que le 17 février 2004, Mme D…a, en compagnie de son amie MmeC…, chuté dans une excavation située en contrebas du chemin dit de la Mouille Ronde, piste damée réservée aux piétons et aux personnes en raquettes, dans la station des Gets ; que Mme D…fait appel du jugement du 6 novembre 2014 du tribunal administratif de Grenoble rejetant l’ensemble de ses conclusions qui tendaient à la mise en cause de la responsabilité de la commune des Gets et à son indemnisation ; que dans ses dernières écritures la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de l’Ille-et-Vilaine demande à la cour d’annuler le jugement du 6 novembre 2014 du tribunal administratif de Grenoble et de condamner la commune des Gets à lui rembourser les montants exposés pour le compte de son assurée, qui se chiffrent à la somme de 70 222,68 euros, et à lui payer la somme de 1 047 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue à l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
Sur les conclusions de MmeD… :
2. Considérant qu’en appel, Mme D…indique que sa chute dans l’excavation située en bordure du chemin dit de la Mouille Ronde a eu lieu alors qu’elle était descendue de sa luge et marchait à côté de celle-ci sur le chemin, et non pas lorsqu’elle était sur la luge avec son amie MmeC… ; que toutefois, cette allégation de la requérante en appel n’est corroborée par aucune des pièces présentes au dossier alors qu’il résulte de l’instruction que tant dans différentes déclarations de l’intéressée auprès de son assureur ou du médecin expert désigné par le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble du 21 octobre 2005, que dans le constat d’huissier réalisé le 24 février 2004 à l’initiative de MmeC…, ou encore dans l’attestation de la personne leur ayant porté secours, ou enfin dans la plainte déposée par Mme C…contre auteur inconnu, il avait été indiqué que l’accident s’était produit alors que les victimes circulaient sur une luge ; que par suite, la requérante qui n’établit pas avoir chuté alors qu’elle circulait à pied, ne peut soutenir que les premiers juges se sont fondés sur des circonstances inexactes en retenant qu’au moment de l’accident elle était à bord d’une luge dont elle avait perdu le contrôle ;
3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales :  » La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement, l’éclairage, l’enlèvement des encombrements, la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine, l’interdiction de rien exposer aux fenêtres ou autres parties des édifices qui puisse nuire par sa chute ou celle de rien jeter qui puisse endommager les passants ou causer des exhalaisons nuisibles ainsi que le soin de réprimer les dépôts, déversements, déjections, projections de toute matière ou objet de nature à nuire, en quelque manière que ce soit, à la sûreté ou à la commodité du passage ou à la propreté des voies susmentionnées (…) ;
4. Considérant que Mme D…fait valoir qu’il appartenait au maire de la commune des Gets de prendre des mesures particulières pour assurer la sécurité des usagers sur ce chemin enneigé susceptible d’être verglacé, et par suite particulièrement glissant, en signalant les bordures de la voie ou en faisant installer des barrières ou des filets de protection à hauteur de l’excavation située en bord du chemin, qu’elle qualifie d’obstacle imprévisible pour les piétons, les promeneurs en raquette et les utilisateurs de luge nombreux à fréquenter l’endroit ; qu’elle indique que lors du constat d’huissier réalisé le 24 février 2004, un enfant installé sur une luge est passé à 50 cm seulement de la bordure du chemin surplombant l’excavation dangereuse ; que toutefois, il résulte de l’instruction que ledit chemin n’est destiné qu’à la seule circulation des piétons et des personnes en raquettes et qu’il ne constitue pas l’une des pistes de luge aménagées dans la station des Gets ; qu’au demeurant Mme D…n’établit pas que c’est en raison d’un défaut de signalisation que sa luge a quitté le chemin pour tomber dans l’excavation dont s’agit, dont il résulte de l’instruction qu’elle est parfaitement visible pour un piéton empruntant le chemin à hauteur du local en béton situé du côté des sapins, et mentionné par l’huissier dans son procès-verbal de constat du 24 février 2004 ; que s’il est possible d’approcher de très près la bordure périlleuse du chemin, dont l’instruction a établi qu’il est suffisamment large, dégagé et rectiligne pour permettre le cheminement sans danger des piétons et des personnes en raquettes auquel il est dédié, cette circonstance ne saurait suffire à en établir le caractère dangereux de la voie, ni par conséquent la carence fautive du maire dans l’exercice de son pouvoir de police ; que d’ailleurs Mme D…n’allègue aucun accident antérieur lié à une chute imputable à l’absence de signalisation, de barrières ou de filets de protection ; qu’ainsi en l’espèce, seules la vitesse excessive et la perte de contrôle de l’engin par Mme D…sont responsables de la trajectoire de la luge et par suite de la chute de celle-ci et de son équipage dans cette excavation ; qu’il s’ensuit que, dans les circonstances de l’espèce, le maire n’ayant commis aucune faute dans l’exercice de ses pouvoirs de police, l’accident dont s’agit doit être regardé comme exclusivement imputable à l’imprudence de Mme D…et son amie dans l’utilisation de leur luge ; que la requérante n’est ainsi pas fondée à rechercher la responsabilité de la commune des Gets au titre des pouvoirs de police de son maire ;
5. Considérant qu’il appartient à la victime d’un dommage survenu à l’occasion de l’utilisation d’un ouvrage public d’apporter la preuve du lien de causalité entre l’ouvrage public dont elle était usager et le dommage dont elle se prévaut ; que la collectivité en charge de l’ouvrage public peut s’exonérer de sa responsabilité en rapportant la preuve soit de l’entretien normal de l’ouvrage, soit de ce que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure ;
6. Considérant que Mme D…recherche également la responsabilité de la commune des Gets pour défaut d’entretien normal de l’ouvrage public constitué de l’échappatoire d’eau de ruissellement, ayant provoqué le creusement de l’excavation dans laquelle elle a chuté ; qu’elle indique que cet échappatoire d’eau situé en contrebas du chemin de la Mouille Ronde aurait dû faire l’objet d’une signalisation spécifique ; que toutefois, il ne résulte pas de l’instruction que cet ouvrage situé au fond de l’excavation a provoqué, ou contribué à, la survenue de l’accident, lequel, comme il a été dit plus haut est exclusivement imputable à l’imprudence fautive de la requérante dans l’utilisation d’une luge sur un chemin non aménagé pour cette activité ; que, dès lors, la responsabilité de la commune des Gets ne saurait être engagée à raison d’un défaut d’entretien normal de l’ouvrage public constitué par cette canalisation ;
7. Considérant qu’il suit de ce qui précède que Mme D…n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions indemnitaires et a laissé à sa charge les frais de l’expertise ;
Sur les conclusions présentées par la CPAM de l’Ille-et-Vilaine :

8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, en l’absence de responsabilité de la commune des Gets, la CPAM de l’Ille-et-Vilaine n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses conclusions indemnitaires ; que doivent être rejetées par voie de conséquence, les conclusions présentées en appel par la CPAM de l’Ille-et-Vilaine tendant au versement de la somme de 1 047 euros au titre de l’indemnité forfaitaire prévue par l’article L. 376-1 alinéa 9 du code de la sécurité sociale ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à la charge de la commune des Gets, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que la requérante et la CPAM d’Ille-et-Vilaine demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens ; qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, et sans qu’il besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions tendant à la condamnation in solidum de Mme D…et de la CPAM d’Ille-et-Villaine, de faire droit aux conclusions présentées par la commune des Gets sur le même fondement ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme D…et les conclusions de la CPAM d’Ille-et-Vilaine sont rejetées.